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TRAVAIL SOCIAL INTERVENTION SOCIALE

Accompagner le projet des parents en éducation spécialisée

« Partager l'éducation d'un enfant dont le développement s'avère problématique - quelle qu'en soit la raison - est source de conflictualité », souligne Bertrand Dubreuil, sociologue et directeur de l'organisme de formation Singuliers-Pluriel. Pour autant, il n'est pas envisageable de développer une démarche d'éducation spécialisée qui est, par nature, de l'ordre de la suppléance, sans s'associer au projet de vie que les parents ont pour leur enfant. Cela suppose de parvenir à soutenir efficacement les intéressés dans leurs responsabilités éducatives sans usurper leur place. Tel est le fil conducteur de cet ouvrage qui, se gardant de verser dans les généralités, décrit le cheminement de pensée d'équipes que l'auteur a amenées à s'interroger sur leurs pratiques. Pas de réponse standard, donc, mais une variété de situations témoignant que le travail avec les parents est à la fois fonction des difficultés de l'enfant et de la part qu'eux-mêmes peuvent y avoir. Ainsi, avec les parents dont les enfants sont hébergés en maison d'accueil à caractère social (MECS) par mesure de protection, il est nécessaire de commencer par analyser les motifs de ce placement, alors que la parentalité des familles ayant un enfant handicapé n'est pas la cause de leurs besoins d'aide spécialisée. « Vécu sur le mode injonctif de la bonne pratique comme conduite adéquate en toute situation, le mot d'ordre du travail avec les parents pourrait devenir aussi doctrinaire que l'indifférence ou le mépris dans lesquels on les tient parfois », fait observer l'auteur. Dans chaque cas, il s'agit de chercher à comprendre les « bonnes raisons » d'agir des parents et le sens que les actes des professionnels peut prendre pour eux. Pour ce faire, les intervenants doivent se dégager de la « vulgate professionnelle » chargée d'implicites plus ou moins partagés sur les conduites parentales surprotectrices, fusionnelles ou rejetantes, sur le laxisme ou la rigidité éducative des familles, leur culpabilité d'avoir eu un enfant handicapé... De telles attitudes existent, et il ne s'agit pas de les ignorer, explique Bertrand Dubreuil. « Mais elles ne justifient pas de réduire les parents à des stéréotypes généralisants qui invalident d'emblée leur point de vue. » Autrement dit, s'il y a bien, d'un côté, des parents en souffrance et, de l'autre, des professionnels sollicités pour apporter un mieux - soit une configuration qui est, en elle-même, génératrice de clivage -, il faut faire un effort de raison et d'analyse pour échapper à ces inscriptions respectives et développer un véritable processus de co-éducation.

Accompagner le projet des parents en éducation spécialisée - Bertrand Dubreuil - Ed. Dunod - 21 € .

PERSONNES HANDICAPÉES

La fratrie à l'épreuve du handicap

Dans une fratrie dont l'un des membres est malade ou handicapé, celui-ci, protégé, voire surprotégé, a parfois du mal à avoir sa place d'enfant, cependant que le libre jeu des interactions entre frères et soeurs peut également se trouver parasité par une intervention excessive des parents, expliquent Régine Scelles, professeur en psychopathologie, et Anne Aubert-Godard, psychanalyste. Deux adultes témoignent de cette expérience particulière qu'ils ont vécue pendant l'enfance, de part et d'autre du handicap. Olivier Bergis, âgé de 3 ans à la naissance de Thibault atteint d'un handicap mental et moteur, évoque la culpabilité ressentie par rapport à son cadet moins bien loti que lui, celle aussi qu'il éprouvait à se mettre en colère contre lui, et la honte de la différence de son frère, voire celle d'être lui-même normal. Chez Jean-Marc Bardeau-Garneret, la culpabilité se développera à l'âge adulte, quand il prendra conscience de la part d'affection maternelle dont Sylvie, sa cadette de deux ans et demi, a été privée. Souffrant d'une infirmité physique et de difficultés psychologiques, Jean-Marc Bardeau-Garneret confie avoir été un frère d'autant plus jaloux qu'il craignait de voir rompue sa relation fusionnelle avec leur mère. « Telle sera la source de notre souffrance commune à Sylvie et à moi », note-t-il. A l'instar de l'écrivain Jorge Semprun qu'il cite, Bernard Golse, pédopsychiatre, estime que « tous les chagrins sont supportables si on en fait un récit ». D'où la nécessité, quels que soient les empêchements qu'il rencontre pour ce faire, d'aider l'enfant handicapé à « se dire », souligne Bernard Golse. Symétriquement, il ne faut pas mésestimer l'impact de ce « double étrange » sur le devenir psychique de ses frères et soeurs, confrontés à des enjeux de rivalité très compliqués, aussi bien avec lui qu'avec leurs parents, développe Simone Korff-Sausse, psychanalyste. D'où l'intérêt des groupes d'expression pour les fratries d'enfants handicapés, comme ceux qui sont proposés par le centre d'action médico-sociale précoce de Créteil ou le service d'éducation spéciale et de soins à domicile Les Marmots à Besançon. Cependant, dans cette configuration familiale aussi, la relation fraternelle est une relation qui se co-construit entre enfants. C'est pourquoi parents et professionnels doivent également veiller à ne pas entraver son établissement.

