« L'immigration [est] aujourd'hui sans rapport avec les capacités d'accueil de la France et ses besoins économiques. » Tel est le constat dressé par le ministre de l'Intérieur lors de la présentation à l'Assemblée nationale du projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration. Selon le gouvernement, l'immigration pour des motifs professionnels ne représente que 7 % des flux, alors que celle pour motif familial reste dominante, près de la moitié des cartes de séjour étant délivrées à ce titre (82 000 en 2005). En outre, « l'intégration des migrants à la société française est insuffisante ». « De nombreux immigrés ne disposent pas du cadre permettant d'assurer leur intégration : un emploi, un logement, une connaissance suffisante de la langue française - autant de conditions nécessaires qui doivent être redoublées par une volonté d'intégration, un engagement personnel du migrant à respecter les principes de la République qui l'accueille » (1).
Avec la loi du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration, il s'agit donc de « retrouver une maîtrise quantitative des flux migratoires » via un nouveau concept, celui de « l'immigration choisie », a expliqué Nicolas Sarkozy lors des débats parlementaires (J.O. Sén. [C.R.] n° 54 du 7-06-06 page 4315). Concrètement, l'immigration de travail est relancée, tandis qu'un coup de frein est donné non seulement à l'immigration familiale mais aussi aux régularisations. A cette fin, le gouvernement s'est engagé à présenter chaque année au Parlement, dans son rapport sur les orientations de la politique d'immigration, des objectifs quantitatifs pluriannuels. Ce rapport indiquera, à titre prévisionnel, le nombre, la nature et les différentes catégories de visas de long séjour et de titres de séjour qui seront délivrés au cours des 3 années qui suivent l'année de sa remise, en distinguant en particulier l'admission au séjour aux fins d'emploi, aux fins d'études et pour motifs familiaux. « Ces objectifs tiendront compte de la situation démographique de la France, de ses perspectives de croissance, des besoins du marché de l'emploi et des capacités d'accueil de notre pays au regard des conditions du bon fonctionnement des services publics et des dispositifs sociaux susceptibles d'être sollicités dans le cadre de l'accueil et de l'intégration des migrants », explique le gouvernement (2).
Très vivement critiquée par les associations (3) et la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (4), la loi du 24 juillet 2006 intervient moins de 3 ans après celle du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité (5), également portée par Nicolas Sarkozy et qui, selon lui, « a constitué le premier temps de la réforme de la politique d'immigration ».
Quatre objectifs sous-tendent ce nouveau texte, validé par le Conseil constitutionnel le 20 juillet dernier. Tout d'abord, redéfinir les conditions de l'immigration familiale, ce qui passe notamment par une réforme des règles du regroupement familial et une redéfinition des catégories de bénéficiaires de plein droit des titres de séjour, en particulier de la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale ». Il est en outre mis fin aux régularisations de droit pour les étrangers résidant habituellement en France depuis plus de 10 ans. La loi tend, parallèlement, à « mieux accueillir les étudiants, les talents et les actifs qui désirent venir en France ». En particulier, certains obstacles à l'immigration de travail sont levés, dans les métiers et zones géographiques qui connaissent des pénuries de main-d'oeuvre. Autre ambition du texte : réussir l'intégration, en affirmant un lien étroit entre l'intégration et l'immigration. La signature du contrat d'accueil et d'intégration devient ainsi obligatoire pour toutes les personnes qui entrent en France légalement afin de s'y installer durablement. Enfin, la loitend à lutter contre l'immigration clandestine. Elle comporte ainsi une série de mesures tendant à simplifier et accélérer la procédure d'éloignement des personnes étrangères en situation irrégulière.
Par ailleurs, le droit d'asile est aménagé. Les centres d'accueil pour demandeurs d'asile sortent notamment de la catégorie des centres d'hébergement et de réinsertion sociale.
La plupart des dispositions de la loi sont applicables depuis le 26 juillet 2006, à l'exception de celles pour lesquelles une date d'entrée en vigueur particulière est prévue et de celles dont la mise en oeuvre nécessite un décret ou un arrêté.
Expérimenté dans quelques départements à partir de juillet 2003, le contrat d'accueil et d'intégration (CAI) a été généralisé sur l'ensemble du territoire national le 1er janvier 2006 par la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005. Depuis cette loi, l'article L. 117-1 du code de l'action sociale et des familles prévoit ainsi qu'il est proposé, dans une langue qu'il comprend, à tout étranger admis pour la première fois au séjour en France en vue d'une installation durable, de conclure individuellement avec l'Etat un contrat d'accueil et d'intégration, contrat qui précise les conditions dans lesquelles il bénéficie d'actions tenant compte de sa situation et de son parcours personnel et destinées à favoriser son intégration dans le respect des lois et des valeurs fondamentales de la République française. Ces actions comprennent notamment une formation linguistique sanctionnée par une validation des acquis.
La loi du 24 juillet 2006 rend le contrat d'accueil et d'intégration obligatoire et le redéfinit. Désormais intégré à l'article L. 311-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (Ceseda), « le CAI devient un élément essentiel de la politique d'immigration, dont l'intégration est un volet fondamental et central, et n'est donc plus considéré comme une politique annexe. [Il] doit être au coeur du parcours d'intégration suivi par l'ensemble des nouveaux immigrants souhaitant s'installer durablement en France », explique Thierry Mariani, rapporteur de la loi à l'Assemblée nationale (Rap. A.N. n° 3058, avril 2006, Mariani, page 65).
Ainsi, tout étranger admis pour la première fois au séjour en France ou qui entre régulièrement en France entre 16 ans et 18 ans, et qui souhaite s'y maintenir durablement, doit préparer son « intégration républicaine » dans la société française et, à cette fin, conclure avec l'Etat un CAI, traduit dans une langue qu'il comprend. Lorsque l'étranger est âgé de 16 à 18 ans, le contrat doit être cosigné par son représentant légal régulièrement admis au séjour en France.
