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Le Conseil d'Etat dénonce l'inflation législative et appelle à une réforme des commissions départementales d'aide sociale

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Dans son rapport annuel rendu public le 15 mars (1), le Conseil d'Etat dresse le bilan de son activité en 2005, ainsi que celui des juridictions spécialisées. L'occasion pour lui d'appeler, une nouvelle fois, à une réforme des commissions départementales d'aide sociale et de dénoncer le phénomène d'inflation législative.

S'agissant de son activité contentieuse, le conseil note un « maintien du niveau élevé » de requêtes enregistrées en 2005, qui s'explique notamment par l'augmentation d'environ 50 % des pourvois en cassation contre les décisions des juridictions spécialisées, notamment de la commission des recours des réfugiés (+ 26,5 % en données brutes). « Au total, si le nombre d'affaires jugées a augmenté, il ne compense pas pour autant le nombre des entrées », conclut le conseil. Un point de satisfaction tout de même : la durée moyenne des instances diminue, pour atteindre 11 mois et 15 jours en 2005.

Par ailleurs, l'activité consultative de la Haute Juridiction est « restée intense » , souligne son vice-président, Renaud Denoix de Saint Marc, du point de vue du nombre de textes examinés comme de celui de leur complexité. Les sections administratives ont eu à connaître de 1 390 textes ou demandes d'avis (soit 98 de plus qu'en 2004). Deux phénomènes ont conduit en 2005 à compliquer la tâche du conseil : d'une part, un nombre croissant de projets de loi présentés en urgence et, d'autre part, l'importance du nombre de saisines rectificatives «  sans que [celles-ci] soient toujours justifiées par des motifs impératifs et légitimes, mais le plus souvent par l'évolution de la position du gouvernement sur le contenu même de ces projets », souligne le rapport. La section sociale a, pour sa part, connu une activité « particulièrement intense » en 2005 avec l'examen de 44 projets de loi et d'ordonnance, le nombre le plus élevé des 20 dernières années. Tout comme les années précédentes, elle attire l'attention du gouvernement et de l'administration sur « plusieurs dérives dans la production normative » : « excès dans la production normative » , « insuffisante préparation de certains textes » ou encore « persistance de difficultés dans les consultations préalables » . Autre mauvais point : le Conseil d'Etat regrette que « l'effort de simplification du droit ne [conduise] pas, dans l'immense majorité des cas, à une réduction du nombre d'articles ou de dispositions applicables, [et] qu'il entraîne au contraire un alourdissement de certains textes ». Selon lui, « la France légifère trop et légifère mal ». Il a d'ailleurs choisi de revenir sur le thème dans une partie spécifique intitulée « sécurité juridique et complexité du droit ». Plusieurs causes sont avancées : l'inflation législative, la multiplication des sources externes et internes du droit (2), l'éclatement des compétences normatives...

Du côté des juridictions spécialisées, la commission des recours des réfugiés a, en 2005, enregistré environ 38 600 nouveaux recours, contre 51 700 en 2004, et a rendu 62 300 décisions contre 39 200 l'année précédente (+ 59 %) (3). Le rapport a également examiné la situation de la commission centrale d'aide sociale, saisie, en 2005, d'un nombre de dossiers beaucoup moins important qu'en 2004 : environ 1 700 au lieu de 2 600, un résultat essentiellement dû à une diminution du nombre de contentieux relatifs à la couverture maladie universelle complémentaire (- 43 %). Malgré ces résultats « positifs » (4), le Conseil d'Etat ne peut « considérer la situation comme vraiment satisfaisante ». Les sages du Palais Royal ont en effet constaté que beaucoup d'affaires ne viennent pas devant la commission centrale « parce que les commissions départementales d'aide sociale tardent à les inscrire à leurs propres rôles, ou parce que [leurs] décisions n'offrent pas prise à un appel aux yeux de justifiables désorientés par leur défaut de motivation ou leur caractère péremptoire ». En outre, certaines de ces affaires tardent à être jugées « faute de diligence des commissions départementales d'aide sociale qui ne transmettent pas des dossiers complets, et des conseils généraux qui tardent à répondre, ou ne répondent pas aux suppléments d'instruction ». Le Conseil d'Etat souligne donc l'urgence de la réforme des commissions départementales d'aide sociale, déjà préconisée dans un rapport de 2004 sur l'avenir des juridictions spécialisées dans le domaine social (5).

F.T.

Notes

(1)  Rapport public 2006 - Jurisprudence et avis de 2005 - « Sécurité juridique et complexité du droit » - Conseil d'Etat - Disponible sur www.conseil-etat.fr ou sur www.ladocumentationfrancaise.fr.

(2)  Le rapport fait ici surtout référence au développement de l'activité des instances européennes, dont les textes normatifs ont une valeur supérieure aux lois nationales.

(3)  Quant au pourcentage d'annulation des décisions de l'OFPRA, il s'élève à 15,5 % (contre 12 % en 2004). Au final, ce sont donc environ 9 600 décisions supplémentaires accordant le statut de réfugié qui ont été prises, contre 5 000 en 2004.

(4)  En effet, le stock de dossiers en attente s'est considérablement réduit en 2005 : à peine 2 000, contre 2 800 en 2004.

(5)  Voir ASH n° 2358 du 7-05-04.

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