Recevoir la newsletter

L'ORDONNANCE DE SIMPLIFICATION DU DROIT EN MATIERE D'ACTION SOCIALE

Article réservé aux abonnés

Simplifier les procédures d'admissionà l'aide sociale, passer à une gestion plus globalisée des crédits, offrir un droit d'option entre l'autorisation et l'agrément aux services d'aide àdomicile, lutter contre la maltraitance en clarifiant le régime des incapacités professionnelles :l'ordonnance du 1er décembre est ambitieuse, et parfois controversée.

Ordonnance portant diverses dispositions relatives aux procédures d'admission à l'aide sociale et auxétablissements et services sociaux et médico-sociaux

(Ordonnance n° 2005-1477 du 1er décembre 2005, J.O. du 2-12-05)

C'est un texte épuré comprenant 17 articles qui vient d'être publié au Journal officiel après avoirété soumis au conseil des ministres du 30 novembre par le ministre de l'Emploi et de la Cohésion sociale. L'ordonnance portant diverses dispositions relatives aux procédures d'admission à l'aide sociale et aux établissements et services sociaux et médico-sociaux du 1erdécembre 2005, prise en application de l'article 72 de la loi du 9 décembre 2004 de simplification du droit (1), a donc payé le prix de l'encombrement du Conseil d'Etat chargé de donner son avis sur le texte et a perdu en cours de route 28 de ses dispositions. La plupart des mesures mises de côté devraient toutefois être instillées dans d'autres textes, notamment lors de la discussion au Parlement du collectif budgétaire et du projet de loi « engagement national pour le logement », ou encore figurer dans une autre ordonnance attendue pour le mois de mai 2006 au plus tard. Celle-ci devraitêtre adoptée conformément cette fois àl'article 84 de la loi du 9 décembre 2004, qui autorise le gouvernement à légiférer par ordonnance pour inclure des dispositions de nature législative qui n'ont pasété codifiées et pour remédier auxéventuelles insuffisances de codification au sein, en particulier, du code de l'action sociale et des familles. D'autres dispositions encore - notamment en matière tarifaire -devraient figurer dans un décret d'application de l'ordonnance qui doit être examiné par le comité national de l'organisation sanitaire et sociale du 15 décembre 2005.

Pour autant, ce texte comporte de nombreuses innovations pour le secteur social et médico-social. Afin d'accélérer la procédure d'attribution des droits à certaines prestations d'aide sociale légales, il prévoit ainsi de supprimer les commissions d'admission à l'aide sociale et clarifie les compétences en la matière.

En outre, en réponse aux réclamations de plusieurs catégories d'intervenants sociaux (2), l'ordonnance élargit le champ des structures entrant dans la nomenclature des établissements et services sociaux et médico-sociaux fixée par l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles.

Autre innovation, qui soulève la controverse (3), le texte organise, pour tous les services d'aide et d'accompagnement à domicile, un droit d'option entre la procédure d'autorisation desétablissements et services sociaux et médico-sociaux et celle d'agrément récemment modifiée par la loi du 26 juillet 2005 relative au développement des servicesà la personne et par un décret d'application (4).

L'ordonnance comprend par ailleurs tout un volet relatif àdes mesures de tarification. Elle permet ainsi d'accorder une autorisation ayant un effet différé de une ou 2 années au plus à des projets de création, d'extension ou de transformation d'établissements ou de services sociaux ou médico-sociaux. Elle vise égalementà prévoir les conséquences de l'amendement Creton et précise les modalités de calcul des tarifs applicables aux jeunes adultes handicapés maintenus dans desétablissements pour enfants.

Pour faire face à la charge de travail des services départementaux en matière d'autorisation, d'habilitationà l'aide sociale ou de tarification des services d'aideà domicile non médicalisés, qui ontété intégrés dans la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale, ces services décentralisés sont autorisés à conclure des conventions avec un ou plusieurs groupements départementaux auxquels des services d'aide à domicile ont adhéré. Ces groupements pourront alors solliciter les autorisations et habilitations et obtenir une tarification pour le compte de leurs adhérents.

Une autre mesure, longuement discutée avec les partenaires associatifs, offre la faculté aux établissements d'hébergement pour personnes âgées accueillant un nombre minoritaire de bénéficiaires de l'aide sociale d'abandonner la tarification administrée.

Par ailleurs, l'ordonnance vise à simplifier et clarifier les procédures de contrôle et de fermeture desétablissements et services sociaux et médico-sociaux. Et prévoit des sanctions en cas d'obstacles aux contrôles. Le texte regroupe, en un article unique, les diverses dispositions relatives aux incapacités professionnelles du champ social et médico-social, aujourd'hui éclatées. Etétend les structures et activités concernées ainsi que la liste des infractions pouvant entraîner de telles incapacités. Enfin, pour réparer un oubli de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 (5), l'ordonnance établit clairement la compétence du président du conseil général en matière d'organisation de la formation initiale et continue à laquelle sont tenus les accueillants familiaux, à titre onéreux, à leur domicile, de personnes âgées ou handicapées adultes.

Relevons que, dans la dernière ligne droite, les dispositions réclamées par les associations prévoyant un report du calendrier des procédures d'évaluation interne et externe des établissements et services sociaux et médico-sociaux ont disparu de la mouture finale. Toutefois, cette mesure pourrait, selon nos sources, être réintégrée dans le projet de loi de ratification de l'ordonnance que le gouvernement doit faire voter par les parlementaires pour donner pleinement valeur législative à ce texte.

I - LA SIMPLIFICATION DES PROCÉDURES D'ADMISSION À L'AIDE SOCIALE

A - La suppression des commissions d'admissionà l'aide sociale (art. 1, II à XII de l'ordonnance)

L'ordonnance vise à simplifier les procédures d'admission à l'aide sociale en supprimant, en premier lieu, les commissions d'admission à l'aide sociale (code de l'action sociale et des familles [CASF], art. L. 131-5 et L.131-6 abrogés). Cette disparition s'explique par la réduction progressive du champ d'intervention de cette instance au profit d'une compétence attribuée au département.

Le texte allège ainsi «  l'instruction du droit de quelques rares prestations d'aide sociale qui relevaient encore d'une procédure ancienne et particulièrement lourde », indique le rapport au président de la République annexé à l'ordonnance.

Tenant compte de cette disparition, l'ordonnance procèdeà un toilettage du code de l'action sociale et des familles (CASF, art. L. 111-3, L. 113-1, L. 131-1, L. 131-3, L. 132-6, L.133-3, L. 133-5, L. 134-5, L. 134-7 et L. 134-8 modifiés).

B - La simplification de la procédure

Parallèlement à cette suppression, l'ordonnance cherche à simplifier les procédures.