N'y sont pas soumis les étudiants étrangers, les travailleurs saisonniers et tous ceux qui ne s'installent pas durablement en France. L'étranger qui a effectué sa scolarité dans un établissement d'enseignement secondaire français à l'étranger pendant au moins 3 ans est également dispensé de la signature de ce contrat.
L'étranger qui n'a pas conclu un CAI lorsqu'il a été admis pour la première fois au séjour en France peut demander à signer un tel contrat.
Le contenu du contrat est redéfini par la loi qui précise les obligations à la charge de l'étranger qui le signe. Ce dernier s'oblige à suivre une formation civique et, lorsque le besoin en est établi, linguistique. La formation civique comporte une présentation des institutions françaises et des valeurs de la République, notamment l'égalité entre les hommes et les femmes et la laïcité. La formation linguistique est sanctionnée par un titre ou un diplôme reconnus par l'Etat. L'étranger bénéficie également d'une session d'information sur la vie en France et, le cas échéant, d'un bilan de compétences professionnelles. Toutes ces formations et prestations sont dispensées gratuitement.
Le non-respect du CAI pourra avoir une incidence au moment de la demande de renouvellement de titre de séjour. La loi indique en effet que le non-respect des stipulations du contrat, manifesté par une volonté caractérisée de l'étranger, peut être pris en compte lors du premier renouvellement de la carte de séjour.
Un décret doit venir fixer les conditions de mise en oeuvre de ce CAI « nouvelle formule », notamment sa durée et ses conditions de renouvellement. Il déterminera également les actions prévues par le contrat et leurs conditions de suivi et de validation, dont la reconnaissance de l'acquisition d'un niveau satisfaisant de maîtrise de la langue française et la remise à l'étranger d'un document permettant de s'assurer de l'assiduité de celui-ci aux formations qui lui sont dispensées. La loi ne fixe pas de date d'entrée en vigueur pour ce CAI obligatoire, mais l'objectif du gouvernement est qu'il soit applicable à compter du 1er janvier 2007.
La loi inscrit un nouveau principe au Ceseda : l'obligation de produire un visa de long séjour, c'est-à-dire d'une durée supérieure à 3 mois, pour obtenir une carte de séjour temporaire, sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par le code de l'entrée et du séjour des étrangers (Ceseda, art. L. 311-7 nouveau). Ainsi, explique le gouvernement (6), « les étrangers admis à séjourner durablement sur le territoire [feront] l'objet, en amont, d'un choix par l'autorité consulaire, dans leur pays d'origine ».
Cette nouvelle règle s'applique aux demandes de titres de séjour introduites à partir du 26 août 2006 (art. 116 de la loi).
Jusqu'alors, le visa de long séjour était déjà fréquemment exigé pour obtenir un titre de séjour. Le code indiquait que l'octroi de la carte de séjour temporaire pouvait être subordonné à la production par l'étranger d'un visa de long séjour d'une durée supérieure à 3 mois. C'est le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 réglementant les conditions d'entrée et de séjour en France des étrangers qui énumérait les différentes catégories d'étrangers tenus de présenter un tel visa.
En pratique, cette réforme touche principalement les conjoints de Français et de scientifiques étrangers qui demandent une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale ».
S'agissant des conjoints de Français, les parlementaires ont toutefois adopté plusieurs mesures visant à adoucir cette contrainte (Ceseda, art. L. 211-2-1 nouveau) :
les autorités diplomatiques et consulaires doivent statuer sur la demande de visa de long séjour formée par le conjoint de Français « dans les meilleurs délais » ;
lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un Français et que le demandeur séjourne en France depuis plus de 6 mois avec son conjoint, la demande est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour, c'est-à-dire à la préfecture. Il s'agit d'éviter que le conjoint ne retourne dans son pays d'origine afin d'y obtenir un visa ;
le visa ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public.
En outre, la loi prévoit désormais que toute demande d'un visa de long séjour donne lieu à la délivrance par les autorités diplomatiques et consulaires d'un récépissé indiquant la date du dépôt de la demande. Ce récépissé prouve que l'étranger a déposé une demande de visa et, en cas d'absence de réponse de la part du consulat dans un délai de 2 mois, lui permet de déposer un recours contre la décision implicite de rejet de la demande devant la commission de recours contre les refus de visa (Ceseda, art. L. 211-2-1 nouveau).
La loi redéfinit les cas de délivrance de plein droit de la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale ». C'est ainsi que les étrangers justifiant de 10 années de résidence habituelle en France ne peuvent plus accéder de plein droit à cette carte de séjour.
Ce cas de régularisation concernait entre 2 500 et 3 000 personnes par an (Rap. Sén. n° 371, mars 2006, Buffet, page 128). Il était en nette baisse depuis 2004, la loi du 26 novembre 2003 ayant durci les conditions de régularisation en ne permettant plus de prendre en compte dans le calcul des 10 ans les années aux cours desquelles l'étranger s'était prévalu de documents d'identité falsifiés ou d'une identité usurpée. La suppression de cette possibilité légale de régularisation a été vivement critiquée par les associations qui invoquaient notamment le nombre modeste de personnes régularisées à ce titre, lié à la difficulté de prouver les 10 ans de séjour habituel, et l'absence désormais, pour les sans-papiers, de « possibilité réelle » d'être régularisés. Tenant compte de ces réactions, le ministre de l'Intérieur a présenté à l'Assemblée nationale un amendement créant une procédure d'admission exceptionnelle au séjour (voir page 27).
La carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est désormais délivrée de plein droit - sauf si leur présence constitue une menace pour l'ordre public - aux catégories d'étrangers suivantes (Ceseda, art. L. 313-11 modifié et L. 313-13 modifié) :
le conjoint et les enfants d'un étranger titulaire de la carte de séjour temporaire ou de la carte de résident, s'ils ont été autorisés à séjourner en France au titre du regroupement familial ;
l'étranger qui justifie par tout moyen avoir résidé habituellement en France avec au moins un de ses parents légitimes, naturels ou adoptifs depuis qu'il a atteint au plus l'âge de 13 ans. Le visa de long séjour n'est pas exigé. Antérieurement, la loi n'exigeait pas la résidence avec un des parents légitimes, naturels ou adoptifs. Sont donc désormais exclues les personnes qui ont été confiées à un autre membre de la famille établi en France ;
l'étranger qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus 16 ans, aux services de l'aide sociale à l'enfance (ASE). Plusieurs critères doivent être réunis : le caractère réel et sérieux du suivi de la formation, la nature des liens avec la famille restée dans le pays d'origine et l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de l'étranger dans la société française. Le visa de long séjour n'est pas exigé. Avant la loi du 26 novembre 2003, les mineurs isolés confiés à l'ASE pouvaient obtenir la nationalité française par déclaration à leur majorité, sans condition de durée de prise en charge. Mais la loi de 2003 a ajouté une condition de durée de prise en charge de 3 ans. Beaucoup de mineurs isolés entrant en France après l'âge de 15 ans, très peu accèdent donc à la nationalité française à leur majorité depuis cette réforme. Jusqu'à présent, la loi ne prévoyait aucune disposition relative au séjour en France de ces jeunes lorsqu'ils atteignaient l'âge de 18 ans. Ce nouveau cas de délivrance de plein droit vise à régler leur situation ;
l'étranger dont l'un des parents ou le conjoint est titulaire de la carte de séjour « compétences et talents » (voir page 35) ou de la carte de séjour temporaire portant la mention « salarié en mission » ;
l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. Le visa de long séjour est indispensable, mais des règles visant à adoucir cette contrainte sont prévues (voir page 25) ;
l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié à un ressortissant étranger titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention « scientifique ». Jusqu'à présent, le conjoint de scientifique était seulement soumis à la condition d'être entré régulièrement en France. Il doit désormais produire un visa de long séjour ;
l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à son entretien et à son éducation depuis sa naissance ou depuis au moins 2 ans (contre 1 an auparavant). Le visa de long séjour n'est pas exigé ;
l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, mais dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. S'inspirant des critères dégagés par la jurisprudence, la loi précise que ces liens sont « appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine ». Le visa de long séjour n'est pas exigé ;
l'étranger né en France qui justifie par tout moyen y avoir résidé pendant au moins 8 ans de façon continue et avoir suivi, après l'âge de 10 ans, une scolarité d'au moins 5 ans dans un établissement scolaire français, à la condition qu'il fasse sa demande entre 16 ans et 21 ans. Le visa de long séjour n'est pas exigé ;
l'étranger titulaire d'une rente d'accident du travail ou de maladie professionnelle servie par un organisme français et dont le taux d'incapacité permanente est égal ou supérieur à 20 %. Le visa de long séjour n'est pas exigé ;
l'étranger qui a obtenu le statut d'apatride, ainsi que son conjoint et ses enfants. Le mariage doit être antérieur à la date de cette obtention ou avoir été célébré depuis au moins un an, et la communauté de vie doit être effective entre les époux. Le visa de long séjour n'est pas exigé ;
l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. Le visa de long séjour n'est pas exigé. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin-inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin-inspecteur ou le médecin chef peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat ;
l'étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire, son conjoint et ses enfants. Le mariage doit être antérieur à la date d'obtention de la protection subsidiaire ou avoir été célébré depuis au moins un an et la communauté de vie doit être effective entre les époux. Le visa de long séjour n'est pas exigé.
A noter : concernant l'octroi d'un titre de séjour aux enfants, la loi vise désormais « l'étranger dans l'année qui suit son 18e anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3 du Ceseda ». La détention d'un titre de séjour n'est en effet pas obligatoire pour les mineurs sauf s'ils souhaitent exercer une activité professionnelle salariée entre 16 et 18 ans (hypothèse visée à l'article L. 311-3). La nouvelle rédaction a pour seul objet de clarifier la situation des mineurs et ne modifie pas les conditions dans lesquelles ils sont tenus de détenir un titre de séjour.
Dans des conditions qui doivent être fixées par décret, la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » est délivrée au conjoint d'un étranger titulaire du statut de résident de longue durée-CE dans un autre Etat membre de l'Union européenne (sur ce statut, voir page 28) et d'une carte de séjour temporaire délivrée en France, ainsi qu'à ses enfants entrés mineurs en France et devenus majeurs. Ces personnes ne sont pas soumises à la procédure du regroupement familial. Le visa de long séjour n'est pas exigé mais elles doivent justifier des conditions suivantes (Ceseda, art. L. 313-11-1 nouveau) :
avoir résidé légalement avec le résident de longue durée-CE dans l'autre Etat membre ;
bénéficier d'une assurance maladie ;
disposer de ressources stables et suffisantes (ou s'agissant des enfants, être pris en charge par le parent titulaire de la carte de séjour temporaire). Sont prises en compte toutes les ressources propres du demandeur et, le cas échéant, de son conjoint ou parent, indépendamment des prestations familiales, du revenu minimum d'insertion, de l'allocation de solidarité pour personnes âgées, de l'allocation équivalent retraite et de l'allocation de solidarité spécifique. Ces ressources doivent atteindre un montant au moins égal au SMIC et sont appréciées au regard des conditions de logement. Le maire de la commune de résidence du demandeur donne son avis sur le caractère suffisant des ressources au regard des conditions de logement. Cet avis est réputé favorable à l'expiration d'un délai de 2 mois à compter de sa saisine par l'autorité administrative.
La demande de titre de séjour doit être faite dans les 3 mois qui suivent l'entrée en France ou, lorsqu'il s'agit d'un enfant, dans les 3 mois suivant son 18e anniversaire. La date d'expiration de la carte de séjour temporaire délivrée dans ces conditions ne peut être postérieure à celle de la carte de séjour temporaire délivrée à l'étranger titulaire du statut de résident de longue durée-CE (Ceseda, art. L. 313-11-1 nouveau).
