« Les méthodes contraceptives ne sont ni parfaites ni parfaitement utilisées », en particulier par les adolescentes, constate le Haut Conseil de la population et de la famille dans un avis et un rapport rendus publics le 5 décembre (1), qu'il doit remettre au président de la République. 9,4 % des adolescentes n'ont recours à aucune forme de contraception, contre 3,6 % chez les adultes. Et chez les jeunes filles de moins de 18 ans, trois grossesses sur cinq aboutissent à une interruption volontaire de grossesse (IVG) : 13 400 d'entre elles ont avorté en 2004, un chiffre qui « n'a pas baissé depuis dix ans ». Aussi l'instance formule-t-elle une série de recommandations en faveur d'une meilleure prévention de l'IVG chez les mineures, articulées essentiellement autour de deux axes : développement de la contraception anonyme et gratuite et amélioration de l'information des jeunes.
Pour le Haut Conseil, « le choix de la France apparaît mal adapté puisqu'il est exclusivement curatif au lieu d'être surtout préventif ». En effet, « l'IVG et la contraception d'urgence (2) sont devenues anonymes et gratuites alors que la contraception orale, le choix préventif le plus efficace, reste toujours payante, ou remboursable sur la sécurité sociale des parents, ce qui restreint les possibilités de confidentialité pourtant nécessaires à cet âge ». La faiblesse ou même l'absence de ressources financières des mineures n'est pas suffisamment prise en compte dans la politique de prévention menée en leur faveur, déplore le rapport, même si elles peuvent se rendre dans un centre de planification familiale où la consultation et la pilule sont gratuites. Autres obstacles à une contraception efficace : la sous-information des jeunes au commencement de la vie amoureuse, ainsi que le manque de lieux d'accueil adaptés à un besoin de confidentialité, voire de secret, autour de la vie sexuelle, besoin amplifié dans certaines situations familiales « lorsque la culture ou la religion prohibent toute relation sexuelle en dehors du mariage ».
En conséquence, le Haut Conseil propose de généraliser les réseaux de prévention départementaux - actuellement expérimentés de façon limitée - en collaboration avec les maternités, des médecins généralistes et des pharmaciens volontaires. Ces réseaux, mis en place conjointement par le conseil général et l'Etat, auraient pour vocation d'augmenter le nombre de lieux permettant un accueil gratuit et confidentiel, sans rendez-vous, par un médecin ou une sage-femme, des jeunes en quête d'informations, de conseils et d'orientation. Consultation médicale et délivrance sur ordonnance de produits et dispositifs contraceptifs seraient également gratuits. Ces lieux seraient distincts des centres de planification et d'éducation, difficiles d'accès « pour une grande partie des mineures » et dont le mode de fonctionnement n'offre « pas toujours la souplesse requise ».
L'instance préconise aussi de multiplier les actions d'information auprès des jeunes, notamment dans les établissements scolaires. Elle souhaite que l'obligation d'instaurer, à l'école, au collège et au lycée, trois séances annuelles d'éducation à la sexualité, inscrite dans la loi du 4 juillet 2001 relative à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception (3), « devienne effective au plus vite ». Et demande que cette information n'incombe pas seulement aux personnels de l'Education nationale, mais puisse associer des intervenants extérieurs appartenant en particulier aux centres de planification, ce qui pourrait faciliter d'éventuelles prises de contact ultérieures. Par ailleurs, il met l'accent sur la nécessité de faire porter cette information sur les risques sexuels mais aussi sur la prévention des violences sexistes et de l'homophobie.
Enfin, le Haut Conseil suggère que l'impact de ces mesures soit régulièrement vérifié par des enquêtes ponctuelles auprès d'un panel de centres de planification, d'établissements de santé et de médecins libéraux.
(1) Pour une meilleure prévention de l'IVG chez les mineures - Haut Conseil de la population et de la famille - Décembre 2006 - Disponible sur
(2) La « pilule du lendemain » est de plus en plus couramment utilisée par les adolescentes : sur l'année scolaire 2004-2005, au mois 11 450 sont venues la demander à l'infirmerie de leur établissement scolaire. Or son efficacité n'est que de 85 % lorsqu'elle est prise dans les 12 heures et de 54 % lorsqu'elle est prise dans les 48 heures.