1 - LA CLARIFICATION DES COMPÉTENCES (art. 1, I, 1°)

Le gouvernement vise d'abord à clarifier la répartition des compétences entre les différentes autorités concernées.

Ainsi, « la décision d'admission à l'aide sociale est prise par le représentant de l'Etat dans le département pour les prestations qui sont à la charge de l'Etat en application de l'article L. 121-7 du [code de l'action sociale et des familles] et par le président du conseil général pour les autres prestations d'aide sociale prévues par le présent code » (CASF, art. L. 131-2 nouveau).

Le représentant de l'Etat est donc chargé de se prononcer sur :

 les dépenses d'aide sociale engagées en faveur des personnes sans domicile fixe ;

 les dépenses d'aide sociale qui n'ont pas pu être prises en charge par les personnes tenuesà l'obligation alimentaire en faveur du demandeur d'aide sociale (6)  ;

 les frais d'aide médicale de l'Etat ;

 l'allocation simple aux personnesâgées ;

 l'allocation différentielle aux adultes handicapés ;

 les frais d'hébergement, d'entretien et de formation professionnelle des personnes handicapées dans les établissements de rééducation professionnelle ;

 les frais de fonctionnement des structures d'aide par le travail ;

 les mesures d'aide sociale en matière de logement, d'hébergement et de réinsertion ;

 l'allocation aux familles dont les soutiens indispensables accomplissent le service national.

Pour le reste, c'est le président du conseil général qui est compétent.

2 - UN DISPOSITIF D'INFORMATION DES AUTORITÉS COMMUNALES (art. 1, I, 2°)

L'ordonnance prévoyait initialement un dispositif d'accompagnement des demandeurs. Cette mesure n'apparaît plus dans la mouture finale mais pourrait être prévue par voie réglementaire.

En revanche, le texte prévoit l'information de l'élu de proximité, à savoir les autorités communales du demandeur, de la décision prise par le représentant de l'Etat dans le département ou le président du conseil général. En effet, un décret doit venir préciser les modalités des procédures d'admissionà l'aide sociale et d'information des autorités communales (CASF, art. L. 131-7 modifié).

C - L'entrée en vigueur de ces dispositions (art. 1, XIV)

Afin d'éviter les désordres juridiques, l'ordonnance reporte au 1er janvier 2007 l'entrée en vigueur de ces modifications.

Elles s'appliqueront :

 aux nouvelles demandes déposéesà compter de cette date ;

 à celles qui n'ont pas fait l'objet d'une décision à cette même date.

II - L'EXTENSION DE LA LISTE DESÉTABLISSEMENTS ET SERVICES SOCIAUX ET MÉDICO-SOCIAUX

Depuis la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale, plusieurs catégories de structures souhaitaient être intégrées à la liste desétablissements et services sociaux et médico-sociaux fixée à l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et médico-sociale.

Après parfois d'âpres discussions, elles auront obtenu gain de cause. Prévention spécialisée, services assurant des mesures d'investigation et services d'aide aux familles font ainsi leur entrée dans la nomenclature relativeà ces structures.

A - La prévention spécialisée (art. 3, II)

L'insertion des services gérant des équipes de prévention spécialisée est l'aboutissement d'un processus de négociation mené depuis 2002 entre les associations et la direction générale de l'action sociale (DGAS).

Et la cause était loin, au départ, d'être entendue. En mars 2004, la DGAS rejetait même l'idée d'intégrer ces services. Dans une note, elle rappelait que, si la prévention spécialisée figurait dans la loi du 2 janvier 2002 comme une mission du service de l'aide sociale àl'enfance (7), elle ne pouvait néanmoins relever de la nomenclature des établissements et services sociaux et médico-sociaux (8). Elle considérait notamment que les dispositions relatives aux droits des usagers, telles que le livret d'accueil ou le contrat de séjour, lui étaient inapplicables.

Les membres du Conseil technique des clubs et équipes de prévention spécialisée (CTPS) se sont alors montrés pragmatiques. Pourquoi ne pas modifier la loi du 2 janvier 2002, par le biais de l'ordonnance de simplification du droit, pour indiquer que toutes les dispositions de la loi s'appliquent à la prévention spécialisée hormis celles relatives aux droits des usagers ?, ont-ils suggéré.

Au final, l'ordonnance introduit un IV à l'article L. 312-1 qui prévoit que les équipes de prévention spécialisée relèvent des établissements et services prenant en charge habituellement, y compris au titre de la prévention, des mineurs et des majeurs relevant de l'aide sociale à l'enfance, structures visées au I, 1° de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles. Le texte ajoute ensuite que les dispositions relatives aux droits des usagers ne leurs sont pas applicables. Ces équipes sont donc exemptées de l'obligation de mettre en place d'un livret d'accueil, un règlement de fonctionnement et d'élaborer un contrat de séjour (ou un document individuel de prise en charge). Elles n'auront pas non plus à prévoir la possibilité de recourir à un conciliateur ou àinstaurer des formes de participation des usagers comme le conseil de la vie sociale (CASF, art. L. 311-4 à L. 311-7).

Ainsi, les 344 associations et 9 services en régie directe, qui interviennent dans 86 départements en mobilisant près de 750 équipes, soit 3 800 professionnels salariés, sont concernés.

A noter qu'un autre problème soulevé par la DGAS portait sur le financement de ces services. Dans sa note de mars 2004, l'administration considérait en effet qu'« un financement global [était] la seule forme de financement adaptée, l'absence de mandat et le principe de l'anonymat rendant impossible tout financement au prix de journée ». A cet égard, une première mouture de l'ordonnance prévoyait que la tarification de ces services serait fixée par le président du conseil général qui prendrait en compte les subventions de fonctionnement des autres collectivités territoriales et, le cas échéant, celles de l'Etat et des organismes de sécurité sociale au titre de leur action sociale. Cette disposition a été finalement retirée du texte et devrait figurer dans un décret d'application de l'ordonnance. De son côté, le projet de décret budgétaire et comptable rectificatif, qui devrait prochainement paraître, prévoit que les dépenses liées àl'activité sociale et médico-sociale des équipes de prévention spécialisée seront prises en charge sous la forme d'une dotation globale calculée par le président du conseil général et versée par le département.

En attendant la parution de ces textes, aucune règle de financement de ces services n'est modifiée.

B - Les services assurant des mesures d'investigation (art. 3, I et II)

Autre entrée dans la liste établie à l'article L.312-1 du code de l'action sociale et des familles : celle des services assurant des mesures d'investigation (enquêtes sociales, mesures d'investigation et d'orientation éducative), préalables aux mesures d'assistance éducative et prévues par le nouveau code de procédure civile et par l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante. Ce sont des mesures exécutées àl'intention des magistrats qui les prescrivent et destinéesà la préparation des décisions judiciaires afférentes aux mineurs concernés.

