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« La participation des usagers n'est plus perçue comme une menace »

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Dépassant les freins fréquemment opposés à la participation des usagers, nombre de centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) s'engagent dans cette démarche. Celle-ci suppose de prendre le temps d'informer et de former les bénéficiaires et d'accompagner les travailleurs sociaux, défend Catherine Etienne, consultante et auteure d'une étude sur les « actions innovantes » financées en 2004 par la direction générale de l'action sociale (1).

Actualités sociales hebdomadaires : Sur quels types d'actions cette étude porte-t-elle ?

Catherine Etienne : Le programme « actions innovantes 2004 », financé par la direction générale de l'action sociale, a porté sur l'application du volet « participation des usagers » de la loi du 2 janvier 2002 dans le champ de la lutte contre l'exclusion (2). Celui-ci a permis à certains établissements d'aller, malgré les restrictions budgétaires, au bout des démarches participatives prévues par les décrets. Les 80 projets soutenus ont été initiés par des centres d'hébergement et de réinsertion sociale, pour la plupart adhérents de la FNARS, mais aussi par des centres sociaux, des foyers pour jeunes travailleurs ou des fermes, des jardins et des entreprises du secteur de l'insertion par l'activité économique, une association gérant des foyers de migrants (3). A partir de septembre 2005, une cinquantaine de bilans nous ont été transmis : hormis quelques projets non réalisés, certains se sont heurtés à des difficultés dans l'évaluation de la conduite de leur action et de ses effets, ce qui montre que la culture de l'évaluation n'était pas encore très développée dans le secteur. Sur l'ensemble des rapports analysés, une majorité porte sur la mise en oeuvre de deux outils créés par la loi : le livret d'accueil et le conseil de vie sociale. Les autres concernent diverses actions et expériences inter-associatives, comme les journées « usagers » de Lille en janvier 2005, pilotées par la FNARS Nord-Pas-de-Calais, ou encore le projet initié en 2004 par la FNARS Lorraine, qui a consisté pendant plus d'un an à accompagner une douzaine d'associations dans la mise en oeuvre de formations sur la participation, destinées aux usagers et aux salariés désireux de devenir « formateurs » d'usagers (4). Toute une palette d'actions a pu être analysée, sachant qu'il n'y avait quasiment pas eu d'évaluation approfondie des démarches participatives et de leurs effets (5).

Que déduire de ces bilans sur l'appropriation de la démarche participative par les CHRS ?

- Les associations qui ont mis en oeuvre ces actions reconnaissent aux usagers une légitimité à s'exprimer sur le fonctionnement des structures et sur les prestations qui leur sont proposées. Une réelle évolution par rapport à la fin des années 90 ! Il y avait, à l'époque, des freins objectifs à la participation des usagers : comment par exemple rassembler des personnes hébergées dans un parc de logements « diffus », ou quand le « turn-over » dû à la courte durée des séjours est très important ? Mais ces difficultés cachaient aussi d'autres obstacles qui relevaient davantage de la représentation qu'avaient les professionnels et les associations des usagers. Prévalait encore un déni de la capacité citoyenne des usagers, jugés trop accaparés par leurs souffrances et leurs émotions pour pouvoir exprimer un avis sensé sur des questions d'intérêt collectif. Le CHRS étant un lieu de passage, il ne fallait surtout pas créer de sentiment d'appartenance, au risque de fabriquer un « ghetto », entendait-on. Ces blocages renvoyaient également à la conception française du travail social, centrée sur la personne, avec des aspects positifs, comme une réelle personnalisation de la prise en charge, mais aussi des aspects pervers : l'injonction au projet personnel, à l'autonomie, est potentiellement violente et génératrice d'angoisse, l'exclusion sociale tendant alors à être considérée comme le résultat de failles personnelles. Or l'identité se construit tout autant par l'appartenance à un groupe, par le sentiment d'utilité sociale, que par la restauration d'une biographie individuelle. Les actions participatives rééquilibrent les places respectives du « je » et du « nous » dans le travail social. Elles permettent une approche plus collective du droit des usagers que la revendication d'un droit individuel que pourrait paradoxalement impliquer la loi du 2 janvier 2002.

Même s'ils ne constituent qu'une étape dans un parcours, les CHRS sont aujourd'hui considérés comme des lieux où l'on peut travailler très efficacement sur la question de la citoyenneté, de la responsabilité, du vivre ensemble. Les travailleurs sociaux ont pris conscience qu'en « faisant avec », dans une relation où ils ne sont plus les experts, ils ne perdent pas leur identité professionnelle. Peu habitués à être à égalité de coproduction avec les usagers, ils ont néanmoins compris que cet apprentissage ne représentait pas une menace.

