Même s'ils n'ont pas tous ratifié la Convention internationale de 1949 « pour la répression de la traite des êtres humains et de l'exploitation de la prostitution d'autrui » - ce qu'a fait la France en 1960 -, les pays de l'Union européenne sont déterminés à lutter ensemble contre le trafic d'êtres humains aux fins de prostitution. En elle-même, cependant, la prostitution n'est pas illégale : tout ressortissant de l'espace communautaire peut la pratiquer librement, à condition de respecter les politiques nationales relatives au commerce du sexe. En France, celui-ci est régi par la loi Sarkozy de sécurité intérieure, adoptée en mars 2003, qui a notamment réintroduit le délit de racolage : passif ou actif, il est puni de deux mois d'emprisonnement et de 3 750 € d'amende. Résultat, font observer les chercheurs à l'origine de cet ouvrage, une moindre visibilité des personnes prostituées qui, sous la menace de la répression policière, quittent le centre des villes où elles s'étaient installées au grand dam des riverains ; et un contrôle accru des femmes étrangères qui constituent 70 % des personnes qui se prostituent dans la rue : leur placement en garde à vue - qu'une simple contravention n'autorisait pas - permet de vérifier la régularité de leur situation au regard du séjour et, le cas échéant, d'engager une procédure administrative de reconduite à la frontière.
Entre rétablissement d'un ordre public troublé par les nuisances de l'activité prostitutionnelle et gestion d'une immigration qui est neuf fois sur dix clandestine, les villes s'efforcent d'adapter leur action en fonction des contextes locaux, et en particulier des pressions de la population. A Nantes, où la mairie mène une politique d'ensemble à laquelle les associations d'aide aux personnes prostituées, telles que Médecins du monde et Le Nid, sont étroitement associées, la police est tenue d'intervenir de façon assez mesurée et articulée avec les prises en charge des différents partenaires, explique la sociologue Véronique Guienne. A Toulouse, en revanche, les policiers, plus seuls pour rassurer la population, doivent répondre à l'injonction des élus de montrer qu'ils font quelque chose. Dans les deux cas, cependant, on peut noter un certain malaise des acteurs publics - élus, policiers, magistrats, associations - qui évoquent une situation complexe et insatisfaisante. Ainsi, à Toulouse, où le délit de racolage a été utilisé pour justifier quelques reconduites à la frontière, c'est sans grande illusion de la police sur l'efficacité réelle d'une telle mesure. En outre, loin d'avoir l'effet escompté sur le démantèlement des réseaux de proxénétisme, les interventions de la police, sur le fondement du racolage, semblent gêner le travail d'élucidation destiné à mettre ces filières au jour, précise le juriste Jean Danet. « La loi ne fonctionne pas selon l'annonce qui en a été faite [...], c'est-à-dire comme s'inscrivant dans le courant abolitionniste français de la prostitution », estime-t-il. Soulignant la contradiction entre le caractère légal d'une activité qui s'avère être interdite, c'est bien la question de la dépénalisation de ses conditions d'exercice qui se pose, concluent les auteurs.
Action publique et prostitution - Ouvrage collectif sous la direction de Jean Danet et Véronique Guienne - Presses Universitaires de Rennes - 10 € .
Depuis longtemps considérée comme une institution cruciale, la famille, en France, fait l'objet de constantes attentions. Julien Damon, responsable du département « questions sociales » du Centre d'analyse stratégique, analyse l'impact - positif - des politiques familiales en termes de réduction de la pauvreté et de maintien d'un taux élevé de fécondité. Le niveau de celui-ci, bien sûr, ne tient pas à leur seule dimension monétaire - même si les prestations en espèces constituent près des trois quarts des dépenses publiques en direction des familles. Sachant que les femmes ne désirent renoncer ni aux enfants, ni à l'emploi, la natalité est aussi fonction de l'existence d'équipements et de prestations destinés à la garde des tout-petits. Or, actuellement, environ 20 % des moins de 3 ans ne bénéficient d'aucune aide de la collectivité sur ce plan-là. C'est pourquoi, l'auteur propose de créer un service public de la petite enfance qui garantisse aux parents une place dans un dispositif d'accueil public, privé ou mixte - et une forme de droit opposable pour qui n'en aurait pas. Comme l'entrée dans l'âge adulte est, avec la petite enfance, la période la plus coûteuse pour les familles, Julien Damon suggère également l'instauration d'un compte d'épargne bloqué pour les bébés. A la naissance, chacun serait doté par l'Etat d'un capital qui fructifierait pendant qu'il grandit, car ni l'enfant, ni ses parents ne pourraient effectuer de retraits avant la majorité du bénéficiaire. Des pistes d'action d'ailleurs reprises dans le rapport annuel du Centre d'analyse stratégique (voir ASH n° 2489 du 12-01-07, page 7).
Les politiques familiales - Julien Damon - Ed. PUF, coll. Que sais-je ? - 8 € .
Qu'ils aient, ou pas, des besoins éducatifs particuliers, tous les enfants doivent pouvoir bénéficier d'une scolarisation. Alors qu'actuellement quelque 30 000 enfants handicapés n'auraient aucun contact avec un enseignant, ce droit à la formation scolaire, posé par la loi du 11 février 2005, est « un signal fort donné à l'Education nationale pour rappeler que les enfants handicapés sont des enfants de la République comme les autres », soulignent Jean-Marc Louis, inspecteur de l'Education nationale, et Fabienne Ramond, professeure spécialisée des écoles. Si le parcours scolaire de ces élèves pourra s'effectuer, en tout ou en partie, dans des dispositifs ou établissements adaptés, c'est plus spécifiquement aux enfants amenés à être scolarisés en milieu ordinaire que s'intéressent les auteurs. Lesquels, pour aider les enseignants à les accueillir dans de bonnes conditions, passent en revue les modalités pratiques d'un accompagnement pédagogique de qualité.