Là encore, le débat était vif entre la direction de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), les associations du secteur et les syndicats. La querelle trouvait son origine dans une circulaire du ministère de la Justice sur la campagne budgétaire de décembre 2003. Elle avait, en effet, explicitement écarté les services qui mettent enœuvre des mesures d'investigation ordonnées par une autorité judiciaire de la liste des établissements et services sociaux et médico-sociaux. Et jugeait que ces mesures d'investigation n'étaient pas des mesures d'assistanceéducative mais des procédures d'information àdestination des magistrats (9).

Grâce à la mise en place d'un groupe de travail avec la direction de la PJJ, le Réseau inter-associatif a obtenu le principe de l'intégration de ces mesures (10). Principe confirmé dans une lettre du 20 octobre 2005 du directeur de la protection judiciaire de la jeunesse (11) et traduit désormais juridiquement dans le cadre de l'ordonnance du 1erdécembre 2005 qui complète en ce sens l'article L. 312-1, I, 4 °.

Comme pour les services de prévention spécialisée, l'ordonnance prévoit toutefois que les dispositions relatives aux droits des usagers desétablissements et services sociaux et médico-sociaux ne sont pas applicables aux services effectuant des mesures d'investigations (CASF, art. L. 312-1, IV modifié).

Là aussi, la question du financement de ces mesures se pose. D'ores et déjà, le directeur de la PJJ a indiqué dans sa lettre du 20 octobre 2005 que les mesures d'investigation et d'orientation éducative (IOE) seraient, dès le 1er janvier prochain, rémunérées à l'acte sur la base du service fait. Pour la prochaine campagne budgétaire, la détermination du prix de l'acte devrait se fonder sur une durée de l'IOE de 6 mois (soit 182 jours multipliés par le prix de journée). Et c'est à partir des capacités et de l'organigramme arrêtés pour les budgets 2004 que seront discutés les budgets 2006. L'année 2006 devrait, d'autre part, être mise à profit pour évaluer la durée effective des mesures d'IOE. L'objectif est, en effet, de revoir et d'assouplir si nécessaire les références techniques ainsi que le taux d'encadrement, cela dans le dessein de proposer un prix de l'acte pour 2007« en rapport avec la durée réelle observée et intégrant les modifications éventuellement retenues ». En outre, le décret budgétaire et comptable rectificatif, toujours attendu, devrait prévoir le dispositif financier qui leur sera applicable.

C - Les services d'aide aux familles (art. 3, I)

Enfin, l'ordonnance du 1er décembre 2005 introduit dans la nomenclature des établissements et services sociaux et médico-sociaux les services assurant une action d'aide à domicile aux familles, visés à l'article L.222-3 du code de l'action sociale et des familles, à savoir (CASF, art. L. 312-1, I, 1° modifié) :

 l'action d'un technicien ou d'une technicienne d'intervention sociale et familiale ou d'une aide-ménagère ;

 l'intervention d'un service d'actionéducative ;

 le versement d'aides financières, effectué sous forme soit de secours exceptionnels, soit d'allocations mensuelles, à titre définitif ou sous condition de remboursement, éventuellement délivrés en espèces.

En juin 2004, la DGAS avait pourtant indiqué dans une note que ces services ne relevaient pas de la loi du 2 janvier 2002 (12). Une position qui confirmaient les discussions intervenues au cours des débats parlementaires avant l'adoption de cette loi.

Finalement, l'ordonnance étend le champ de la loi du 2 janvier 2002 à leur profit, après de nombreuxéchanges sur cette question notamment au sein du comiténational d'organisation sanitaire et sociale chargé de se prononcer pour avis sur ce texte (13).

Relevons que, là encore, les premières moutures de l'ordonnance prévoyaient que la tarification de ces services serait fixée par le président du conseil général qui prendrait en compte les contributions, au titre de leur action sociale familiale facultative, des caisses d'allocations familiales et de la mutualité sociale agricole du département. Les actions et les contributions financières respectives du département, des caisses d'allocations familiales et de la mutualité sociale agricole devaient faire l'objet d'une convention entre ces financeurs et le service concerné. Cette disposition a disparu du texte final et pourrait être réintroduite dans un décret d'application de l'ordonnance. Lequel devrait également fixer les modalités de financement de ces services (dotation globale de financement...).

III - LES MODIFICATIONS APPORTÉES À LA PROCÉDURE D'AUTORISATION

A - L'instauration d'une autorisation àeffet différé (art. 5)

L'ordonnance cherche « à assouplir le lien entre autorisation et financement d'un établissement ou d'un service social ou médico-social en permettant d'autoriser des projets de création de places et d'établissements dont l'ouverture n'interviendra qu'une ou deux années plus tard, au terme de leur construction », explique le rapport annexé à l'ordonnance.

Actuellement, l'autorisation d'ouverture ou d'extension d'unétablissement ou service social ou médico-social est subordonnée à la disponibilité, pour l'année de délivrance de l'autorisation, des crédits nécessaires au fonctionnement de la structure (CASF, art. L. 313-4,4 ° modifié).

Or il s'écoule couramment 1 ou 2 années entre le moment où le promoteur reçoit son autorisation et la date d'ouverture effective de l'établissement. Ce qui a plusieurs conséquences : des projets peuvent être refusés faute de disponibilité financière l'année N, alors même qu'ils ne coûteront rien au titre de cette année ; les crédits correspondant aux projets autorisés n'ont que très peu de chances d'être employés pour le projet en question, et servent àfinancer des dépenses « non reconductibles ».

D'où cet effet paradoxal que des projets nouveaux, correspondant à des besoins, ne sont pas autorisés, alors même que des moyens peuvent rester « sans emploi ».

Aussi l'ambition de l'ordonnance est-elle d'assouplir le lien entre l'enveloppe de financement disponible une année N et le nombre de projets autorisés cette même année. En d'autres termes, le texte ouvre la possibilité d'autoriser, au cours d'une année N, des places supplémentaires qui correspondent non pas à des crédits supplémentaires de l'année N mais à de tels crédits que l'on peut anticiper pour l'année d'ouverture effective, cette faculté d'anticipation étant toutefois limitée à 2 années ( N + 1 ou N +2).

Afin de donner corps à ce principe, l'ordonnance prévoit que l'autorisation fixe l'exercice au cours de laquelle elle prend effet (CASF, art. L. 313-4 modifié).

En conséquence, au moment de l'autorisation initiale, le projet devra notamment présenter un coût de fonctionnement en année pleine compatible avec le montant des dotations limitatives de crédits au titre de l'exercice au cours duquel l'autorisation prend effet (CASF, art. L. 313-4,4° modifié).

