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LA LOI POUR L'ÉGALITÉ DES CHANCES

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Insertion professionnelle des jeunes, lutte contre les discriminations, « responsabilisation » des parents, création d'une nouvelle agence pour la cohésion sociale... la loi pour l'égalité des chances brasse large et constitue la traduction législative des engagements pris par le Premier ministre en novembre dernier au lendemain desémeutes dans les banlieues.

Le contrat de responsabilité parentale - L'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances

(Loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 et décision du Conseil constitutionnel n° 2006-535 DC du 30 mars 2006, J.O. du 2-04-06)

Texte emblématique des réponses du gouvernement aux violences urbaines qui ont secoué les banlieues àl'automne dernier, la loi pour l'égalité des chances aura fait couler beaucoup d'encre. Les débats se sont cristallisés essentiellement autour de la question de l'emploi et en particulier de la création du contrat première embauche (CPE). Un dispositif validé par le Conseil constitutionnel mais, de fait, mort-né puisque finalement« remplacé », sous la pression de la rue, par « des mesures en faveur de l'insertion professionnelle des jeunes les plus en difficulté » (voir ce numéro).

Au-delà de cette disposition, la loi comprendégalement des mesures en faveur du développementéconomique des quartiers en difficulté, de la lutte contre les discriminations ainsi que pour l'éducation et l'emploi des jeunes, avec l'institution de l'apprentissage junior ou encore l'encadrement juridique des stages. Elle met en place, par ailleurs, un dispositif inédit pour répondre aux« carences de l'autorité parentale », le contrat de responsabilité parentale. Elle renforceégalement les pouvoirs des maires pour lutter contre les incivilités et instaure un service civil volontaire pour les jeunes de 16 à 25 ans. Enfin, elle crée une« Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances » (Ancsec).

A noter : pour mémoire, deux dispositions de la loi, relatives au calcul des effectifs de l'entreprise en cas de recours à la sous-traitance et à l'assiette de calcul des exonérations ou réductions de cotisations de sécurité sociale, ont été censurées par le Conseil constitutionnel, au motif qu'elles étaient issues« d'amendements dépourvus de tout lien avec le projet de loi ».

I - LE CONTRAT DE RESPONSABILITÉ PARENTALE

La loi pour l'égalité des chances place entre les mains du président du conseil général un nouvel outil censé apporter une aide aux parents qui éprouvent de graves difficultés dans l'exercice de leurs devoirséducatifs : le contrat de responsabilité parentale. « Les enseignants ne peuvent faire face seuls aux situations scolaires les plus difficiles », expliquait le Premier ministre, Dominique de Villepin, au lendemain des violences urbaines de l'automne dernier. « Les parents ont aussi leur rôle à jouer. » Avec ce nouveau contrat, dans les cas d'absentéisme scolaire, mais aussi dans « toutes les situations où l'enfant est en difficulté en raison d'une défaillance ou d'une insuffisance manifeste de l'autoritéparentale », les parents se verront ainsi rappeler leurs droits et devoirs au regard de la loi et proposer un soutien et un accompagnement social. Ceux qui refusent de s'engager dans cette démarche sans motif légitime ou qui ne respectent pas leurs engagements pourront être sanctionnés, notamment par une suspension de certaines prestations familiales.

Dans sa décision rendue le 30 mars, le Conseil constitutionnel n'a rien trouvé à redire au dispositif. Les parlementaires qui l'avaient saisi estimaient notamment que les droits de la défense n'étaient pas respectés en cas de suspension des prestations familiales décidée par le président du conseil général. Les neuf sages ontécarté le grief, soulignant que, en vertu de la loi du 11 juillet 1979 et de celle du 12 avril 2000 - toutes deux relatives aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration-, la décision n'interviendra en tout état de cause qu'après que les parents ou le représentant légal du mineur auront été mis à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, àleur demande, des observations orales, en se faisant assister par un conseil ou représenter par un mandataire de leur choix.

A noter : la loi prévoit le versement par l'Etat d'une compensation financière aux départements mettant en œuvre le contrat de responsabilité parentale. Les modalités de cette compensation devront être fixées par une loi de finances (art. 48 III de la loi).