La fratrie à l'épreuve du handicap - Ouvrage collectif dirigé par Claudie Bert - Ed. érès - 25 € .

SOCIÉTÉ

La famille change-t-elle ?

Evidemment, la question que pose le titre est d'ordre rhétorique, comme le montre, d'entrée de jeu, le sociologue Claude Martin rendant compte des principales transformations intervenues dans la sphère privée depuis 60 ans. Pas question, pour autant, de regretter le passé, ni de considérer les nouvelles formes de vie familiale comme d'indéniables progrès. Le psychologue Daniel Coum, responsable de l'association Parentel, ne se prive d'ailleurs pas de discréditer les analyses qu'a développées dans différents ouvrages François de Singly, qui salue l'avènement d'une famille démocratique - même si ce sociologue ne semble pas pour autant prôner la confusion des rôles et des générations. Sur un mode plus constructif, plusieurs des contributions réunies proposent quelques pistes de réflexion et d'action, destinées notamment aux professionnels de l'enfance. Ces derniers doivent avant tout remiser au vestiaire leur « terrorisme » de spécialistes qui, après avoir inventé le bébé puis le parent compétents, les auscultent désormais régulièrement pour détecter leurs éventuelles inaptitudes, affirme la psychanalyste Sylviane Giampino. Soutenir les parents, explique-t-elle, c'est d'abord éviter de les « abîmer » en les confrontant à des modèles idéaux de fonctionnement familial, car « jamais l'autre ne peut répondre à une attente idéalisée ; par définition, il est manquant, défaillant, mauvais ». Il s'agit donc de travailler avec les parents tels qu'ils sont, et faire aussi son deuil, comme professionnel, de « l'illusion de la maîtrise, par la connaissance, d'un mieux-faire avec les enfants ». En outre, l'accompagnement à la parentalité n'est pas l'affaire des seuls spécialistes, insiste Sylviane Giampino, qui appelle à « faire village » autour des enfants et des familles. L'anthropologue Marie Maïlat en est également convaincue : « ce n'est plus possible d'acculer les parents tout seuls à l'injonction d'assumer leur adolescent sans faire appel aux autres adultes ». Aucun n'est extérieur à la société et tous, à leurs différentes places, doivent en afficher les repères et les valeurs pour les rendre lisibles tant aux enfants ou adolescents qu'aux parents. Dans la grande majorité des cas, ces derniers ne sont ni irresponsables, ni démissionnaires, mais souvent très démunis, comme beaucoup d'adultes, devant un certain nombre de comportements, soulignent le psychiatre Patrice Huerre et le sociologue Claude Martin. Aussi, affirme ce dernier, ferait-on fausse route en se défaussant sur les seuls parents de l'incapacité collective à faire société, qui est celle d'une génération d'adultes chargée de préparer le chemin de la suivante.

La famille change-t-elle ? - Sous la direction de Daniel Coum - Ed. érès - 15 € .