Pour tenir compte de cette modification, l'ordonnance prévoit que l'arrêté fixant chaque année, sur la base de l'objectif national de dépenses de l'assurance maladie (ONDAM), le montant total annuel des dépenses prises en compte pour le calcul des dotations globales, forfaits, prix de journée et tarifs afférents aux prestations des structures pourra fixer, pour les établissements et services (ou pour certaines catégories d'entre eux) dont certaines prestations sont à la charge de la sécurité sociale, des enveloppes nationales d'anticipation, c'est-à-dire établir « le montant indicatif de leurs crédits de fonctionnement prévisionnels ». Ce, en respectant toutefois les objectifs des 4 années à venir figurant dans le rapport accompagnant le projet de loi de financement de la sécurité sociale (CASF, art. L. 314-3-4 nouveau). Il s'agit par là d'encadrer ces enveloppes d'anticipation afin qu'elles ne représentent qu'une fraction« prudentielle » de la hausse prévisible des mesures nouvelles.

De même, le programme interdépartemental d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie pourra prévoir des dotations limitatives de crédits pour l'année considérée ou, le cas échéant, de telles dotations d'anticipation au titre de l'une ou de l'autre des 2 années suivantes (CASF, art. L. 312-5-2 nouveau). Pour mémoire, c'est la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances des persones handicapées qui a instauré ce nouvel outil de coordination nationale de la politique en faveur des personnesâgées dépendantes et des personnes handicapées (14). Ces programmes auront à définir, pour la part des prestations financées sur décision tarifaire de l'autorité compétente (préfet ou assurance maladie), les priorités, au niveau régional, de financement des créations, extensions et transformations de certains établissements ou services pour personnesâgées ou handicapées.

B - Un droit d'option pour les services d'aide et d'accompagnement à domicile (art. 4)

L'ordonnance propose d'organiser, par dérogation à la procédure d'autorisation, un droit d'option pour les services prestataires d'aide et d'accompagnement à domicile pour les personnes âgées, handicapées ou les familles.

Selon le rapport annexé à l'ordonnance, cette « nouvelle procédure, plus légère, de l' "agrément-qualité" et le mécanisme de libre fixation des prix au moyen d'un contrat constituent un dispositif plus souple, adapté à ces catégories d'opérateurs et de nature à favoriser, dans des délais brefs, des créations d'emplois de services d'aide à la personne ».

1 - UN DROIT D'OPTION (art. 4, II)

Ainsi, la création, la transformation et l'extension de ces services seront soumises, à la demande de l'organisme gestionnaire (CASF, art. L. 313-13-1 nouveau) :

 soit au régime de l'autorisation des établissements et services sociaux et médico-sociaux ;

 soit, à condition qu'ils remplissent la condition d'activité exclusive, à la procédure d'agrément prévue à l'article L. 129-1 du code du travail. Relevons que cet agrément a été remisà plat par la loi du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne (15) et précisé récemment par un décret du 7 novembre 2005 (16). La condition d'activité exclusive renvoie à l'obligation pour les associations et les entreprises de consacrer exclusivement leur activité à des services aux personnes physiques àleur domicile ainsi qu'à des services favorisant le maintienà leur domicile de personnes âgées, handicapées ou dépendantes.

Ces services, en tous les cas, pourront, même en l'absence d'habilitation à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale, intervenir auprès des bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie.

Relevons enfin que, selon le décret du 7 novembre 2005 relatif à l'agrément des associations et des entreprises de services à la personne, l'autorisation obtenue par les services prestataires organisant l'aide et l'accompagnement àdomicile de personnes âgées ou handicapées vaut agrément, sous réserve de remplir la condition d'activité exclusive.

2 - LES OBLIGATIONS DES SERVICES OPTANT POUR L'AGRÉMENT (art. 4, III)

a - Les obligations générales

Les services optant pour l'agrément seront tenus de conclure, avec la personne bénéficiant des prestations, un contrat dans les mêmes conditions et modalités que celles prévues pour les établissements pour personnes âgées à but lucratif (CASF, art. L.313-13-1 nouveau).

Ce contrat devra ainsi être à durée indéterminée et préciser les conditions de sa résiliation. Il devra également comporter en annexe un document contractuel décrivant l'ensemble des prestations qui sont offertes par l'établissement et indiquant le prix de chacune d'elles, fixé librement lors de la signature du contrat (voir ci-dessous). Le document sera ensuite complété en cas de création d'une nouvelle prestation.

En outre, les dispositions relatives à l'exercice des droits et libertés individuels garanti à toute personne prise en charge par une structure sociale ou médico-sociale devront être respectées par les services optant pour l'agrément. De même, ces derniers devront élaborer un livret d'accueil et ne pas faire obstacle aux procédures de contrôle mises en œuvre par les agents de l'inspection générale des affaires sociales et des directions des affaires sanitaires et sociales (CASF, art. L. 313-13-1 nouveau).

Enfin, ils seront soumis aux procédures d'évaluation interne et externe dans des conditions et des délais qui doivent néanmoins être déterminés par décret (CASF, art. L. 313-13-1 nouveau).

Relevons enfin que la création, la transformation ou l'extension d'un service d'aide et d'accompagnement à domicile sans avoir obtenu l'autorisation ou désormais l'agrément sera punie d'un emprisonnement de 3 mois et d'une amende de 3 750 € (CASF, art. L. 313-22,1°modifié).

b - La liberté des prix

Dans les services optant pour l'agrément, les prix des prestations de service seront librement fixés lors de la signature du contrat conclu entre le prestataire de service et le bénéficiaire, précise un nouvel article du code de l'action sociale et des familles (CASF, art. L. 347-1 nouveau).

Les prix des prestations contractuelles pourront toutefois varier ensuite dans la limite d'un pourcentage fixé par arrêté compte tenu de l'évolution des salaires et du coût des services.

Néanmoins, le représentant de l'Etat dans le département pourra fixer un pourcentage supérieur en cas d'augmentation importante des coûts d'exploitation résultant de l'amélioration des prestations existantes ou de la modification des conditions de gestion ou d'exploitation (CASF, art. L. 347-1 nouveau).

Enfin, les infractions à ces dispositions seront constatées et poursuivies, comme pour les établissements commerciaux pour personnes âgées, dans les conditions fixées par le code de commerce (art. L. 450-1, al. 1 et 3, L. 450-2, L. 450-3, L. 450-8 et L. 470-5) : enquêtes par la direction générale de la concurrence et de la répression des fraudes du ministère de l'Economie, visites des locaux, communication de documents, sanction pénale pour toute opposition à l'exercice des fonctions de ces agents du ministère de l'Economie... (CASF, art. L.347-2 nouveau).

IV - LES MESURES EN MATIERE DE TARIFICATION

A - L'abandon de la tarification administrée autorisé dans les établissements pour personnesâgées (art. 8)

L'ordonnance rend possible la suppression de la tarification administrée des établissements d'hébergement pour personnes âgées accueillant un nombre minoritaire de bénéficiaires de l'aide sociale.

