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Une aide au retour à domicile après l'hôpital

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La caisse régionale d'assurance maladie (CRAM) du Sud-Est expérimente depuis 2003 un dispositif d'aide au retour à domicile des personnes âgées hospitalisées. Objectif : faire le lien entre les travailleurs sociaux de l'hôpital, de la CRAM et les prestataires de services pour favoriser le rétablissement des convalescents et leur maintien à domicile.

Donner la priorité à l'évaluation des besoins, mettre l'accent sur la prévention et miser sur la coordination. Tels sont les objectifs de l'aide au retour à domicile après hospitalisation (ARDH) en faveur des personnes âgées expérimentée depuis deux ans par la caisse régionale d'assurance maladie du Sud-Est (1). Ce dispositif, lancé par la caisse nationale d'assurance vieillesse en 2003 (voir encadré ci-dessous), vise à proposer aux personnes âgées hospitalisées, via les services sociaux de l'hôpital, une aide temporaire à domicile de deux à trois mois dès leur sortie de l'établissement (2). Pour mettre en place ce dispositif innovant, qui doit « associer les établissements de santé, les professionnels médico-sociaux et de santé ainsi que le service social des caisses régionales dans le cadre d'une approche globale mobilisant les branches maladie et retraite », la CRAM du Sud-Est a signé des conventions avec les hôpitaux de la région.

Aujourd'hui, 62 établissements hospitaliers participent à cette expérimentation, qui a déjà bénéficié à 1 600 personnes. « La rapidité de montée en charge du dispositif repose beaucoup sur l'arti- culation entre médical et social au sein de l'hôpital avec lequel nous passons une convention, explique Françoise Baudin, responsable du service social à la CRAM. Ce dispositif pousse les équipes médicales et les services sociaux des hôpitaux à travailler ensemble. »

Concrètement, cette démarche coordonnée se déroule en plusieurs étapes. Tout d'abord, une assistante sociale de l'hôpital procède à une première évaluation des besoins du patient âgé et contacte elle-même la CRAM et les intervenants à domicile si une ARDH est jugée nécessaire (3). Cette procédure anticipée permet à la personne âgée de rentrer sereinement à domicile et de disposer d'une aide immédiate (4). Une assistante sociale de la caisse régionale prend ensuite le relais pour effectuer une seconde évaluation au domicile du bénéficiaire et éventuellement l'orienter vers un autre dispositif à l'issue des deux à trois mois d'ARDH. « Ce système repose sur la réactivité des services sociaux de l'hôpital qui nous signalent rapidement par fax qu'il faut activer une aide, explique Sabine Schang, responsable des études et des recherches au service social de la CRAM. Et cela va d'autant plus vite que nous ne demandons aucun justificatif au patient pour en bénéficier pendant son séjour à l'hôpital. » La caisse a en effet choisi de se baser sur la bonne foi du patient pour accélérer la procédure. « La personne âgée ne se déplace pas avec son titre de pension et ses déclarations de ressources à l'hôpital, indique Gérard Steibel, responsable de l'action sociale envers les personnes âgées à la CRAM. S'il est toujours délicat de se baser sur la déclaration pour une administration, nous n'avons recensé que trois à quatre cas de prise en charge indue. C'est donc un risque que l'on peut prendre. » Ce n'est qu'au moment de l'évaluation réalisée à domicile que la personne âgée doit fournir des justificatifs. Certains critères doivent en effet être remplis pour accéder au dispositif : la personne doit relever du régime général de retraite ou recevoir une pension de réversion, ne pas déjà bénéficier de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) ou d'une autre prise en charge et ne pas dépasser un certain plafond de ressources (5).

Les avantages du dispositif sont multiples : non seulement les besoins des personnes âgées sont évalués dès l'hôpital, mais la mise en place de l'aide intervient rapidement, en moyenne moins d'un jour après le retour à domicile. « Auparavant, les personnes âgées qui sortaient de l'hôpital le vendredi y retournaient dès le dimanche, se souvient Gérard Steibel. Le nouveau dispositif d'aide au retour à domicile a permis de mettre fin à ces situations désastreuses en instaurant une meilleure gestion des sorties d'hôpital. » Comme le rappelle Max Sollari, directeur de l'assurance maladie et de l'action sociale à la CRAM, un retour dans de mauvaises conditions conduit généralement « soit à une réhospitalisation à plus ou moins court terme, soit à un placement en institution car l'état de la personne âgée se sera détérioré, soit à un maintien à domicile de manière précaire ».

