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Assistants familiaux : une reconnaissance légale, mais qui reste à conquérir

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Parce que « ça ne va pas tout seul » d'accueillir un enfant en grande difficulté, la loi du 27 juin 2005 a cherché à améliorer la qualification des assistants familiaux et à mieux les intégrer au projet institutionnel. Une inscription que certains conseils généraux tentent de promouvoir par diverses formules, mais qui ne va pas de soi.

Représentant le principal mode d'accueil des enfants confiés à l'aide sociale à l'enfance (ASE), les assistants familiaux reçoivent dans leurs foyers quelque 63 000 enfants (1). L'âge moyen de la population prise en charge est assez élevé :11,5 ans, et seuls 15 % des enfants ont moins de 6 ans (2). Ces placements relativement tardifs sont aujourd'hui très controversés. « Au nom d'une idéologie du lien qui empêche de recourir précocement à la suppléance parentale, la séparation des enfants et de leurs parents est différée », regrette Jean-Claude Cébula, directeur de l'Institut de formation, de recherche et d'évaluation des pratiques médico-sociales (IFREP) (3). Aussi, lorsqu'ils arrivent à l'ASE, les enfants sont-ils souvent très « abîmés », fait-il observer.

« En France, nous sommes le pays de la "mater dolorosa ", commente Jacques Dayan, pédopsychiatre au CHU de Caen. Autrement dit, on a tendance à considérer a priori que toutes les femmes sont heureuses et capables d'être mères. » C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la dépression post-natale a été reconnue plus tardivement dans l'Hexagone que dans d'autres pays comme la Grande-Bretagne qui, dès 1968, a mis en évidence sa fréquence. De la même manière, les pratiques de protection de l'enfance sont très différentes de part et d'autre de la Manche. Ainsi, en Grande-Bretagne, quand une jeune mère connaît de sévères difficultés avec son enfant, une expertise psychiatrique de trois semaines, payée par la justice, peut être mise en place dans un institut spécialisé. A l'issue de cette évaluation clinique, l'enfant est soit remis à sa mère, soit placé en famille d'accueil, soit déclaré juridiquement abandonné et confié à l'adoption- ce dernier cas n'ayant rien d'exceptionnel. La France, en revanche, cherche davantage à respecter les droits parentaux. Aussi « valorise-t-on énormément le lien parents-enfants, même dans le cas de familles dysfonctionnantes, voire toxiques, et privilégie-t-on de façon outrancière l'accueil familial en cas de souffrance de l'enfant », dénonce Jacques Dayan. Qui regrette qu'on ne se donne pas les moyens de chercher à éviter les placements par une aide périnatale intense ou de réfléchir aux modalités d'un accueil à long terme du tout-petit, lorsqu'il ne semble pas possible qu'il reste dans sa famille. Néan-moins, comme les critères d'intervention sont assez flous, reconnaît Jacques Dayan, les Anglais se demandent aujourd'hui s'ils ne procèdent pas à de trop nombreuses séparations (4). Symétriquement, « le monothématisme de la position française commence enfin à être mis en question », se réjouit le psychiatre, qui invite à mieux différencier les situations familiales pour leur apporter des réponses adaptées - et évaluées. A cet égard, insiste-t-il, il est indispensable de nourrir la réflexion en réalisant des études sur le développement des enfants confiés à des familles d'accueil. Sans perdre de vue les connaissances déjà acquises sur l'effet délétère, surtout dans la prime enfance, des changements fréquents de milieux de vie auxquels nombre d'enfants placés sont confrontés : des séparations répétées, qui les amènent à reproduire, avec l'adulte qui assume un rôle parental, les schémas relationnels antérieurs ayant abouti à ce qu'ils développent un mode d'attachement insécure.

Risquant d'être mis en difficulté par le comportement des enfants qu'ils accueillent (voir encadré ci-dessous), les assistants familiaux ont besoin d'être soutenus. Déjà en 1992, la réforme du statut des assistantes maternelles avait posé pour le département une obligation qui demeure : assurer l'accompagnement des professionnelles et l'évaluation des situations d'accueil par une équipe d'intervenants qualifiés dans les domaines social, éducatif, psychologique et médical. Cependant, « plus de dix ans après, de nombreuses intervenantes soulignaient leur insatisfaction, un certain nombre ne bénéficiant pas de rencontres régulières avec un travailleur social et beaucoup ne participant jamais à des réunions de synthèse concernant l'enfant accueilli », fait observer Anne Oui qui, ancienne de la direction générale de l'action sociale (DGAS), a suivi la réforme de 1992 et a préparé celle de 2005. Une enquête sur l'organisation de l'ASE, réalisée en 2001 par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES), a d'ailleurs établi que le nombre moyen d'enfants suivis par un travailleur social référent était plus élevé dans le cadre de l'accueil familial - 32 à 40 enfants - que dans celui du placement en établissement, où la « fourchette » allait de 3 à 35 (5).

