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La prévention : concept, politiques, pratiques en débat

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D'abord apparu dans le champ de la santé, le concept de prévention s'est étendu aux risques sociaux. Mais si l'objectif de ne pas en rester à la seule action réparatrice est entouré d'un large consensus, l'idée de « prévention sociale » est néanmoins ambiguë. Notamment, explique Jean-Michel Belorgey, conseiller d'Etat, parce que « la pathogenèse des inadaptations sociales ne renvoie pas, comme celle des maladies, à des agents physiques, chimiques ou microbiens, plus ou moins aisément identifiables et isolables ». C'est précisément son flou même qui assure le succès de la notion, estime Laurent Barbe, consultant en action sociale, qui centre ses analyses sur le secteur de la protection de l'enfance. Le terme de prévention, développe-t-il, fait office de « mot de passe "magique" [...] pour dire qu'il faudrait intervenir avant, plus tôt », comme s'il était certain que lesdites interventions pouvaient réellement éviter le ou les problèmes en question. Que cherche-t-on d'ailleurs à prévenir, si ce n'est d'autres formes d'intervention vécues comme plus difficiles, mais qui peuvent pourtant être parfaitement justifiées par la situation ? On se prémunirait, en quelque sorte, de l'intervention d'autres acteurs, ce qui vaut critique implicite de leur action et rend d'autant plus difficiles les processus de coopération. Ainsi, les mesures d'action éducative en milieu ouvert seront considérées comme préventives de la séparation et du placement. Or une séparation analysée comme un échec a bien du mal à ne pas le devenir, alors même que, dans un certain nombre de cas, il aurait été préférable de ne pas la différer.

Par ailleurs, le glissement de la notion de prévention à celle de précaution fait surgir de nouvelles interrogations. Il n'est plus, là, question de gérer des risques avérés mais des risques potentiels - des « risques de risques », selon la formule de Guy Robert, rapporteur d'une étude sur la prévention en matière de santé pour le Conseil économique et social. Là encore, le principe de précaution semble aller - relativement - de soi lorsqu'il est question d'anticiper de possibles catastrophes écologiques ou sanitaires, mais il en va différemment dans le champ social. Celui-ci a même tout intérêt à le manier avec la plus grande prudence, souligne Brigitte Bouquet, professeure titulaire de la chaire de travail social du Conservatoire national des arts et métiers, co-organisateur du séminaire dont est issu cet ouvrage. En effet, la plupart des actions sociales comportent une marge voulue et assumée de risques potentiels connus, précise-t-elle. Ce n'est donc pas le souci du risque zéro - porteur d'inaction - qui peut guider les intervenants, mais celui d'une « action mesurée », c'est-à-dire dont la prise de risque est proportionnée aux bénéfices escomptés pour les usagers. Mais il reste à définir collectivement quels sont les risques acceptables.

La prévention : concept, politiques, pratiques en débat - Sous la direction de Brigitte Bouquet - Ed. l'Harmattan - 18 €.

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