Depuis que la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005 a fait voler en éclats le monopole de placement des chômeurs de l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) (1), la rivalité entre cette dernière et les opérateurs privés « conventionnés » par l'Unedic bat son plein. Dernière manifestation en date de cette compétition, la publication par l'ANPE, le 22 novembre, des résultats d'une étude de son observatoire (2), selon laquelle elle est au moins aussi efficace que les prestataires privés dans le suivi des demandeurs d'emploi, tout en étant beaucoup moins chère.
Ciblant la période mai-septembre 2005, l'enquête a porté sur 3 900 chômeurs pris en charge, dans le cadre d'expérimentations, par des opérateurs privés (Ingeus, BPI, Altedia et Adecco) et sur plus de 300 000 demandeurs d'emploi suivis par l'agence au travers de l'un de ses deux dispositifs d'accompagnement renforcé (3): l'accompagnement « recherche » (189 400 personnes) qui a pour vocation de les outiller dans leur recherche d'emploi et l'accompagnement « projet » (114 000) dont le but est la construction d'un projet professionnel.
Premier enseignement : les publics suivis par l'ANPE et les opérateurs privés présentent tous un risque de chômage de longue durée mais leurs profils sont assez différents. L'ensemble des demandeurs d'emploi pris en charge par les seconds étaient en effet indemnisés, alors que seuls 50 % l'étaient dans le cadre des accompagnements « recherche » ou « projet ». Ils étaient en outre moins jeunes, globalement plus diplômés et principalement au début de leur période de chômage. De son côté, l'ANPE a davantage accompagné de demandeurs d'emploi handicapés et a donc pris en charge des publics plus en difficulté. Malgré ces profils diversifiés, l'étude montre que « les divers types d'accompagnement ont des niveaux d'efficacité très proches. A neuf mois, près de 55 % des bénéficiaires [...] sont sortis au moins une fois [des listes du chômage], et environ 43 % [en] sont absents ». Mais, dans le cas de l'ANPE, l'accompagnement coûte en moyenne 690 € (accompagnement « recherche ») ou 760 € (accompagnement « projet »), tandis qu'il est facturé en moyenne 2 300 € par les opérateurs privés, et même 4 000 € dans le cas d'une reprise d'emploi de plus de six mois et 5 000 € pour le reclassement des personnes de 50 ans et plus.
Hasard du calendrier ou pas, le jour même où cette étude était rendue publique, le bureau de l'Unedic a reporté le lancement d'un appel d'offres au public et au privé pour le reclassement de salariés bénéficiant d'une convention de reclassement personnalisée (4), et a précisé que la convention actuelle avec l'ANPE sur ce sujet (5) serait « vraisemblablement prolongée ». Début septembre 2006, au terme d'un premier appel d'offres européen, l'Unedic avait sélectionné 17 opérateurs pour suivre et reclasser 46 000 chômeurs par an pendant deux ans (6).
(2) « L'accompagnement renforcé des demandeurs d'emploi » - L'essentiel n° 7 - Novembre 2006 - Disp. sur
(3) Les accompagnements renforcés sont destinés à des « demandeurs d'emploi pour lesquels des difficultés particulières sont décelées ou qui présentent des risques de chômage de longue durée », rappelle l'ANPE.