Les organisations professionnelles de la psychiatrie et les associations d'usagers cherchent toujours une issue à leur désaccord sur les articles 18 à 24 du projet de loi sur la prévention de la délinquance, qui sera débattu à l'Assemblée nationale les 13 et 14 février. Le différend porte sur les soins psychiatriques sans consentement.
Après la censure par le Conseil constitutionnel de l'habilitation du gouvernement à agir sur ordonnance (1), « plusieurs parlementaires de la majorité se sont exprimés pour le maintien en l'état » du projet de loi, ont conjointement expliqué 14 organisations (2) le 6 février, « témoignant ainsi d'une profonde indifférence pour le million et demi de Français et de Françaises qui recourent chaque année à des soins en psychiatrie ». Plus inquiétant, « le gouvernement est resté silencieux devant la demande des organisations d'usagers et de professionnels de la psychiatrie » : ôter les dispositions contestées du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, mais aussi inscrire dans la prochaine session parlementaire un projet de loi rénovant la loi du 27 juin 1990 « relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées pour troubles mentaux ». Afin de faire pression sur le gouvernement, les organisations prévoient une série de mobilisations, à commencer par une grève, le 13 février, des psychiatres du service public.
En décembre dernier, les organisations avaient pourtant transmis aux ministères de la Santé et de la Justice des propositions « unanimes » sur une réforme globale de la loi du 27 juin 1990. Concernant strictement les soins sans consentement visés par le projet de loi sur la prévention de la délinquance, les organisations professionnelles et d'usagers demandent que les rôles respectifs des maires et des préfets soient maintenus et une « hospitalisation complète initiale de 72 heures au plus » lors de l'entrée dans le dispositif. Elles réclament également la suppression de la disposition qui prévoit la rétention du malade dans une « structure médicalement adaptée » en attente de l'hospitalisation d'office.
Elles rappellent en outre que « la sortie d'essai ne constitue pas un passage obligé vers des soins en ambulatoire », les deux dispositifs devant coexister, et estiment que, compte tenu du besoin de suivre régulièrement le patient, cette sortie devrait être limitée à trois mois, renouvelables une fois. Les organisations s'opposent par ailleurs à la création d'un traitement national des données relatives aux hospitalisations d'office, dont l'objectif « pose de sérieuses questions de libertés publiques et de garanties de celles-ci ». Le clivage entre l'hospitalisation d'office et l'hospitalisation à la demande d'un tiers prévu par le projet de loi devrait être supprimé, estiment encore les organisations, « considérant qu'il s'agit bien souvent des mêmes patients qui, en fonction de l'évolution de leur pathologie et du contexte, sont pris en charge en hospitalisation libre ou en hospitalisation sans consentement, tantôt d'office, tantôt à la demande d'un tiers ». La distinction introduite par le projet de loi pourrait être contre-productive, déplorent-elles, car elle « intervient en obstacle à l'acceptation des soins, souvent progressive ».
Enfin, les organisations jugent que « l'équilibre de la réforme de la loi de 1990 ne peut être atteint que moyennant un renforcement du rôle de la commission départementale des hospitalisations psychiatriques ».
(2) Dont l'Association française de psychiatrie, la Fédération hospitalière de France, la FNAP-Psy, l'Intersyndicale de défense de la psychiatrie publique, le Syndicat des psychiatres français et l'Unafam. Contact : FHF - 3, avenue d'Italie - 75013 Paris - Tél. 01 44 06 84 44.