Ce titre de séjour ne permet pas d'exercer une activité professionnelle dans l'année qui suit sa première délivrance, sauf lorsqu'il est accordé à l'enfant à partir de 16 ans qui séjourne en France depuis au moins un an (Cedesa, art. L. 313-12 complété). « Par exemple, un enfant mineur qui rejoindrait l'un de ses parents à la date de son 17e anniversaire pourrait travailler dès l'âge de 18 ans » (Rap. Sén. n° 371, mai 2006, Buffet, page 116).
Cette carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » peut également être délivrée à l'étranger qui dépose plainte contre une personne qu'il accuse d'avoir commis à son encontre les infractions de proxénétisme et de traite des êtres humains ou témoigne dans une procédure pénale concernant une personne poursuivie pour ces mêmes infractions. Une exception toutefois : cette carte ne lui est pas attribuée si sa présence constitue une menace à l'ordre public. Le visa de long séjour n'est pas requis. Cette carte permet l'exercice d'une activité professionnelle (Ceseda, art. L. 316-1 modifié).
En réponse aux critiques des associations qui contestaient la suppression de la régularisation de droit des étrangers résidant habituellement en France depuis plus de 10 ans, la loi met en place une nouvelle procédure de régularisation « au cas par cas ». L'objectif est de « mieux formaliser le pouvoir de régularisation de l'autorité administrative, aujourd'hui laissé pour une large part à l'appréciation des préfets [et de donner] une base légale à des régularisations accordées au vu de situations individuelles » (Rap. Sén. n° 371, mars 2006, Buffet, page 133).
La carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » peut ainsi être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour (Ceseda, art. L. 313-14 nouveau) :
soit répond à des considérations humanitaires ;
soit se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir.
Le visa de long de séjour n'est pas requis. Ces critères doivent permettre de prendre en compte des situations très diverses « ne se confondant pas avec celles relevant du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers [respect des liens personnels et familiaux] et allant bien au-delà de la catégorie des étrangers justifiant de 10 ans de résidence habituelle » (Rap. Sén. n° 371, mars 2006, Buffet, page 134).
Une Commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour est créée (Ceseda, art. L. 313-14 nouveau). Un décret précise ses modalités de fonctionnement (7). Elle est composée de 11 membres nommés par arrêté pour un mandat de 2 ans renouvelable : responsables des administrations compétentes, représentants de la société civile et élus. Parmi eux, figurent 2 personnalités qualifiées, dont l'une préside la commission, et 2 représentants d'associations reconnues pour leur action en faveur de l'accueil et de l'intégration des étrangers en France. Elle exprimera un avis sur les critères d'admission exceptionnelle au séjour utilisés par les préfets. Pour ce faire, elle se réunira sur convocation de son président, au moins 2 fois par an. Elle pourra en outre être saisie par le ministre de l'Intérieur des recours hiérarchiques formés contre un refus préfectoral d'admission exceptionnelle au séjour. Le ministère en informera alors le requérant et le préfet compétent. Et la commission émettra son avis dans le délai de un mois à compter de sa saisine. En l'absence de réponse à l'issue de ce délai, l'avis sera réputé défavorable.
Chaque année, la commission présentera un rapport évaluant les conditions d'application en France de l'admission exceptionnelle au séjour, qui sera annexé au rapport annuel sur les orientations pluriannuelles de la politique d'immigration (Ceseda, art. L. 313-14 nouveau).
Lorsque la demande d'admission exceptionnelle au séjour est présentée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de 10 ans (et qui pouvait auparavant obtenir de plein droit une carte de séjour), la commission du titre de séjour est obligatoirement saisie pour avis (Ceseda, art. L. 313-14 nouveau).
Jusqu'alors, la carte de résident, valable 10 ans, était délivrée de plein droit à certaines catégories d'étrangers en raison de leurs liens particuliers avec la France. Elle pouvait aussi être octroyée à l'étranger justifiant d'une résidence ininterrompue d'au moins 5 ans.
La nouvelle loi du 24 juillet 2006 aménage ces deux possibilités. En premier lieu, en supprimant deux cas de délivrance de plein droit. Puis en remplaçant la carte de résident subordonnée à une durée minimale de séjour régulier par une carte de résident portant la mention « résident de longue durée-CE ».
La loi supprime deux catégories de bénéficiaires de plein droit de la carte de résident : l'étranger marié avec un Français et l'étranger en situation régulière depuis plus de 10 ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention « étudiant ».
Au final, sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident, valable 10 ans, est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour, aux catégories d'étrangers suivantes (Ceseda, art. L. 314-11 modifié et L. 314-12) :
l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française si cet enfant est âgé de 18 à 21 ans ou s'il est à la charge de ses parents, ainsi que les ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge. La loi exige désormais qu'ils produisent un visa de long séjour ;
l'étranger titulaire d'une rente d'accident de travail ou de maladie professionnelle versée par un organisme français et dont le taux d'incapacité permanente est égal ou supérieur à 20 %, ainsi que les ayants droit d'un étranger bénéficiaires d'une rente de décès pour accident de travail ou maladie professionnelle versée par un organisme français ;
l'étranger ayant servi dans une unité combattante de l'armée française ;
l'étranger ayant effectivement combattu dans les rangs des forces françaises de l'intérieur, titulaire du certificat de démobilisation délivré par la commission d'incorporation de ces formations dans l'armée régulière ou qui, quelle que soit la durée de son service dans ces mêmes formations, a été blessé en combattant l'ennemi ;
l'étranger qui a servi en France dans une unité combattante d'une armée alliée ou qui, résidant antérieurement sur le territoire de la République, a également combattu dans les rangs d'une armée alliée ;
l'étranger ayant servi dans la Légion étrangère, comptant au moins 3 ans de services dans l'armée française, titulaire du certificat de bonne conduite ;
l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié, son conjoint et ses enfants lorsque le mariage est antérieur à la date de cette obtention ou, à défaut, lorsqu'il a été célébré depuis au moins un an, sous réserve d'une communauté de vie effective entre les époux. Depuis la loi du 24 juillet 2006, obtiennent également la carte de résident les ascendants directs au premier degré (parents) si l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié est un mineur non accompagné ;
l'apatride justifiant de 3 années de résidence régulière en France, son conjoint et ses enfants ;
l'étranger qui remplit les conditions d'acquisition de la nationalité française.
