« Derrière les apparences d'un reclassement purement technique et de bon sens », la réforme des unités de soins de longue durée (USLD) ne va-t-elle pas aboutir à « une nette régression de la qualité de l'accompagnement » des personnes âgées fragilisées ? Telle est du moins la crainte relayée par l'Association des directeurs d'établissements d'hébergement pour personnes âgées (Adehpa) (1), qui a demandé, le 4 mai, la « suspension » de la réforme dans l'attente d'une « réelle réflexion sur les financements à dégager pour combler le retard français » en la matière.
Le gouvernement voulait, on s'en souvient, faire passer toutes les USLD du secteur sanitaire au secteur médico-social, en les transformant en établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Cette réforme figurait dans le projet d'ordonnance examiné en 2005. Elle a finalement été écartée au profit d'une étude plus fine de la situation de chaque structure (2), à partir d'une « coupe » réalisée avec l'outil Pathos, sous l'égide d'une mission pilotée par Michel Thierry, inspecteur général des affaires sociales. Le but est désormais de faire la part entre les établissements appelés à rester dans le secteur sanitaire, parce qu'accueillant des patients réclamant des soins techniques importants et constants, et ceux qui seront transformés en EHPAD. Mais nombre de professionnels redoutent que ces derniers voient leurs effectifs soignants ramenés au niveau, nettement plus bas, de ceux alloués aux maisons de retraite médicalisées. La réforme va conduire « à un accroissement important du handicap moyen des personnes vivant en maisons de retraite » (3), note ainsi l'Adehpa, alors que les moyens qui leur sont alloués sont « clairement sous-évalués ».
D'autres protestations s'élèvent contre la « disparition massive » des lits de soins de longue durée. C'est le cas de médecins exerçant en USLD en train de se rassembler dans une association, « SOS longue durée » (4). Ils refusent de communiquer la coupe Pathos de leur établissement, ce qui reviendrait pour eux à se « faire hara-kiri » tant que ne seront pas « communiqués les moyens qui seront alloués aux différentes catégories de malades ». C'est aussi le cas d'élus et de professionnels d'Ile-de-France, qui ont signé une pétition sur le sujet.
Même la Fédération hospitalière de France (FHF) (5), qui ne conteste pas a priori le bien-fondé de la réforme, demande des garanties. Dans une lettre adressée le 10 mars dernier à Jean Castex, directeur de l'hospitalisation et de l'organisation des soins, elle s'inquiète des répercussions que le reclassement des établissements risque d'avoir pour les résidents. Elle demande que soit établi « un principe de neutralité financière » pour l'intéressé et sa famille. « A défaut de pouvoir satisfaire totalement à cette condition », ajoute-t-elle, l'augmentation de la facture acquittée doit « comporter une contrepartie objective en termes d'amélioration qualitative ».
Par ailleurs, la fédération rappelle son souhait de conserver ou d'établir un « maillage large » du territoire, qui permette à chaque famille de voir son parent accueilli en USLD à une heure maximum de trajet aller et retour. Elle insiste également pour que ces unités restent affectées aux seuls soins de longue durée et non à l'ensemble des patients de plus de 60 ans, qui, du seul fait de leur âge, seraient ainsi tenus d'acquitter le tarif hébergement au lieu du seul forfait hospitalier.
(1) Adehpa : 3, impasse de l'Abbaye - 94100 Saint-Maur - Tél.01 55 12 17 24.
(2) Voir ASH n° 2426 du 21-10-05.
(3) Les USLD accueillent actuellement des personnes nettement plus dépendantes que les autres établissements - Voir l'étude de la DREES, ci-dessous.
(4) Ils font signer une pétition sur
(5) FHF : 33, avenue d'Italie - 75013 Paris - Tél. 01 44 06 84 44.