Le Sénat a adopté le 11 mai, en première lecture, une proposition de loi du sénateur (UDF) Nicolas About, visant à accorder une majoration de pension de retraite aux fonctionnaires handicapés.
Pour mémoire, la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances des personnes handicapées a étendu aux fonctionnaires handicapés le dispositif de retraite anticipée mis en place pour les salariés du régime général lourdement handicapés (taux d'incapacité d'au moins 80 %) par la loi réformant les retraites du 21 août 2003 (1). Elle a également introduit un principe général de majoration de pension servie en cas de départ anticipé à la retraite des personnes handicapées, avec toutefois des modalités de mise en œuvre différentes entre secteur public et secteur privé pour tenir compte des spécificités de chacun des régimes.
Pour les salariés du régime général, un décret du 30 décembre 2005 est venu fixer les règles de calcul de cette majoration (2).Mais pour les fonctionnaires handicapés, le décret qui devait permettre l'entrée en vigueur du dispositif prévu n'est jamais paru, « le gouvernement se refusant, selon Nicolas About, à publier un [texte] qui aurait en réalité pour conséquence une rupture importante d'égalité, d'une part entre personnes handicapées employées dans la fonction publique et dans le secteur privé, d'autre part entre fonctionnaires handicapés eux-mêmes selon leur âge de départ en retraite ». La loi du 11 février 2005 pose en effet le principe d'une retraite anticipée à 55 ans pour les fonctionnaires lourdement handicapés et précise que leur pension est calculée sur la base du taux de remplacement maximum prévu par le code des pensions civiles et militaires de retraite, soit 75 % (3), et ce quand bien même ceux-ci ne totaliseraient pas le nombre de trimestres cotisés nécessaire pour obtenir, selon les règles de droit commun, le bénéfice d'un tel taux. Or, explique Nicolas About, également rapporteur de la proposition de loi, « ce mécanisme se révèle finalement être une source d'iniquité et d'incohérence dans la mesure où la majoration de pension est identique, quel que soit l'âge de départ en retraite anticipée » et où « le bénéfice de cette majoration prend fin brutalement à 60 ans ».Ainsi, par exemple, un fonctionnaire handicapé qui disposerait de 80 trimestres validés à 59 ans pourrait partir en retraite anticipée avec une pension automatiquement égale à 75 % de son dernier traitement ; paradoxalement, s'il attend d'avoir 60 ans, il ne percevrait plus qu'une pension calculée dans les conditions de droit commun, c'est-à-dire au prorata du nombre de trimestres effectivement cotisés, et donc égale à 42 % seulement de son dernier traitement.
« C'est pour remédier à ces malfaçons » que la proposition de loi prévoit qu'une majoration de pension est accordée aux fonctionnaires handicapés bénéficiant d'une retraite anticipée dans des conditions qui seront déterminées par décret (4).Ce décret, précise Nicolas About, « devrait permettre d' aboutir à un mécanisme similaire à celui des salariés du secteur privé dans son esprit, mais compatible avec les règles spécifiques du régime de la fonction publique : la majoration sera ainsi d'autant plus importante que le fonctionnaire handicapé aura cotisé longtemps et elle ne s'annulera plus au-delà de l'âge de 60 ans comme ce serait le cas si on appliquait les dispositions » prévues par la loi du 11 février 2005 .
(1) Voir ASH n° 2423 du 30-09-05.
(2) Voir ASH n° 2438 du 13-01-06.
(3) Dans le secteur privé, le décret du 30 décembre 2005 a mis en place un mécanisme qui prévoit que la majoration est plus ou moins importante en fonction du nombre de trimestres cotisés alors que la personne handicapée était atteinte d'un taux d'incapacité de 80 % minimum.
(4) Une mesure qui avait déjà été adoptée dans le cadre de la loi pour l'égalité salariale entre les femmes et les hommes du 23 mars 2006, mais que le Conseil constitutionnel avait censurée pour des raisons de forme - Voir ASH n° 2448 du 24-03-06.