Or, précisément, parce que « ça ne va pas tout seul » d'accueillir un enfant en grande difficulté, « la loi du 27 juin 2005 énonce très clairement qu'on n'est pas assistant familial de manière isolée, mais dans un cadre institutionnel », explique Anne Oui. Le texte affirme que l'activité des professionnels s'insère dans un dispositif de protection de l'enfance, un dispositif médico-social ou un service d'accueil familial thérapeutique, et prévoit que les intéressés sont rattachés à une équipe pluriprofessionnelle (6). Aussi chaque département doit-il élaborer un projet de service de l'ASE précisant l'organisation et le fonctionnement des équipes travaillant avec les assistants familiaux - dont ils sont reconnus comme des membres à part entière. Il est d'ailleurs prévu qu'ils participent aux réunions d'évaluation et/ou de synthèse sur la situation des enfants accueillis avec les autres personnels de l'équipe. Support de cette relation de travail, le contrat d'accueil. Distinct du contrat de travail, il voit son contenu enrichi : il doit préciser désormais les modalités d'information de l'assistant familial sur la situation de l'enfant - aux plans de sa santé et de son état psychologique, en particulier - et ses conséquences sur la prise en charge au quotidien (7). Il doit aussi indiquer comment ce professionnel est associé à la mise en œuvre et au suivi du projet individualisé de l'enfant. Enfin, les intéressés voient leur formation considérablement renforcée (voir encadré), et la nécessité de leur accompagnement professionnel réaffirmée.

Des départements s'engagent

La loi, cependant, ne fixe pas l'obligation de créer, dans le cadre de l'ASE, des services de placement familial autonomes, comme les services associatifs, « qui permettraient de poser clairement un dispositif interprofessionnel répondant aux besoins de prise en charge des enfants et des parents, ainsi qu'aux nécessités du travail en équipe », regrette Alain Boucher, administrateur de l'Association nationale des placements familiaux (ANPF). Cependant, rien n'empêche les départements d'aller plus loin dans la structuration de leurs services de placement familial. Tous, d'ailleurs, n'ont pas attendu la loi de 2005 pour mettre en place une équipe assurant le suivi des situations et/ou l'accompagnement des assistants familiaux.

Il en est ainsi dans le Val-de-Marne, où le travail des assistants familiaux s'inscrit dans le cadre d'équipes pluriprofessionnelles à même de leur fournir un étayage solide. Aujourd'hui, précise Anne-Marie Martinez, responsable des placements familiaux au conseil général, le placement familial est défini comme un service alliant, d'une part, accueil et hébergement par une famille chargée au quotidien de mettre en œuvre les soins ordinaires et, d'autre part, le soutien apporté à l'assistant familial. « Il s'agit d'une construction commune qui permet de croiser regards et pratiques et de compléter l'action de la famille d'accueil qui, à elle seule, ne saurait suffire », explique-t-elle. Schématiquement, ce travail d'équipe consiste à faire exister des espaces de parole et de partage d'expériences pour introduire du jeu dans une relation duelle qui peut devenir périlleuse, en particulier entre l'enfant accueilli et la famille d'accueil, ou entre le travailleur social référent de l'enfant et l'assistant familial.

Au service d'accueil familial de Draveil (Essonne), différents outils permettent de mettre en œuvre ces principes. C'est par exemple les « samedis d'ouverture »  : depuis 20 ans, un samedi sur deux, le service est ouvert pour les rencontres entre les parents et les enfants. Trois des six travailleurs sociaux du service sont présents à tour de rôle, si bien que la mé-diation avec les parents, qui viennent voir ou chercher leur enfant, ne dépend pas forcément du travailleur social référent. Il est prévu également que l'assistante familiale prête à engager un accueil fonctionne en tandem avec le travailleur social disponible, ce qui pourra l'amener à collaborer avec deux - ou, plus rarement, trois - professionnels différents.