Comme auparavant, l'enfant doit avoir une filiation légalement établie. Il peut s'agir d'une filiation légitime, naturelle ou adoptive, sous réserve dans ce dernier cas, de la vérification par le ministère public de la régularité de la décision d'adoption lorsqu'elle a été prononcée à l'étranger.
L'étranger qui entre dans les catégories de bénéficiaires de plein droit de la carte de résident n'est pas tenu légalement de justifier de son « intégration républicaine » dans la société française (voir page 30).
La directive européenne n° 2003/109/CE du 25 novembre 2003 a défini un statut de résident de longue durée-CE (8). Ce statut est accordé par les Etats membres de l'Union européenne aux ressortissants de pays tiers qui ont résidé de manière légale et ininterrompue sur leur territoire pendant les 5 années qui ont immédiatement précédé la demande de délivrance du statut de résident. La loi du 24 juillet 2006 transpose en droit interne cette directive et met ainsi en place une carte de résident portant mention « résident de longue durée-CE ». Cette carte remplace la carte de résident, qu'elle soit délivrée de plein droit ou non, pour tous les étrangers qui remplissent les conditions requises pour l'obtenir, c'est-à-dire qui justifient :
de 5 années de résidence légale et ininterrompue en France ;
de ressources stables et suffisantes ;
et d'une assurance maladie.
Une exception est toutefois prévue : les réfugiés qui ont obtenu une carte de résident de plein droit ne peuvent obtenir une carte de résident portant la mention « résident de longue durée-CE ».
Comme la carte de résident, la carte de résident portant mention « résident de longue durée-CE » est valable 10 ans. Elle permet à l'étranger de séjourner dans les autres Etats membres de l'Union européenne, sous réserve de remplir les conditions fixées par la directive et la législation nationale d'accueil, sans qu'un visa de long séjour soit exigé.
Peut obtenir une carte de résident portant la mention « résident de longue durée-CE » tout étranger qui justifie d'une résidence ininterrompue d'au moins 5 années en France, conforme aux lois et règlements en vigueur, sous couvert de l'une des cartes de séjour suivantes (Ceseda, art. L. 314-8 modifié) :
carte de séjour temporaire portant la mention « visiteur » ;
carte de séjour temporaire portant la mention « scientifique » ;
carte de séjour temporaire portant la mention « profession artistique et culturelle » ;
carte de séjour temporaire portant la mention « salarié » ;
carte de séjour temporaire portant la mention « travailleur temporaire » ;
carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale ou d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisée par des difficultés de recrutement, d'une profession non soumise à autorisation ;
carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » délivrée de plein droit ou au conjoint d'un étranger titulaire du statut de résident de longue durée-CE ;
carte de résident délivrée de plein droit ;
carte de séjour « compétences et talents » (voir page 35).
L'étranger doit en outre justifier qu'il dispose d'une assurance maladie. La décision d'accorder ou de refuser cette carte est prise en tenant compte des faits que l'étranger peut invoquer à l'appui de son intention de s'établir durablement en France, notamment au regard des conditions de son activité professionnelle s'il en a une, et de ses moyens d'existence (Ceseda, art. L. 314-8 modifié).
Les moyens d'existence du demandeur sont appréciés au regard de ses ressources qui doivent être stables et suffisantes pour subvenir à ses besoins. Sont prises en compte toutes les ressources propres du demandeur indépendamment des prestations familiales et du revenu minimum d'insertion, de l'allocation temporaire d'attente, de l'allocation de solidarité spécifique et de l'allocation équivalent retraite. Les ressources doivent atteindre un montant au moins égal au SMIC et sont appréciées au regard des conditions de logement. Le caractère suffisant des ressources au regard des conditions de logement fait désormais l'objet d'un avis du maire de la commune de résidence du demandeur. Cet avis est réputé favorable à défaut de réponse du maire à l'expiration d'un délai de 2 mois à compter de sa saisine (Ceseda, art. L. 314-8 modifié).
Rappelons que l'étranger qui souhaite obtenir une carte de résident doit justifier de son « intégration républicaine » dans la société française (voir ci-dessous).
La carte de résident portant la mention « résident de longue durée-CE » ne peut en principe être obtenue qu'après 5 années de résidence légale et ininterrompue en France. Trois dérogations à cette durée de résidence sont prévues en faveur d'étrangers ayant des attaches familiales en France (Ceseda, art. L. 314-9 modifié). Ils reçoivent alors une carte de résident et non une carte de résident « résident de longue durée-CE » puisqu'ils ne justifient pas de 5 ans de résidence. Il s'agit (Ceseda, art. L. 314-9 modifié) :
du conjoint et des enfants d'un étranger titulaire de la carte de résident, autorisés à séjourner en France au titre du regroupement familial et qui justifient d'une résidence non interrompue, conforme aux lois et règlements en vigueur, d'au moins 3 années en France (contre 2 ans avant la réforme) ;
de l'étranger qui est père ou mère d'un enfant français résidant en France et titulaire depuis au moins 3 années (2 ans avant la réforme) de la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » obtenue de plein droit, sous réserve qu'il remplisse encore les conditions prévues pour l'obtention de cette carte de séjour et qu'il ne vive pas en état de polygamie ;
de l'étranger marié depuis au moins 3 ans avec un ressortissant Français, à condition que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. Avant la réforme, les conjoints de Français obtenaient de plein droit une carte de résident après 2 années de mariage. Ils peuvent désormais en obtenir une après 3 ans de mariage, et sous réserve de l'appréciation du préfet.
