Depuis 1982, les lois de décentralisation ont transféré aux collectivités territoriales d'importantes compétences en matière d'action sanitaire et sociale ou encore de formation professionnelle et d'apprentissage. Mais les administrations d'Etat n'en ont pas tiré toutes les conséquences. C'est en tout cas ce qu'affirment, en substance, les inspections générales des affaires sociales, de l'administration et des finances dans un audit rendu public le 1er février (1).
Ainsi, « l'organisation des administrations de l'Etat n'a pas été systématiquement mise en cohérence avec l'évolution de leur environnement ». En outre, soulignent les auteurs du rapport, les effectifs de ces administrations n'ont pas partout été ajustés à leurs nouvelles missions alors que, parallèlement, les collectivités territoriales ont procédé à d'importants recrutements. Résultat : l'effectif global affecté par l'Etat et les départements à l'action sanitaire et sociale au niveau territorial (donc hors administration centrale) a augmenté de près de deux tiers (65 %) entre 1984 et 2003. Autre problème pointé par les inspecteurs : « La décentralisation laisse subsister de multiples interventions de l'Etat dans le champ des compétences transférées », notamment en matière d'insertion sociale des personnes en difficulté, de formation professionnelle ou d'apprentissage, indique le rapport. Pour les auteurs de l'audit, la persistance de ces interventions et « l'intrication des compétences » constituent les principaux freins à l'adaptation des effectifs et des structures des administrations d'Etat à la décentralisation.
Ils formulent, en conséquence, 35 propositions « visant à permettre à l'Etat de mieux exercer un nombre restreint de fonctions essentielles, en recentrant ses moyens ». A court terme, ils suggèrent notamment de supprimer la procédure de déclaration préalable à l'Etat des établissements de formation de travailleurs sociaux. Rappelons en effet, que, dans ce domaine, le transfert aux régions de la compétence d'agrément des organismes de formation n'a pas été accompagné de la suppression de cette procédure. Or, expliquent les inspecteurs, « cette intervention de l'Etat en amont des épreuves de diplôme constitue une source de blocages potentiels et de surcoûts inutiles ».
Critiquant la dispersion des leviers du pilotage de la politique de prise en charge des personnes handicapées ou dépendantes - les crédits en la matière étant partagés entre l'Etat et la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) -, ils plaident par ailleurs pour que la responsabilité de la gestion de l'intégralité des crédits du programme « Handicap et dépendance » soit transférée à la CNSA, à l'exception de l'allocation aux adultes handicapés. Autre proposition : la réalisation, en 2008, d'un bilan des deux premières années d'application de la loi « handicap » du 11 février 2005... et l'examen ensuite, à la lumière de cette évaluation, de l'opportunité de procéder à de nouveaux transferts de compétence vers les départements en matière de prise en charge du handicap et de la dépendance.
Enfin, dans le domaine de l'insertion, s'inspirant d'une des propositions du rapport des sénateurs Mercier et Raincourt (2), les inspecteurs préconisent d'instaurer, pour les bénéficiaires de l'allocation de parent isolé, un droit d'accès aux actions d'insertion organisées par les conseils généraux, et d'étendre le cas échéant cette faculté aux bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique. « Ce transfert de compétence présenterait l'avantage de permettre la conduite d'actions cohérentes pour l'ensemble des publics concernés », expliquent-ils. Autre proposition des inspecteurs : déléguer systématiquement aux conseils généraux la responsabilité de la conduite des actions d'insertion pour les bénéficiaires de minima sociaux autres que le revenu minimum d'insertion. Et organiser, quelle que soit l'option retenue, la participation financière de l'Etat à ces actions dans le cadre de conventions mobilisant notamment les crédits de l'appui social individualisé.
(1) Disp. sur