Dans ce cas, les conseils de vie sociale et les livrets d'accueil sont donc plus que des outils réglementaires ?

- Les outils créés par la loi du 2 janvier 2002 [projet d'établissement, livret d'accueil, contrat de séjour personnalisé, règlement de fonctionnement, conseil de vie sociale] ont donné l'occasion de retravailler en profondeur sur l'ensemble du fonctionnement de l'institution. Beaucoup d'associations ont par exemple commencé par élaborer un livret d'accueil, qui paraît simple et ludique à créer. Mais on s'aperçoit que ce support permet aussi de se pencher sur la philosophie générale de l'accueil, y compris sur l'architecture des lieux. Les équipes sont amenées à s'interroger sur la façon de présenter l'organigramme, le parcours dans l'établissement, voire les valeurs de l'association, et à vérifier au passage si ces éléments sont clairs pour elles. L'accom-pagnement qui doit entourer le livret d'accueil est également essentiel : à quel moment, de quelle façon doit-il être remis ? Cet outil n'a aucun intérêt s'il est juste donné à l'usager lorsqu'il arrive. Il en est de même pour les instances de participation. Il y a des « pseudo » conseils de vie sociale où sont surtout abordées les sorties culturelles, ce qui est certes important, mais d'autres vont évoquer les restrictions budgétaires ou l'augmentation de la participation financière des usagers. Cette dernière fait alors l'objet d'une négociation, après enquête auprès de l'ensemble des personnes hébergées. Lorsqu'elle parvient jusque-là, la démarche oblige à se poser la question du partage du pouvoir. Cela ne veut pas dire que les usagers ont toujours raison, mais il faut leur donner une place dans le jeu de la concertation.

Quelles sont les conditions de réussite d'un projet participatif ?

- Le préalable essentiel à tout projet participatif est l'engagement de l'association : comment le conseil de vie sociale est-il intégré au projet institutionnel ? Quelle peut être la participation des usagers aux instances associatives ? L'accompagnement des travailleurs sociaux dans ce changement suppose que la direction - en général préoccupée par des contraintes budgétaires - joue son rôle de pilotage et que l'équipe intermédiaire assure ses fonctions de management.

Sans exiger d'« usine à gaz » ou d'intervention extérieure, la participation demande avant tout du temps pour l'appropriation, l'information, l'explication, la sensibilisation, la mobilisation... Parfois, les usagers sont mieux préparés que les travailleurs sociaux ! Il faut également réunir les conditions structurelles nécessaires pour que la parole émerge : créer des espaces de parole institutionnalisés, reconnus et formels, qui peuvent prendre la forme d'un conseil de vie sociale, mais aussi de réunions d'usagers ou de réunions de projet. Le cadre de la représentation et les rôles doivent être clairement définis : il ne s'agit pas de participer à tout, certaines décisions ne relevant absolument pas des usagers.

Il faut en outre associer les personnes accueillies très en amont du projet, pour ne pas tomber dans la consultation alibi. Pour cela, il faut vraiment leur donner les moyens de comprendre ce qu'est une association, la loi du 2 janvier 2002, le fonctionnement de la structure. Certains délégués des usagers ne connaissent pas les décrets d'application de cette loi, ce n'est pas normal ! On ne peut s'exprimer et développer une analyse que si l'on est informé et formé. Même s'il y a des avis divergents sur l'égalité des compétences entre usagers et non-usagers, j'estime qu'il faut faire de la discrimination positive en termes de formation. De la même façon, un usager ne peut pas participer au Conseil national de l'évaluation sociale et médico-sociale sans avoir été préparé. Autrement, cela revient à le conduire à l'échec.

Il n'en reste pas moins que la formation continue des travailleurs sociaux doit aussi intégrer des temps de réflexion sur la participation. Les professionnels doivent acquérir des méthodes d'animation collective, car la parole des usagers doit être accompagnée : comment repérer des problématiques communes, permettre que des points de vue différents puissent se confronter dans le respect de chacun, aider à l'élaboration d'un consensus ? Les professionnels doivent également apprendre à utiliser différentes techniques de créativité : le dessin, par exemple, bon support de dialogue pour les usagers qui ne lisent pas le français.

Mais créer un outil ne suffit pas. Encore faut-il assurer son fonctionnement effectif...

