(Loi n° 2005-102 du 11 février 2005, J.O. du 12-02-05)
Fin 2002,35 % des établissements de plus de 20 salariés n'employaient toujours aucun travailleur handicapé (voir encadré). Fort de ce constat le législateur a cherché, avec la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, à renforcer l'efficacité de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés dans le secteur privé. Un nouvel outil est par ailleurs mis en place pour imposer le respect de cette obligation dans le secteur public : un fonds pour l'insertion des personnes handicapées, commun aux fonctions publiques de l'Etat, hospitalière et territoriale. Son principe est similaireà celui du Fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) intervenant dans le secteur privé. Il sera alimenté par les contributions à la charge des employeurs publics ne respectant pas l'obligation d'emploi.
Au-delà, la loi tente de « faire de l'emploi des personnes handicapées une préoccupation ordinaire des entreprises » (Rap. Sén. n° 210, tome 1, février 2004, Blanc). A cet effet, elle impose par exemple aux partenaires sociaux une obligation périodique de négociation sur la thématique de l'insertion professionnelle des personnes handicapées. Elle renforce le principe de non-discrimination à l'égard de ces publics dans le cadre professionnel et, afin de répondre aux exigences d'une directive communautaire, introduit la notion de« mesures appropriées » facilitant l'accès à l'emploi des personnes handicapées.
De même, elle tente de mieux articuler la politique de l'emploi et les mesures spécifiques en faveur des personnes handicapées. Elle renforce ainsi les missions de l'Agefiph et précise le rôle des centres de préorientation et des organismes de placement spécialisés. Du côté de la fonction publique, le législateur accorde de nouveaux avantages aux fonctionnaires et agents handicapés afin de faciliter leur accès à l'emploi ou leur maintien àleur poste. Il leur étend également le dispositif de retraite anticipée, déjà prévu pour les salariés handicapés et introduit par la loi du 21 août 2003 réformant les retraites (1).
Nombre de ces dispositions entreront en vigueur le 1er janvier 2006 et nécessitent, pour ce faire, des textes d'application. Il en est ainsi de la plupart des modifications apportées au mécanisme de l'obligation d'emploi. Certaines sont entrées en vigueur dès le 13 février 2005, telles celles sur le principe de non-discrimination ou sur l'insertion professionnelle des personnes handicapées.
Tout en maintenant le principe et le quota de l'obligation d'emploi des personnes handicapées, la loi du 11 février 2005 en modifie certaines règles. « Il s'agit de rendre plus incitatif à l'embauche directe de travailleurs handicapés un système qui a permis à beaucoup de personnes d'accéder à l'emploi mais a atteint ses limites » (Rap. A.N. n° 1599, mai 2004, Chossy). Rappelons que tout employeur de droit privé occupant au moins 20 salariés est aujourd'hui tenu d'employer des travailleurs handicapés dans la proportion de 6 % de l'effectif total de ses salariés. Les entreprises peuvent s'acquitter de leur obligation par l'emploi direct de personnes handicapées ou par :
la passation de contrats de sous-traitance avec des ateliers protégés (devenant, à compter du 1er janvier 2006, des entreprises adaptées (2) ), des structures d'aide par le travail ou des centres de distribution de travail à domicile. Cependant, l'obligation d'emploi ne peut être réalisée intégralement de la sorte ;
l'accueil de stagiaires de la formation professionnelle handicapés, une option qui ne peut non plus couvrir la totalité de l'obligation d'emploi ;
l'application d'accords collectifs comportant des mesures d'insertion, de formation, d'adaptation aux mutations ou de maintien dans l'entreprise en faveur des travailleurs handicapés ;
le versement d'une contribution àl'Agefiph.
La loi procède à des aménagements concernant les bénéficiaires de cette obligation, les modalités de décompte de ces derniers et de calcul de l'effectif global des entreprises ainsi que les possibilités offertes àcelles-ci pour s'acquitter de cette obligation. Ces modifications doivent entrer en vigueur, pour l'essentiel, au 1erjanvier 2006 (art. 96, I de la loi), des décrets d'application étant toutefois nécessaires.