Scolariser l'élève handicapé - Jean-Marc Louis, Fabienne Ramond - Ed. Dunod - 23 € .
Après avoir été longtemps rejeté hors du champ du travail social, car incompatible avec la nécessité d'inscrire dans la durée la relation avec l'usager, le concept d'urgence s'est imposé dans les années 1990. Educateur spécialisé qui a travaillé deux ans dans une institution emblématique de ce secteur, le SAMU social - expérience dont il a rendu compte dans un précédent ouvrage (voir ASH n° 2339 du 26-12-03, page 34) -, Stéphane Rullac revient ici, pour la contester, sur une approche des sans-abri qui les assimile à des naufragés « souffrant en quelque sorte de troubles post-traumatiques de la modernité ». Décrivant les stratégies diversifiées développées par les SDF pour faire alliance avec leur environnement et parvenir à vivre « hors les murs », l'auteur estime que, par son manque de régularité dans la mise à l'abri des intéressés et l'absence de tout suivi social soutenu, le système d'urgence sociale est largement inadapté. Reste qu'il soulage grandement les consciences. Et pour moins cher que les dispositifs d'insertion qui, eux-mêmes, seraient à repenser.
Critique de l'urgence sociale. Et si les SDF n'étaient pas des exclus ? - Stéphane Rullac - Ed. Vuibert - 16 € .
Représentant 7 % des personnes qui exercent dans les professions sociales - où les assistantes maternelles sont majoritaires -, les assistants de service social ont vu leurs effectifs doubler depuis 3 ans. Plus de 40 000 étaient recensés en 2002, des femmes dans 96 % des cas. Dans cette troisième édition largement remaniée et qui prend en compte la réforme du diplôme d'Etat d'assistant de service social mise en oeuvre par le décret du 11 juin 2004, Brigitte Bouquet, professeure de la chaire de travail social au Conservatoire national des arts et métiers, et Christine Garcette, déléguée du Clicoss de Seine-Saint-Denis, reviennent sur les conditions d'exercice de ce métier. Et, soulignant les mutations de la société et de l'action sociale vécues parfois de façon insécurisante, les auteures insistent sur la faculté d'adaptation d'une profession « qui tout au long de son histoire a su maintes fois se réajuster dans un contexte en évolution permanente ».
Assistante sociale aujourd'hui - Brigitte Bouquet et Christine Garcette - Ed. Maloine - 17 € .
Avec l'allongement de l'espérance de vie, les troubles cognitifs pathologiques, au premier rang desquels la maladie d'Alzheimer, sont en constante augmentation. Chercheurs et praticiens du réseau gérontologique des pays de l'Europe du Sud analysent le rôle - et le fardeau - des familles ayant à prendre soin d'un proche affecté de démence, et l'usure des professionnels de l'aide aux personnes âgées, dont le travail, souvent ingrat, est d'autant plus éprouvant qu'il s'accompagne d'une forte implication affective.
Exclusion, maladie d'Alzheimer et troubles apparentés : le vécu des aidants - Sous la direction de Philippe Pitaud - Ed. érès - 25 € .
Complexe, la question du temps en placement familial renvoie à la conjugaison par les intervenants des temps judiciaire, institutionnel et subjectif de l'enfant. Des temps qu'il faut parvenir à articuler pour faire du temps qui passe, et malgré son accélération, un levier d'évolution. Abordée lors des journées d'étude des 22 et 23 décembre 2005 de l'Association nationale des placements familiaux, la thématique du temps s'est déclinée en une série de variations, dont la violence du temps, le temps d'évaluation préalable à l'admission, les temps de la rencontre...
Ed. L'Harmattan - 16 € .
L'équilibre entre responsabilités individuelle et collective, les enjeux de la prévention, l'éthique du travail social, le soutien à la parentalité et la protection des mineurs isolés... L'Uniopss a réuni le 21 septembre quelque 200 professionnels pour débattre de leurs convictions et de leurs pratiques éducatives, en pleine préparation des projets de loi sur la protection de l'enfance et la prévention de la délinquance.
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« Y a-t-il psychologisation de l'intervention sociale ? », se sont interrogés les participants au colloque organisé les 14 et 15 octobre 2005 à Lille à l'initiative du Groupe de recherche sur actions et les croyances collectives à l'Université de Lille III. La réponse est complexe en raison même de la diversité des interprétations de la psychologisation. Elle soulève de nombreuses questions renvoyant à la transformation des politiques sociales et aux mutations du champ professionnel de l'intervention sociale.
Sous la direction de Maryse Bresson - Ed. L'Harmattan - 24 € .
Comment articuler la politique sociale du handicap avec la recherche et l'évaluation de la qualité des établissements ? Lors des rencontres nationales du 13 mars 2006 de l'Association nationale des directeurs d'établissements et services d'aide par le travail (Andicat), des décideurs publics, des experts et des professionnels ont débattu des nouveaux droits des usagers-travailleurs et de leur mise en oeuvre, de la formation professionnelle des travailleurs handicapés, de l'évaluation des projets et du rôle des directeurs.
Les cahiers d'Andicat n°5 -2006 - Andicat Editions : 1, avenue Marthe - 94500 Champigny-sur-Marne - Tél. 01 45 16 15 15 - 15 € .