- Il faut en effet dépasser l'enthousiasme de départ et faire vivre l'outil en permanence, lui donner du sens. Concernant le conseil de vie sociale, par exemple, les délégués des usagers, lorsqu'ils quittent l'établissement, peuvent conserver leur mandat. Certains centres d'hébergement mettent en place des collèges d'« anciens usagers » au sein de l'instance, ou des systèmes de tutorat. Parfois, la tenue d'un « cahier du conseil de vie sociale » constitue un fil conducteur où les débats sont retranscrits. Il s'agit d'inventer des formules simples pour pérenniser ces instances. Mais il faut aussi avoir une certaine humilité et accepter qu'à un certain moment, le conseil ne soit pas très dynamique. L'essentiel est de conserver une ligne de conduite et des réflexes professionnels qui en font un espace important d'expression et un outil majeur de la lutte contre l'exclusion.

Les difficultés de mobilisation des usagers sont par ailleurs très souvent évoquées comme un obstacle aux actions participatives. Cela nécessite de communiquer en permanence, même si l'on ne peut exiger d'eux d'être plus participants que tout citoyen ordinaire dans les associations de quartier ou dans les associations de parents d'élèves ! Il faut inviter à la participation et non pas faire de l'injonction à la participation ! Attention en outre à une hiérarchie malsaine qui pourrait apparaître dans les établissements entre les usagers très investis et les autres, du coup considérés comme de « mauvais usagers ». Les modes d'expres-sion peuvent être multiples. Faire de la sculpture, ce n'est évidemment pas la même chose que de s'exprimer sur le fonctionnement de l'établissement, mais dès lors que l'activité permet une production collective, elle participe aussi à l'intégration et à la reconnaissance de soi. J'insiste beaucoup sur le conseil de vie sociale, car c'est une instance de concertation qui est au coeur de la revitalisation associative. Néanmoins, elle ne suffit pas : elle n'a de vie qu'à partir du moment où elle est entourée par toutes sortes d'espaces d'expression.

Quels changements dans les pratiques professionnelles induit la démarche participative ?

- Ils ont surtout trait, me semble-t-il, à l'évolution du regard porté sur les usagers. L'expérience d'être à égalité de contribution sur un projet donné permet en effet de redonner du sens au travail social : travailler sur la remobilisation des usagers, leurs ressources, leurs compétences. S'apercevoir aussi que plus on travaille sur la participation dans l'établissement, plus les usagers vont avoir envie de s'investir à l'extérieur. Il s'agit également d'un changement de posture professionnelle : on n'est plus en face de, mais à côté de l'usager. Cette évolution amène les institutions à travailler la question du conflit, au sens positif de la confrontation de points de vue divergents. L'un des avantages des démarches participatives est d'ailleurs une diminution de la violence dans les institutions, notamment parce qu'elles permettent de discuter et de clarifier des fonctionnements, des positionnements, des règles de vie. L'institution, stimulée par les usagers, peut réinterroger la légitimité de certains choix, de certaines habitudes, pour ensuite les confirmer ou les faire évoluer. Le conflit de points de vue et d'intérêts devient alors productif pour éviter la violence et favoriser la coopération. C'est un phénomène nouveau, car il y a quelques années, les travailleurs sociaux exprimaient essentiellement leurs craintes d'être confrontés à des groupes d'usagers revendicatifs. Ils réalisent maintenant que, malgré les difficultés propres à la mise en oeuvre des démarches participatives, la confrontation d'idées, la coopération autour de projets redonnent du sens au projet associatif comme au travail social.

30 % des structures ont mis en place une vraie instance de concertation

Parmi les cinq outils de la participation prévus par la loi du 2 janvier 2002, le conseil de vie sociale (CVS) est sans doute le plus symbolique : il constitue le seul espace de dialogue entre tous les acteurs de l'association - administrateurs, professionnels et usagers. Mais plus de deux ans après le décret du 25 mars 2004 relatif au conseil de vie sociale et aux autres formes de participation, où en sont les établissements ? Selon une enquête réalisée en 2005 par le groupe national d'appui « usagers » de la FNARS auprès de l'ensemble de ses adhérents (6), seule une minorité de CVS (12,5 % sur 200 répondants) est conforme au décret, c'est-à-dire avec des délégués élus à bulletin secret, une présidence assurée par un usager élu, une réunion au moins trois fois par an, un ordre du jour et un compte rendu formalisés et transmis à tous les acteurs de l'association.