Actuellement, les conseils généraux tarifient des milliers d'établissements hébergeant des personnesâgées habilités au titre de l'aide sociale alors que l'aide sociale à l'hébergement des personnesâgées finance à titre très accessoire certains de ces établissements. Selon le rapport annexé àl'ordonnance, « cette tarification administrée est complexe et mobilise des moyens dans les administrations et lesétablissements ». L'objectif affiché du gouvernement est de trouver un point d'équilibre entre la liberté contractuelle entre l'usager et l'établissement dès lors que c'est l'usager qui est le principal financeur, la libre administration des collectivités locales, le traitementéquitable et non discriminatoire des bénéficiaires de l'aide sociale et les garanties à offrir auxétablissements et aux financeurs.

Il ressort des documents préparatoires que, selon la direction générale de l'action sociale, le risque d'éviction des bénéficiaires de l'aide sociale avancé par certains partenaires « peut êtreécarté dans la mesure où ce dispositif [concerne] des établissements publics et associatifs sans but lucratif qui n'ont pas pour objectif d'établir des tarifs contractuels visant à dégager et partager un dividende. Ce dispositif vise uniquement à leur permettre d'obtenir un juste prix traduisant un bon rapport qualité prix comme ils le réclament et comme ils reprochent à la tarification administrée de l'empêcher. Cette crainte traduit une méfiance dans les capacités des gestionnaires (la tarification administrée serait le seul moyen d'éviter les exigences démesurées des gestionnaires) et des conseils généraux censés ne pas avoir d'exigence en matière de qualité de la prise en charge des bénéficiaires de l'aide sociale. »

1 - LES CONDITIONS DE LA SUPPRESSION DE LA TARIFICATION ADMINISTRÉE

Ainsi, l'ordonnance étend le champ de la tarification contractuelle prévue pour les établissements n'accueillant pas de bénéficiaires de l'aide socialeà ceux qui n'en accueillent qu'une minorité.

A certaines conditions, les établissements d'hébergement pour personnes âgées habilités au titre de l'aide sociale pourront donc être soumis aux dispositions sur l'hébergement de personnes âgéesà but lucratif (CASF, art. L. 342-1,4° modifiéet L. 342-3-1 nouveau).

Ils doivent d'abord en faire la demande et obtenir l'accord du président du conseil général.

En outre, l'établissement doit avoir accueilli en moyenne moins de 50 % de bénéficiaires de l'aide sociale par rapport à sa dernière capacité agréée sur les trois exercices précédant celui de la demande.

2 - UNE CONVENTION D'AIDE SOCIALE

a - La conclusion de la convention

Dans ce cas, une convention d'aide sociale devra être conclue pour une durée maximale de 5 ans entre le représentant de l'établissement et le président du conseil général.

Ce document, dont le contenu minimal sera fixé par décret, devra notamment préciser :

 les conditions de réservation et de mise à disposition des places pour les bénéficiaires de l'aide sociale à l'hébergement des personnesâgées ;

 le montant des différents tarifs afférents à l'hébergement pouvant être pris en charge par l'aide sociale départementale et la définition des prestations garanties auxquelles ces tarifs correspondent.

A noter que l'ordonnance prévoit que les conseils d'administration des établissements publics sociaux ou médico-sociaux devront délibérer désormais sur ces conventions d'aide sociale quand elles existent ( CASF, art. L. 315-12 modifié ).

b - Une revalorisation automatique du tarif hébergement

Les tarifs afférents à l'hébergement pouvantêtre pris en charge par l'aide sociale départementale et qui auront été fixés dans le cadre de cette convention d'aide sociale seront ensuite revalorisés chaque année pendant toute la durée de la convention du pourcentage fixé annuellement par arrêté pour l'ensemble des établissements pour personnes âgéesà but lucratif. Rappelons que, par exemple, au cours de l'année 2005, les prix des prestations offertes aux personnes résidant, au 31 décembre 2004, dans lesétablissements sociaux et médico-sociaux pour personnesâgées à but lucratif ne peuvent augmenter de plus de 2,6 % (17).

B - L'assouplissement de la tarification des services d'aide à domicile non médicalisés (art. 7, I)

Comme la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale a inclus dans le champ des établissements et services sociaux et médico-sociaux les services d'aideà domicile non médicalisés qui délivrent principalement des prestations d'aide ménagère, notamment dans le cadre de l'aide personnalisée à l'autonomie, plus de 8 000 services doivent être régularisés (autorisation, habilitation, tarification) par les présidents des conseils généraux. Ce qui va accroître la charge de travail de leurs services.

Relevant que ces services d'aide à domicile adhèrent, pour la plupart, à des fédérations départementales qui les soutiennent dans leur gestion (services communs), voire bénéficient déjàd'une délégation de gestion, l'ordonnance préconise de limiter le nombre d'unités à traiter.

Pour ce faire, l'autorité administrative chargée de l'autorisation, de l'habilitation à l'aide sociale ou de la tarification de ces services aux familles, aux personnesâgées ou handicapées, qui dispensent des prestations d'aide à domicile et ne bénéficient pas d'un financement de l'assurance maladie, pourra conclure une convention avec un ou plusieurs groupements départementaux ayant la personnalitémorale, auxquels ces services ont adhéré. Cette convention permettra à ces groupements de solliciter les autorisations et habilitations et d'obtenir une tarification pour le compte de leurs adhérents (CASF, art. L. 313-12-1, nouveau).

C - Le financement des conséquences de l'amendement Creton légalisé (art. 6)

Mesure réclamée de longue date, l'habilitation accordée par la loi de simplification du droit du 9 décembre 2004 permettait au gouvernement de prévoir les modalités de tarification et de financement du maintien des jeunes adultes handicapés dans les établissements d'éducation spéciale.

En effet, l'article L. 242-4 du code de l'action sociale et des familles, dit « amendement Creton », offre la possibilité de maintenir des jeunes adultes handicapés dans les établissements et services dispensant uneéducation adaptée pour mineurs en l'absence de possibilité de placement dans un établissement pour adultes vers lequel ils ont été orientés.

Actuellement, le législateur n'a toutefois fixé ni les moda- lités d'application du principe posé par l'amendement Creton, ni renvoyé à un texte réglementaire le soin de les définir. Or la question de la tarification et du financement des journées de ces jeunes adultes maintenus en établissement pour mineurs a fait l'objet d'un contentieux abondant. Ainsi, le Conseil d'Etat a estiméen 1993 que « les frais d'hébergement, d'une part, et les frais de soins, d'autre part, à l'exclusion de tous autres frais effectivement occasionnés par le maintien d'une personne handicapée dans un établissement d'éducation spéciale, doivent être supportés par la ou les personnes morales qui auraient éténormalement compétentes pour prendre en charge les frais de même nature entraînés par le placement de cette personne dans la catégorie d'établissements vers laquelle elle a été orientée par la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel ». Dans un second temps, il a précisé, en mai 2003, que le dispositif législatif ne nécessitait pas de décret d'application pour entrer en vigueur (18).

