Patronat et syndicats ont scellé dans la nuit du 12 au 13 octobre un projet d'accord sur l'emploi des seniors, après sept mois de blocage et autant de séances de négociations (1). Pour obtenir les paraphes syndicaux, la partie patronale a multiplié les concessions. Aux oubliettes, par exemple, l'idée d'instaurer un contrat de travail spécifique - baptisé « contrat de mission » - pour les seniors, de même que la demande du Medef de supprimer la contribution Delalande - due par les entreprises en cas de licenciement de salariés de 50 ans et plus (2). Résultat, les questions les plus délicates sont soit renvoyées aux pouvoirs publics - l'examen de ce prélèvement et les possibilités de cumul emploi-retraite notamment -, soit à d'autres négociations. En particulier, celles qui débuteront le 8 novembre sur le renouvellement de la convention d'assurance chômage seront l'occasion d'examiner les dispositifs susceptibles de favoriser le retour à l'emploi des seniors. Au final, sur les 27 articles que compte le projet d'accord, peu d'entre eux sont réellement normatifs, les partenaires sociaux ayant fait le choix de laisser aux branches et aux entreprises le soin de mettre en musique les mesures arrêtées (modalités d'information sur l'accès à la validation des acquis de l'expérience par exemple). Avec un objectif à respecter toutefois : faire passer le taux d'emploi des 55-64 ans « de 36,8 % actuellement à 50 % à l'horizon 2010, soit une progression de l'ordre de 2 points par an ». Un premier bilan sera dressé fin 2007.
Longtemps, les négociations ont achoppé sur la question des mesures à mettre en œuvre pour favoriser le retour à l'emploi des seniors. Le projet d'accord prévoit finalement que ceux de plus de 57 ans pourront bénéficier d'un contrat à durée déterminée d'une durée maximale de 18 mois, renouvelable une fois. A condition toutefois d' « être inscrits [à l'ANPE] comme demandeur d'emploi depuis plus de trois mois ou [d'être] en convention de reclassement personnalisé » (3). Ultime concession du patronat, ce contrat ne pourra par ailleurs être proposé aux intéressés que pour leur « permettre d'acquérir des droits supplémentaires en vue de la liquidation de [leur] retraite à taux plein ». La création de ce dispositif nécessite toutefois des aménagements législatifs et réglementaires, la durée d'un contrat à durée déterminée ne pouvant actuellement excéder 18 mois dans le cas général, renouvellement compris.
Les salariés d'au moins 45 ans auront par ailleurs accès à un « entretien de deuxième partie de carrière » tous les cinq ans, leur permettant de faire le point sur leurs compétences, leurs besoins de formation ou sur un éventuel aménagement de leurs conditions d'emploi. Après 20 ans d'activité professionnelle et, en tout état de cause, à partir de son 45eanniversaire, chaque salarié bénéficiera en outre, à son initiative et sous réserve de disposer d'une ancienneté minimale de un an dans l'entreprise qui l'emploie, d'un bilan de compétences.
Au-delà, un accès prioritaire au contrat et à la période de professionnalisation (4) est reconnu aux plus de 45 ans, afin de « favoriser [leur] réinsertion en leur assurant une qualification » et de « répondre à leurs besoins de formation ». Ceux âgés d'au moins 50 ans se voient, quant à eux, reconnaître le droit d'abonder, via leurs droits au droit individuel à la formation (5), une action de formation professionnelle déterminée en accord avec leur employeur lors de l'entretien de deuxième partie de carrière.
En outre, les salariés de 55 ans et plus pourront, s'ils le souhaitent, bénéficier d'aménagements de leurs horaires de travail, y compris sous forme de temps partiel. « Les entreprises s'efforceront de limiter l'impact de ces aménagements sur les droits à retraite à taux plein des intéressés », précise le projet d'accord.
Ce texte est ouvert à la signature jusqu'au 10 novembre, le temps pour les organisations syndicales de consulter leurs bases ou leurs instances de direction. Quatre d'entre elles - la CFDT, FO, la CFTC et la CFE-CGC - devraient en principe le signer.
(1) Une négociation prévue, pour mémoire, par la loi « Fillon » du 21 août 2003 sur les retraites - Voir ASH n° 2339 du 26-12-03.
(2) Sur l'impact de ce prélèvement sur le taux d'emploi des seniors, voir ASH n° 2425 du 14-10-05.
(3) Voir ASH n° 2410 du 3-06-05.
(4) Voir ASH n° 2385 du 10-12-04.
(5) Voir ASH n° 2359 du 14-05-04.