Recevoir la newsletter

La mission sénatoriale sur les quartiers sensibles veut « donner un nouvel élan à la politique de la ville »

Article réservé aux abonnés

Ala suite des violences urbaines de l'automne 2005, une mission d'information regroupant 28 sénateurs de tous bords a été créée afin de dresser le bilan et de tracer les perspectives d'avenir des politiques conduites envers les quartiers en difficulté depuis une quinzaine d'année. Après avoir procédé à une soixantaine d'auditions et effectué dix déplacements, la mission formule aujourd'hui 70 propositions « afin de donner un nouvel élan à la politique de la ville en France et de mettre en oeuvre un nouveau pacte de solidarité pour les quartiers ». Le sénateur (UMP) Pierre André les a réunies dans un rapport, rendu public le 6 novembre (1). On notera que ces propositions - qui touchent à différents sujets, allant de l'éducation à l'emploi, en passant par le cadre de vie, la sécurité ou la cohésion sociale - ne vont pas toutes dans le sens de la politique conduite par le gouvernement dans les banlieues.

Un objectif de 100 % de jeunes en activité

Pour les sénateurs, les actions les plus urgentes concernent les jeunes des quartiers, particulièrement touchés par la déscolarisation et le chômage. La priorité est ainsi que 100 % d'entre eux « soient occupés, à travers un emploi, une formation, un service civil ou un contrat aidé », a expliqué Pierre André. Dans cette optique, la mission juge nécessaire d'améliorer l'offre scolaire dans les quartiers, notamment en révisant la carte des zones d'éducation prioritaire, en plafonnant la taille des établissements ou encore en rémunérant de nouveaux intervenants pour encadrer les études (retraités, mères de famille, étudiants). Les représentants du Sénat plaident également pour un renforcement des liens entre l'école et les entreprises. Ce qui passe, selon eux, par le développement des programmes de parrainage, la mise en place dès le collège de « modules de sensibilisation aux exigences de la vie professionnelle (ponctualité, sociabilité, présentation, hiérarchie...) » ou encore la revalorisation des filières professionnelles et des métiers manuels.

Le rapport suggère encore qu'une aide soit versée aux jeunes diplômés des quartiers pour leur permettre de postuler à des emplois sur l'ensemble du territoire national. Elle pourrait servir lors des déplacements pour les entretiens d'embauche, pour financer un déménagement ou même pour compléter une caution locative. Elle pourrait prendre la forme d'un « compte mobilité emploi » qui serait « alimenté par l'Etat d'un montant de l'ordre de 1 000 € » et qui pourrait « être complété soit par les entreprises à travers l'adoption d'un accord interprofessionnel, soit par les collectivités locales dans le cadre de leur politique en faveur de l'emploi ».

Enrayer la ghettoïsation des quartiers

Autre nécessité, selon les sénateurs : renforcer la présence de l'Etat et des services publics dans les quartiers. Notamment en matière de sécurité. Dans cette optique, ils préconisent la réactivation de la police de proximité et suggèrent d'attirer les professionnels expérimentés - notamment les enseignants et les policiers - en majorant l'indemnité de résidence des fonctionnaires affectés dans les quartiers et en améliorant leurs perspectives de carrière. Ils plaident également pour le développement de la prévention spécialisée.

Plus globalement, de la même manière que les zones franches urbaines prévoient un régime fiscal dérogatoire pour inciter les entreprises à s'implanter dans les quartiers, un régime fiscal dérogatoire pour les personnes pourrait être envisagé afin de « favoriser un retour et un développement des classes moyennes dans ces quartiers ». Il pourrait prendre la forme d'un abattement de 20 % à 30 % appliqué sur le revenu de référence du barème de l'impôt sur le revenu pendant cinq ans. « Une telle disposition constituerait, en particulier, un signe de reconnaissance à destination de toutes les professions qui assurent des services indispensables à la vie de ces quartiers (médecins, enseignants, policiers, artisans...). »

Les sénateurs insistent aussi sur la redéfinition d'un projet urbain plus cohérent - pour « casser les ghettos » - et, en particulier, sur la nécessité de « renforcer l'accompagnement social des habitants concernés par les projets de rénovation urbaine ». Les mécanismes de garantie contre une hausse de loyer pour les personnes changeant de logement pourraient par exemple être revus : « dans certains cas, [le fonds de solidarité pour le logement] pourrait prendre en charge, sous condition de ressources, le différentiel entre le montant de l'ancien et du nouveau loyer engendré par un relogement prévu dans le cadre d'une convention de rénovation urbaine ».

Les élus déplorent encore que les associations aient à souffrir de « l'évolution erratique des crédits en faveur de la cohésion sociale » et que leurs personnels n'aient pas « un statut spécifique, leur permettant d'accéder à une véritable reconnaissance sociale ». C'est ainsi qu'ils jugent indispensable que des moyens d'une action dans la durée leur soient donnés. Ils proposent, entre autres, de développer les conventions pluriannuelles d'objectifs entre les associations et les collectivités partenaires des contrats urbains de cohésion sociale (2), déjà mises en oeuvre dans certains départements ou communes. Ils souhaitent également qu'un « véritable statut du bénévole » soit créé.

Une nouvelle gouvernance de la politique de la ville

Les sénateurs proposent enfin « une nouvelle gouvernance de la politique de la ville ». Ils souhaitent notamment confier la responsabilité des quartiers en difficulté à un ministre d'Etat compétent en matière d'aménagement du territoire, de la ville et du logement. Autre préconisation : préparer une loi quinquennale d'orientation et de programmation pour la ville afin de « sanctuariser » les moyens dévolus aux quartiers difficiles sur l'ensemble de la législature. Ils suggèrent enfin qu'une réponse spécifique puisse être apportée en Seine-Saint-Denis, par le biais d'une loi qui l'autoriserait à déroger au droit commun notamment dans les domaines de l'emploi, de l'éducation et du logement, en donnant des compétences accrues aux collectivités locales de ce département.

Notes

(1) Rapport d'information fait au nom de la mission commune d'information sur le bilan et les perspectives d'avenir des politiques conduites envers les quartiers en difficulté depuis une quinzaine d'années - Octobre 2006 - Pierre André - Disp. sur www.senat.fr ainsi que sur www.ladocumentationfrancaise.fr.

(2) Voir ASH n° 2471 du 29-09-06, p. 12.

LE SOCIAL EN TEXTES

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur