Mauvais diagnostic, mauvais remède. Les difficultés de la banlieue n'ont pas été saisies à leur juste mesure, ont en substance déclaré, le 6 février, les représentants des 120 édiles regroupés dans l'Association des maires Ville et banlieue (1).
Quinze mois après les émeutes urbaines et trois mois avant l'élection présidentielle, l'association, présidée par Pierre Bourguignon, député-maire (PS) de Sotteville-lès-Rouen (Seine-Maritime), et qui a pour premier vice-président Pierre Cardo, député-maire (UMP) de Chanteloup-les-Vignes (Yvelines), exprime ses revendications dans un « manifeste des villes de banlieue ». En refusant de réduire la crise, dont souffrent ces dernières, à un problème d'urbanisme et en réfutant le procès « malhonnête » fait à la politique de la ville, sous-dimensionnée, le texte demande un changement de braquet : « Le problème des banlieues n'est pas celui de nos villes, mais a minima celui de la France. Il est impératif qu'elle accepte de le regarder comme une cause nationale, en décidant enfin de s'y investir. » Il s'agit donc pour l'association de dépasser le domaine de la politique de la ville et d'aborder la banlieue à travers tous les chantiers politiques, économiques et sociaux.
La plate-forme de propositions se décline en dix points, au premier rang desquels l'instauration d'une péréquation financière nationale et locale, permettant aux villes de banlieue les plus pauvres d'offrir à leurs habitants un service public comparable à la moyenne des villes françaises. Elle demande de renforcer l'application de l'article 55 de la loi « solidarité et renouvellement urbains », en exigeant de certaines communes qui y sont soumises de construire 25 % de logements très sociaux.
Le manifeste préconise encore d'amplifier la lutte contre l'échec scolaire et le soutien à la parentalité, en accélérant la mise en oeuvre des dispositifs de réussite éducative. Il suggère de confier au maire la coordination des dispositifs de prévention, qui passerait par le partage de l'information « stratégique » entre les acteurs. La prévention primaire dès la petite enfance ainsi que l'encadrement socio-éducatif devraient, selon l'association, être développés. Celle-ci recommande, par ailleurs, de revitaliser les politiques d'insertion, en redonnant notamment « une dimension réelle et opérationnelle au dispositif d'insertion censé accompagner le versement du RMI » et en relançant les contrats aidés pour les jeunes très éloignés de l'emploi. L'association, qui attend une mobilisation des moyens des différents ministères (Emploi, Logement, Ville, Edu-cation nationale, Intérieur, Justice...) au service des banlieues et des quartiers, demande enfin la création d'un « ministère des Territoires » qui rassemblerait la ville, le logement, l'aménagement du territoire et la direction générale des collectivités locales.
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