A la suite notamment de la mise en oeuvre par les départements de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), la caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) a prévu, dans sa convention d'objectifs et de gestion (COG) 2005-2008 conclue avec l'Etat (1) de recentrer son action sociale sur le maintien de l'autonomie et la prévention de la perte d'autonomie pour les retraités des groupes iso-ressources 5 et 6 socialement les plus fragiles, qui ne sont pas éligibles à l'APA. Mais l'application de cette nouvelle politique fait apparaître « certaines difficultés, notamment de la part des prestataires de l'aide à domicile conventionnés avec la branche [retraite] qui, pour nombre d'entre eux, ne sont actuellement en mesure de fournir que la seule prestation classique d'aide ménagère », estime l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) dans un rapport (2) présenté le 5 octobre à la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale de l'Assemblée nationale (3). Un document demandé en janvier dernier par le ministre de la Santé et des Solidarités, afin d'analyser « ces difficultés, ainsi que les conditions qui faciliteraient la réussite et l'évolution de l'action sociale de la branche retraite ». Mais aussi « les différents systèmes de gestion et d'attribution des enveloppes d'heures d'aide ménagère mis en oeuvre par les caisses régionales [...], afin de proposer des améliorations au dispositif existant dans le but de rendre plus partenariale et plus efficace cette gestion ».
La COG 2005-2008 entend rendre les prestations plus sélectives et apporter des réponses mieux adaptées et plus globales que l'aide ménagère, comme l'évaluation globale et les plans d'actions personnalisés. En conséquence, le nombre prévu des heures d'aide ménagère est passé de 21 millions en 2005 à 19,6 millions en 2006 et doit s'élever à 17,9 et 16,3 millions en 2007 et 2008. Or, selon Michel Duraffourg et Stéphane Paul, auteurs du rapport, de nombreux éléments défavorables ont empêché le bon déroulement de cette réforme, tels que la complexité du pilotage budgétaire du Fonds national pour l'action sanitaire et sociale en faveur des personnes âgées (FNASSPA) ou encore l'insuffisance d'assistants sociaux au service des objectifs de la CNAV. Autre reproche : la mise en oeuvre de la réforme paraît avoir été « insuffisamment préparée » (avec très peu d'études préalables et une absence d'ouverture sur l'extérieur de la branche vieillesse), « trop peu expliquée » (encore aujourd'hui, de nombreux interlocuteurs de la mission en ignorent le contenu) et « mise en place tardivement », la COG n'ayant été approuvée qu'en mai 2005. La diminution des heures d'aide ménagère a ainsi été reçue par une large part des intervenants comme un « événement brutal et injustifiable ». Autre conséquence de ces difficultés : la mise en suspens de la COG pour ce qui concerne l'action sociale. Les nouvelles prestations qu'elle entend promouvoir « ne décollent pas », « le plus souvent faute d'offre locale organisée pour les proposer ». D'où, au final, le maintien des niveaux initiaux des quotas régionaux d'heures d'aide ménagère, un constat qui « conduit à tenir pour irréaliste, selon le rapport, l'application de la programmation de la COG pour les années 2007 et 2008 ».
Au vu de ces éléments, l'IGAS propose de conclure un avenant à la COG qui, sans remettre en cause la philosophie de ce texte qui a inspiré le recentrage de la politique d'action sociale de la CNAV, modifierait sa programmation pluri-annuelle. Pour l'aide ménagère, le rapport estime « raisonnable l'hypothèse de 21 millions d'heures en 2007 et 20 millions en 2008 ». La CNAV devra alors faire « une projection de l'évolution du coût horaire et, surtout, des reports de crédits envisageables d'une année sur l'autre, ce qui constitue un exercice où les possibilités d'erreurs de prévision sont très grandes ». Pour les prestations innovantes, la mission note une très faible montée en charge, « faute d'offre disponible ou en raison de l'inadaptation de certaines ». Malgré tout, insistent les auteurs, il s'agit de ne « pas décourager les initiatives qui, localement, ont d'ores et déjà été prises pour diversifier l'offre de prestations » et de ne « pas contraindre la branche à prélever sur le risque [vieillesse] pour financer les évolutions souhaitables », et notamment pour équilibrer le FNASSPA. Enfin, pour préparer la prochaine convention d'objectifs et de gestion, l'IGAS suggère à la CNAV de ne « pas borner sa réflexion à la seule question du rythme qu'elle donne au recentrage décidé en 2004. L'interrogation doit porter sur sa légitimité à conduire une politique gérontologique qui lui soit propre et, en cas de réponse positive, au contenu qu'il faut viser dans un contexte marqué par le caractère extralégal de ses prestations et par le caractère limité de ses enveloppes. »
Face à ces préconisations, la CNAV considère, quant à elle, que des alternatives sont envisageables pour maintenir un volume suffisant des heures et des crédits pour l'aide ménagère à domicile en 2007 et 2008. Toutefois, elle ne peut adhérer à la remise en cause de la COG par l'IGAS et à un redéploiement massif des crédits prévus pour les évaluations globales et les plans d'actions personnalisés au profit de l'aide ménagère. Au contraire, la caisse estime devoir explorer d'autres voies, telles que le redéploiement interne des crédits au sein du budget FNASSPA - dont la contribution de la CNAV au financement du service social - ou un plus grand lissage dans le temps de la mise en oeuvre des nouvelles orientations. Sur ce dernier point, par exemple, il pourrait être donné un caractère « plus progressif à la généralisation des plans d'actions personnalisés », le recalibrage pour les deux prochaines années des crédits correspondants pouvant permettre de dégager des fonds qui seraient une des sources mobilisées pour rendre possible le « quasi-maintien » de l'enveloppe d'aide ménagère à domicile en 2007 et 2008.
(2) IGAS - « Politique de maintien à domicile des personnes âgées relevant de l'action sociale de la caisse nationale d'assurance vieillesse » - Rapport n° 2006-063 - Juillet 2006 - Disponible sur
(3) Le nouveau thème d'étude de cette mission est en effet l'« action sociale de la sécurité sociale et des collectivités territoriales ».