Dans un arrêt du 2 novembre, la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) a jugé qu'une loi - en l'espèce une loi allemande - qui autorise la conclusion, sans limitation, de contrats à durée déterminée (CDD) pour les personnes de 52 ans et plus n'est pas conforme au principe de non-discrimination pour les travailleurs âgés prévu par la directive en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail du 27 novembre 2000 (1). C'est la première fois que la cour précise la portée de ce principe.
Cet arrêt, rédigé en termes généraux, peut être considéré comme un arrêt de principe. Il intervient au moment où, en France, l'emploi des seniors, au cœur d'un récent accord des partenaires sociaux (2), doit faire l'objet de décisions du gouvernement dans les prochaines semaines.
Certes, estime la CJCE, les Etats membres disposent « incontestablement d'une large marge d'appréciation dans le choix des mesures susceptibles de réaliser leurs objectifs en matière de politique sociale et d'emploi ». Et, pour favoriser l'insertion professionnelle des travailleurs âgés au chômage, il est possible d'introduire « en principe, objectivement et raisonnablement, une différence de traitement fondée sur l'âge », considère-t-elle. Mais encore faut-il que la réglementation n'aille « pas au-delà de ce qui est approprié et nécessaire pour atteindre l'objectif légitime poursuivi ».
Sur ce point, la cour estime que la législation allemande est contraire aux principes communautaires. Ainsi, permettre « sans restrictions » la conclusion de CDD pour tous les travailleurs les plus âgés n'est pas « objectivement nécessaire à la réalisation de l'objectif d'insertion professionnelle des travailleurs âgés au chômage ». L'absence de proportionnalité est caractérisée, selon les juges, car cette mesure est appliquée sans distinction - « que les personnes aient été ou non en situation de chômage avant la conclusion du contrat et quelle qu'ait été la durée de la période de chômage éventuelle » - et reconduite « de manière indéfinie ». Une « catégorie importante de travailleurs, déterminée exclusivement en fonction de l'âge, risque ainsi, durant une partie substantielle de la carrière professionnelle de ces derniers, d'être exclue du bénéfice de la stabilité de l'emploi, laquelle constitue pourtant un élément majeur de la protection des travailleurs », ont considéré les juges.
Au final, la cour demande au juge national « d'assurer le plein effet du principe général de non-discrimination en fonction de l'âge en laissant inappliquée toute disposition contraire de la loi nationale ». Et ce, « alors même que le délai de transposition de la directive [du 27 novembre 2000] n'est pas encore expiré ».
(1) Voir ASH n° 2186 du 27-10-00.
(2) Voir ASH n° 2426 du 21-10-05.