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Emploi des seniors : le Conseil d'analyse économique et le Conseil d'orientation des retraites mettent leurs propositions sur la table

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Deux récentes contributions sont venues alimenter les réflexions actuellement menées par le gouvernement sur l'amélioration de l'emploi des seniors, qui doit faire l'objet d'un programme d'action fin mars : l'une émanant du Conseil d'analyse économique (CAE) (1), l'autre du Conseil d'orientation des retraites (COR) (2), qui s'est penché plus spécifiquement, à la demande de Dominique de Villepin, sur le dispositif de la surcote. Celui-ci, pour mémoire, permet de majorer la pension de vieillesse des personnes qui travaillent au-delà de l'âge de la retraite et de la durée nécessaire pour bénéficier d'une pension à taux plein.

Le CAE souhaite reconstruire le marché du travail des seniors...

Rappelant qu' « en 2003, le taux d'emploi des 60-64 ans est de 13 % en France - l'un des plus faibles du monde et la moitié du taux moyen dans l'Europe à 15 », et celui des 55-59 ans de 54 %, inférieur de deux points à la moyenne de l'Europe à15, le Conseil d'analyse économique juge nécessaire de réformer le marché du travail pour les tranches d'âge situées peu avant l'âge de la retraite. Il plaide donc pour un durcissement des conditions de cessation anticipée d'activité. Objectif : « casser notre logique collective d'ajustement à la baisse de l'emploi par le départ des seniors et [...] remettre en cause radicalement notre culture de la préretraite ». Ainsi, afin de maintenir les seniors en activité, la suppression de la dispense de recherche d'emploi pour les plus de 57 ans au chômage lui apparaît comme une « nécessité » car « elle sort définitivement de l'activité des personnes qui pourraient retrouver un travail ultérieurement et surtout elle encourage le départ massif des seniors des entreprises ». La suppression de la dispense de recherche d'emploi impliquerait également de réformer les règles d'indemnisation des chômeurs âgés, si on ne veut pas qu'elles offrent un dispositif de substitution. Par exemple, lance le CAE, « les chômeurs âgés de plus de 57 ans et de plus de 60 ans pourraient garder leurs droits particuliers à la condition de ne pas recevoir d'offres d'emplois ». En outre, le conseil recommande une restriction des dispositifs de préretraite. Celui de l'ASFNE (allocation spéciale du fonds national de l'emploi) pourrait notamment être supprimé.

Parallèlement, il pourrait être envisagé de « mettre en place des incitations financières au retour à l'emploi des seniors » , tant du côté des employeurs que des salariés. Ainsi, s'agissant de la contribution Delalande (3), les auteurs proposent de la supprimer au motif qu'elle a « potentiellement des effets pervers sur les embauches parce que les entreprises anticipent les surcoûts des licenciements ». C'est vers cette solution que semble s'engager le gouvernement, alors que les inspections générales des affaires sociales et des finances suggèrent au contraire de l'étendre (4).

Le Conseil d'analyse économique préconise également la mise en place d'incitations financières pour les chômeurs seniors, telles que des primes temporaires au retour à l'emploi qui seraient modulables en fonction de la durée du contrat d'embauche. Ainsi qu'un encadrement spécifique et des formations qui leur soient adaptées.

... et revaloriser les surcotes...

Par ailleurs, si les auteurs jugent les orientations de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites (5) « éminemment positives » - notamment le cumul emploi-retraite, dont ils souhaitent assouplir les conditions -, ils estiment qu' « il faut pour le moins les rendre pérennes, afin qu'elles soient jugées irréversibles par les différents acteurs ». Dans cette optique, ils préconisent notamment « d'éliminer toute limite d'âge supérieure à l'activité » . Ou encore de supprimer les dérogations permettant aux entreprises d'anticiper sur l'âge normal de mise à la retraite d'office. En outre, « comme l'augmentation de la durée de cotisation pour obtenir un taux plein mettra du temps avant de décaler significativement l'âge de la retraite, il est crucial d'atteindre cet objectif par la voie incitative », souligne le rapport. Ainsi prônent-ils de « retarder le départ en retraite par la retraite choisie » . Ce constat amène à «  faire monter en puissance les surcotes , et [à] ne pas modifier le système des décotes ». La revalorisation de ces surcotes permettrait « de se donner le maximum de chances d'augmenter le taux d'emploi des seniors de plus de 60 ans, sans déficit supplémentaire pour les caisses de retraite », assure le conseil, et aurait des « retombées positives pour l'emploi des 55-59 ans ».