L'ordonnance légalise ces décisions jurisprudentielles pour en garantir l'application, notamment par les collectivités territoriales (CASF, art. L. 242-4 modifié).

Ainsi, si un jeune adulte handicapé est orienté vers un établissement relevant de la compétence du département, le tarif journalier de l'établissement pour mineurs dans lequel il est maintenu sera pris en charge par l'aide sociale du département dans lequel il a son domicile de secours .

En revanche, si le jeune adulte handicapé est orientévers un foyer d'accueil médicalisé ou un service d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés (Samsah), le prix de journée de l'établissement pour mineurs à la charge de l'aide sociale du département est diminué du forfait journalier plafond afférent aux soins qui a étéfixé pour l'exercice précédent par arrêtédu ministre chargé de la sécurité sociale. Ce forfait journalier est quant à lui facturé aux organismes d'assurance maladie (CASF, art. L. 242-4 modifié et art. L. 314-1, V modifié).

Enfin, dans les autres situations, ce tarif journalier continue à être pris en charge par les organismes d'assurance maladie sur facture de l'établissement.

Relevons que la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a prévu en outre que, tous les 2 ans, le représentant de l'Etat dans le département devra adresser au président du conseil général et au conseil départemental consultatif des personnes handicapées un rapport sur l'application de ce dispositif. Ce rapport devra également être transmis, avec les observations et les préconisations du conseil départemental consultatif des personnes handicapées, au conseil national du même nom. Au vu de ce rapport biennal, toutes les dispositions devront être prises « en suffisance et en qualité » pour créer, selon une programmation pluriannuelle, les places en établissement nécessaires à l'accueil des jeunes handicapésâgés de plus de 20 ans.

Par ailleurs, la loi du 11 février 2005 a également prévu que toute personne handicapée ou son représentant légal a droit à une information sur les garanties que lui reconnaît ce dispositif. Cette information doit lui être délivrée par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées au moins 6 mois avant ses 20 ans ou l'âge limite pour lequel l'établissement est agréé s'il est supérieur.

D - La non-rétroactivité des tarifs (art. 7, IV)

L'ordonnance vise à régler la question de la non-rétroactivité des tarifs annuels desétablissements sociaux et médico-sociaux lorsque ceux-ci n'ont pas été arrêtés avant le 1erjanvier de l'exercice en cause. En effet, en pratique, ces tarifs ne sont jamais fixés au 1er janvier de l'année concernée. Les établissements fonctionnent alors avec des douzièmes provisoires et les personnes accueillies continuent, pendant plusieurs mois, d'acquitter le tarif établi pour l'année précédente.

Ce point avait notamment été critiqué par le Conseil d'Etat lorsqu'il avait examiné, avant sa parution, le décret relatif à la gestion budgétaire et comptable des établissements sociaux et médico-sociaux du 22 octobre 2003. Pour la Haute Juridiction, la mise en œuvre rétroactive des tarifs est « fâcheuse quantà ses conséquences sur les usagers qui acquittent certains tarifs. Il apparaît en outre pour le moinsétrange que les pouvoirs publics acceptent que tout un secteur (plus de 30 000 établissements) se trouve conduit de manière pérenne à fonctionner en régime de "douzièmes" provisoires. »

De plus, cette question de la rétroactivité est source de nombreux contentieux et entraîne des inégalités de traitement selon les départements, les tarificateurs et les financeurs, et une insécurité financière des usagers et des établissements.

L'ordonnance vise à mettre fin à ces difficultés (CASF, art. L. 314-7, IV bis modifié).

Ainsi, dans le cas où les tarifs journaliers n'auront pasété arrêtés avant le 1er janvier de l'exercice en cause, et jusqu'à l'intervention de la décision fixant le montant de ces tarifs, les recettes relatives à la facturation de ces tarifs journaliers seront liquidées et perçues dans les conditions en vigueur au cours de l'exercice précédent.

Les tarifs de l'exercice, dont la date d'effet sera précisée dans l'arrêté tarifaire, seront ensuite calculés en prenant en compte les recettes àencaisser entre le 1er janvier et cette date d'effet.

E - L'exécution des décisions des juridictions de la tarification (art. 9)

L'ordonnance vise enfin à mieux rendre exécutoires les décisions des juridictions de la tarification - tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale et Cour nationale du même nom - par la prise en compte des incidences financières de ces décisions. En effet, l'article L.351-6 du code l'action sociale et des familles énonçait jusque-là que les décisions de ces juridictions qui fixent le montant des prix de journée, des dotations globales, des dotations annuelles, ou des remboursements forfaitaires desétablissements et services sanitaires et sociaux prennent effet à compter de la date fixée dans la décision donnant lieu au litige.

Cette disposition a des conséquences qui rendent complexe l'action de l'administration en matière d'exécution des décisions de justice. En effet, en cas d'annulation d'un arrêté fixant le tarif de l'année N, le recalcul des tarifs à partir de la date fixée dans la décision donnant lieu au litige peut impliquer une correction du résultat comptable de l'année N mais aussi, par exemple, du résultat à affecter en N + 2 qui, à son tour, entraîne des changements pour les années suivantes. En outre, des difficultés peuvent survenir lorsqu'un transfert de compétence a lieu entre la date du litige et la date de la décision, le requérant étant alors renvoyé vers l'ancienne autorité compétente pour le recalcul des tarifs. Enfin, en raison des délais de jugement, le nombre de retraitements nécessaires pour mettre en œuvre une décision du juge du tarif peut êtreélevé.

Aussi l'article L. 351-6 prévoit-il désormais que les décisions du juge du tarif sont mises en œuvre lors de l'exercice au cours duquel elles sont notifiées àl'autorité de tarification par une décision budgétaire modificative.

Lorsqu'une décision du juge du tarif passée en force de chose jugée fixe, ou entraîne nécessairement, une modification du tarif pour un exercice déjà clos, l'exécution de la décision fera l'objet de modalités comptables et financières simplifiées fixées par décret.

Enfin, tout paiement de sommes supplémentaires tiendra compte, le cas échéant, des sommes déjàversées au même titre par l'autorité de tarification.

V - LES PROCÉDURES DE CONTROLE ET DE FERMETURE

Initialement, le projet d'ordonnance prévoyait de nombreuses dispositions sur les procédures de contrôle et de fermeture. Il visait ainsi à simplifier et clarifier les procédures de contrôle et de fermeture desétablissements et services sociaux et médico-sociaux, introduites par des lois successives avec des préoccupations différentes et qui manquaient, de ce fait, de cohérence.