A - La définition du contrat (art. 48 de la loi)

1 - UN CONTRAT POUR RÉPONDREÀ UNE SITUATION DONNÉE

Quels faits peuvent amener un président de conseil général à proposer à une famille un contrat de responsabilité parentale ? La loi vise différentes situations (code de l'action sociale et des familles [CASF], art. L. 222-4-1 nouveau)  :

 l'absentéisme scolaire  ;

 le « trouble porté au fonctionnement d'un établissement scolaire »  ;

  « toute autre difficulté liée à une carence de l'autoritéparentale ».

Selon le député (UMP) Laurent Hénart, rapporteur de la loi, c'est intentionnellement que le législateur a utilisé cette dernière expression, assez imprécise. « En effet, il n'existe pas d'outil adaptéd'accompagnement social des familles pour répondre aux problèmes posés par le comportement de certains adolescents en voie de marginalisation mais qui n'ont pas commis d'actes délictueux caractérisés », explique-t-il. « Le contrat de responsabilitéparentale correspond en quelque sorte à une voie médiane entre le dispositif existant de sanctions pour manquement àl'obligation scolaire [...] et des dispositifs beaucoup plus contraignants qui s'imposent aux familles, après décision du juge des enfants, et qui relèvent des actionséducatives en milieu ouvert » (Rap. A.N. n°2825, février 2006, Hénart).

Le ministre délégué à la famille, Philippe Bas, indiquait pour sa part le 10 janvier, qu'il retenait au nombre des « autres difficultés » liéesà une carence parentale « la déambulation nocturne des tout-petits ».

A noter : l'imprécision des termes utilisésétait un autre des griefs portés devant le Conseil constitutionnel par l'opposition contre les dispositions relatives au contrat de responsabilité parentale. Mais les neuf sages ont jugé que les faits susceptibles de justifier la suspension des prestations familiales visées par la loi « sont définis en termes suffisamment clairs et précis au regard des obligations qui pèsent sur les parents ».« En particulier, la notion de "carence parentale" fait référence à l'article 371-1 du code civil. » Lequel, pour mémoire, dispose notamment que« l'autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant » et qu'elle « appartient aux père et mère jusqu'à la majorité ou l'émancipation de l'enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne ».

2 - LA FINALITÉ DU CONTRAT

Avec le nouveau contrat, il s'agit d'une part - selon la formule consacrée par le gouvernement - de « responsabiliser les parents », en leur rappelant leurs obligations en tant que titulaires de l'autorité parentale. Mais aussi, d'autre part, de les aider à faire face à leurs difficultéséducatives. La loi indique simplement, à cet égard, que le contrat « comporte toute mesure d'aide et d'action sociales de nature à remédier à la situation  » (CASF, art. L. 222-4-1 nouveau). Sans donner plus de précisions, laissant le soin à un décret de fixer le contenu et la durée du contrat.

Le ministre délégué à la famille, Philippe Bas, a indiqué le 10 janvier que ce contrat impliquerait un « échange » : les parents devront s'engager à « participer à des groupes de parentalité » et à « reprendre en main leurs enfants »  ; en contrepartie, « ils recevront une aide des services publics ». « Le suivi proposé aux parents pourra s'appuyer sur les réseaux d'écoute et d'accompagnement à la parentalité, sur les dispositifs de réussite éducative ou sur toute autre mesure d'aide sociale et de protection de l'enfance », a-t-il ajouté le 5 mars dans un communiqué.

Le rapporteur de la loi à l'Assemblée nationale explique, pour sa part, que « l'objectif recherché par le gouvernement est de permettre aux parents de définir avec les travailleurs sociaux du conseil général un suivi social de la famille et du mineur pour arriver à terme à une réinsertion scolaire et sociale ». « Il ne devrait donc pas y avoir de "contrat type" de responsabilité parentale mais la mise au point d'un accompagnement social adapté aux difficultés spécifiques de chaque famille » (Rap. A.N. n° 2825, février 2006, Hénart).

