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Dérives sectaires : la Miviludes cible sa vigilance sur la protection des mineurs, les pratiques de soins et l'aide humanitaire d'urgence

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La nécessité de protéger les mineurs de l'emprise des sectes, la présence de ces dernières dans l'aide humanitaire d'urgence et l'engouement pour les « alter-médecines » sont autant de domaines « particulièrement préoccupants ces derniers temps » : tel est le constat dressé par la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) dans son rapport d'activité 2005 rendu public le 26 avril (1).

En 2005, la protection des mineurs face à l'emprise sectaire - qui peut s'exercer sur eux soit par l'intermédiaire de parents membres d'organisations déviantes, soit directement - a fait l'objet d'une surveillance accrue. Ce qui frappe, en premier lieu, indique Jean-Michel Roulet, président de la mission, c'est « l'intense souffrance de ces jeunes enfants soumis à des maltraitances affectives, physiques ou psychologiques, ou à des ruptures familiales dans des contextes difficiles ». L'enfant peut même être un « instrument utilisé par le groupe contre ses parents », ajoute-t-il. Une souffrance certainement accentuée par l'enfermement et l'isolement dans lesquels ils vivent. Même « l'école est interne ou faite par correspondance » - une brèche pour ces organisations (2) - quand la scolarisation n'est pas complètement interrompue. La cellule de prévention du phénomène sectaire du ministère de l'Education nationale a été très active, en particulier dans la formation des cadres administratifs de ce ministère. Des contrôles ont été effectués dans les établissements hors contrat et pour les enfants bénéficiant d'une instruction à domicile. « Il reste cependant un certain nombre de problèmes », avoue l'administration. La Miviludes rappelle également la dangerosité de l'utilisation d'Internet sans suivi parental (3) et incite le Parlement à débattre de ce problème, s'il envisageait, « à brève échéance », une révision de la loi du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse. Plus généralement, elle propose de réfléchir à l'instauration d'un « correspondant secte » au sein des directions régionales de la protection judiciaire de la jeunesse, en lien avec celui des cours d'appel.

Autre sujet d'inquiétude : les risques induits par les pratiques de soins et de guérison des groupes à caractère sectaire, issus de l'attirance grandissante du public pour les thérapies alternatives et les médecines douces. « Ce succès génère des risques divers, depuis l'escroquerie pure et simple jusqu'à la dérive thérapeutique, voire sectaire au sens des critères retenus par les pouvoirs publics », explique le rapport. Si le phénomène n'est pas nouveau, son évolution est « préoccupante » : en 2001, la police nationale dénombrait quelque 80 méthodes de thérapies alternatives, contre plus de 200 en 2005, dont certaines doivent, selon elle, faire l'objet d'une vigilance des pouvoirs publics. Mais le nombre réduit de plaintes rend difficile l'appréciation de l'étendue des dangers de ces pratiques sur un plan criminel. « A la frontière de l'escroquerie et du charlatanisme, il n'est pas toujours facile de leur trouver une traduction juridique et l'autorité judiciaire se trouve désarmée. » L'apparition de nouvelles associations de défense des victimes démontre la nécessité de lieux d'écoute et d'aide. La mission constate également que l'infiltration des professions médicales et paramédicales est une autre technique d'expansion pour ces organismes sectaires.

L'aide humanitaire d'urgence est aussi devenue depuis peu un des bastions des mouvements sectaires. « En France, même si les cas recensés ne sont pas légion, estime la Miviludes , il est indispensable de rappeler l'existence d'un risque sectaire potentiel dans ce domaine. » En effet, la mission a été alertée de leur présence dans les banlieues à la suite des violences urbaines de l'automne dernier, la phase de séduction passant d'abord par une aide matérielle et psychologique.

La mission revient par ailleurs sur le sort des propositions qu'elle a émises dans son rapport 2004 (4)  : si certaines se sont révélées « non viables à l'usage ou prématurées, la grande majorité [d'entre elles] ont été mises en œuvre », constate-t-elle. Elle s'est notamment attachée à développer et à pérenniser les réunions des cellules de vigilance préfectorales et se réjouit de la présence « quasiment systématique » d'un membre de la mission dans ces instances. Aussi s'emploiera-t-elle en 2006, en relation avec le cabinet du Premier ministre, à « poursuivre la mise en œuvre d'un schéma cohérent d'intervention des pouvoirs publics , à développer le recueil et l'analyse de renseignements dans un contexte qui requiert de plus en plus de technicité et à instaurer dans chacun des départements des modes d'action adaptés à des formes d'expression du risque sectaire diversifiées et innovantes ». Enfin, concernant l'accueil à domicile des personnes vulnérables (enfants ou adultes dépendants) par des assistants agréés, un projet d'instruction du ministère de la Santé et des Solidarités à l'attention des conseils généraux est en cours d'élaboration.

F.T.

Notes

(1)  Rapport disponible sur www.miviludes.gouv.fr.

(2)  Le contrôle des cours par correspondance est impossible. Il n'y a donc aucune garantie en dehors de ceux proposés par le Centre national d'enseignement à distance, ni aucun agrément.

(3)  A ce propos, Philippe Bas, ministre délégué à la famille, a présenté le 26 avril, avec les fournisseurs d'accès à Internet, des logiciels de contrôle parental - devant être proposés aux abonnés gratuitement - ainsi que la campagne d'information grand public lancée à partir du 15 mai qui accompagnera leur diffusion. Un engagement qui, pour mémoire, avait été pris dans le cadre de la conférence de la famille de 2005 - Voir ASH n° 2423 du 30-09-05.

(4)  Voir ASH n° 2400 du 25-03-05.

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