A la liste des bénéficiaires déjàprévue par le code du travail - travailleurs reconnus handicapés par la nouvelle commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (et, dans l'attente, par la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel [Cotorep]), victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles ayant entraîné une incapacité permanente au moins égale à 10 % et titulaires d'une rente, titulaires d'une pension d'invalidité... - seront ajoutés, à compter du 1er janvier 2006 (code du travail [C. trav.], art. L. 323-3 modifié) :
les titulaires d'une carte d'invalidité. Actuellement, ces derniers, qui ont une incapacité permanente d'au moins 80 %, ne sont pas systématiquement décomptés comme bénéficiaires de l'obligation d'emploi. Ils ne le sont que dans la mesure où ils remplissent l'une des conditions prévues par l'article L. 323-3 du code du travail (être reconnu travailleur handicapé par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées appelée àse substituer à la Cotorep, être titulaire d'une pension d'invalidité, ou victime d'un accident du travail...). « A priori , les titulaires de la carte d'invalidité ont toutes les chances d'appartenir déjà à l'une des catégories existantes de bénéficiaires de l'obligation d'emploi et il est difficile d'évaluer la portée de l'extension » (Rap. A.N. n° 1599, mai 2004, Chossy).
les titulaires de l'allocation aux adultes handicapés. Il s'agit de leur permettre de« bénéficier des actions d'accompagnement vers l'emploi offertes par les réseaux spécialisés. L'objectif est d'élargir le champ des réponses apportées aux bénéficiaires de l'AAH qui sont capables de travailler mais qui ont des difficultés às'insérer dans le marché du travail, dans une perspective générale de retour à l'emploi des personnes handicapées », a expliqué au cours des débats Marie-Anne Montchamp, alors secrétaire d'Etat aux personnes handicapées (J.O.A.N. [C.R.] n° 138 du 22-12-04).
Le législateur avait un temps envisagé d'étendreégalement cette liste aux salariés ayant bénéficié d'un reclassement au cours de leur carrière, à la suite d'une inaptitude définitive, partielle ou totale, à leur poste de travail. L'idéeétait en effet de « faciliter le maintien dans l'emploi des personnes fragilisées dans leur parcours professionnel par un accident de la vie » (J.O.A.N.[C.R.] n° 138 du 22-12-04).
Par ailleurs, le mode de décompte des bénéficiaires de l'obligation d'emploi est simplifié. Aujourd'hui, les travailleurs handicapés dans l'entreprise peuvent être pris en compte une fois et demie ou plus en fonction de leur âge, de la lourdeur de leur handicap, de la nature de leur contrat de travail ou de leur parcours professionnel. Ainsi, une personne handicapée peut correspondre jusqu'à 5,5 unités bénéficiaires de l'obligation d'emploi dans l'effectif de l'entreprise.
Répondant aux préconisations formulées par le Conseil économique et social (3), la loi du 11 février 2005 substituera à ce dispositif, dès le 1er janvier prochain, un décompte conduisant à comptabiliser chaque salarié handicapé pour une unité dans l'effectif de l'entreprise, dès lors qu'il aura été présent au moins 6 mois au cours des 12 derniers mois écoulés, quelles que soient la nature de son contrat de travail et sa durée de travail (C. trav., art. L. 323-4 nouveau). En visant les contrats de travail de toute nature, la loi prend en compte notamment les apprentis et les titulaires d'un contrat de professionnalisation, expliquent les travaux parlementaires. De même, aucune spécificité n'est prévue pour les personnes handicapées à temps partiel. La loi prend ainsi en« considération une réalité : pour une entreprise, le coût de l'accueil d'une personne handicapée exigeant des aménagements matériels ou un encadrement humain spécifique n'est pas nécessairement plus faible si elle est seulement présente pour une durée limitée ou à temps partiel » (Rap. A.N. n°1599, mai 2004, Chossy ).