3 - LE LANCEMENT DE LA PROCÉDURE

Qui trouve-t-on à l'origine de la procédure ? La loi prévoit que le président du conseil général peut proposer un contrat de responsabilité de sa propre initiative. Mais il pourraégalement être saisi par (CASF, art. L. 222-4-1 nouveau)  :

 l'inspecteur d'académie  ;

 le chef d'établissement d'enseignement  ;

 le maire de la commune de résidence du mineur ;

 le directeur de la caisse d'allocations familiales  ;

 le préfet.

Un décret fixera les modalités selon lesquelles il est procédé à la saisine du président du conseil général. Il déterminera également les conditions dans lesquelles les autorités de saisine sont informées par ce dernier de la conclusion d'un contrat et de sa mise en œuvre.

A noter : l'inspecteur d'académie dispose actuellement, entre autres, du pouvoir de saisir le procureur de la République des manquements au respect de l'assiduitéscolaire. Dorénavant, s'il a demandé au président du conseil général de mettre en place un contrat de responsabilité parentale, il ne pourra plus saisir lui-même le parquet (code de l'éducation, art. L.131-9 modifié).

4 - LE POUVOIR D'APPRÉCIATION DU PRÉSIDENT DU CONSEIL GÉNÉRAL

La question de savoir si le président du conseil général dispose d'un véritable pouvoir d'appréciation pour décider de proposer ou non un contrat- ou si, au contraire, il a compétence liée dès lors qu'il est saisi d'une demande - a été au cœur des débats parlementaires. Certains pointaient le risque qu'avec une trop grande faculté d'appréciation laissée au président du conseil général, une demande de contrat puisse ne pas être suivie d'effet. « Je ne souhaite pas arriver à une situation dans laquelle le président du conseil général pourrait choisir de ne rien faire », a indiqué le ministre délégué à la famille, Philippe Bas, le 4 mars devant les sénateurs. « Il faut donc ouvrirà celui-ci une capacité de choix entre plusieurs formules  » (J.O. Sén. [C.R.]n° 22 du 5-03-06). C'est ce que fait la loi, au final. Ainsi, une fois saisi et face à une situation donnée, le président du conseil général« propose » le contrat « ou prend toute autre mesure d'aide sociale à l'enfance adaptéeà la situation » (CASF, art. L. 222-4-1 nouveau).

Un décret déterminera les modalités selon lesquelles il est procédé à la conclusion du contrat.

B - Le pouvoir de sanction du président du conseil général (art. 48)

Le président du conseil général qui constate que des parents n'ont pas respecté leurs obligations, ou que le contrat n'a pu être signé par leur faute et sans motif légitime, dispose de trois options laissées à sa libre appréciation. Soit (CASF, art. L. 222-4-1 nouveau)  :

 il demande au directeur de la caisse d'allocations familiales (CAF) de suspendre le versement de tout ou partie des prestations afférentes à l'enfant dont le comportement est à l'origine du contrat ;

 il saisit le procureur de la République de faits susceptibles de constituer une infraction pénale (par exemple pour absentéisme scolaire, situation qui constitue une infraction contraventionnelle)  ;

 il saisit le juge des enfants pour une mise sous tutelle des prestations familiales (voir encadré ci-contre).

Ce pouvoir de sanction « est la contrepartie de l'engagement contractuel des parents à respecter leurs devoirséducatifs », explique le sénateur (UMP) Philippe Richert (Avis Sén. n° 211, février 2006, Richert). Il constitue, en outre, une singularité par rapport aux autres dispositifs existants d'aide et d'accompagnementà la parentalité (tels que les actions éducativesà domicile organisées par les services départementaux).

C - La suspension temporaire de certaines prestations familiales (art. 49)

« Il est parfois utile de frapper les gens au portefeuille », a estimé le ministre délégué à la famille, Philippe Bas le 10 janvier. Ainsi la suspension des prestations familiales est-elle, à ses yeux, « nécessaire dans certains cas ». La loi autorise donc le directeur de la caisse d'allocations familiales à suspendre, « pour la durée et dans la proportion décidées par le président du conseil général », le versement de certaines prestations familiales aux parents ou au représentant légal de l'enfant qui ne se conforment pas aux obligations qui leur sont imposées par un contrat de responsabilité parentale ou à ceux qui s'opposent àla conclusion d'un tel contrat sans motif légitime . Cette décision ne peut toutefois porter que sur la part des aides dues à la famille au titre de l'enfant« fautif », c'est-à-dire celui dont le comportement a conduit à proposer la conclusion du contrat.

