Quelques jours après les annonces du Premier ministre à propos de la mise en chantier de l'opposabilité du droit au logement (1), le ministre de l'Emploi, de la Cohésion sociale et du Logement, Jean-Louis Borloo, et la ministre déléguée à la cohésion sociale, Catherine Vautrin, ont présenté, le 8 janvier, un « plan d'action renforcé » pour 2007 au profit des mal-logés et des sans domicile fixe (sur les réactions associatives, voir ce numéro, page 45). « Bâti [...] dans un grand travail de concertation avec l'ensemble des associations et partenaires concernés », il mêle initiatives nouvelles et mesures d'ores et déjà annoncées (2).
Au coeur de ce programme : la mise à disposition de 27 100 places d'hébergement d'urgence, présentées comme « nouvelles ». Le dispositif, qui « se substituera aux 13 500 places actuelles », démarre « immédiatement » et « se mettra en place au fur et à mesure dans le courant » de l'année, indique le « relevé de décisions » établi par les services de Jean-Louis Borloo. Le document fait le détail des 27 100 places. Il s'agira ainsi de :
3 000 logements du parc social public prioritairement proposés aux personnes sortant de centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) et d'autres structures d'insertion, sur les réservations de l'Union d'économie sociale pour le logement (UESL) - fédération des organismes du 1 % logement - et de la fédération des entreprises sociales pour l'habitat ;
4 000 logements dans le parc privé conventionné pour les bénéficiaires de la nouvelle garantie des risques locatifs mise en place pour les personnes en contrat de travail à durée déterminée, en intérim, ou les demandeurs d'emploi indemnisés ou salariés à faibles revenus (3) ;
9 000 places complémentaires en maison-relais, financées sur la base d'un forfait journalier de 16 € (forfait pouvant être abondé, le cas échéant, par les collectivités territoriales au titre de leur compétence en matière sociale) ;
1 600 places en résidences collectives - « mises à disposition sur le programme «LogiRelais» » - essentiellement réservées au public sortant de CHRS et dans le cadre desquelles des propositions d'accueil avec chiens seront mises en place ;
4 500 nouvelles places créées sur l'année en CHRS, dont 3 000 qui, déjà identifiées et ayant fait l'objet d'un examen en comité régional de l'organisation sanitaire et sociale, sont immédiatement financées. « Pour le complément, des appels à projets seront organisés localement de telle sorte que l'ensemble des projets soient autorisés avant la fin de l'année » ;
5 000 places d'« hébergement de stabilisation » créées en 2007, en plus des 1 100 installées en Ile-de-France.
Sur ce dernier point, le ministère précise que 3 000 seront créées effectivement d'ici à avril et 2 000 dans le courant de l'année. « Ces transformations de places d'hébergement d'urgence auront pour principe la chambre de deux personnes, voire parfois individuelle, selon la disposition des locaux, la faisabilité et la décision des gestionnaires. » « Le financement de ces places sera majoré de 50 % du coût moyen des places d'hébergement d'urgence », ajoute-t-il.
« 3 000 places d'hébergement d'urgence généraliste en collectif » seront par ailleurs « maintenues », précise-t-il encore.
L'ambition affichée par le gouvernement est de « changer radicalement l'accueil dans les centres d'hébergement d'urgence ». Toute personne qui y sera accueillie « devra se voir proposer, en fonction de sa situation, une solution pérenne, adaptée et accompagnée si nécessaire, dans le parc public social, dans le parc privé conventionné, dans un centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), un centre d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA), un LogiRelais, une maison-relais ou un hébergement de stabilisation ».
D'ici à ce que cet objectif soit effectivement rempli, dans l'immédiat, l'ouverture des hébergements d'urgence de 17 heures à 9 heures et 24 heures sur 24 le week-end est généralisée, ont rappelé Jean-Louis Borloo et Catherine Vautrin. « L'ouverture 24 heures sur 24 sera acceptée sous réserve que les associations gestionnaires le demandent (contraintes de locaux exigus, entretien...). » Par ailleurs, « compte tenu de la transformation des hébergements d'urgence et afin d'éviter toute rupture dans l'offre, une évaluation sera menée pour s'assurer de l'adéquation du nombre de places d'urgence au regard de la demande et des besoins. »
Au-delà, les ministres ont encore indiqué qu'« une action de soutien aux métiers de l'urgence sera conduite avec les associations ». De plus, « une expérimentation sur la base du volontariat associatif » sera lancée « pour la prise en charge de sans domicile fixe accompagnés d'animaux domestiques, notamment dans les LogiRelais ». De même, « une première expérimentation visant à transformer des places d'urgence (hôtels...) en location d'appartement dans le parc privé par des associations sera mise en place ». Le gouvernement a par ailleurs acté le principe d'une « conférence de consensus sur la problématique générale relative à la prise en charge des personnes en détresse sociale ». La Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale (FNARS), qui est à l'origine de cette idée et travaille actuellement à son organisation, devrait présenter son projet dans les prochains jours. La conférence devrait se tenir fin février-début mars.
Autre mesure prévue dans le cadre du plan : alors que « 160 000 logements sociaux » ont d'ores et déjà été programmés et financés en 2007, « un effort plus particulier sera fait sur les prêts locatifs aidés d'intégration et les prêts locatifs à usage social (logements très sociaux) pour porter l'objectif de 63 000 en 2007 à 80 000 ». Le gouvernement assure par ailleurs, toujours dans le cadre du plan, que la nouvelle garantie des risques locatifs - qui apporte une garantie de loyer dans le parc privé social - « devrait favoriser la mise en place de 200 000 logements supplémentaires ».
Un comité de suivi du plan d'action renforcé, coprésidé par Catherine Vautrin et le président des « Enfants de Don Quichotte », Jean-Baptiste Legrand, sera installé le 17 janvier. Le même jour, comme prévu, sera présenté en conseil des ministres le projet de loi « instituant le droit opposable au logement et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale ». Signalons à cet égard que le Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées s'est penché sur le texte et considère « à l'unanimité » qu'il constitue une « avancée significative pour l'instauration de l'opposabilité du droit au logement ». A ce titre, il donne un avis favorable à ce projet, a indiqué l'instance le 8 janvier dans un communiqué.
De son côté, l'UESL a annoncé le même jour qu'elle s'engage à soutenir ce programme, dans le prolongement du plan de relance du logement locatif social et des conventions signées avec l'Etat en décembre dernier (4). L'intervention du 1 % logement s'articulera plus précisément autour de trois mesures : « l'accélération du programme LogiRelais, avec la création de 1 600 nouvelles places dont la moitié en région parisienne ; la mise à disposition de réservations locatives adaptées aux personnes sans domicile fixe ou en errance ; la mise en place de la garantie des risques locatifs, notamment pour les personnes en contrat à durée déterminée, intérim ou les demandeurs d'emploi indemnisés ou salariés à faibles revenus ».
A noter également : la FNARS a été chargée de « proposer des solutions adaptées aux situations individuelles des personnes actuellement sans abri et sous tente, notamment celles figurant sur la liste établie par les «Enfants de Don Quichotte» ». « Les services de l'Etat compétents lui apporteront tout l'appui nécessaire ainsi que les différents autres acteurs du secteur du logement et de l'hébergement », indique le ministère.
(2) Notamment par Catherine Vautrin, le 27 décembre dernier - Voir ASH n° 2488 du 5-01-07, p. 7.