Ces conditions s'appliquent à la carte de résident comme à la carte de résident portant la mention « résident de longue durée-CE » (Ceseda, art. L. 313-4-1 nouveau).
La loi Sarkozy du 26 novembre 2003 a ajouté une condition supplémentaire pour obtenir une carte de résident de 10 ans : justifier de son « intégration républicaine » dans la société française, cette condition étant appréciée en particulier au regard de la connaissance suffisante de la langue française et des principes qui régissent la République française.
La loi du 24 juillet 2006 maintient cette condition et la redéfinit. L'« intégration républicaine » de l'étranger dans la société française est désormais appréciée en particulier au regard de « son engagement personnel » à respecter les principes qui régissent la République française, « du respect effectif de ces principes » et de sa connaissance suffisante de la langue française. « L'intégration ne serait plus uniquement jugée sur des connaissances, mais sur une implication plus forte de l'étranger », explique le gouvernement (9). Les étrangers âgés de plus de 65 ans ne sont pas soumis à la condition relative à la connaissance de la langue française. Des précisions seront apportées par décret en Conseil d'Etat (Ceseda, art. L. 314-2 modifié).
Un lien direct est établi entre la condition d'intégration et le contrat d'accueil et d'intégration (voir page 24). Ainsi, pour apprécier la condition d'intégration, l'autorité administrative tient compte de la souscription et du respect, par l'étranger, du CAI. De plus, elle saisit le maire de la commune dans laquelle réside l'étranger pour avis. Cet avis étant réputé favorable à l'expiration d'un délai de 2 mois à compter de sa saisine (Ceseda, art. L. 314-2 modifié).
Comme auparavant, la carte de résident valable 10 ans peut être refusée à tout étranger dont la présence constitue une menace pour l'ordre public.
Elle ne peut être délivrée à un étranger qui vit en polygamie ni aux conjoints d'un tel ressortissant ni, ajoute la loi du 24 juillet 2006, à un étranger condamné pour avoir commis sur un mineur de 15 ans des violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente (excision notamment) ou s'être rendu complice de cette infraction (Ceseda, art. L. 314-5 modifié).
La carte de résident est renouvelable de plein droit sauf pour les étrangers vivant en polygamie et les conjoints de tels ressortissants ainsi que pour les étrangers condamnés pour avoir commis sur un mineur de 15 ans des violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité ou s'être rendu complice de cette infraction (Ceseda, art. L. 314-1).
La loi ajoute de nouveaux cas de retrait de la carte de résident, également applicables à la carte de résident portant mention « résident de longue durée-CE ».
Ainsi, désormais, la carte de résident peut être retirée à tout employeur, titulaire de cette carte, ayant fait travailler un étranger sans autorisation de travail. Il est ajouté que l'employeur qui a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en raison du retrait de sa carte de résident peut, dans les 3 années qui suivent cette obligation, se voir refuser le droit d'exercer une activité professionnelle en France (Ceseda, art. L. 314-6 modifié).
La carte de résident délivrée au conjoint de Français après 3 années de mariage, quant à elle, peut être retirée au motif de la rupture de la vie commune, dans la limite de 4 années à compter de la célébration du mariage. Cette mesure est « un élément d'un dispositif plus général mis en place aux fins de lutter contre les mariages de complaisance conclus dans l'unique but d'obtenir un droit au séjour et, le cas échéant, la nationalité française » (Rap. Sén. n° 371, mars 2006, Buffet, page 137). Le retrait de la carte n'est toutefois pas possible (Ceseda, art. L. 314-5-1 nouveau) :
si un ou des enfants sont nés de cette union et à la condition que l'étranger titulaire de la carte de résident établisse contribuer effectivement, depuis la naissance, à l'entretien et à l'éducation du ou des enfants ;
lorsque la communauté de vie a été rompue par le décès de l'un des conjoints ou à l'initiative de l'étranger en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint.
Par ailleurs, la carte de résident d'un étranger protégé contre l'expulsion peut lui être retirée s'il fait l'objet d'une condamnation définitive pour menaces et actes d'intimidation commis contre les personnes exerçant une fonction publique, pour avoir détruit, soustrait ou détourné des biens contenus dans un dépôt public, ou pour rébellion. Une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » lui est alors délivrée de plein droit (Ceseda, art. L. 314-6-1 nouveau).
Enfin, la carte de résident délivrée à un étranger qui vit en état de polygamie et à ses conjoints doit être retirée. Elle doit l'être également lorsque l'étranger a été condamné pour avoir commis sur un mineur de 15 ans des violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité (Ceseda, art. L. 314-5 modifié).
De nouveaux cas de péremption de la carte de résident sont prévus, liés à la mise en place de la carte de résident « résident de longue durée-CE ».
Ainsi, la carte de résident d'un étranger qui a quitté le territoire français et a résidé à l'étranger pendant plus de 3 ans consécutifs est périmée, de même que la carte de résident « résident de longue durée-CE » accordée par la France lorsque son titulaire a résidé en dehors du territoire des Etats membres de l'Union européenne pendant plus de 3 ans consécutifs. Dans les deux cas, cette période peut être prolongée si l'intéressé en a fait la demande soit avant son départ de France, soit pendant son séjour à l'étranger (Ceseda, art. L. 314-7 modifié).
Est également périmée la carte « résident de longue durée-CE » accordée par la France lorsque son titulaire a, depuis sa délivrance, acquis ce statut dans un autre Etat membre de l'Union européenne, ou lorsqu'il a résidé en dehors du territoire national pendant 6 ans consécutifs (Ceseda, art. L. 314-7 modifié).
La loi prévoit trois nouveaux cas de délivrance d'une autorisation provisoire de séjour.
