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ENQUETE SUR LES DIRECTEURS

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Présentée le 25 novembre, lors de la première réunion de concertation à propos du décret sur la qualification des directeurs, l'étude du cabinet GESTE met en évidence, au-delà du socle commun de leurs missions, la diversité des conditions d'exercice et des profils des directeurs.

Le décret sur la qualification des directeurs d'établissements et de services sociaux et médico-sociaux verra-t-il enfin le jour ? La loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale a en effet posé des exigences pour ces personnels. Son article 15 II précise que les établissements et services « sont dirigés par des professionnels dont le niveau de qualification est fixé par décret et après consultation de la branche professionnelle ou, à défaut, des fédérations ou organismes représentatifs des organismes gestionnaires d'établissements et de services sociaux et médico-sociaux associés ». Décret à propos duquel la direction générale de l'action sociale (DGAS) avait fait circuler un avant-projet, fortement critiqué d'ailleurs, en vue d'ouvrir la concertation en septembre 2004. Depuis, plus rien. La DGAS vient, enfin, de sortir de sa réserve en conviant, le 25 novembre, les syndicats de salariés et d'employeurs, les associations de directeurs et les fédérations d'associations à une première réunion de discussion.

Parviendra-t-elle à un consensus sur le sujet ? Il va falloir en effet arbitrer entre les intérêts, pas toujours convergents, des uns et des autres. Comment reconnaître un niveau de qualification adapté aux nouvelles contraintes d'une fonction devenue aujourd'hui un véritable métier tout en tenant compte des contraintes financières et de la liberté associative ? Comment tirer vers le haut les voies d'accès eu égard aux exigences de qualité et aux nouvelles règles gestionnaires et comptables sans les verrouiller face à la diversité des conditions d'exercice de la fonction et à la pénurie des candidats, qui va aller en s'aggravant ? L'une des pistes, évoquée par certains, pourrait être de s'inspirer de la circulaire du 26 février 1975 relative à la direction des « établissements pour mineurs adaptés », seul texte de référence aux fonctions du directeur, et de définir dans le décret à partir de quels critères un responsable exerce pleinement les fonctions de direction. Dans ce cas, le certificat d'aptitude aux fonctions de directeur d'établissement social (Cafdes) ou un diplôme de niveau I serait exigé. Sinon, lorsque les fonctions de direction ne sont pas exercées en totalité, un diplôme de niveau II serait demandé. Un scénario qui, au-delà de son impact financier, exigerait bien sûr d'engager un effort de formation pour les nombreux directeurs possédant un diplôme de niveau III. Il aurait en tout cas le mérite d'articuler la qualification à la réalité de la fonction et au contenu des délégations.

Il est évident en effet qu'au vu de la disparité des modes d'exercice et donc des profils des directeurs, il ne saurait y avoir de réponse unique en termes de qualification. Une hétérogénéité que met d'ailleurs clairement en évidence « l'étude sur la qualification des directeurs d'établissements et de services sociaux et médico-sociaux », réalisée par le cabinet GESTE (Groupe d'études sociales techniques et économiques) à la demande de la DGAS et qui sera présentée, le 25 novembre, aux partenaires du groupe de travail. Effectuée à partir d'entretiens auprès de directeurs et d'employeurs, elle donne un état des lieux précis sur les profils et les rôles, assez mal connus, des cadres du secteur.

D'abord qui sont-ils ? Des hommes (54 %) ou des femmes (46%). Ce relatif équilibre dans la fonction de direction (malgré un niveau de diplôme plus élevé pour les hommes) est toutefois à nuancer en raison de la forte féminisation des emplois dans le secteur. Près des trois quarts des enquêtés ont plus de 45 ans. Un directeur sur cinq a entre 36 et 45 ans. S'ils sont peu nombreux à avoir dépassé 60 ans en comparaison avec d'autres secteurs d'activité, l'étude prévoit, sur les cinq prochaines années, une moyenne de départ de 5 % par an. Un taux plus élevé que le taux moyen du secteur (3 %) mais dont l'effet devrait être progressif, en raison de l'équilibre des effectifs des tranches d'âge 46-50 ans, 51-55 ans et 56-60 ans. Dans 80 % des cas, la fonction de direction est rattachée au titre de directeur. Taux qui passe à 42 % dans le secteur de l'aide à domicile où le titre de responsable de service est également répandu. Par ailleurs, près d'un tiers des directeurs assure cette fonction également dans un autre établissement (au sein des secteurs de l'hébergement des adultes handicapés et des personnes âgées notamment).