Lors de son conseil d'administration du 4 janvier 2006, la caisse nationale des allocations familiales a donné un avis défavorable à ce dispositif, soulignant qu'il ne lui semblait pas opportun de prévoir une sanction consistant en la suspension des prestations alors qu'existe la possibilité de prononcer une contravention.

A noter : les prestations familialeséventuellement suspendues dans le cadre du nouveau dispositif pourront être reversées à l'établissement d'accueil où serait placé l'enfant concerné (code de la sécurité sociale [CSS], art. L. 521-2, al. 3 modifié).

1 - LES PRESTATIONS CONCERNÉES

Seuls les allocations familiales et le complément familial peuvent être suspendus (CSS, art. L. 552-3 nouveau). C'est suite à l'adoption d'un amendement du député Laurent Hénart que ces limites ontété posées. « Les autres prestations familiales seront exclues du dispositif de sanction » , indiquait ainsi l'exposé de cet amendement : « l'allocation de parent isolé, l'allocation de soutien familial et les aides au logement, qui présentent un caractère social et dont la suspension frapperait de façon disproportionnée les familles les plus vulnérables ». Mais aussi « l'allocation de rentrée scolaire, dont le versement annuel se prête mal à une suspension ». « Enfin, en raison même de leur objet, la prestation d'accueil du jeune enfant, l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé et l'allocation journalière de présence parentale ne sauraient être concernées par le dispositif. »

2 - LA DURÉE DE LA SUSPENSION ET LES SUITES POSSIBLES

Le président du conseil général choisit la durée de la mesure de suspension. Elle est au pluségale à 3 mois mais elle peut être renouvelée dans la limite d'une durée maximale de 12 mois (CSS, art. L. 552-3 nouveau).

Quelles suites peuvent être données à une telle décision ?

Le versement des prestations suspendues est rétabli rétroactivement à la date de la suspension dans deux hypothèses (CSS, art. L. 552-3 nouveau)  :

 si au terme de la période de suspension prononcée par le président du conseil général, la CAF n'a été informée d'aucune décision de renouvellement ;

  dès que le président du conseil général constate que les parents ou le représentant légal du mineur se conforment aux obligations qui leur étaient imposées en application du contrat de responsabilité parentale.

Si, à l'issue de la période maximale de 12 mois de suspension, les parents ou le représentant légal du mineur ne se conforment toujours pas à leurs obligations, les prestations seront rétablies mais sans effet rétroactif. En outre, le président du conseil général devra alors mettre en œuvre « toute mesure nécessaire pour remédierà la situation ».

La question de savoir quelles seront les voies de recours pour contester la décision de suspension des prestations familiales a été posée au cours des débats parlementaires. S'agira-t-il d'un contentieux administratif ou d'un contentieux relevant du tribunal des affaires de sécuritésociale ? Autrement dit, contre quelle autorité les parents touchés par une suspension pourront-ils se retourner : le président du conseil général ou le directeur de la CAF ? La loi n'apporte aucune réponse.

II - L'AGENCE NATIONALE POUR LA COHÉSION SOCIALE ET L'ÉGALITÉ DES CHANCES

La loi du 31 mars 2006 crée « l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances », nouvel établissement public nationalà caractère administratif que le gouvernement présente comme le pendant pour l'action sociale de l'Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU). Le second étant plus spécifiquement chargé du bâti tandis que l'autre serait plutôt chargé de« l'humain ». Bien que, à lire l'exposé des motifs du projet de loi, cette nouvelle institution réponde avant tout à une « volonté d'accroître la présence de l'Etat dans les quartiers sensibles » , son champ d'action ne sera pas limité aux seules banlieues difficiles. Certes, elle participera aux opérations en faveur des habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Mais elle devra également mettre en œuvre un certain nombre d'actions sur l'ensemble du territoire national.

