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Un rapport pointe les failles des centres de placement immédiat

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Un rapport d'évaluation des centres de placement immédiat (CPI) réalisé par l'inspection des services de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) à la demande, en mars 2005, du directeur de la PJJ, souligne plusieurs faiblesses du dispositif, rejoignant sur ce point les positions des syndicats (voir ce numéro). Les CPI, rappellent les rapporteurs, sont nés en 1999 d'une décision du conseil de sécurité intérieure, répondant au triple souci de pouvoir disposer de places d'hébergement immédiat, de rassurer l'opinion en matière d'ordre public et de la volonté du ministère de la Justice de maintenir le caractère éducatif des placements. Pour autant, la direction de la PJJ ne s'est dotée « d'aucune structure-projet en mesure de porter politiquement ses objectifs », constatent-ils, ce qui a abouti à un manque de pilotage du dispositif et a renforcé la réticence d'une bonne partie des professionnels.

Autre critique : comme pour les centres éducatifs fermés, « la réponse à la commande politique (urgence, nombre de CPI, couverture du territoire national...) a été privilégiée par rapport à l'analyse des besoins des juridictions comme des départements ». Les inspecteurs émettent l'hypothèse que « certains directeurs régionaux ont saisi l'opportunité offerte par le programme pour rééquilibrer les capacités de la protection judiciaire de la jeunesse dans leur région ». Les locaux, en partie issus de l'existant, se sont en outre avérés « massivement inadaptés », ce qui a amené les directeurs territoriaux à « composer » avec le cahier des charges, allant jusqu'à « externaliser » la prise en charge en famille d'accueil ou en hébergement individualisé.

L'accueil immédiat respecté

S'agissant des « points forts », le rapport observe que la priorité a bien été donnée aux mineurs délinquants multirécidivistes et que le principe de l'accueil immédiat a été respecté. Dans ces structures devant assurer une prise en charge éducative jour et nuit, il relève également « un décalage entre un discours empreint de réticence vis-à-vis des notions de contrôle et de surveillance et des pratiques qui montrent que ces préoccupations sont concrètement prises en compte de façon majoritaire ». Sur les trois dernières années, les fugues ne « représentent que 7,5 % des journées de prise en charge en moyenne ». Bémol cependant : certains magistrats semblent réduire les CPI à leur rôle de contention et les « bilans-orientation » sont « le plus souvent inexistants ».

Les CPI vivent « souvent mal le fait d'être des réceptacles de tous les besoins en matière d'accueil d'urgence ». Leur mauvaise intégration dans le schéma départemental conjoint, la réticence des établissements sollicités, conjuguées à l'insuffisance de places en foyer classique, rend l'orientation des mineurs placés « particulièrement problématique » , mettant à mal la continuité de la prise en charge éducative.

Les inspecteurs constatent également que les modèles éducatifs fondés sur l'adhésion volontaire du jeune sur le principe de l'accès à l'autonomie « constituent encore les référents implicites de nombreuses pratiques éducatives » alors que « les caractéristiques sociologiques et psychologiques des mineurs délinquants placés viennent percuter fortement ces modèles ». Ils regrettent une prise en charge encore « trop peu intensive » et pointent l'inexpérience des éducateurs, l'hébergement souffrant « depuis de longues années d'une dévaluation symbolique ».

Reste que l'activité des centres de placement immédiat est en deçà des objectifs fixés : avec 352 places, 39 % des objectifs d'accueil ont été atteints et l'ensemble des structures est en sous-occupation (50,88 % en 2004), alors que leur prix de journée « demeure très élevé » (656,66 € en 2004).

Les limites des commandes politiques

Comment expliquer toutes ces faiblesses ? Les inspecteurs les imputent en partie à la PJJ, mais aussi aux « limites de commandes politiques axées sur des réponses « visibles » ». Sans ambages, ils affirment « qu'il ne suffit pas de redéployer ou d'attribuer de nouveaux moyens pour traiter un problème de société » et pointent le risque de faire de l'hébergement « un déversoir non régulé des situations les plus problématiques ». S'est ainsi installée, témoignent-ils, une concurrence entre les structures au détriment des missions, sans pour autant « que soit garantie la cohérence des diverses interventions et que le projet de réinsertion soit travaillé avec l'ensemble des acteurs ».

Passés ces constats, les rapporteurs formulent plusieurs propositions. Ils suggèrent « une approche décloisonnée de la prise en charge des mineurs », en la confiant à la direction départementale de la PJJ, qui garantirait la cohérence des parcours et aurait aussi la possibilité d'adapter les effectifs de personnel. Pour l'inspection, les principes de l'éducation renforcée « ne doivent plus être réservés à l'hébergement et doivent s'appliquer à tous les acteurs du secteur public de la PJJ, milieu ouvert et insertion compris ». L'accueil d'urgence devrait également être partagé avec les autres acteurs de la protection de l'enfance. Enfin, « pour des raisons économiques et pédagogiques », les auteurs préconisent de «  ne plus maintenir les établissements dont la capacité d'accueil réelle est inférieure à dix places ».

Une situation que Michel Duvette, directeur de la PJJ, indique « étudier avec attention » dans une note aux directeurs régionaux et au directeur du Centre national de formation et d'études de la PJJ datée du mois d'octobre. Il souligne également que le décret relatif à la classification, à l'organisation, au contrôle et à l'évaluation des établissements et services de la DPJJ « mettra l'accent sur les missions dont la mise en oeuvre effective doit être garantie dans chaque dispositif départemental ». Il rappelle que sa note du 29 juillet 2005 (1) permettra davantage de polyvalence des établissements. « Il est également indispensable que chaque département soit doté d'un dispositif d'accueil d'urgence », ajoute-t-il, et que soit organisée « une prise en charge collective de chaque jeune » par l'institution. La formation professionnelle des personnels éducatifs devrait par ailleurs mettre l'accent sur l'accueil et l'orientation, ainsi que sur les techniques d'encadrement d'activités. L'affectation départementale des jeunes et des agents n'a pas, en revanche, les faveurs du directeur de la PJJ.

M. LB.

Notes

(1)  Voir ASH n° 2424 du 7-10-05.

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