Une autorisation provisoire de séjour est délivrée à l'étranger qui souhaite effectuer une mission de volontariat en France auprès d'une fondation ou d'une association reconnue d'utilité publique ou d'une association adhérente d'une fédération reconnue d'utilité publique. Les conditions suivantes doivent être réunies (Ceseda, art. L. 311-10 nouveau) :
la mission doit revêtir un caractère social ou humanitaire ;
le contrat de volontariat doit avoir été conclu préalablement à l'entrée en France ;
l'association ou la fondation doit attester de la prise en charge du demandeur ;
celui-ci doit être en possession d'un visa de long séjour et avoir pris par écrit l'engagement de quitter le territoire à l'issue de sa mission.
L'association ou la fondation doivent faire l'objet d'un agrément préalable par l'autorité administrative, dans des conditions qui seront fixées par décret (Ceseda, art. L. 311-10 nouveau).
Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l'un des parents étrangers d'un enfant mineur étranger malade qui remplit les conditions prévues pour l'obtention d'une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » pour soins. L'état de santé de l'enfant doit nécessiter une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Et l'enfant ne doit pas pouvoir bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. Le parent doit justifier résider habituellement en France avec le mineur et subvenir à son entretien et à son éducation (Ceseda, art. L. 311-12 nouveau).
L'autorisation provisoire de séjour, d'une durée maximale de 6 mois, est délivrée, comme la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale », après avis du médecin-inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin chef du service médical de la préfecture de police. Elle est renouvelable et n'autorise pas son titulaire à travailler. Toutefois, elle peut être assortie d'une autorisation provisoire de travail, sur présentation d'un contrat de travail (Ceseda, art. L. 311-12 nouveau).
L'objectif de ce dispositif est de « donner un fondement législatif à une pratique issue de circulaires du ministère de l'Intérieur qui consiste à admettre au séjour, à titre humanitaire, l'un des parents d'un mineur étranger malade à l'égard duquel le médecin inspecteur de santé publique estime que l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et dont il ne peut effectivement bénéficier dans le pays dont il est originaire » (J.O. Sén. [C.R.] n° 56 du 9-06-06, page 4475).
Une autorisation provisoire de séjour de 6 mois non renouvelable est délivrée à l'étranger qui a achevé avec succès, dans un établissement d'enseignement supérieur habilité au plan national, un cycle de formation conduisant à un diplôme au moins équivalent au master et qui souhaite, dans la perspective de son retour dans son pays d'origine, compléter sa formation par une première expérience professionnelle participant directement ou indirectement au développement économique de la France et du pays dont il a la nationalité (Ceseda, art. L. 311-11 nouveau).
Pendant la durée de cette autorisation provisoire de séjour, l'étudiant est autorisé à chercher et à exercer un emploi en relation avec sa formation et assorti d'une rémunération supérieure à un seuil qui sera fixé par décret. A l'issue des 6 mois, l'intéressé qui travaille ou qui est titulaire d'une promesse d'embauche, répondant aux conditions énoncés ci-dessus, est autorisé à séjourner en France pour exercer cette activité professionnelle. La situation de l'emploi ne lui est pas opposable (Ceseda, art. L. 311-11 nouveau).
Trois ans après la loi du 26 novembre 2003 qui en a modifié et durci les conditions, le regroupement familial fait l'objet d'une nouvelle réforme.
C'est désormais après 18 mois de séjour régulier en France, et non plus un an, sous couvert d'un titre de séjour d'une durée de validité d'au moins un an, que l'étranger peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint majeur et les enfants du couple mineurs de 18 ans (Ceseda, art. L. 411-1 modifié).
Justifiant cet allongement du délai, Thierry Mariani, rapporteur (UMP) de la loi à l'Assemblée nationale, a précisé que « faire venir sa famille en France est le signe d'une volonté de s'installer durablement dans notre pays. Il est donc normal de réserver cette procédure aux personnes présentes depuis plus de un an, c'est-à-dire celles ayant obtenu un premier renouvellement de la carte de séjour temporaire, élément indiquant la probabilité d'un séjour durable. Cette disposition empêchera d'accorder de manière trop hâtive le regroupement familial » (J.O.A.N. [C.R.] n° 41 du 10-05-06, page 3226).
S'agissant du conjoint, la loi ajoute que ce dernier doit être âgé d'au moins 18 ans (Ceseda, art. L. 411-1 modifié). Cette restriction tient compte du relèvement de 15 à 18 ans de l'âge nubile de l'épouse par la loi du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs (10). L'objectif est « de lutter contre les mariages forcés qui s'exercent éventuellement sur des mineures » (Rap. Sén. n° 371, mars 2006, Buffet, page 151).
Le regroupement familial est soumis à des conditions de ressources et de logement. La loi les modifie et en ajoute une nouvelle : se conformer aux principes fondamentaux de la République.
Le demandeur doit justifier de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Ces ressources doivent atteindre un montant au moins égal au SMIC mensuel (soit 1 254,28 € depuis le 1er juillet 2006). Pour l'appréciation de ces ressources, seules les prestations familiales n'étaient pas prises en compte jusqu'à présent. Dorénavant, sont également exclus le revenu minimum d'insertion, l'allocation de solidarité pour personnes âgées, l'allocation temporaire d'attente, l'allocation de solidarité spécifique et l'allocation équivalent retraite (Ceseda, art. L. 411-5 modifié). Le demandeur doit « pouvoir démontrer qu'il peut subvenir aux besoins de sa famille par son seul travail, et donc sans recourir au système d'aide sociale du pays d'accueil » (Rap. A.N. n° 3058, avril 2006, Mariani, page 147).
La condition de logement ne s'apprécie plus désormais au niveau national mais dans un contexte local. La loi dispose en effet que, au moment de sa demande de regroupement familial, l'étranger doit disposer, ou justifier qu'il disposera à la date d'arrivée de sa famille en France, d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant dans la même région géographique (et non plus vivant en France). « Cette nouvelle rédaction permettra de mieux adapter le dispositif aux réalités du terrain et, en tout état de cause, d'écarter les critères de superficie actuels qui ne semblent pas à même d'assurer un logement dans des conditions correctes » (Rap. Sén. n° 371, mars 2006, Buffet, page 154).