A l'hôpital Saint-Joseph de Marseille, 101 personnes ont bénéficié du dispositif à ce jour. « L'ARDH nous donne la possibilité d'enclencher une réponse immédiate, constate Evelyne Collomb, assistante sociale et coordinatrice du service social de l'hôpital, qui travaille en étroite collaboration avec les médecins. Quand les personnes hospitalisées sont déprimées ou éprouvent un sentiment de renoncement, elles ne sollicitent pas d'aide. C'est nous qui la proposons pour les éveiller à une meilleure prise en charge. » Même enthousiasme du côté des prestataires de services, qui estiment avoir gagné en efficacité. « Auparavant, nous recevions des appels de personnes isolées et nous ne pouvions pas établir de dossier avant leur sortie de l'hôpital, rappelle Christine Chauvin, chef de service à Arcade Assis-tance, une association de maintien à domicile pour personnes âgées. Il fallait ensuite attendre que les gens soient suffisamment en forme pour nous accueillir. Désormais, nous recevons un fax de l'hôpital et les papiers de la CRAM en 24 à 48 heures. Ce qui veut dire que quelqu'un qui sort de l'hôpital le lundi a quelqu'un chez lui le mardi. » Outre la réactivité des travailleurs sociaux comme celle des prestataires de services, le dispositif offre la possibilité de voir plus loin dans la prise en charge de la personne. « Le fait de pouvoir les suivre pendant deux à trois mois puis d'éventuellement déclencher un dossier d'allocation personnalisée d'autonomie dans la foulée permet un suivi à long terme », estime ainsi Evelyne Collomb. Ce suivi est assuré notamment lors de l'évaluation à domicile réalisée par les travailleurs sociaux de la caisse régionale d'assurance maladie et qui s'avère extrêmement complète. « Il s'agit d'un tour d'horizon de l'ensemble de la situation de la personne âgée effectué à l'aide d'un document de plusieurs pages », précise Valérie Arquier, cadre social. Sont passés en revue le degré d'isolement de la personne, ses relations familiales, de voisinage, l'adaptation de son logement, ses besoins en matière d'aide à la personne... « Il y a relativement peu d'écart entre le diagnostic réalisé à l'hôpital et celui effectué à domicile, poursuit Valérie Arquier. La seule différence peut être liée à la présence du travailleur social au domicile de la personne, ce qui lui permet de susciter la mise en place d'un autre type d'aide :téléalarme, petits travaux... » A l'issue des deux à trois mois d'ARDH, plusieurs situations peuvent se présenter : soit la personne âgée a parfaitement récupéré et ne relève plus d'aucun dispositif, soit elle a encore besoin d'un « coup de pouce » et devra solliciter une autre aide de la CRAM, soit elle est orientée vers l'APA (6).

Depuis le début de l'expérimentation, l'offre de services de l'ARDH s'est étoffée. Des services de la vie quotidienne (portage de repas...) se sont ajoutés à l'aide au ménage. « Ce qui est intéressant avec ce dispositif, c'est qu'on peut le faire évoluer, note Sabine Schang. On diversifie ainsi les réponses en fonction des réalités du terrain. » Les travailleurs sociaux peuvent par exemple « repérer que, sur un territoire ou une commune, un vrai besoin existe comme le portage de repas, la livraison des courses ou l'aide au déplacement », poursuit Sabine Schang, qui espère susciter la mise en place de tels services au sein des communes (7).

Pour autant, la généralisation de l'aide au retour à domicile après hospitalisation dans la région pourrait déséquilibrer le dispositif actuel. « Pour le moment, les prestataires de services jouent complètement le jeu, mais l'extension du dispositif risque de poser problème, redoute ainsi Gérard Steibel. S'il n'y a pas de réponse à un moment donné, cela risque de remettre en cause tout le système. » Un risque accru pendant la période estivale, les prestataires de services à domicile voyant une partie de leur personnel se tourner vers des activités plus lucratives comme le tourisme. Gérard Steibel propose ainsi de « prévoir des incitations financières pour dépasser ces périodes de tension et assurer la continuité des services à domicile ». De son côté, Christine Chauvin admet que, si chaque salarié absent est remplacé pendant l'été, elle ne peut embaucher « que des étudiantes ».

