C'est un avis très critique sur le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance (1) qu'a rendu, le 21 septembre, la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH). Soit le même jour que l'adoption du texte en première lecture au Sénat (voir ci-dessus).
Regrettant tout d'abord de ne pas avoir été saisie et « d'avoir dû procéder une fois encore à une autosaisine » alors que « le texte concerne au premier chef les droits de l'Homme et les libertés fondamentales », la CNCDH fustige par ailleurs l'absence de cohérence globale du projet de loi, « un texte d'opportunité qui semble vouloir répondre à la crise ponctuelle des violences urbaines de novembre 2005 ». Elle s'interroge sur sa philosophie et estime que ses finalités ne sont pas véritablement affichées. Ainsi, explique-t-elle, malgré son titre, le texte « traite essentiellement de mesures de répression ou de moyens permettant de la mettre en oeuvre ». Elle juge en outre « étonnant » que le projet de loi, « notamment en raison de ses implications en matière judiciaire, n'ait pas été porté conjointement par le garde des Sceaux ».
La commission s'inquiète encore des conséquences de cette loi « fourre-tout » sur les familles les plus défavorisées, à l'égard desquelles plusieurs mesures suivent « une logique de contrôle, de suspicion ». « Ceci risque de faire échouer la lutte contre les exclusions qui nécessite écoute et confiance pour permettre à ces personnes d'accéder aux droits fondamentaux et d'exercer leurs responsabilités », ajoute la commission, qui note également « le risque d'une plus grande stigmatisation de ces familles, susceptible de contrarier les activités associatives dont elles bénéficient ».
La CNCDH s'étonne aussi que « le rôle pourtant indispensable des travailleurs sociaux ne soit pas précisé dans le nouveau dispositif », tout comme « celui des associations pourtant souvent investies de missions de service public dans le domaine de l'action sociale ». Elle demande ainsi que leur statut soit « mieux défini et garanti ». « Les travailleurs sociaux doivent [notamment] pouvoir exercer leur mission en toute indépendance et dans des conditions qui ne remettent pas en cause la confiance dont ils bénéficient de la part des personnes qu'ils assistent, confiance qui est un élément essentiel de l'efficacité de leur travail. »
La commission dénonce encore plusieurs dispositions sur la délinquance des mineurs. Elle estime par exemple « inopportunes » les nouvelles mesures de placement de mineurs d'au moins 10 ans : « la rupture d'un enfant de 10 ans avec son environnement social et affectif est-elle une réponse adaptée à sa socialisation ? » Par ailleurs, elle juge « disproportionnées et arbitraires » les durées de placement prévues et déplore que le texte fasse « l'impasse sur l'après-éloignement, le suivi et l'évaluation ».
La Commission nationale consultative des droits de l'Homme s'alarme également de l'absence d'explications ou de motivations concernant la compétence donnée aux maires en matière d'hospitalisation d'office et souligne que « cette mesure constitue, selon de nombreux psychiatres, un recul des droits de la personne fragile ou malade ».
(1) Avis disponible sur