S'appuyant sur une version du plan de prévention de la délinquance qui circule depuis la fin du mois de décembre et, désormais, des annonces du ministre de l'Intérieur lors de ses vœux du 12 janvier (voir ce numéro), le Collectif national unitaire qui s'était constitué contre l'avant-projet de loi Sarkozy en 2004 (1) se prépare à une nouvelle mobilisation. Le projet de texte diffusé par la bande, observe-t-il, comporte de nombreuses similitudes avec celui de janvier 2004, qui avait fait descendre quelques milliers de travailleurs sociaux dans la rue. Si le texte pointe « que les causes sociales sont à l'œuvre dans les phénomènes de délinquance, le ton est donné d'emblée, selon lui : cela ne doit pas servir d'excuses, et il s'agira donc de contrôler, d'encadrer des populations désignées comme suspectes ».
Au-delà de cette approche, les maires se verraient, sans surprise, confier le pilotage local de la prévention de la délinquance. Ajout néanmoins, en écho à une proposition du rapport Bénisti (2) : la création d'une délégation pour la prévention de la délinquance, placée auprès du ministre de l'Intérieur, qui animerait, entre autres, le réseau des préfets à l'égalité des chances. S'agissant de la circulation des informations, les professionnels de la prévention, « dont le maire », devraient pouvoir « se communiquer entre eux les informations nécessaires aux seules fins d'éviter toute rupture ou tout retard des interventions, et ce dans le strict cadre de leurs missions, c'est-à-dire dans l'intérêt même de la personne au profit de laquelle ils agissent ». Le texte « cherche à éviter de poser la question de modifier le code pénal et de rendre "compatible" ce projet et le code pénal actuel », commente le Collectif national unitaire. S'il conserve des dispositions en la matière, le plan de Nicolas Sarkozy devra, quoiqu'il en soit, être cohérent avec le projet de loi sur la protection de l'enfance attendu pour le mois de mars. Lequel devrait pour sa part trancher sur la légalisation du partage du secret professionnel. Un groupe de travail sur le sujet, piloté par le ministère de la Justice, auquel participent plusieurs institutions, la direction générale de l'action sociale et, notamment, l'Association nationale des assistants de service social et le Carrefour national de l'action éducative en milieu ouvert, a démarré sa réflexion le 19 janvier. Les dispositions sur la suppression des prestations familiales, déjà inscrites dans le projet de loi sur l'égalité des chances, ne devraient en outre pas figurer dans le plan de Nicolas Sarkozy.
Ainsi qu'il l'avait prévu dans la version du projet de loi de 2004, le ministre entendrait développer les diplômes sanctionnant la formation aux métiers de la prévention, renforcer la reconnaissance des métiers de la médiation sociale, créer un bac professionnel préparant à l'ensemble des métiers de la sécurité et de la prévention, instaurer une « culture commune » entre travailleurs sociaux, policiers, magistrats... Egalement au programme de l'avant-projet : l'amélioration du suivi psycho-médico-éducatif des enfants, la prévention des violences conjugales, le développement de l'accès aux internats d'excellence, l'intégration des jeunes issus des quartiers défavorisés dans les écoles de formation des cadres de la fonction publique, ou encore la réorganisation du régime de la sortie d'essai liée aux hospitalisations psychiatriques d'office. La création d'une contravention de 5e classe pour sanctionner les usagers de drogue, un temps envisagée par le gouvernement, semble être de nouveau à l'étude.
Autre projet, jugé « très inquiétant » par le Collectif national unitaire : l'élargissement de la « gamme » de sanctions applicables aux mineurs de moins de 13 ans, qui devrait nécessiter une décision du ministère de la Justice. Il s'alarme également de dispositions sur la réponse pénale aux violences urbaines. Pour contourner le problème de la preuve matérielle de l'infraction commise par un individu dans le cadre de regroupements, le ministère de l'Intérieur souhaiterait l'engagement de « la responsabilité pénale personnelle de chacun des membres qui s'y sera joint volontairement et dès lors que des infractions graves contre les personnes et les biens et de nature au moins correctionnelle seront commises ». Ce qui, pour le collectif, rappelle « la tristement célèbre loi anticasseurs des années 70 ».
(1) CGT - FSU - SUD - Syndicat de la magistrature - Syndicat national des médecins de PMI - Union syndicale G10 Solidaires - CNT - Coordination des étudiants en travail social - Collectifs de prévention spécialisée - AC ! - LDH - APEIS - CFDT Cheminots - Collectif Informatique Fichiers et Citoyenneté - Collectif des formateurs en travail social - Conférence permanente des organisations professionnelles du social - FCPE.
(2) Voir ASH n° 2433 du 9-12-05.