L'étude met en évidence les niveaux hétérogènes des diplômes. Plus d'un tiers des directeurs ont un diplôme de niveau I (1) et près d'un quart un diplôme de niveau III. Devant le niveau II (19 %), le niveau IV (18 %), et le niveau V (5,5 %). Un tableau en cohérence avec la logique de promotion par l'emploi du secteur, qui permet à des professionnels souvent diplômés au niveau III d'accéder aux fonctions de direction.

Les niveaux de diplômes varient selon le statut juridique de l'établissement ou du service : le niveau I est plus fréquent au sein du secteur privé non lucratif (41 %) et dans la fonction publique hospitalière (35 %). Les niveaux sont moins élevés dans le secteur privé commercial (40 % des directeurs au niveau IV) et dans la fonction publique territoriale (36 % au niveau IV). Si la qualification augmente avec la taille de la structure, elle varie également en fonction de l'activité : les directeurs des établissements et services liés au handicap ont un niveau de qualification plus élevé (plus de 50 % des directeurs ont un diplôme de niveau I) tandis que l'aide à domicile, les foyers-logements et l'accueil des travailleurs et migrants présentent des niveaux de qualification moindres. Les maisons de retraite offrant une situation intermédiaire avec une distribution assez équilibrée.

Logiquement, les nouvelles générations sont plus formées que les précédentes : 50 % des directeurs diplômés après 2000 ont le niveau I contre 31 % avant 1980. De même, le niveau de diplôme est inversement proportionnel à l'ancienneté dans l'établissement : 41 % des directeurs présents depuis moins de cinq ans ont un diplôme de niveau I contre 26% de ceux en poste depuis 20 ans.

Le secteur se caractérise par l'importance des doubles formations : 30 % des directeurs cumulent un diplôme professionnel et un diplôme universitaire ; 30 % n'ont qu'un diplôme professionnel et 21 % qu'un diplôme universitaire ; 19 % sont titulaires ou non du bac.

Près de 46 % des directeurs possèdent un diplôme professionnel obtenu en formation initiale. Il s'agit surtout du diplôme d'Etat d'éducateur spécialisé, notamment dans les structures pour handicapés, celles comptant entre 21 et 100 salariés (équivalent temps plein) et celles relevant du secteur privé non lucratif, et du diplôme infirmier, souvent dans les maisons de retraite ou les services d'aide à domicile, les petits établissements (moins de 10 salariés) et ceux dépendant de la fonction publique territoriale. 24 % des directeurs ont obtenu un diplôme professionnel en formation continue, le Cafdes pour 70 % d'entre eux.

35 % des directeurs ont préparé un diplôme universitaire en formation initiale : de niveau II (licence, maîtrise) pour 41 % d'entre eux. Les DESS, DEA, doctorat, (niveau I) sont davantage préparés en formation continue.

Pour 81 % des directeurs, leur dernier diplôme a été décroché avant leur nomination au poste actuel. Mais si le titre est important, le critère principal pour le recrutement reste la trajectoire du candidat. Si 51 % des enquêtés soulignent que leur dernier diplôme obtenu était bien celui exigé à l'embauche, bon nombre d'entre eux mettent en avant combien « leurs parcours professionnels et leurs diverses expériences » ont pesé lors de l'embauche. Un constat confirmé par les responsables associatifs chargés du recrutement. C'est ainsi qu'une longue expérience dans l'association, le type d'établissement ou de service dans lequel le directeur a exercé « sur le terrain » sont déterminants. C'est le fait « d'appartenir au sérail », c'est à dire de bien connaître le champ social ou médico-social, mais aussi, en plus d'avoir des compétences de gestion et d'animation, de posséder tout simplement une « fibre pour ces publics ».