C'est finalement un texte aminci qui a été retenu. Les dispositions supprimées devraient être reprises dans la prochaine ordonnance adoptée en application de l'article 84 de la loi du 9 décembre 2004 de simplification du droit, voire dans le projet de loi sur la protection de l'enfance promis par le ministre délégué à la famille, Philippe Bas (19). Certaines mesures pourraient égalementêtre instillées dans le projet de loi de finances rectificative pour 2005 ou encore dans des décrets d'application de l'ordonnance.

A - La procédure de fermeture (art. 10, II et IV)

Quelques modifications sont apportées à la procédure de fermeture d'un établissement ou service social ou médico-social.

Ainsi, l'ordonnance permet désormais au représentant de l'Etat de prononcer à titre provisoire la fermeture totale ou partielle de l'établissement ou du service. Ce, sans mise en demeure adressée au préalable. Toutefois, cette possibilité est strictement encadrée : il fautêtre dans un «  cas d'urgence » et le préfet doit se prononcer «  par arrêtémotivé » (CASF, art. L. 313-16 modifié).

Par ailleurs, les hypothèses dans lesquelles une fermeture peut être prononcée sont resserrées, que l'on soit ou non dans l'urgence. Ainsi, l'autorité qui a délivré l'autorisation ou - désormais, le caséchéant, le représentant de l'Etat dans le département - doit prononcer la fermeture, totale ou partielle, provisoire ou définitive, d'un service ouétablissement dans deux hypothèses :

 lorsque les conditions techniques minimales d'organisation et de fonctionnement de la structure ne sont pas respectées ;

 lorsque sont constatées dans l'établissement ou le service et du fait de celui-ci des infractions aux lois et règlements susceptibles d'entraîner la mise en cause de la responsabilité civile de l'établissement ou du service ou de la responsabilitépénale de ses dirigeants ou de la personne morale gestionnaire.

Relevons que la procédure fixée à l'article L.331-5 du code de l'action sociale et des familles estégalement modifiée. Cet article prévoit, dans l'hypothèse où la santé, la sécurité ou le bien-être moral ou physique des personnes hébergées sont menacés ou compromis, que le représentant de l'Etat ordonne, après injonction restée sans effet, la fermeture totale ou partielle, définitive ou provisoire, de l'établissement. Auparavant, avant de prendre cette décision, le préfet devait prendre l'avis de la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques. Le recueil de cet avis n'est plus requis (CASF, art. L. 331-5, al.2 modifié).

B - Les obligations des personnes contrôlées (art. 10, III)

L'ordonnance cherche à harmoniser et à mettre en cohérence les dispositions régissant les établissements sociaux et médico-sociaux avec celles applicables aux établissements sanitaires. L'harmonisation n'est toutefois pas totale (notamment par rapport aux horaires de visite de nuit).

Sans changement, les personnes responsables d'unétablissement sont tenues de fournir aux autorités et agents chargés de la surveillance tous renseignements qui leur sont demandés relatifs aux points mentionnés dans la déclaration d'ouverture et à l'identité des personnes hébergées (CASF, art. L. 331-3 modifié).

Comme avant, ces responsables sont également tenus de laisser pénétrer dans l'établissement, à toute heure du jour et de la nuit, les autorités et agents chargés du contrôle. Toutefois, sans préjudice des dispositions pénales et sauf exceptions posées par la loi, les visites de nuit après 21 heures et avant 6 heures ne sont possibles qu'après appel provenant de l'intérieur de l'établissement, sur plainte ou réclamation, ou sur autorisation du procureur de la République.

En tout état de cause, les responsables du contrôle peuvent, comme aujourd'hui, visiter tous les locaux, se faire présenter toute personne hébergée et demander tous renseignements nécessaires pour apprécier les conditions matérielles et morales de fonctionnement de l'établissement. Ils peuvent se faire accompagner, le caséchéant, par l'homme de l'art compétent en la matière.

Les personnes chargées du contrôle sont tenues au secret professionnel dans les conditions et sous les peines fixées par l'article 226-13 du code pénal.

La nouveauté introduite par l'ordonnance est de prévoir que les contrôles s'effectueront désormais dans les conditions prévues à l'article L. 1421-3 du code de la santé publique avec le concours de professionnels vixés à l'article L. 1421-1 de ce même code. Concrètement, cela signifie que divers professionnels -pharmaciens inspecteurs de santé publique, médecins inspecteurs de santé publique, inspecteurs de l'action sanitaire et sociale, ingénieurs du génie sanitaire, ingénieurs d'études sanitaires, techniciens sanitaires -pourront intervenir et demander communication de tous documents nécessaires à l'accomplissement de leurs missions, quel qu'en soit le support, et en prendre copie, prélever deséchantillons ainsi que recueillir, sur place ou sur convocation, tout renseignement ou toute justification nécessaires. En outre, les agents ayant la qualité de médecin auront accès à toutes données médicales individuelles nécessaires à l'exercice de leurs missions, dans le respect du secret professionnel.

C - Les sanctions en cas d'entrave aux procédures de contrôle (art. 11)

Enfin, réparant un oubli de la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale, l'ordonnance punit d'une peine de 6 mois d'emprisonnement et de 7 500d'amende le fait de faire obstacle aux procédures de contrôle des établissements et services sociaux et médico-sociaux soumis à autorisation voire à déclaration fixées aux articles L. 313-13à L. 313-20 et L. 331-1 à L. 331-9 du code de l'action sociale et des familles (CASF, art. L. 313-22-1 nouveau).

Dans un souci d'harmonisation, le texte s'aligne sur les peines prévues dans le code de la santé publique.

VI - LA TRANSPARENCE ET LA SÉCURITÉ FINANCIERE

L'ordonnance introduit un nouvel article dans le code de l'action sociale et des familles afin d'améliorer l'applicabilité, dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux, des dispositions relatives àla transparence et à la sécuritéfinancière.

Ce dispositif s'inspire de l'article L. 612-5 du code du commerce. Lequel vise à s'assurer que les conventions entre les dirigeants d'une association ou les personnes interposées ne remettent pas en cause le caractère désintéressé de leur gestion.

En effet, les associations gestionnaires d'établissements sociaux et médico-sociaux sont particulièrement visées par cet article qui est donc articulé par l'ordonnance avec le code de l'action sociale et des familles. Le texte vise également à assurer la transparence des tarifs.

A - Le respect du principe de gestion désintéressée (art. 12, I)

Ainsi, les administrateurs et les cadres dirigeants salariés (c'est-à-dire ceux disposant de responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance) d'une personne morale de droit privéà but non lucratif gérant un établissement social et médico-social ainsi que les directeurs desétablissements sociaux et médico-sociaux devront déclarer les conventions passées, directement ou par personne interposée, entre cette personne morale et certaines personnes dont la liste est fixée à l'article L. 612-5 du code du commerce (CASF, art. L. 313-25 nouveau).