À LIRE AUSSI

Savoir évaluer en action sociale et médico-sociale

Désormais incontournable, l'évaluation a déjà suscité bon nombre de publications. Francis Alföldi, consultant en méthodologie d'évaluation, propose, lui, une réflexion sur l'évaluation de l'évaluation. Qu'il s'agisse d'apprécier la qualité des outils d'auto-évaluation conçus en interne ou livrés, clés en mains, par des prestataires spécialisés, ou bien de jauger la pertinence des audits ou évaluations externes dont les établissements ou services font l'objet : le « programme instrumental d'évaluation de la compétence évaluative », présenté par l'auteur, doit permettre aux responsables d'évaluer la valeur des méthodes d'évaluation que leurs institutions développent ou qui leur sont appliquées.

Savoir évaluer en action sociale et médico-sociale - Francis Alföldi - Ed. Dunod - 26 € .

Le travail social sert-il la discrimination ?

Révoltés par la montée des politiques sécuritaires et l'absence de moyens pour faire face aux besoins des publics qu'ils ont mission d'accompagner, des professionnels des secteurs social, médico-social, sanitaire et scolaire, ont créé l'association Némésis. A l'instar de la déesse de la juste colère, l'indignation qui réunit les auteurs (anonymes) de ce vibrant livre blanc est fondée : comment, en effet, se résigner à la mise en oeuvre de pratiques d'exclusion, aussi bien occultées soient-elles par de rassurants discours sur les droits des usagers - à l'intégration scolaire, au logement, à la citoyenneté, à l'insertion... - qui s'avèrent quotidiennement bafoués ? Rompant le silence pour faire entendre la voix de ceux dont la parole porte peu, les membres de Némésis espèrent bien également, grâce à cet opuscule, inciter d'autres travailleurs sociaux à jouer leur rôle de contre-pouvoir. Et à le faire savoir.

Le travail social sert-il la discrimination ? - Association Némésis - Ed. L'Harmattan - 11 € .

L'enquête sociale dans le cadre judiciaire

A partir de l'étude de 166 enquêtes sociales effectuées dans le Nord-Pas-de-Calais, en 2001 par des travailleurs sociaux du secteur public et associatif de la protection judiciaire de la jeunesse, Armelle Tabary expose la méthodologie de cet outil d'analyse des situations familiales.

L'enquête sociale dans le cadre judiciaire. De la saisine par le juge au rapport écrit du travailleur social - Armelle Tabary - Ed. L'Harmattan - 17,50 € .

- ACTES DE COLLOQUES -

L'accès aux droits : un vecteur de l'insertion pour les jeunes

Face aux difficultés sociales, familiales et scolaires de certains jeunes, auxquelles s'ajoutent parfois des discriminations, la mission régionale d'appui droit et ville et le Réseau national pour l'accès aux droits des enfants et des jeunes ont voulu analyser les différentes initiatives qui, en Ile-de-France, ont été mises en place pour les 16-25 ans en difficulté afin de favoriser leur prise de conscience en tant que sujets de droit, leur connaissance de leurs droits et obligations et leur faculté à être « en capacité d'agir ».

Mission régionale d'appui droit et ville Ile-de-France : 129, rue de l'Université - 75007 Paris - Tél. 01 45 51 80 04 - Email : mission-droit-ville.sadjpv@justice.gouv.fr.

Les états généraux du polyhandicap

Lors d'une journée sur le polyhandicap, le 17 novembre 2005, présidée par Jean-François Chossy, rapporteur à l'Assemblée nationale de la loi du 11 février 2005, les intervenants réunis par le Groupe polyhandicap France sont revenus sur des questions laissées en suspens par la réforme : quelle définition « opérationnelle » pour le polyhandicap ? Comment répondre au déficit criant de places sans évaluation des besoins ? L'approche éthique de la personne polyhandicapée a par ailleurs fait l'objet d'une intervention d'Emmanuel Hirsch, directeur de l'espace éthique/ AP-HP et du département de recherche en éthique à l'université Paris-Sud XI.

Groupe polyhandicap France - 30, rue de Pony - 75017 Paris - Tél. 0143 80 95 25 - 22 € (port compris).

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