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Le projet de loi pour l'égalité des chances suscite de nombreuses craintes

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Absence de concertation dans l'élaboration du texte, amalgame entre pauvreté, population en difficulté, quartiers sensibles et immigration, risque de dilution et de démantèlement des missions... Nombreuses sont les craintes que le projet de loi pour l'égalité des chances, présenté le 11 janvier en conseil des ministres (voir ce numéro), suscite chez le personnel du Fonds d'action et de soutien à l'intégration et à la lutte contre les discriminations (Fasild) et de la délégation interministérielle à la ville (DIV). L'intersyndicale (CGT et CFDT) des deux institutions qui devraient être intégrées au sein de la future Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (1), appelait à une mobilisation le 11 janvier pour demander « l'ouverture immédiate de négociations au niveau ministériel sur le devenir de leurs missions » et l'avenir de leurs agents. L'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme, qui devait être également absorbée par la nouvelle structure, ne devrait finalement pas y figurer.

Selon le projet de loi, l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances devra mettre en place des actions en direction des habitants résidant dans les territoires ou quartiers prioritaires ou rencontrant des difficultés d'insertion sociale ou professionnelle. Le personnel de la DIV s'interroge néanmoins sur l'imprécision de ses futures missions : « Cela est encore plus vrai pour la question non traitée de la prévention de la délinquance », ajoute-t-il, inquiet des projets du ministre de l'Intérieur en la matière et rappelant qu'elle est « formellement inscrite dans le décret de 1988 portant création de la DIV ».

Les préfets seraient, dans les départements, les délégués de l'agence et signeraient les conventions avec les collectivités territoriales. Pour les syndicats du Fasild, cette disposition « remet en cause l'autonomie de gestion et d'administration » de l'institution et la rend vulnérable aux pressions, « dominées par les enjeux sécuritaires et électoraux » des élus. Ils regrettent également que les associations « figurent en queue de peloton pour ce qui est des conventionnements avec la future agence ». Reçus au cabinet de Jean-Louis Borloo, les syndicats ont néanmoins obtenu l'engagement que l'organisation régionale du Fasild serait reproduite, que l'agence conserverait sa configuration paritaire et que le personnel serait maintenu sans changement de statut. La CGT et la CFDT devraient par ailleurs être associées à l'élaboration du décret qui précisera l'organisation de l'agence. Pour tenter d'apaiser le climat, le ministre de la Cohésion sociale a par ailleurs annoncé que l'agence serait « un outil de coordination, pas de fusion de structures qui existent déjà ».

Les syndicats ne baisseront pas pour autant la garde et continueront de monter au créneau avec plusieurs associations avec lesquelles ils ont décidé de mener une « campagne d'opinion » sur les risques du projet de loi. Le 10 janvier, la Ligue des droits de l'Homme (LDH), le MRAP, la Ligue de l'enseignement et la Cimade (2) exprimaient leurs préoccupations communes. Jean-Pierre Dubois, président de la LDH, a dénoncé une « reprise en main administrative et bureaucratique » de la lutte contre les discriminations, qui deviendrait « une affaire de l'Intérieur et des maires », ainsi que l'oubli de la société civile dans le projet. Il s'est également alarmé « des mesures dangereuses derrière l'affichage de valeurs positives » comme l'apprentissage à 14 ans, le pouvoir de sanction donné aux édiles communaux ou encore le contrat de responsabilité parentale.

Ce dernier fait d'ailleurs réagir le collectif Alerte (3), après l'Union nationale des associations familiales (4) et le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale (5). Les 41 fédérations et associations de lutte contre la pauvreté expriment leur désaccord sur la proposition de mettre sous tutelle ou de suspendre les allocations familiales lorsque le contrat de responsabilité parentale n'est pas signé ou respecté. «  Un contresens grave » puisque cela ne «  ferait que renforcer les détresses des familles démunies et n'aurait aucun effet sur les familles aisées ». Au contraire, estime le collectif, «  c'est en renforçant l'accompagnement et le soutien des familles et des jeunes en difficulté que l'on pourra résoudre leurs problèmes et leur déscolarisation ou leur échec scolaire, et non en les sanctionnant ». En outre, «  peut-on décemment responsabiliser par l'argent des familles qui n'ont rien ou quasiment rien pour vivre sans ces allocations ? », s'interroge-t-il.

S'il n'est pas opposé au principe d'un contrat passé entre les institutions de la République et les parents, fondé sur l'objectif de réussite scolaire de tous les enfants, le collectif estime celui-ci «  manifestement unilatéral », «  contraire au principe de libre adhésion » et de nature à culpabiliser un grand nombre de familles.

Quelle est la cohérence des politiques ?, s'interroge aussi Alerte, qui rappelle que la possibilité de suspendre les allocations familiales avait été abrogée par la loi du 2 janvier 2004 sur l'accueil et la protection de l'enfance. Enfin, il estime que faire de la tutelle aux prestations sociales, procédure ordonnée par le juge des enfants, «  une sanction dans les mains du président du conseil général » reviendrait «  à la détourner de son objet ». Autant d'arguments qui l'amènent à demander la suppression des sanctions liées au contrat de responsabilité parentale.

Notes

(1)  ASH n° 2435 du 23-12-05.

(2)  C/o LDH - 138, rue Marcadet - 75018 Paris - Tél. 01 56 55 51 00.

(3)  Voir ASH n° 2430 du 18-11-05.

(4)  Voir ASH n° 2437 du 6-01-06.

(5)  C/o Uniopss : 133, rue Saint-Maur - 75541 Paris cedex 11 - Tél. 01 53 36 35 00.

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