Ailleurs, en Meurthe-et-Moselle, le placement fa-milial n'est pas structuré en service spécialisé, mais l'ASE a mis en place, depuis 1995, un dispositif de coordination et d'accompagnement professionnel des assistantes familiales (la CAPAM). Composée de six personnes - trois travailleurs sociaux, une psychologue, une responsable et une secrétaire-, cette structure intervient auprès des assistantes familiales et des autres professionnels de l'enfance, mais jamais auprès des enfants et de leur famille. Concrètement, le soutien des accueillantes par la CAPAM, qui va à leur rencontre, consiste à les aider à trouver leur juste place dans l'équipe constituée autour de l'enfant, et à leur permettre d'élaborer et de faire évoluer leur projet professionnel. Chacune d'entre elles bénéficie d'un référent éducatif de la CAPAM, qui l'épaule tout au long de sa carrière au travers d'entretiens réguliers et de rencontres ponctuelles à sa demande. Les assistantes familiales peuvent aussi être reçues individuellement par la psychologue et participer aux groupes de parole qu'elle anime. Au plan collectif, la CAPAM contribue également à développer les contacts entre les collègues (notamment par le biais d'un journal de liaison du placement familial). En outre, elle associe les intéressées -en fait, relativement peu nombreuses - aux réflexions engagées (par exemple la refonte du contrat d'accueil ou le développement de formes d'accueil innovantes).

« Le travail que nous menons avec les assistantes familiales, précise Sylvie Roumier, responsable de la CAPAM, se fait en lien avec les travailleurs sociaux qui sont les référents des enfants confiés et qu'il convient de ne pas déresponsabiliser. » Nombre d'entre eux estiment cependant que leurs collègues de la CAPAM sont « du côté des assistantes familiales » et ils ont tendance à se décharger sur elles de l'accompagnement des familles d'accueil. Pourtant, « donner une réelle place aux assistants familiaux n'est pas source de danger pour les autres professionnels : chacun y gagne », affirme Sylvie Roumier. A commencer par les enfants, dont la situation est déjà suffisamment complexe pour que les protagonistes du placement n'y ajoutent pas... l'incohérence de leurs relations. Caroline Helfter

UN ALBUM DE VIE POUR L'ENFANT

Pour que les enfants séparés de leurs parents puissent s'approprier leur histoire, Marceline Gabel, chargée de cours à l'Université Paris-X et consultante à l'Observatoire national de l'enfance en danger (ONED), a conçu en 2002 un instrument de mémoire, de dialogue et d'accompagnement, à la demande de Ségolène Royal, alors ministre déléguée à la famille et à l'enfance. Cet « album de vie » est mis à la disposition des institutions et des établissements accueillant durablement des enfants, afin qu'ils l'offrent à ces derniers dès leur arrivée (8). Tel un fil d'Ariane, il permet à l'enfant de fixer son cadre de vie au moment de la séparation (état civil, adresse, santé, scolarité, photos...), puis de relater les événements marquants de son existence familiale ou institutionnelle et de garder trace des liens établis avec les personnes significatives rencontrées. A travers la tenue de cet album, il s'agit aussi d'intéresser les professionnels à l'enfant et à son histoire, aux liens qu'il maintient ou non avec sa famille et aux mesures prises pour lui, explique Marceline Gabel. « Ce n'est en aucun cas un dossier administratif bis, mais l'intérêt que les institutions et les professionnels y porteront peut en faire un outil de formation continue les sensibilisant, d'une part, à la nécessité d'évaluer le parcours des enfants accueillis en établissements ou en familles d'accueil, d'autre part, à la mise en œuvre de pratiques bientraitantes faisant participer les parents chaque fois que cela est possible et opportun. »

« UN MÉTIER À RISQUES »

« Plus l'enfant est souffrant, plus il aura tendance à revenir au même, c'est-à-dire qu'il cherchera à susciter chez la personne qui s'occupe de lui un comportement tel qu'il lui permette de retrouver en elle le parent pathologique qu'il connaît », explique Jacques Dayan, pédopsychiatre au CHU de Caen. Aussi convient-il d'aider les assistantes familiales à résister aux attaques destructrices dont elles font l'objet, sans haïr l'enfant et sans l'abandonner. Elles-mêmes disposent d'un certain nombre d'atouts personnels. « A commencer par la compétence qu'elles ont acquise dans leur propre développement et le désir plus ou moins clair de réparation qui motive le choix de leur profession - en soi positif, même s'il doit faire l'objet d'un travail. » Souvent, une expérience de souffrance, de privation ou de carence qu'elles ont réussi à surmonter fait aussi partie du bagage des assistantes familiales, ajoute Jacques Dayan. Elles y puisent à la fois la possibilité de s'identifier aux souffrances de l'enfant et une assise suffisante pour assumer sa prise en charge. La qualité de celle-ci se heurte, cependant, à un certain nombre d'obstacles qui sont également liés à la personnalité des assistantes familiales. Il en est ainsi des limites à l'amour qu'elles peuvent donner : si l'enfant a un besoin vital d'être aimé pour se développer, il est en même temps très difficile pour les accueillantes de gérer leurs propres sentiments. Un autre écueil tient à leur capacité de supporter la déception associée à leur activité réparatrice, qui ne sera jamais à la hauteur de ce qu'elles souhaiteraient. La douleur et l'hostilité ressentie contre les parents de l'enfant lorsque celui-ci revient malade ou souffrant de chez eux font aussi partie des émotions délicates auxquelles elles sont confrontées. Tout comme la pitié qu'elles peuvent éprouver vis-à-vis de l'enfant ou de ses parents. Face à ces difficultés, les assistantes familiales sont à la fois mal préparées et insuffisamment soutenues, souligne-t-il. En particulier, « de nombreux conseils généraux n'acceptent pas qu'elles aient un interlocuteur psy personnel avec qui évoquer, non pas les questions éducatives, mais les problèmes psychologiques suscités par l'accueil de l'enfant », alors qu'à certains moments les prises de parole en groupe ne suffisent pas. Les familles d'accueil ont aussi beaucoup de mal à trouver un médiateur lorsqu'une décision de justice ou des services sociaux concernant un enfant dont elles s'occupent depuis longtemps leur paraît inadaptée. « Cette possibilité de recours serait d'autant plus nécessaire que les travailleurs sociaux s'identifient plus facilement aux parents et manquent souvent d'intuition, d'empathie et de formation pour comprendre le vécu très particulier des familles d'accueil. »

