La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées constitue, en matière de scolarisation des jeunes handicapés (1), « une totale révolution. Car non seulement les enfants scolarisés jusque-là à titre subsidiaire le seront demain à titre principal, mais encore tous ceux qui bénéficient d'une prise en charge appropriée dans le secteur médico-social ou qui le sont dans des établissements situés à l'étranger (en Belgique pour un grand nombre) se voient reconnaître le droit à une véritable existence scolaire par le biais du premier acte fondateur de toute scolarité qui est celui de l'inscription dans l'école de son quartier. » C'est partant de ce constat positif que le rapport du député (UMP) de Seine-et-Marne, Guy Geoffroy, remis le 8 novembre au ministre délégué aux personnes handicapées, Philippe Bas, et au ministre de l'Education nationale, Gilles de Robien, analyse les conséquences de ce dispositif pour les institutions scolaires et les institutions médico-sociales et dans leurs relations réciproques.
Pour lui, pas de doute, même si aujourd'hui la plupart des jeunes concernés « ne bénéficient de cet apport scolaire qu'à titre subsidiaire », « tous [les membres de la communauté éducative] se déclarent prêts à "jouer le jeu" et à favoriser la mise en œuvre de ce droit nouveau ». Reste qu'il convient, selon l'auteur, pour ne pas créer « une nouvelle usine à gaz », d'expliquer à tous les acteurs du monde de l'école ce qu'implique réellement, pour chaque étape de la scolarité, la mise en œuvre du nouveau principe. Et, en premier lieu, aux acteurs locaux - inspecteurs d'académie, inspecteurs du premier degré, chefs d'établissements secondaires et directeurs d'école -qui donneront l'impulsion en la matière.
Le rapport relaie par ailleurs les inquiétudes du secteur médico-social : va-t-il, « sous la pression de la forte attente de scolarisation "ordinaire ", "perdre" certains des enfants ? », s'interrogent les acteurs concernés. N'y a-t-il pas un risque de voir les « établissements changer de destinée par l'accueil de nouveaux enfants, plus durement handicapés, et vis-à-vis desquels [ils perdraient] cette légitimité durement acquise à assurer une prise en charge incluant une dimension scolaire ? » En réponse à ces craintes, le député juge nécessaire que ce secteur adhère à ce nouveau dispositif. Et pour ce faire, il prohibe tout retrait à ces établissements médico-sociaux des moyens en personnel de l'Education nationale dont ils disposaient au motif que la scolarisation relèverait exclusivement du monde de l'école. Au contraire, le monde médico-social doit se voir reconnaître, dans ce nouveau cadre, une mission complémentaire « mais nullement accessoire ». Dès lors, le rapport préconise la tenue, à l'automne 2007, d'une conférence nationale pour mesurer l'ampleur des conséquences de la loi du 11 février 2005 et convenir des améliorations à apporter.
Le document souligne également l'importance des partenariats avec les collectivités locales. Le rôle des départements est ainsi mis en avant, de même que celui de l'échelon communal devenu « incontournable » en tant que premier lieu d'inscription de l'enfant. Le rapport insiste également pour que l'élève handicapé puisse bénéficier des accueils pré et/ou post scolaire et des prestations du « temps du midi ». En outre, Guy Geoffroy recommande une « présence très forte de l'Etat » et invite le gouvernement, durant la présente année scolaire, à procéder à un « balayage complet de ces questions avec les représentants des associations représentatives des collectivités locales, afin de mesurer les premiers effets constatés de la nouvelle loi, de pointer le plus précisément possible les sujets sur lesquels il est important de compléter l'organisation et l'articulation des interventions et de combler les lacunes qui pourraient apparaître ».
Un dernier volet du rapport a trait à la question cruciale des moyens humains. Tout en relevant la « grande hétérogénéité et la relative discontinuité de la présence accompagnante » ainsi que l'insuffisance de la formation parfois dénoncée par les auxiliaires de vie scolaire (AVS), le député préconise « la professionnalisation de ces acteurs ». Il propose, à cette fin, de recourir à « l'expertise des nombreux professionnels du secteur, dont
les aides médico-pédagogiques [...] qui constituent probablement un vivier intéressant de formateurs ». Il lui semble également nécessaire de réfléchir à l'émergence de nouveaux métiers de l'accompagnement permettant, aux côté des AVS, « la présence plus durable de professionnels qui auront de cette mission fait leur métier ». Pour l'auteur, le plan des métiers, décrit dans la loi du 11 février, doit être le vecteur de ces évolutions et devraient permettre aux AVS de prolonger leur mission vers ce métier nouveau. Le rapport suggère enfin de différencier les rôles de ces personnels selon que l'accompagnement est collectif - ce qui relève d'une approche pédagogique compatible avec les savoir-faire de l'Education nationale - ou individuel - qui exige une adaptation plus fine à la problématique spécifique du handicap et ressortit plus à une démarche à laquelle sont rompues les institutions médico-sociales. S. A
(1) Voir ASH n° 2413 du 24-06-05.