En revanche, une exception est posée pour ceux sous contrat de travail temporaire ou mis à disposition par une entreprise extérieure qui seront pris en compte au prorata de leur temps de présence dans l'entreprise au cours des 12 mois précédents.
En conséquence de ce nouveau dispositif de décompte, la classification des travailleurs handicapés fondée sur la lourdeur de leur handicap sera supprimée au 1er janvier prochain (C. trav., art. L. 323-12 abrogé). Auparavant, la Cotorep avait pour mission, dès lors qu'elle avait reconnu la qualité de travailleur handicapé, de classer les intéressés dans l'une des catégories A, B ou C - selon que le handicap est léger (A), modéré (B) ou grave (C) - en fonction de ses capacités professionnelles et de l'emploi qui lui est proposé. Un tel classement a actuellement pour conséquence principale d'influer sur le calcul du nombre d'unités bénéficiaires pour l'obligation d'emploi. En effet, une personne classée en catégorie B correspondà une demi-unité supplémentaire et celle classée en catégorie C, à une unité et demie. C'est donc pour tenir compte de la fin du système des unités bénéficiaires que la loi supprimera ce dispositif en 2006. Entre le 12 février 2005 et le 1er janvier 2006, c'est la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, si elle est en place, qui procède à la classification des personnes handicapées et non la Cotorep (art. 96, I de la loi). En outre, jusqu'au 31 décembre 2007, les travailleurs reconnus handicapés par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (ou la Cotorep) et classés en catégorie C seront considérés comme présentant un handicap lourd pour l'application des dispositions sur la modulation de la contribution à l'Agefiph (art. 96, II).
La loi du 11 février 2005 modifie en outre le calcul de l'effectif global des entreprises qui sert de référenceà l'application du taux d'emploi de personnes handicapées de 6 %.
Actuellement, certaines catégories d'emplois exigeant des conditions d'aptitude particulières ne sont pas comptabilisées dans l'effectif global de l'entreprise. La liste de ces dernières est fixée en annexe àl'article D. 323-3 du code du travail (pompiers, ambulanciers, maçons qualifiés...). A compter du 1erjanvier 2006, ces catégories d'emploi seront intégrées dans le calcul de l'effectif global de l'entreprise. Néanmoins, leur spécificité pourraêtre prise en compte dans le cadre de la modulation de la contribution à l'Agefiph (C. trav., art. L. 323-4 nouveau) .
Selon les rapports parlementaires, « environ 456 000 emplois relèvent de ces catégories, qui sont donc exclus des quelque 8 millions d'emplois des entreprises de 20 salariés au moins correspondant aux effectifs assujettisà l'obligation d'emploi » (Rap. Sén. n°210, février 2004, Blanc). Explications : le maintien de l'exclusion de ces emplois n'est pas compatible avec le principe de non-discrimination par ailleurs réaffirmé par la loi.
Deux voies d'exécution de l'obligation d'emploi sont amendées par la loi du 11 février : le versement d'une contribution à l'Agefiph et l'application d'accords collectifs comportant des mesures d'insertion professionnelle, de formation, d'adaptation aux mutations ou de maintien dans l'entreprise.
Aujourd'hui, les entreprises peuvent notamment s'acquitter de leur obligation d'emploi en versant à l'Agefiph une contribution annuelle pour chacun des bénéficiaires de l'obligation d'emploi qu'elles auraient dû employer.
La loi du 11 février 2005 modifie les modalités de calcul de cette contribution à compter du 1erjanvier 2006.
A cette date, le plafond de la contribution passera de 500à 600 fois le SMIC horaire maximal par bénéficiaire de l'obligation d'emploi non employé. Les modalités de calcul de cette contribution, qui s'élèvera alors à 4 818 € au maximum, seront fixées par décret (C. trav., art. L. 323-8-2 modifié).
