La protection de l'enfance est un élé- ment « de la fonction d'éducation », ainsi que de la prévention et de l'action sociale et médico-sociale, considèrent les huit associations (1) regroupées au sein de la Coordination nationale des associations de protection de l'enfance (CNAPE) (2), dans leur contribution à la préparation du projet de loi pour la protection de l'enfance, promis pour fin mars.
La coordination revient en premier lieu sur un élément clé du débat : la répartition des rôles entre l'autorité judiciaire et l'autorité administrative. « Les propositions visant à centraliser la protection de l'enfance sous la seule responsabilité des conseils généraux, en remisant l'intervention judiciaire dans une subsidiarité exceptionnelle, mettraient gravement en cause les conditions d'accès des enfants et des familles aux prestations de soutien et d'assistance dans le respect de leurs libertés individuelles », s'inquiète-t-elle. En effet, « l'indépendance de l'ordre judiciaire et la possibilité de sa saisine par tout membre de la communauté nationale sont des garanties fondamentales ». C'est pourquoi elle préférerait une approche articulant les interventions au lieu de les opposer et une reconnaissance de la complémentarité des compétences entre l'Etat, les collectivités locales, les magistrats et les associations.
La coordination répond également aux quatre questions soumises par le ministre chargé de la famille aux débats décentralisés dans les départements. Pour répondre à la première - « Prévention, quelles actions pour prévenir la maltraitance ? » -, elle propose que l'autorité, saisie par signalement ou par information, ait pour obligation d'en accuser réception à l'auteur et d'indiquer la suite donnée dans un délai d'un mois. Des procédures de signalement devraient, selon elle, être généralisées sur le modèle de chartes déjà utilisées dans certains départements. La prévention représentant un champ d'intervention large mais éparpillé, elle suggère de créer des points d'accueil communs aux institutions sociales, médico-sociales et judiciaires dans des « maisons départementales de la protection de l'enfance et de la famille ».
Deuxième axe du débat : le partage des informations entre professionnels tenus au secret. Considérant ce partage comme « le produit de bonnes pratiques individuelles », elle préconise de définir « le cadre conceptuel » et la notion de partage entre les personnes investies d'une mission de protection de l'enfance, d'en définir les protocoles dans un cadre légal et de constituer un « comité départemental d'éthique » susceptible d'être saisi.
Comment, par ailleurs, mieux répondre aux besoins et à l'intérêt de l'enfant par l'action éducative ? Sur ce troisième sujet, « l'ensemble des observations faites à propos de la mauvaise coordination des interventions sociales néglige l'aspect de l'incohérence des cadres réglementaires », estime la coordination. Elle suggère d'une part « d'organiser la synthèse des observatoires existants » et d'autre part que les « maisons départementales de la protection de l'enfance et de la famille » qu'elle propose deviennent des lieux « de cohérence et de coordination ». Ces maisons géreraient un fond commun d'intervention socio-éducative rassemblant les financements actuellement éclatés.
Le quatrième thème du débat, sur les « pratiques et actions originales », met le doigt, selon la coordination, sur la question du statut de l'expérimentation. Laquelle devrait être intégrée aux schémas départementaux conjoints et bénéficier de moyens suffisants. Une agence de l'innovation devrait répertorier, modéliser et mutualiser « les expérimentations évaluées positivement ».
Reste que des réflexions devraient également être menées sur la formation des professionnels, poursuit la coordination, qui plaide pour la mutualisation de mo-dules de formation pluri-professionnels et la création de « référentiels d'aide au diagnostic précoce de situations à risque ». Les associations devraient quant à elles être reconnues dans leur spécificité, réclame-t-elle, souhaitant que « puisse être ouverte la réflexion sur le statut des associations de protection de l'enfance, en cohérence avec le débat européen sur les services sociaux d'intérêt général ».
(1) ANPF (Association nationale des placements familiaux), Citoyens et justice, Cnaemo, CNLAPS, CETT (Carrefour d'échanges techniques de la tutelle aux prestations sociales enfants), Fenamef (Fédération nationale des associations de médiation familiale), FN3S et Unasea.
(2) Secrétariat : Unasea - 118, rue du Château-des-Rentiers - 75013 Paris - Tél. 01 45 83 50 60 -Voir ASH n° 2439 du 20-01-06.