A la suite de la polémique soulevée, cet été en pleine canicule, par la présence des tentes distribuées cet hiver aux sans-abri de la capitale par Médecins du monde, Catherine Vautrin, ministre déléguée à la Cohésion sociale et à la parité, a présenté le 9 août une série de mesures. Parmi elles, figure la création d'un nouveau mode d'hébergement, dit « de stabilisation ». Il s'agit de proposer aux sans-abri des structures ouvertes 24 heures sur 24, toute l'année, avec un accompagnement social renforcé. 103 places de ce type ont d'ores et déjà été créées, le 1er août, sur deux sites franciliens dans l'enceinte d'établissements de santé spécialisés et gérés par deux associations, le Coeur des Haltes et Emmaüs. Devrait s'y ajouter la transformation, d'ici à 2007, de 1 000 places d'hébergement de nuit en Ile-de-France en hébergement de stabilisation pour un coût évalué à 7 millions d'euros en année pleine. La création de cet échelon intermédiaire entre l'hébergement d'urgence et le logement social pourrait être généralisée à l'ensemble du territoire, précise la ministre, « si elle permet aux personnes sans domicile de s'engager véritablement et durablement dans un parcours d'insertion ».
Autre décision : face à la saturation des centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) - due en particulier à une insuffisance de l'offre de logement abordable à Paris et en Ile-de France -, plusieurs actions sont envisagées : dès la fin du mois, 170 personnes hébergées actuellement en CHRS, notamment celles qui ont un contrat de travail, pourraient accéder à un logement autonome. Pour ce faire, le parc de la Sonacotra et celui de l'Association française de travailleurs africains malgaches (AFTAM) ont été mobilisés et des instructions données aux préfets de la région Ile-de-France pour qu'ils réservent une partie de leur contingent. Début 2007, lorsque les premières résidences hôtelières à vocation sociale (RHVS) créées par la loi portant engagement national pour le logement (ENL) (1) seront opérationnelles, elles seront en priorité attribuées aux personnes hébergées en CHRS. Par ailleurs, la ministre mise sur le développement des maisons-relais pour offrir des solutions d'hébergement adaptées aux personnes sans domicile fixe âgées ou handicapées et sur la poursuite du plan triennal pour l'hébergement d'urgence mis en place en avril dernier lors de la conférence nationale de prévention et de lutte contre l'exclusion (2).
Ces annonces, jugées toutefois insuffisantes par les associations (voir ce numéro, page 41), s'inspirent du rapport d'Agnès de Fleurieu, présidente de l'Observatoire de la pauvreté et de l'exclusion sociale, et du docteur Laurent Chambaud, membre de l'inspection générale des affaires sociales (3), chargés par la ministre de recenser les dispositifs susceptibles d'être mobilisés pour répondre notamment au problème posé par les quelque 500 tentes de sans-abri dénombrées à Paris. Déplorant le manque d'informations sur le nombre de sans-domicile fixe à Paris, les estimations faisant état d'une « hypothèse basse » de 2 000 personnes chaque nuit et d'une « hypothèse haute » de 5 000 personnes, les auteurs suggèrent au préalable d'affiner les connaissances quantitatives et qualitatives sur les personnes sans abri. Par ailleurs, ils estiment aussi qu'une palette de solutions doit être proposée pour tenir compte de l'hétérogénéité des parcours. « Il existe des situations qui, à l'évidence, ne conduiront pas vers un parcours de pleine autonomie ou de réinsertion vers l'emploi. Ainsi en est-il des personnes vieillissantes que l'on doit pouvoir orienter vers des dispositifs spécifiques pour personnes âgées en fonction de leur niveau de dépendance, de celles porteuses d'un handicap important, qu'il soit physique ou mental, qui doivent être traitées dans le cadre des nouvelles Maisons du handicap. » Par ailleurs, le rapport propose de développer des unités spécifiques permettant d'accueillir à moyen ou à long terme des personnes présentant des pathologies psychiatriques avérées, en s'assurant que des ressources spécialisées soient affectées à ces structures.
« Il s'agira surtout, notent les auteurs, d'amorcer un travail afin de faire émerger des offres correspondant aux besoins des différentes populations en grande précarité et permettant au maximum de ces personnes de rejoindre des dispositifs de droit commun, que ce soit dans un projet de réinsertion ou dans la prise en compte du handicap qu'il soit physique, mental ou social. »
(3) Rapport disponible sur