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Projet de loi sur l'immigration : des craintes pour les droits individuels et le droit d'asile

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Déjà alarmées depuis la diffusion officieuse de l'avant-projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration (1), les associations renforcent leur mobilisation depuis la présentation de ce dernier devant le comité interministériel de contrôle de l'immigration, le 9 février (voir ce numéro).

« Le nouveau credo gouvernemental, "en finir avec l'immigration subie pour promouvoir une politique d'immigration choisie ", emploie des moyens sans concession », condamne le collectif « Uni (es) contre une immigration jetable » (2), qui lance un appel à « se battre avec force contre cette réforme qui réduit l'étranger à l'éventuelle utilité de la force de travail qu'il représente, violant, voire niant les droits à valeur constitutionnelle qui lui sont attachés ». Au cœur des inquiétudes : la fin de la régularisation systématique des sans-papiers au bout de dix ans de séjour en France et le raidissement des conditions au regroupement familial, déjà durcies par la loi du 26 novembre 2003. Ce qui fait notamment réagir l'Union nationale des associations familiales, qui présage un nombre accru de familles en situation de précarité, et pour laquelle « le droit à la famille est imprescriptible ».

Les CADA sortis des CHRS

Un autre volet de l'avant-projet de loi réforme le dispositif des centres d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA), dans la lignée de la note d'instruction aux préfets du 20 janvier dernier (3), qui vise à en améliorer la gestion et à en exclure les réfugiés statutaires et les déboutés. En vue de renforcer leur spécialisation, l'avant-projet de loi sort les CADA de la catégorie des centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS). « Ce qui nous semble fragilisant pour les structures et inutile, commente Anne Poulain, responsable de mission « publics et travail social » à la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale. Cette catégorisation par public ne permet pas une bonne articulation avec le dispositif global d'accueil et d'insertion et risque de jeter davantage de personnes à la rue. Sortir les CADA de la catégorie des CHRS revient à ne plus considérer les demandeurs d'asile comme des personnes en difficulté sociale. » En résumé, le dispositif tend à prendre une dimension davantage administrative que sociale avec, de surcroît, une dimension répressive.

Pierre Henry, directeur général de France Terre d'asile, se félicite malgré tout que la consultation des associations ait permis de sauver certains principes existants. Comme ceux concernant l'admission dans les centres, qui devrait rester, a promis le ministère chargé des affaires sociales, sous la responsabilité des gestionnaires (après accord du préfet). « Nous avons obtenu que les décrets d'application soient discutés avec les associations », ajoute Pierre Henry.

La Coordination française pour le droit d'asile (CFDA) s'inquiète, pour sa part, de la seule admission dans les établissements des demandeurs munis d'un titre de séjour, « alors que près d'un tiers en sont privés, parce qu'ils sont traités en procédure prioritaire ou en attente de transfert vers un autre pays de l'Union européenne ». La coordination juge cette disposition contraire au principe de l'inconditionnalité de l'accueil et non conforme aux normes européennes en matière d'accueil des demandeurs d'asile.

Autre préoccupation de la CFDA : l'avant-projet de loi insiste sur le fait que l'hébergement de résidents déboutés ou réfugiés statutaires peut être un motif de retrait de l'habilitation des établissements. La gestion du dispositif se ferait «  par le biais d'un système d'informations que les responsables des centres seraient tenus d'alimenter par la transmissions des données relatives à la situation administrative des personnes accueillies et à l'occupation des places dans leur CADA », ajoute-t-elle. Le terme de « personnes morales privées ou publiques, à but lucratif ou non,  » pour désigner les gestionnaires inquiète encore la coordination, qui craint une « possible gestion par des sociétés commerciales ».

La section française d'Amnesty international dénonce une autre disposition : la pérennisation de la liste des 12 « pays d'origine sûrs » adoptée par la France en juin 2005 (4), en complément de la liste communautaire à venir. Ce qui, insiste l'association, « allongera d'autant le nombre de pays considérés comme sûrs par la France », avec toutes les conséquences induites pour l'instruction des dossiers et l'accès aux droits sociaux des demandeurs.

Une «  invitation » qui devient « obligation »

Elément supplémentaire de désarroi :le texte remplace l' « invitation » à quitter le territoire après la décision de refus de séjour par une « obligation » à respecter dans un délai de un mois. Un recours suspensif de 15 jours contre cette décision serait possible, mais l'association juge ce délai nettement insuffisant et regrette que soit ainsi limitée « la possibilité pour les demandeurs d'asile de se maintenir après le rejet de la Commission des recours et de présenter une demande de réexamen de leur demande de protection, alors que certains obtiennent l'asile à ce stade de la procédure ».

Notes

(1)  Voir ASH n° 2437 du 6-01-06.

(2)  C/o : GISTI :- 3, villa Marcès - 75011 Paris - Tél. 01 43 14 84 84. - Appel consultable sur le site www.contreimmigrationjetable.org.

(3)  Voir ASH n° 2440 du 27-01-06.

(4)  Voir ASH n° 2415 du 8-07-05.

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