« Il est hors de question que les fraudes de quelques-uns nous pénalisent tous. C'est une question de principe, d'éthique dans un système solidaire », a martelé Xavier Bertrand, ministre de la Santé et des Solidarités, lors de l'installation, le 24 octobre, du comité national de lutte contre la fraude en matière de protection sociale, dont la composition et les missions ont été fixées par un décret du même jour (1). A titre d'exemple, la caisse nationale des allocations familiales évalue à 21,5 millions d'euros son manque à gagner, un montant à comparer aux 61 milliards d'euros de prestations versées chaque année. Placée auprès du ministre chargé de la sécurité sociale, cette nouvelle instance a pour objet d'assurer une coordination des politiques et des actions de lutte contre la fraude dans le domaine de la protection sociale.
Le comité national de lutte contre la fraude en matière de protection sociale comprend 21 membres représentant l'Etat, les organismes de sécurité sociale et de protection sociale. Bernard Cieutat - actuel président de la chambre en charge du contrôle « santé et sécurité sociale » de la Cour des comptes (2) - a été placé à sa tête.
Ce comité est notamment chargé :
de centraliser et d'analyser les cas de fraude recensés par les organismes de sécurité sociale, en particulier au travers de leurs rapports et synthèses annuelles ;
d'animer la coopération entre ces organismes pour lutter contre les fraudes et de participer aux travaux interministériels, notamment en vue de mettre en place des échanges d'informations entre l'ensemble des organismes en charge de la prévention et de la détection des fraudes ;
d'établir chaque année un rapport d'analyse du phénomène de la fraude ;
de faire toutes propositions de nature à prévoir et à détecter les cas de fraude ;
de sensibiliser l'ensemble des acteurs du système de protection sociale aux phénomènes de fraude.
Parallèlement, Xavier Bertrand a annoncé qu'il introduirait par amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 (3) un certain nombre de mesures en matière de lutte contre la fraude, qui figureront parmi les cinq objectifs prioritaires assignés au comité. Ce dernier devra tout d'abord s'attacher au contrôle de la condition de résidence, dont la définition devrait être calquée sur celle de l'administration fiscale. Ainsi, les assurés qui partent s'installer à l'étranger auront l'obligation de se signaler et de rendre leurs cartes Vitale ou verront leurs droits à la couverture maladie universelle (CMU) supprimés. Toujours s'agissant de la résidence en France, le comité devra également vérifier que ses conditions sont réunies (stabilité et régularité) pour éviter que les personnes qui partent à l'étranger reviennent en France pour de courts séjours se faire soigner. En outre, ce nouvel organe se penchera sur le contrôle des ressources des demandeurs de prestations attribuées sous conditions de ressources, telles que le revenu minimum d'insertion, la CMU ou les prestations familiales. Xavier Bertrand explique par exemple qu'en cas de disproportion marquée entre les revenus déclarés et le train de vie du demandeur, les ressources pourront être réévaluées « de manière dérogatoire » sur l'appréciation du train de vie. Concernant les travailleurs détachés à l'étranger, le comité national participera à la mise en place d'un mécanisme de contrôle des prestations servies à l'étranger placé autour d'une caisse pivot et d'une base nationale des données. Dernier objectif : le « développement de la lutte contre le travail dissimulé et l'évasion sociale ».
(1) Décret n° 2006-1296 du 23 octobre 2006, J.O. du 24-10-06.
(2) L'arrêté confirmant cette nomination doit prochainement paraître au Journal officiel .
(3) Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 est actuellement discutée au Parlement.