Le projet de loi sur la prévention de la délinquance (1) est examiné actuellement en première lecture au Sénat. Il a d'ores et déjà subi de nombreuses modifications et fait l'objet de vifs échanges entre sénateurs. Près de trois mois après sa nomination, la nouvelle défenseure des enfants, Dominique Versini, a voulu participer au débat et attirer l'attention des parlementaires dans un avis sur « la nécessité que soient respectés les engagements pris par la France à l'occasion de la ratification de la Convention internationale sur les droits de l'enfant (CIDE) en juillet 1990 ». Or, s'inquiète-t-elle, trois dispositions du projet de loi apparaissent « peu compatibles avec la CIDE ».
C'est le cas, en premier lieu, de la possibilité de placer en détention provisoire, avant jugement, des mineurs âgés de 13 à 16 ans suspectés d'avoir commis des délits, dès lors qu'ils n'auraient pas observé certaines des dispositions d'un contrôle judiciaire, et plus particulièrement les conditions d'un placement dans un centre éducatif fermé. « Alors que les inconvénients et les dangers de la détention avant tout jugement ont été très régulièrement soulignés, il est préoccupant d'envisager d'accroître les possibilités de placement en détention provisoire, fût-ce pour une courte période, de mineurs âgés de 13 à 16 ans avant tout jugement sur leur culpabilité », juge ainsi l'ancienne secrétaire d'Etat chargée de la lutte contre l'exclusion et la précarité.
La nouvelle procédure de « présentation immédiate devant le juge des enfants aux fins de jugement » ne trouve pas plus grâce à ses yeux. Elle lui paraît en effet « inadaptée pour les mineurs » dans la mesure où « elle aboutirait fréquemment à des jugements qui ne prendraient pas en compte la personnalité et l'évolution récente du mineur ». Ainsi, insiste-t-elle, « il serait [...] dommageable que dans le cadre d'une présentation immédiate devant le juge des enfants, des décisions lourdes d'avenir pour le mineur soient prises sur la base d'éléments de personnalité pouvant être anciens, d'enquêtes sociales pouvant remonter jusqu'à 18 mois ou en l'absence de parents convoqués mais non présents ce jour-là ».
Enfin, Dominique Versini fustige la nouvelle procédure d'automaticité interdisant à un juge des enfants de prononcer une admonestation ou une « remise à parents » pour une seconde fois dans un délai d'un an, pour un délit de même nature. Une procédure qu'elle juge « inadaptée au fonctionnement actuel de la justice des mineurs et à la nécessité de prendre des décisions privilégiant les mesures éducatives ». « Il arrive en effet très souvent que des délits successifs commis dans un bref intervalle de temps par un mineur soient jugés séparément avec plusieurs mois d'écart », explique-t-elle. Or, « il est important de laisser à la première sanction la possibilité de jouer son rôle, quitte à pouvoir la confirmer, sans en briser l'effet par l'automatisme d'une deuxième sanction [...] plus sévère qui pourrait être inadaptée à l'évolution du mineur dans l'hypothèse où celui-ci aurait amélioré son comportement en tenant compte de la première admonestation ».
(2) Avis du 13 septembre 2006, disponible sur