Par ce renvoi, le code de l'action sociale et des familles vise donc les conventions signées entre la personne morale de droit privé à but non lucratif gérant unétablissement social et médico-social et :

 l'un de ses administrateurs ou l'une des personnes assurant un rôle de mandataire social :

 une société dont un associé indéfiniment responsable, un gérant, un administrateur, le directeur général, un directeur général délégué, un membre du directoire ou du conseil de surveillance, un actionnaire disposant d'une fraction des droits de vote supérieure à 10 % est simultanément administrateur ou assure un rôle de mandataire social au sein de la personne morale.

L'article L. 313-25 prévoit également que cette obligation de déclaration des conventions signées s'applique aussi à celles auxquelles sont parties les membres de la famille des administrateurs, des cadres dirigeants et des directeurs des établissements sociaux et médico-sociaux qui sont salariés par le même organisme gestionnaire dans lequel exercent ces administrateurs et ces cadres dirigeants.

B - La transparence des tarifs (art. 12, II)

Toujours dans le cadre de l'article L. 313-25 du code de l'action sociale et des familles, l'ordonnance prévoit que le directeur ou la personne qualifiée pour représenter unétablissement social ou médico-social, public ou privé, devra évaluer les financements apportés par cet établissement, soit en espèces, soit en nature sous forme de mise à disposition de locaux, de personnels ou de moyens techniques, à un autre organisme (association sportive, de personnels...), entrant dans le calcul des tarifs fixés par les autorités de tarification.

Ce dernier devra ensuite communiquer ces informations aux autorités de tarification concernées qui pourront exercer leur contrôle sur ces associations ainsi subventionnées. Cette disposition permet ainsi de conforter l'article R. 314-60 du code de l'action sociale et des familles qui prévoit que lorsque les recettes de la tarification servent àsubventionner un autre organisme, l'établissement ou le service tient à la disposition des autorités de tarification ou de contrôle toute information sur la nature et l'activité de l'organisme subventionné et sur l'emploi exact des moyens affectés.

Les contrôles de ces mêmes autorités pourront s'étendre, d'une part, aux autres activités de l'organisme gestionnaire et, d'autre part, aux sociétés et filiales créées par l'organisme gestionnaire de l'établissement ou du service social ou médico-social et qui sont des prestataires de services de ce dernier.

VII - LES RÉGIMES D'INCAPACITÉS PROFESSIONNELLES

L'ordonnance insère dans le code de l'action sociale et des familles un nouvel article L. 133-6 qui tend à harmoniser les dispositions relatives aux incapacités professionnelles applicables au secteur social et médico-social. Il se substitue ainsi aux dispositions régissant les différents régimes d'incapacité prévus dans ce code concernant l'accueil de mineurs dans le cadre des vacances et des loisirs, de mineurs ou d'adultes dans une structure soumise àdéclaration, et de personnes âgées ou handicapées adultes au titre de l'accueil familial àtitre onéreux (CASF, art. L. 227-7, L. 227-7-1, L. 322-5, L. 443-2, L. 443-11 abrogés et L. 321-2, L. 321-4, L. 322-8 modifiés) (20).

A - Un nouveau régime d'incapacité (art. 13, II et 15, V)

Désormais, nul ne peut exploiter ni diriger l'un quelconque des établissements, services ou lieux de vie et d'accueil régis par le code de l'action sociale et des familles, y exercer une fonction à quelque titre que ce soit, ou être agréé au titre des dispositions de ce dernier s'il aété condamné définitivement pour crime ouà une peine d'au moins 2 mois d'emprisonnement sans sursis pour les délits suivants dont la liste est harmonisée etélargie :

 atteintes à la vie de la personneà l'exclusion des atteintes involontaires causées par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquementà une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement ;

 atteintes à l'intégritéphysique et psychique de la personne à l'exclusion des atteintes involontaires causées par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement ;

 mise en danger de la personne ;

 atteintes aux libertés de la personne ;

 atteintes à la dignité de la personne (discrimination, traite des êtres humains, proxénétisme, prostitution de mineurs...)  ;

 atteintes aux mineurs et à leurs familles (délaissement de mineur, abandon de famille, mise en péril de mineurs...)  ;

 atteintes aux biens (appropriation frauduleuses tels les vols, l'extorsion, l'escroquerie... et le recel)  ;

 corruption passive et trafic d'influence commis par des personnes exerçant une fonction publique ;

 soustraction et détournement de biens ;

 corruption active et trafic d'influence commis par les particuliers ;

 entraves à l'exercice de la justice ;

 faux ;

 provocation au délit d'usage illicite de substances ou plantes classées comme stupéfiants.

Relevons que le champ des structures et activités concernées est clarifié et rendu plus lisible par l'introduction des «  lieux de vie et d'accueil ». Antérieurement, seuls les« établissements et services »étaient visés. En outre, cet article fait référence à l'individu « agrééau titre des dispositions » du code de l'action sociale et des familles, ce qui permet à l'ordonnance de supprimer la référence explicite aux assistants maternels et aux assistants familiaux qui figurait dans le code jusque-là.

L'incapacité sera susceptible de relèvement judiciaire dans les conditions du code pénal et de procédure pénale (CP, art. 132-21 et CPP, art. 702-1 et 703).

Est également précisée la procédure applicable en cas d'incapacité professionnelle résultant d'une condamnation prononcée par une juridictionétrangère et celle de relèvement judiciaire dans cette hypothèse.

Relevons que l'ensemble de ce dispositif est aussi applicable aux établissements et services gérés par une personne physique ou morale de droit privé accueillant des enfants de moins de 6 ans visés à l'article L. 2324-1 du code de santé publique qui est complété en ce sens.

B - Des sanctions pénales (art. 13, I)

Dans un souci de clarification et d'harmonisation, l'ordonnance instaure également un nouveau chapitre au sein du code de l'action sociale et des familles regroupant les dispositions pénales. Celui-ci intègre, en premier lieu, les dispositions de l'ancien article L. 133-6 (perception frauduleuse de prestations d'aide sociale) qui devient l'article L. 135-1.

Par ailleurs, l'ordonnance punit désormais d'une peine de 2 ans d'emprisonnement et de 30 000 d'amende le fait d'exercer, à quelque titre que ce soit, une activité régie par le code de l'action sociale et des familles malgré les incapacités résultant d'une des condamnations énonc

LES POLITIQUES SOCIALES

S'abonner
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client 01.40.05.23.15

par mail

Recruteurs

Rendez-vous sur votre espace recruteur.

Espace recruteur