A moins que la « souplesse » adoptée à l'égard de la réglementation (coprésidence du conseil ou président élu à main levée, compte rendu non diffusé aux administrateurs...) « ne traduise une réelle difficulté à intégrer le CVS dans le fonctionnement de l'institution », note la FNARS, certaines instances de concertation pourraient constituer de véritables conseils de vie sociale si elles étaient mieux formalisées. En réalité, 30 % s'en rapprochent beaucoup. Si nombre d'établissements font encore de la résistance, d'autres entament timidement la démarche. Toutes les formules sont alors possibles, constate la FNARS : « La plupart du temps, tous les usagers participent. Souvent, ordres du jour et comptes rendus sont de la responsabilité d'un directeur, d'un chef de service ou d'un membre de l'équipe, même lorsqu'il y a eu consultation et préparation préalables. »

Alors qu'en 1997, la fédération recensait à peine 20 % de CHRS disposant d'un conseil d'établissement, on peut donc estimer que les choses se mettent lentement en marche dans les établissements participant à la lutte contre l'exclusion. Les réticences d'ordre technique sont beaucoup évoquées, l'aspect formel du CVS étant jugé trop lourd à mettre en oeuvre. La loi, de surcroît, n'a prévu aucun financement pour mettre en place les outils qu'elle instaure. Mais une grande partie des obstacles réside encore dans la difficulté à faire évoluer les pratiques de l'établissement et des travailleurs sociaux. Une enquête réalisée par la FNARS Rhône-Alpes avec la direction régionale des affaires sanitaires et sociales est particulièrement révélatrice : si 73 % des CHRS interrogés jugent que la loi du 2 janvier 2002 a permis une meilleure expression des personnes à l'intérieur des structures, 78 % n'ont pas associé les usagers à l'élaboration de leur projet d'établissement et 72 % ne les ont pas fait participer de manière effective à la rédaction du livret d'accueil. On est encore loin de l'idée de « coproduction »...

Un outil éducatif avant d'être un idéal de coproduction

Faire accéder les personnes hébergées à un statut d'acteur suppose de penser autrement leur projet d'insertion. C'est ce que Mathilde Debellan, ancienne résidente d'un centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), s'employait à expliquer aux autres femmes accueillies lorsqu'elle faisait littéralement du porte-à-porte pour réussir à les sensibiliser aux enjeux de la participation. « Beaucoup de femmes n'osent pas s'exprimer alors que l'insertion passe d'abord par la revalorisation de soi, souligne-t-elle. Trop souvent, on demande aux personnes de s'insérer dans l'emploi alors qu'elles ne sont pas passées par cette étape, ni par celle de la formation. »

Pas un contre-pouvoir

Pour Eric Lepage, directeur de l'association Foyer d'accueil chartrain, à Chartres (Eure-et-Loir), la mobilisation des usagers va de soi lorsqu'il ne s'agit pas de « participation alibi ». Des délégués des usagers sont élus dans chacun de ses services (dont un CHRS, un centre d'hébergement d'urgence, un centre d'accueil pour demandeurs d'asile), le conseil de vie sociale (CVS) ayant été constitué au niveau de l'association gestionnaire. Leur rôle est à la fois d'être les représentants des usagers au quotidien, mais aussi de participer au projet de l'établissement et de l'association, créée il y a 15 ans sur l'idée de la « co-construction sociale ». En CVS ont déjà été abordées des questions qui touchent à l'organisation des services, mais aussi aux pratiques professionnelles, comme le respect de l'intimité des personnes (visite de leurs chambres en leur absence), ou encore le droit pour un résident d'héberger ponctuellement une personne extérieure. « Mais généralement, ces questions ont déjà été préalablement posées dans le service. Le conseil de vie sociale est un lieu de dialogue, ce n'est pas un lieu de contre-pouvoir, ni un endroit où l'on met individuellement des salariés en cause », explique Eric Lepage.

Pour quelques institutions encore rares, la coproduction n'est donc pas une utopie. Mais pour de nombreuses autres, qui le plus souvent n'ont pas encore porté la participation à l'échelle de toute l'association, l'expression des usagers est d'abord un outil éducatif qui se construit progressivement. « Depuis deux ans que nous nous sommes investis dans l'installation d'un CVS, je commence seulement à percevoir ses effets », témoigne Laurence Berthon, chef de service au CHRS le Relais, à Metz (Moselle). Lorsqu'elle a pris son poste, elle a d'abord dû vaincre quelques réticences avant que son impulsion n'aboutisse, en octobre 2005, à la mise en place d'un conseil de vie sociale. Y siègent six élus représentants des usagers, deux administrateurs, deux professionnels et une représentante de la direction. « La principale difficulté a été d'investir les résidents dans une cause collective, explique Laurence Berthon. Ce qui semble moins simple avec un public d'hommes très désocialisés, celui avec lequel nous travaillons, qu'avec des femmes avec enfants, par exemple. En amont des CVS, nous avons mis en place des réunions d'usagers pour travailler collectivement toutes les questions posées. »

Comme en ont témoigné les débats du congrès des 50 ans de la FNARS, qui pour la première fois ont rassemblé plus de 100 usagers, plusieurs étapes sont nécessaires, depuis une expression désorganisée vécue par les travailleurs sociaux comme surtout revendicative, voire agressive, jusqu'à la collaboration constructive : « après le silence, chacun commence à vouloir se faire entendre, puis reste à travailler vraiment ensemble », analyse Hélène Chappey-Raulet, référente du groupe national d'appui « usagers » de la FNARS. Utile pour accompagner le « savoir être », à condition que les professionnels ne tombent pas dans le travers du paternalisme, l'expression des usagers permet également d'élaborer des outils collectifs : « Un tiers de nos résidents ne sont pas en capacité d'entamer une recherche d'emploi, explique Laurence Berthon. A leur initiative, nous avons mis en place différents ateliers sur le sport ou la cuisine, ce qui nous a permis d'aborder différemment la question de la redynamisation individuelle. » La chef de service espère franchir une phase supplémentaire en élaborant, en partenariat avec les usagers, le livret d'accueil du CHRS : « J'aimerais qu'un élu des usagers puisse être présent pendant la phase d'accueil des nouveaux résidents », envisage-t-elle.

Opportunité pour les usagers amenés à valoriser leurs ressources et à renouer avec la citoyenneté, la démarche participative offre une autre perspective pour le travail social, estime Marie Brossy-Patin, présidente de l'Arapej (Associa-tion réflexion action prison et justice). Sortir de l'assistanat n'est pas une préoccupation nouvelle, souligne-t-elle, mais « le mouvement initié autour de la place de l'usager doit permettre de contribuer à faire évoluer le travail social ». A condition que « le respect du droit des usagers s'accompagne du respect des droits des travailleurs sociaux » pour ne pas mettre les personnes accueillies et les équipes éducatives en position d'affrontement, et que ces dernières développent « une pédagogie du droit ». « Travailler sur la citoyenneté, l'identité, l'appartenance donne un champ fécond au travail social », juge-t-elle, en permettant aux professionnels de sortir du sentiment d'impuissance qu'ils peuvent éprouver.

L'institution doit s'engager

Reste que la participation des usagers dépend encore, dans les institutions, de l'initiative et de l'implication d'individus. Pourquoi ne pas créer un label participatif qui engagerait les institutions sur un certain nombre de procédures ?, propose Eric Lepage. L'évalua-tion, à laquelle sont également soumis les établissements relevant de la loi 2002-2, doit quoi qu'il en soit intégrer la prise en compte du besoin des usagers, qui deviennent acteurs, dans la qualité des prestations.

Le Conseil national de l'évaluation sociale et médico-sociale prépare quant à lui, pour la fin du premier semestre 2007, un document de recommandations de bonnes pratiques professionnelles concernant l'expression et la participation des usagers accueillis en établissement relevant du secteur de l'inclusion sociale.

M. LB.

Notes

(1) Et aussi membre du groupe national d'appui « usagers » de la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale (FNARS).

(2) « Usagers-Actions innovantes 2004 - mise en oeuvre, accompagnement et évaluation des changements en institution découlant de la loi 2002-2 relative aux droits des usagers » - Recueils et documents n° 36 - 4 € - FNARS : 76, rue du Faubourg-Saint-Denis - 75010 Paris - Tél. 01 48 01 82 00.

(3) Bien que le champ de l'insertion par l'activité économique ne soit pas soumis aux obligations de la loi 2002-2, certaines structures se sont engagées dans la dynamique de participation des usagers, abordée dans une étude de la FNARS : « Expression et place des salariés en insertion dans les structures d'insertion par l'activité économique » - Elisabeth Maurel - Recueils et documents n° 38 - Septembre 2006 - 4 € .

(4) Cette démarche a abouti à l'élaboration d'un livret pédagogique : Conseils de vie sociale, groupe d'expression : la participation, cela s'apprend - Sylvie Baron et Catherine Etienne - FNARS.

(5) L'Uniopss avait, en 2005, réalisé une enquête, qu'elle s'apprête à actualiser, sur l'impact de la loi du 2 janvier 2002 dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux - Voir ASH n° 2404 du 22-04-05, p. 31.

(6) L'enquête a été réalisée avant la parution, le 2 novembre 2005, d'un nouveau décret modifiant celui du 25 mars 2004 et amoindrissant certaines exigences dans la mise en place du conseil de vie sociale : il permet notamment que les représentants des usagers puissent être désignés et non plus élus et qu'une autre forme d'expression puisse se substituer au conseil quand la durée de séjour est inférieure à la durée du mandat (un an).

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