Dans sa décision du 20 juillet 2006, le Conseil constitutionnel a estimé que la substitution de critères locaux à des critères nationaux « trouve sa justification dans les disparités du marché immobilier sur l'ensemble du territoire national ». Par conséquent, « le législateur a pu, sans méconnaître l'étendue de sa compétence, se référer à la notion de région géographique, laquelle renvoie à une réalité locale et non à une catégorie de collectivités territoriales ».
Dorénavant, le demandeur doit se conformer aux principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (Ceseda, art. L. 411-5 modifié).
« Ce nouveau critère ne vise pas à écarter les personnes maîtrisant mal la langue française, par exemple, mais celles dont le comportement est révélateur du peu d'attachement qu'elles portent aux valeurs de la République française », a expliqué le rapporteur à l'Assemblée nationale, Thierry Mariani (J.O.A.N. [C.R.] n° 42 du 11-05-06, page 3257). « Il ne s'agit pas d'exiger de l'étranger qui réclame le bénéfice du regroupement familial de respecter une condition d'intégration dans la société française [...] qui ne se justifie pas pour conditionner la mise en oeuvre du droit de mener une vie familiale normale. En revanche, il est parfaitement normal d'exiger de l'étranger qui demande le regroupement familial qu'il se conforme aux principes fondamentaux de la République dont la méconnaissance pourrait troubler l'ordre public. Parmi ces principes figurent l'égalité, et notamment entre les hommes et les femmes, la laïcité, le refus de toute discrimination fondée sur l'origine... » (Rap. A.N. n° 3058, avril 2006, Mariani, page 148).
Le Conseil constitutionnel a considéré que cette nouvelle condition n'était pas contraire à la Constitution mais a émis une réserve d'interprétation et précisé qu'il « ressort des travaux parlementaires [...] que le législateur a entendu se référer aux principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France, pays d'accueil ». Il s'agit notamment, a-t-il indiqué dans un communiqué, de la monogamie, de l'égalité entre l'homme et la femme, du respect de l'intégrité physique des enfants et adolescents, du respect de la liberté du mariage, de l'assiduité scolaire, du respect des différences ethniques et religieuses ou encore de l'acceptation de la règle selon laquelle la France est une république laïque.
Le maire de la commune de résidence de l'étranger ou le maire de la commune où il envisage de s'établir, saisi par l'autorité administrative, peut émettre un avis sur cette condition. Il est réputé rendu à l'expiration d'un délai de 2 mois à compter de la communication du dossier par l'autorité administrative (Ceseda, art. L. 421-1 complété).
Le titre de séjour qui a été remis au conjoint d'un étranger peut faire l'objet d'un retrait ou d'un refus de renouvellement en cas de rupture de la vie commune ne résultant pas du décès de l'un des conjoints, pendant les 3 années (2 ans auparavant) suivant l'autorisation de séjourner en France au titre du regroupement familial. Si la rupture de la vie commune est antérieure à la demande de titre, l'autorité administrative refuse de l'accorder (Ceseda, art. L.431-2 modifié).
L'objectif de cette disposition est de lutter contre les détournements de procédure par des personnes qui procéderaient à des mariages de complaisance avec des étrangers en situation régulière afin d'obtenir un droit au séjour.
Le retrait ou le refus de renouvellement ne s'appliquent pas (Ceseda, art. L.431-2 modifié) :
si un ou plusieurs enfants sont nés de cette union, lorsque l'étranger est titulaire de la carte de résident et qu'il établit contribuer effectivement, depuis la naissance, à l'entretien et à l'éducation du ou des enfants ;
lorsque la communauté de vie a été rompue à l'initiative de l'étranger admis au séjour au titre du regroupement familial, en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint.
L'un des objectifs de la loi du 24 juillet 2006 est d'encourager la reprise de l'immigration de travail. Aussi lève-t-elle certaines entraves au recrutement de travailleurs étrangers.
Tout d'abord, la loi prévoit que l'étranger qui souhaite exercer une activité salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement reçoit une carte de séjour temporaire sans que lui soit opposable la situation de l'emploi. Une liste de ces métiers et zones géographiques sera établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives (Ceseda, art. L. 313-10 modifié).
La loi réécrit en outre l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers relatif à l'exercice d'une activité professionnelle. Une carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle peut être délivrée dans les cinq situations suivantes :
l'exercice d'une activité salariée. La carte porte la mention « salarié » si l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à 12 mois et « travailleur temporaire » lorsqu'elle est exercée pour une durée déterminée inférieure à 12 mois. Si la rupture du contrat de travail du fait de l'employeur intervient dans les 3 mois précédant son renouvellement, une nouvelle carte est délivrée pour une durée de un an ;
l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale. La carte porte la mention de la profession que le titulaire entend exercer ;
l'exercice d'une activité professionnelle non soumise à autorisation (auteur par exemple). L'étranger doit justifier pouvoir vivre de ses seules ressources. La carte de séjour porte la mention de l'activité que le titulaire entend exercer. Ces étrangers recevaient auparavant une carte de séjour temporaire « visiteur ». Désormais, cette dernière ne permet plus l'exercice d'une activité non soumise à autorisation (Ceseda, art. L. 313-6 modifié) ;
l'exercice d'une activité saisonnière. L'étranger doit être titulaire d'un contrat de travail saisonnier et s'engager à maintenir sa résidence habituelle hors de France. Cette carte, accordée pour une durée maximale de 3 ans renouvelable et qui porte la mention « travailleur saisonnier », lui permet d'exercer des travaux saisonniers n'excédant pas 6 mois sur 12 mois consécutifs. Elle lui donne le droit de séjourner en France pendant la ou les périodes qu'elle fixe et qui ne peuvent dépasser une durée cumulée de 6 mois par an. Les modalités permettant à l'autorité administrative de s'assurer du respect, par le titulaire de cette carte, des durées maximales autorisées de séjour en France et d'exercice d'une activité professionnelle seront fix