Le CAE souhaiterait aussi que les surcotes, traditionnellement proposées sous forme de rentes, puissent l'être sous forme de capital lors de la cessation définitive d'activité (6). Selon lui, en effet, le dispositif actuel avantage les personnes qui ont une espérance de vie plus longue et des revenus au-dessus de la moyenne. « Le risque est donc réel que le système de surcote ne parvienne guère à prolonger l'activité des travailleurs à bas revenus », fait-il remarquer.

... ce qui laisse le COR sceptique

Sur la question des surcotes, sur laquelle le Premier ministre l'avait mobilisé en urgence, la position du Conseil d'orientation des retraites diffère sensiblement de celle du CAE. L'instance n'est ainsi pas favorable à un versement de la surcote sous forme de capital, estimant cette possibilité d'un service sous forme de capital d'une fraction de la pension « contraire à l'objet même de l'assurance vieillesse qui est de protéger les assurés au titre du risque viager ». Elle voit même se profiler à terme « l'appauvrissement d'un certain nombre de retraités par rapport à la situation actuelle ».

Plus globalement, le COR, sans écarter cette éventualité, se montre prudent sur une revalorisation du taux de la surcote, actuellement de 3 % par année, mais qui pourrait être porté à 5% ou même plus pour la rendre plus attractive. S'appuyant sur une étude de l'INSEE, le conseil estime que, jusqu'en 2010 environ, les gains pour le régime s'élèveraient assez rapidement pour une surcote à 5 % du fait du décalage, même limité, des âges de départ, puis diminueraient rapidement, surtout avec une surcote à 7 %. Et qu'il y a donc un « risque de report sur les générations futures, qui seront moins nombreuses » et un coût pour les régimes de retraite. Pour limiter les risques financiers, il considère donc que «  la surcote ne saurait dépasser 5% , compte tenu notamment du caractère élevé en France de l'espérance de vie et de l'ampleur qu'a eu le baby-boom, ainsi que de l'âge auquel la surcote est ouverte ». Toutefois, s'il devait en être ainsi, le taux actuel de 3 % ne devrait pas être modifié la première année de surcote. Il paraît ensuite possible pour le COR d'envisager un passage progressif à 4 % puis à 5 % en fonction du nombre d'années de surcote acquises par l'assuré, ainsi qu'un taux de 5 % pour les années travaillées au-delà de la durée d'assurance nécessaire pour bénéficier d'une retraite complète et au-delà de 65 ans, âge auquel il n'y a plus de décote. Par ailleurs, l'instance souhaite qu'une harmonisation entre les régimes de retraite complémentaire et le régime général ait lieu « dès que possible » .

Du côté des fonctionnaires, le COR souligne que l'alignement de leur surcote sur celle des salariés du secteur privé pourra être envisagé « à partir du moment où la durée de cotisations des secteurs privé et public sera identique (2008)  » (7). Ce qui conduit à « conserver dans l'immédiat un taux de surcote de 3 % » . F.T.

Notes

(1)  Les seniors et l'emploi en France - Antoine d'Autume, Jean-Paul Betbèze et Jean-Olivier Hairault - Rapport disponible sur www.cae.gouv.fr.

(2)  Avis du COR du 14 février 2006, disponible sur www.cor-retraites.fr.

(3)  Indemnité supplémentaire due par les employeurs qui licencient un salarié de 50 ans et plus ouvrant droit au versement d'une allocation de chômage.

(4)  Voir ASH n° 2425 du 14-10-05.

(5)  Voir ASH n° 2323 du 5-09-03.

(6)  La pension de base déterminée par le taux plein resterait en rente et la sortie en capital correspondrait aux surplus dégagés par les trimestres de prolongation d'activité.

(7)  Dans la fonction publique, la durée d'assurance constituant le point de départ de la surcote est inférieure à la durée correspondante pour les salariés du secteur privé (40 ans).

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