Autre limite de l'ARDH, le risque de superposition avec les aides existantes de la CRAM (aide ménagère à domicile, garde à domicile, portage des repas, livraison des courses...). « Le dispositif a engendré un déséquilibre avec les dispositifs antérieurs, qui a conduit, dans un premier temps, à un empilement et un manque de lisibilité », estime Françoise Baudin. « Au début, les personnes âgées mélangeaient toutes les aides », confirme Annie Rodriguez, assistante sociale à la CRAM. Face à cette situation, la caisse a donc harmonisé l'ensemble des aides en début d'année. L'amélioration des outils de communication et de traitement des dossiers est également vivement attendue. « Pour l'instant, fax et téléphone sont nos seuls moyens de communiquer avec les services sociaux des hôpitaux, remarque Gérard Steibel. Avec la généralisation du dispositif, il va falloir passer au courrier électronique et procéder à un traitement automatisé des demandes. » Dernier bémol, l'ensemble du territoire est encore loin d'être couvert par le dispositif.

L'aide au retour à domicile après hospi-talisation a toutefois permis d'enclencher une dynamique positive, que les membres de la caisse régionale d'assurance maladie souhaiteraient d'ailleurs voir étendue. D'autre part, la coordination entre les travailleurs sociaux des hôpitaux et de la CRAM pourrait préfigurer une coopération avec ceux des conseils généraux, notamment en ce qui concerne la mise en place de l'APA. « A l'issue des deux à trois mois d'ARDH, on risque de se retrouver avec des ruptures, le temps de la mise en place du dossier APA », prévient Catherine Foujannet, assistante sociale à la caisse. « Ce que l'on souhaite désormais voir évoluer, c'est la reconnaissance mutuelle des évaluations des travailleurs sociaux de la CRAM et du conseil général, confirme Françoise Baudin. Cela permettrait la mise en œuvre immédiate d'une APA. »

Pour l'heure, aucune enquête de satisfaction formalisée n'a été réalisée auprès des bénéficiaires. La seule indication provient des assistantes sociales de terrain, qui assurent avoir un retour très positif. « Les personnes âgées sont ravies de cette réactivité à leur sortie d'hôpital mêmes si elles ne comprennent pas toujours que l'aide ne dure que deux à trois mois, raconte Catherine Foujeannet. Ce qu'elles retiennent par-dessus tout, c'est la rapidité de l'intervention. »

Florence Pagneux

UNE INITIATIVE DE LA CNAV

C'est une circulaire de la caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) du 1er août 2003 qui a lancé, au sein des caisses régionales d'assurance maladie, la mise en place d'une expérimentation de l'aide au retour à domicile après hospitalisation. Menée dans les différentes régions, celle-ci s'avère d'ores et déjà positive. « Ce dispositif s'inscrit dans le cadre de notre nouvelle politique de prévention, indique ainsi Claude Périnel, directeur national de l'action sociale de la CNAV. Il est amené à devenir pérenne car il correspond à un besoin réel. » L'aide au retour à domicile après hospitalisation figure ainsi dans le chapitre de la convention d'objectifs et de gestion 2005-2008 de la caisse nationale visant à « recentrer la politique d'action sociale sur le maintien de l'autonomie des retraités ».

Notes

(1)  CRAM du Sud-Est : 35, rue George - 13386 Marseille cedex 20.

(2)  Trois types d'aides sont proposés : présence auprès du malade (garde de nuit, aide aux courses, au ménage), soins assurés par un auxiliaire médical (ergothérapeute) et services de la vie quotidienne (portage de repas, livraison de médicaments ou de courses, téléalarme...).

(3)  Une ARDH n'est déclenchée que si un pronostic de récupération de l'autonomie de la personne est posé.

(4)  L'aide est plafonnée à 1 350 € pour la durée de la prise en charge (trois mois au maximum).

(5)  Les ressources ne doivent pas dépasser, pour l'année 2006, 1 760 € par mois pour une personne seule, 2 650 € par mois pour un couple.

(6)  L'autonomie des personnes âgées est évaluée à l'aide de la grille AGGIR allant de 1 à 6 (du plus au moins dépendant). Les personnes comprises entre 1 et 4 peuvent bénéficier de l'allocation personnalisée d'autonomie.

(7)  La CRAM dispose à ce sujet d'un dispositif d'aide au montage de projets.

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