Lors du Conseil européen qui s'est tenu les 23 et 24 mars sous la présidence autrichienne, les chefs d'Etat et de gouvernement européens ont délivré un message qui balance entre vision économique et vision sociale. « Si elle veut assurer la pérennité du modèle social européen, l'Europe doit intensifier ses efforts pour générer une croissance économique plus forte, augmenter le taux d'emploi et la productivité, tout en renforçant l'inclusion et la protection sociales », ont-ils estimé, ajoutant que « la croissance et l'emploi sont au service de la cohésion sociale ». Avec ce double objectif en tête, les Etats membres devront élaborer, d'ici à septembre 2006, des rapports nationaux sur la protection sociale et l'inclusion sociale. Dans ce cadre, le Conseil européen met en avant plusieurs priorités.
Tout d'abord, il s'agit de donner un « élan décisif à l'élimination de la pauvreté », en mettant l'accent sur des groupes cibles, comme les enfants. L'objectif étant de « réduire rapidement et sensiblement la pauvreté touchant les enfants , en donnant à tous des chances égales » (1). Il est également nécessaire de « mieux concilier vie professionnelle et vie familiale », estime le conseil, et pour cela d' « améliorer l'offre à prix abordables de services d'accueil pour les enfants et d'autres personnes ayant besoin de soins » et d' « augmenter le taux d'emploi des jeunes, des travailleurs plus âgés et des groupes défavorisés ».
De façon générale, le Conseil européen a aussi rappelé qu' « augmenter le taux d'emploi continue de figurer au premier rang des priorités en matière de réforme ». L'objectif fixé à Lisbonne d'atteindre un taux d'emploi de 70 % en 2010 est répété sous forme d'un objectif annuel : créer « au moins deux millions de postes de travail par an jusqu'en 2010 » . La nécessité d'un dialogue social approfondi a aussi été mise en avant. Les Etats membres doivent par ailleurs accorder « une attention particulière à la flexicurité » (équilibre entre flexibilité et sécurité), a rappelé le conseil. La Commission européenne, en liaison avec les Etats membres et les partenaires sociaux, doit maintenant élaborer « un ensemble de principes communs [...] qui pourront servir de cadre de référence utile pour mettre en place des marchés du travail plus ouverts et plus réactifs, et des lieux de travail plus productifs ».
Le Conseil européen a tenu à souligner qu'il était « urgent d'améliorer la situation des jeunes sur le marché du travail et de réduire sensiblement le taux de chômage ». Il rappelle l'objectif de « limiter l'abandon scolaire à 10% » et d'avoir « au moins 85 % de jeunes ayant achevé à 22 ans des études secondaires supérieures ». En outre, d'ici à la fin 2007, « chaque jeune ayant quitté l'école et se trouvant au chômage devrait, dans un délai de six mois, se voir offrir un emploi, un apprentissage, une formation complémentaire ou une autre mesure propre à améliorer sa capacité d'insertion professionnelle ». Ce délai devant être raccourci à « 100 jours au plus tard d'ici [à] 2010 ».
A noter que, sur la directive « services », le Conseil européen a estimé que l'approche préconisée par les parlementaires (2) était la bonne. La proposition modifiée de la Commission, qui devrait être largement fondée sur le résultat de la première lecture du Parlement européen, pourrait être présentée le 4 avril.
(1) Signalons que, le 15 mars, les parlementaires européens ont demandé à la Commission européenne de présenter un « livre vert » définissant « des objectifs clairs et des mesures appropriées pour éliminer la pauvreté des enfants ».
(2) Voir ASH n° 2444 du 24-02-06.