Le 10 janvier dernier, le ministre de la Cohésion sociale, Jean-Louis Borloo, précisait que l'objectif de la nouvelle agence était que « les partenaires puissent agir ensemble pour des missions plus coordonnées, des actions plus ciblées ». Répondant aux inquiétudes des personnels du Fonds d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les discriminations (Fasild) - que l'agence absorbe -, de la délégation interministérielle à la ville (DIV) et de l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme (ANLCI), le ministre indiquait également que l'agence serait « un outil de coordination, pas de fusion des structures qui existent déjà ».

A - Ses missions (art. 38)

La nouvelle agence aura pour mission générale de contribuer à des actions en faveur des personnes rencontrant des difficultés d'insertion sociale ou professionnelle (CASF, art. L. 121-14 nouveau). La loi distingue cependant, parmi les missions assignées àl'organisme, celles qui s'appliquent à l'ensemble du territoire national et celles qui relèvent de la politique de la ville.

Ainsi, à l'échelle nationale, d'une part, elle mettra en œuvre des actions visant à l'intégration des populations immigrées et issues de l'immigration résidant en France. Elle devraégalement concourir à la lutte contre les discriminations. Et contribuer à la lutte contre l'illettrisme ainsi qu'à la mise en œuvre du tout nouveau service civil volontaire (voir encadréci-dessous).

Elle devra, d'autre part, participer aux opérations en faveur des habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Dans ce cadre, elle devra « promouvoir l'accessibilité au savoir et à la culture et prendre en compte, dans ses interventions, les spécificités des départements d'outre-mer ».

Précision importante dans la mesure où des inquiétudes se sont exprimées au cours des débats parlementaires concernant l'avenir de la délégation interministérielle à la ville : la ministre déléguée à la cohésion sociale, Catherine Vautrin, a assuré le 3 mars, devant les sénateurs, que cette administration sera maintenue (Rap. Sén. [C.R.]n° 21 du 4-03-6).

La nouvelle agence, tout comme l'ANRU, sera en fait rattachée au ministère chargé des affaires sociales. Elle aura plus précisément un « double système de tutelle », a encore indiqué la ministre, avec d'un côté la DIV et de l'autre la direction des populations et des migrations (Rap. Sén.[C.R.] n° 21 du 4-03-6).

Signalons encore qu'à l'origine, il était prévu que les missions confiées actuellement à l'ANLCI soient, à l'instar de celles du Fasild, transférées àla nouvelle agence. La disposition a finalement étéretirée du projet de loi adopté en conseil des ministres. Pour autant, la contribution à la lutte contre l'illettrisme figure tout de même, au final, parmi les missions confiées à l'Ancsec, ce qui pose la question de l'articulation des actions des deux agences. Le sénateur (UMP) Alain Gournac juge, à cet égard, opportun qu'une convention soit signée entre elles « afin d'éviter les empiètements de compétences » et de « favoriser une meilleure efficacité globale du dispositif destiné àlutter contre l'illettrisme » (Rap. Sén. n°210, février 2006, Gournac).

B - Ses modalités d'intervention

Concrètement, l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances pourra mener directement des actions ou accorder des concours financiers aux collectivités territoriales, auxétablissements publics de coopération intercommunale compétents et aux organismes publics ou privés, notamment les associations, qui conduisent des opérations concourant à ces objectifs (CASF, art. L.121-14 nouveau). « Nous avons tous entendu parler du "parcours du combattant" que doivent suivre les associations, qui sont obligées de monter plusieurs dossiers et de solliciter différents interlocuteurs, pour s'entendre parfois opposer des refus, ou tout au moins n'obtenir que des prises de participation partielles », a expliqué Catherine Vautrin devant les sénateurs (J.O. Sén. [C.R.] n°21 du 4-03-06). L'agence vise ainsi à fédérer l'ensemble des moyens humains, logistiques et financiers dans le domaine de l'égalité des chances et de l'intégration, et à permettre une meilleure coordination de missions jusqu'alors dispersées entre diverses agences ou administrations.

