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L'emploi des jeunes et la responsabilisation des parents au cœur du projet de loi pour l'égalité des chances

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Décrété « grande cause nationale pour 2006 » au lendemain des émeutes qui ont enflammé les banlieues à l'automne dernier, le thème de « l'égalité des chances » est au cœur d'un projet de loi que le ministre de la Cohésion sociale, Jean-Louis Borloo, a présenté le 11 janvier en conseil des ministres. Le texte, qui provoque d'ores et déjà une forte mobilisation associative et syndicale (voir ce numéro), brasse large et reprend les annonces faites par le Premier ministre il y a un peu plus d'un mois (1). Tour d'horizon des principales mesures.

Favoriser l'emploi des jeunes des quartiers difficiles

Le projet de loi fixe le nouveau cadre de « l'apprentissage junior », dispositif qui permettra la signature d'un contrat d'apprentissage dès l'âge de 15 ans (au lieu de 16), après une première année consacrée à un « parcours d'initiation aux métiers », accompli notamment en entreprise mais sous statut scolaire (2). Cette nouvelle formule sera ouverte aux élèves volontaires et leur choix, inscrit dans un « projet pédagogique formalisé », sera réversible. Des avantages fiscaux sont en outre prévus pour inciter les entreprises à s'impliquer dans le dispositif.

D'autres mesures visent à favoriser l'emploi des jeunes. Le texte introduit ainsi la notion de décision implicite d'acceptation d'un contrat de professionnalisation, à défaut d'une réponse de l'organisme paritaire collecteur agréé (OPCA) dans un délai d'un mois. L'objectif étant, explique l'exposé des motifs, de régler les difficultés existantes dans la prise en charge financière des formations par les OPCA, « certains d'entre eux ayant une définition restrictive de la liste des formations qu'ils acceptent de financer ». Le projet de loi propose par ailleurs de créer, en faveur des moins de 25 ans issus de zone urbaine sensible (ZUS), des conditions d'accès privilégiées au dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise (SEJE) (3), tout en laissant le soin à un décret de prévoir les montants et les modalités d'attribution de l'aide de l'Etat à l'employeur en fonction du niveau de formation du bénéficiaire et de son éventuelle résidence en ZUS.

Signalons encore que le texte prévoit la création de 15 nouvelles zones franches urbaines (ZFU) à partir du 1er août 2006, sous réserve de l'approbation de Bruxelles. Un comité interministériel en fixera la liste fin janvier. Le dispositif fiscal de l'ensemble des ZFU est par ailleurs renforcé.

Une Agence nationale pour la cohésion sociale

Le projet de loi entérine la création de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances, qui aura pour mission de « mettre en place des actions en faveur des habitants résidant dans les ZUS et les quartiers qui présentent des caractéristiques analogues et des actions en direction des publics rencontrant des difficultés d'insertion sociale ou professionnelle sur l'ensemble du territoire national ». Elle aura également un rôle à jouer dans la mise en place du nouveau « service civil volontaire » prévu lui aussi par le texte pour les jeunes de 16 à 25 ans. Elle devra encore « concourir à la lutte contre les discriminations, à l'intégration des populations immigrées et à la lutte contre l'illettrisme » , ce qui pose la question de la survie de deux structures : le Fonds d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les discriminations (Fasild) d'une part, et l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme (ANLCI), d'autre part. Dans le premier cas, les choses sont claires. Les missions du Fasild seront transférées à la nouvelle agence, à l'exception des actions de participation à l'accueil des populations immigrées, qui sont désormais confiées à l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations. Ses compétences seront transférées de la même façon, tout comme l'ensemble de ses biens, moyens, droits et obligations. Ainsi, le Fasild, tel qu'il existe aujourd'hui, disparaîtra. Il constituera pour autant le « socle de la nouvelle agence », a assuré le 10 janvier la ministre déléguée à la cohésion sociale, Catherine Vautrin. Le projet de loi n'évoque pas, en revanche, le sort réservé à l'ANLCI. Initialement, il était prévu que ses missions soient elles aussi transférées à la nouvelle agence. Il n'en est plus question dans la mouture du texte que les parlementaires auront à examiner.

Concrètement, la nouvelle agence pourra notamment apporter des concours financiers aux collectivités territoriales, aux établissements publics de coopération intercommunale compétents et à certains organismes publics ou privés. Les préfets seront les délégués départementaux de l'agence. A ce titre, ils signeront et assureront le suivi des conventions signées entre l'agence et ses partenaires.

Le projet de loi prévoit, au-delà, un renforcement des pouvoirs de sanctions de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité et légalise la pratique des vérifications à l'improviste (« testing » ) comme moyen de preuve d'éventuelles discriminations.

Un contrat pour répondre aux « carences de l'autorité parentale »

Le projet de loi instaure par ailleurs un « contrat de responsabilité parentale ». Il devrait être mis en place « en cas d'absentéisme scolaire ou de toute autre difficulté liée à une carence de l'autorité parentale » et proposé aux parents par le président du conseil général. Concrètement, le contrat rappellera à la famille ses obligations parentales et proposera « des mesures d'aide et d'actions sociales afin de revenir à une situation plus favorable à l'enfant ». Faute d'accord - à moins d'un motif légitime - ou si les obligations liées au contrat ne sont pas respectées, le président du conseil général pourra demander la suspension du versement de tout ou partie des prestations afférentes à l'enfant ou la mise sous tutelle des prestations familiales. En outre, en cas de faits susceptibles de constituer une infraction pénale, il pourra saisir le procureur de la République.

Signalons enfin deux articles du texte consacrés à la lutte contre les incivilités et tendant à renforcer les pouvoirs des maires en la matière. Le pouvoir de constatation des agents de police municipale pour certaines contraventions sera ainsi étendu. Les édiles pourront en outre, lorsque ces incivilités auront été commises sur le territoire communal mais pas au préjudice de la commune, proposer au parquet de recourir à une alternative aux poursuites. Et si elles ont porté préjudice à un bien de la commune, ils pourront proposer au contrevenant une transaction soumise à l'homologation du parquet, consistant en la réparation du préjudice.

Le texte devrait être présenté rapidement au Parlement. Jean-Louis Borloo souhaite en tout cas le voir publié « dans les deux mois ».

Notes

(1)  Voir ASH n° 2433 du 9-12-05.

(2)  Le projet de loi distingue bien deux phases : l'apprentissage junior initial, qui offre une initiation aux métiers, et l'apprentissage junior confirmé, durant lequel le jeune se trouve sous contrat d'apprentissage.

(3)  Le SEJE permet aux employeurs qui embauchent certaines catégories de jeunes de bénéficier d'une prime mensuelle dont le montant est majoré si le jeune embauché est sans qualification.

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