L'enquête définit ainsi deux types de parcours de directeurs. Le type I correspond à un diplômé du secteur social ou sanitaire en formation initiale (DEES ou diplôme infirmier) qui, en raison de sa « légimité » de terrain a pris des responsabilités dans l'encadrement ; une évolution qui s'est faite le plus souvent après une formation complémentaire (niveau I ou II) de type universitaire ou après une formation de chef de service ou préparant au Cafdes. Le type II concerne des professionnels hors du champ social ou médico-social (venant de l'entreprise notamment) désireux de changer d'orientation et qui font valoir une certaine aptitude sociale et des compétences de gestion ou de management d'équipe. C'est une orientation privilégiée par certains groupes privés dans le secteur des établissements pour personnes âgées ou par des centres d'aide par le travail. C'est aussi la brèche dans laquelle s'engagent des associations pour faire face aux difficultés de recrutement sur les postes de direction.

Quelles sont les compétences les plus importantes pour diriger ? Les enquêtés soulignent l'analyse et le traitement des besoins des usagers (61 %), les capacités de gestion (57 %) et d'animation des équipes (55 %). Interrogés sur leurs besoins de formation, les directeurs expliquent vouloir renforcer leurs compétences juridiques, notamment en matière de droit des usagers, et leurs méthodes d'analyse et d'évaluation. Reste que bon nombre d'entre eux évoquent leur manque de disponibilité, ce qui les amène à privilégier des formations courtes ou des stages de quelques jours sur des thématiques précises. Beaucoup aimeraient préparer le Cafdes, mais émettent des doutes sur les chances d'aboutir pour des raisons de disponibilité, mais également de financement de la formation. D'autres encore évoquent des projets de formations universitaires de niveau I (DESS, Master)... Nul doute, comme le confirment les propos des professionnels et des employeurs, que la fonction de direction a considérablement évolué. Auparavant son titulaire était responsable de la stratégie de la structure vis à vis de l'usager et garant de son bon fonctionnement (couvrant la gestion comptable et celle du personnel). Il doit aujourd'hui être aussi pilote du projet d'établissement, animateur des relations avec les partenaires extérieurs et gestionnaire des ressources humaines. C'est un « homme orchestre ou un chef d'orchestre », expliquent plusieurs directeurs et recruteurs, même si l'ampleur de ses missions dépend de l'organisation de l'association employeur et/ou de la taille de l'établissement. Car, s'il existe un socle commun de missions, entre l'homme à tout faire d'une petite structure et le coordonnateur-animateur d'un grand établissement (ou d'un ensemble d'établissements co-dirigés), la fonction reste à géométrie variable.

Isabelle Sarazin

Un état des lieux représentatif

L'étude confiée au cabinet GESTE visait à cerner les qualifications et diplômes des directeurs et les attentes des employeurs et des professionnels. Elle s'est fondée sur :

 une enquête téléphonique fermée auprès de 780 directeurs d'établissements retenus par tirage aléatoire à partir du fichier Finess selon les critères de taille, de secteur ou de statut juridique ;

 des entretiens approfondis avec des directeurs d'établissements et services (12) et des organismes employeurs (11) représentant 11 secteurs ;

 trois enquêtes complémentaires téléphoniques auprès de 50 établissements et services répartis entre la fonction publique hospitalière, la fonction publique territoriale et les services à domicile. L'échantillon est représentatif de l'ensemble des établissements et services du secteur.

Notes

(1)  Niveau I : supérieur à la maîtrise ; niveau II : licence ou maîtrise ; niveau III : BTS, DUT, DEUG ; niveau IV : baccalauréat, brevet de technicien, brevet professionnel ; niveau V : brevet des collèges validé, BEP ou CAP validé ; niveau V bis : niveau V non validé.

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