Par ailleurs, elle participera, « par la conclusion de conventions pluriannuelles, au financement des contrats passés entre les collectivités territoritales et l'Etat pour la mise en œuvre d'actions en faveur des quartiers » prioritaires de la politique de la ville. Par cette formulation, la loi vise en fait les « contrats urbains de cohésion sociale », qui remplaceront les contrats de ville à compter du 1er janvier 2007 (1). Les financements spécifiques accordés par l'Etat dans le cadre de ces contrats seront en effet attribués par la nouvelle agence. Chaque contrat fera plus précisément l'objet d'une convention pluriannuelle de financement entre cette dernière, l'Etat et les collectivités locales.

C - Son organisation

L'agence sera administrée par un directeur général, nommé par l'Etat, et un conseil d'administration (CASF, art. L. 121-15 nouveau). Celui-ci sera composé pour moitié de représentants de l'Etat et pour moitié de représentants des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives au plan national, de représentants du Parlement, de représentants des communes et de leurs établissements publics de coopération intercommunale compétents, des départements, des régions, des caisses nationales de sécurité sociale, des organismes régis par le code de la mutualité, des associations et des chambres consulaires ainsi que de personnalités qualifiées.

Les préfets seront les délégués départementaux de l'agence. A ce titre, ils signeront et assureront le suivi des conventions signées entre l'agence et ses partenaires.

A la date d'installation de son conseil d'administration, l'agence se substituera au Fasild pour l'ensemble des actions engagées par ce dernier, à l'exception des actions de participation à l'accueil des populations immigrées qui sont transférées à l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM).

La loi est précise sur ce point et indique expressément que, à compter de cette date, les compétences, biens, moyens, droits et obligations du Fasild seront respectivement transférés à l'ANAEM pour ceux qui sont liés aux missions qui lui sont transférées et à l'Ancsec pour les autres. Ainsi, le Fasild, tel qu'il existe aujourd'hui, disparaîtra. Pour autant, Catherine Vautrin, au cours des débats, a préféré parler d'« évolution », plutôt que de disparition.

Le gouvernement a en outre fait savoir à plusieurs occasions que les commissions régionales pour l'intégration et la lutte contre les discriminations (CRILD), à travers lesquelles le Fasild mène actuellement son action locale, seront maintenues.

En tout état de cause, la loi prévoit que les agents contractuels du Fasild transférés à l'Ancsec ou, avec leur accord, à l'ANAEM, conserveront le bénéfice de leurs contrats. Elle donne également la possibilité à la nouvelle agence pour la cohésion sociale de recruter, pour l'exercice de ses missions, des agents non titulaires sur des contrats à durée indéterminée.

A noter : la loi du 10 juillet 1964 relative au Fonds d'action sociale pour les étrangers, devenue sans objet, est abrogée. Et les articles relatifs au Fasild - successeur du fonds créé en 1964 - qui figuraient dans le code de l'action sociale et des familles sont supprimés et remplacés par ceux relatifs à la nouvelle agence.

À SUIVRE...

Plan du dossier

Dans ce numéro :

I - Le contrat de responsabilité parentale

A - La définition du contrat

B - Le pouvoir de sanction du président du conseil général

C - La suspension temporaire de certaines prestations familiales

II - L'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances

A - Ses missions

B - Ses modalités d'intervention

C - Son organisation

Dans un prochain numéro :

III - Le renforcement de la lutte contre les discriminations

IV - L'insertion professionnelle des jeunes

Evaluation du contrat (art. 48 IV)

La loi prévoit qu'une évaluation des résultats du contrat de responsabilité parentale« en termes de réduction d'absentéisme et de troubles portés au fonctionnement des établissements scolaires » devra avoir lieu au plus tard le 30 décembre 2007, sans préciser quel organisme devra s'en charger.

Rappel : qu'est-ce qu'une tutelle aux prestations sociales ?