TROIS DOMAINES DE COMPÉTENCES

La loi du 27 juin 2005 met l'accent sur l'amélioration de la formation des assistants familiaux (9). Celle-ci ne sera plus de 120 heures en cours d'emploi, mais de 300 heures, réparties en deux volets à la charge de l'employeur : un stage préparatoire de 60 heures (soit 10 jours) dans les deux mois précédant l'accueil du premier enfant, puis une formation d'adaptation à l'emploi de 240 heures (sur une amplitude de 18 à 24 mois) dans un délai de trois ans après le premier contrat de travail suivant l'agrément. Pour définir les contenus de cette seconde étape de formation, un groupe de travail, formé au sein de la commission professionnelle consultative du travail social et de l'intervention sociale, a établi un « référentiel métier » qui dégage trois grands blocs de compétences. Ce qui constitue le « cœur de métier » de l'assistant familial - et la plus grande partie de cette formation (soit 140 heures sur les 240 prévues) - concerne toutes les compétences qui font la spécificité de la profession : mettre en œuvre à l'égard du mineur ou du jeune majeur accueilli l'ensemble des fonctions parentales quotidiennes sans empiéter sur les autres aspects de la parentalité, c'est-à-dire donner les soins indispensables permettant à un enfant de se sentir exister, d'éprouver de l'affection pour celui qui les prodigue et de poursuivre son développement physique et psychique grâce à la sécurité procurée. Deuxième bloc de compétences, l'accompagnement éducatif donnera lieu à 60 heures de formation. Le troisième domaine, désigné sous l'appellation de « communication professionnelle », rend compte du positionnement de l'assistant familial dans un cadre institutionnel et couvrira 40 heures de la future formation en cours d'emploi. Celle-ci débouchera sur un diplôme de niveau V, accessible par des épreuves de certification ou par la voie de la validation des acquis de l'expérience, dont les titulaires n'auront pas à faire renouveler leur agrément tous les cinq ans : il sera considéré comme valable sans limitation de durée.

Notes

(1)  Faute de moyens suffisants dans les secteurs du handicap et de la psychiatrie, un certain nombre d'assistants familiaux relevant de la protection de l'enfance sont également amenées à accueillir des enfants qui devraient bénéficier de prises en charge médico-sociales ou psychiatriques.

(2)  Tous modes d'accueil confondus (placement familial ou en établissement et hébergement autonome d'adolescents), les enfants confiés à l'ASE comptaient, en 2002,15 % de moins de 6 ans, 23 % de 6-10 ans, 33 % de 11-15 ans, 16 % de 16-17 ans et 13 % de jeunes majeurs.

(3)  Lors des journées d'étude sur l'accueil familial, organisées par l'IFREP à Paris les 21 et 22 novembre 2005 - IFREP : BP 358 - 75626 Paris cedex 13 - Tél. 01 45 89 17 17.

(4)  Sur la protection de l'enfance en Angleterre, voir ASH n° 2425 du 14-10-05.

(5)  Voir ASH n° 2237 du 16-11-01.

(6)  Voir ASH n° 2427 du 28-10-05.

(7)  Voir ASH n° 2413 du 24-06-05.

(8)  Le CD-Rom de l'album de vie est gracieusement remis par le bureau famille-enfance de la direction générale de l'action sociale aux conseils généraux, qui peuvent y insérer leur logo.

(9)  Voir ASH n° 2437 du 6-01-06.

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