La tutelle aux prestations sociales consiste en la désignation d'un tiers - personne physique ou personne morale- pour recevoir les prestations sociales lorsque l'attributaire normal ne les utilise pas conformément à leurs fins. Ainsi, dans le cas où les enfants donnant droit à des prestations familiales sont élevés dans des conditions d'alimentation, de logement et d'hygiène manifestement défectueuses ou lorsque le montant des prestations n'est pas employé dans l'intérêt des enfants, le juge des enfants peut ordonner que les prestations soient, en tout ou partie, versées à un tuteur aux prestations sociales. Le projet de loi portant réforme de la protection de l'enfance, attendu ce mois-ci en conseil des ministres, devrait apporter quelques retouches au dispositif.

A retenir également

Service civil volontaire (art. 52)

La création d'un service civil volontaire a étéannoncée en novembre dernier par Jacques Chirac en réponse à la crise des banlieues. Il s'appuiera en fait sur des dispositifs existants : les cadets de la République, le plan « défense deuxième chance » (2), le volontariat associatif (3)... Pour l'ensemble de ces dispositifs, la loi pour l'égalité des chances institue un agrément de service civil volontaire. Il sera délivré par l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (Ancsec) aux missions d'accueil, sous contrat, d'un ou de plusieurs jeunes âgés de 16 à 25 ans révolus, missions exercées par des personnes morales de droit public ou de droit privé ayant une mission d'intérêt général ou d'insertion professionnelle (CASF, art. L. 121-19 nouveau) . Pour obtenir l'agrément, l'organisme d'accueil devra s'engager à former le jeune, « notamment aux valeurs civiques », àl'accompagner tout au long de son contrat en désignant dès la conclusion de celui-ci un tuteur chargé d'assurer le suivi, ou encore à accompagner le jeune dans sa recherche d'un emploi ou d'une formation. Un décret doit préciser notamment les conditions dans lesquelles les organismes bénéficient, pour les missions agréées, de subventions accordées par l'Ancsec, en vue de prendre en charge tout ou partie des dépenses d'accompagnement et de formation.

Lutte contre les incivilités (art. 50 et 51)

La loi sur l'égalité des chances vient renforcer les pouvoirs et les responsabilités des maires dans le cadre de la lutte contre les « incivilités ». Elleétend tout d'abord les pouvoirs des agents de police municipale en leur permettant de constater certaines contraventions relatives à des incivilités. La loi vise plus précisément les « contraventions mentionnées au livre VI du code pénal dont la liste [sera] fixée par décret », à l'exclusion de celles qui nécessiteraient de leur part des actes d'enquête et de celles qui réprimeraient des atteintes à l'intégrité des personnes (code général des collectivités territoriales, art. 2212-5 modifié) . Selon le sénateur (UMP) Jean-René Lecerf, la liste des contraventions pourrait comprendre notamment la divagation d'animaux dangereux et les menaces de violences (Rap. Sén. n° 214, février 2006, Lecerf) . Autre nouveauté :dès que des précisions auront étéapportées par décret, le maire pourra, pour les contraventions relatives à des incivilités ayant porté préjudice à un bien de la commune, proposer au contrevenant une transaction tant que l'action publique n'aura pasété mise en mouvement (code de procédure pénale, art. 44-1 nouveau) . Cette transaction consistera en la réparation du préjudice et devraêtre homologuée par le procureur de la République. Les actes tendant à sa mise en œuvre ou à son exécution interrompront la prescription de l'action publique. La transaction pourra également constituer en l'exécution, au profit de la commune, d'un travail non rémunéré pendant une durée maximale de 30 heures et devra alors être homologuée, selon la nature de la contravention, soit par le juge du tribunal de police, soit par le juge de la juridiction de proximité. Enfin, pour les contraventions qui n'auraient pas été commises au préjudice de la commune mais sur son territoire, la loi permet au maire de proposer au procureur de la République d'engager une procédure alternative.

Notes

(1)  Voir ASH n° 2447 du 17-03-06.

(2)  Voir ASH n° 2418 du 26-08-05.

(3)  Qui fait actuellement l'objet d'un projet de loi dont l'examen au Parlement n'est pas terminé.

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