Toutefois, pour les entreprises qui n'auront, pendant une période supérieure à 3 ans, occupé aucun bénéficiaire de l'obligation d'emploi, n'auront passé aucun contrat de fourniture de sous-traitance ou de prestations de service avec des entreprises adaptées, des centres de distribution de travail à domicile ou des structures d'aide par le travail ou n'appliqueront aucun accord collectif prévoyant la mise en place d'un programme annuel ou pluriannuel en faveur des travailleurs handicapés, la limite de la contribution sera portée, dans des conditions qui seront définies par décret, à 1 500 fois le SMIC horaire, soit, au 1er janvier 2006, 12 045 € au maximum.
A l'inverse, pour alléger les procédures, la loi, à compter du 1er janvier prochain, ouvre aux entreprises, en vue de leur permettre de s'acquitter partiellement de leur obligation d'emploi, la possibilité de déduire du montant de leur contribution les dépenses qu'elles auront supportées directement et qui ne leur incombent pas en application d'une disposition législative ou réglementaire, destinées à favoriser :
l'accueil, l'insertion ou le maintien dans l'emploi des travailleurs handicapés au sein de l'entreprise ;
ou, plus généralement, l'accès à la vie professionnelle de personnes handicapées.
En fait, actuellement, les entreprises engageant des dépenses spécifiques en faveur de l'insertion professionnelle des personnes handicapées peuvent déjà bénéficier d'aides de l'Agefiph. Celles-ci leur sont accordées une fois qu'elles ont payé leur contribution. Cette nouvelle procédure, mettant en place une approche globale, vise à éviter des démarches aux entreprises.
L'avantage représenté par cette déduction ne pourra néanmoins se cumuler avec une aide accordée pour le même objet par l'Agefiph.
En tout état de cause, un décret doit préciser la nature des dépenses déductibles ainsi que les conditions dans lesquelles celles-ci peuvent être déduites du montant de la contribution. Pour le rapporteur àl'Assemblée nationale, Jean-François Chossy, « l'exclusion générale des dépenses résultant d'obligations légales ou réglementaires paraît à la fois réduire considérablement le champ des dépenses déductibles et ouvrir la porte àde nombreux litiges compte tenu des incertitudes existant sur le champ de certaines obligations des employeurs » (Rap. A.N. n° 1599, mai 2004, Chossy). Au cours des débats, la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées de l'époque a toutefois semblé restreindre cette non-déductibilité aux seules dépenses de formation professionnelle qui sont des dépenses obligatoires (J.O.A.N. [C.R.] n° 138 du 22-12-04).
La loi du 11 février 2005 maintient le principe d'une modulation du montant de la contribution Agefiph en fonction de l'effectif de l'entreprise. En revanche, elle l'étendà la prise en compte des emplois exigeant des conditions d'aptitude particulières - dont la liste sera fixée par décret - occupés par des salariés de l'entreprise.
Surtout, le montant de la contribution devra tenir compte de l'effort consenti par les entreprises en matière de maintien dans l'emploi ou de recrutement direct de bénéficiaires de l'obligation d'emploi. Ce, notamment à l'égard (C. trav., art. L. 323-8-2 modifié) :
des bénéficiaires pour lesquels le directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, après avis éventuel de l'inspection du travail, a reconnu la lourdeur du handicap. Rappelons que, jusqu'au 31 décembre 2007, les travailleurs reconnus handicapés par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (ou la Cotorep) et classés en catégorie C sont considérés comme présentant un handicap lourd (art. 96, II de la loi) ;
les bénéficiaires de l'obligation d'emploi rencontrant des difficultés particulières d'accès à l'emploi.
Une autre voie ouverte aux employeurs pour s'acquitter de leur obligation d'emploi est l'application d'un accord qui prévoie la mise en œuvre d'un programme pluriannuel ou annuel en faveur des travailleurs handicapés comportant obligatoirement un plan d'embauche en milieu ordinaire et 2 au moins des actions suivantes : plan d'insertion et de formation, plan d'adaptation aux mutations technologiques, plan de maintien dans l'entreprise en cas de licenciement (C. trav., art. L. 323-8-1 modifié). Il peut s'agir d'un accord de branche, d'un accord d'entreprise ou d'établissement et, désormais, d'un accord de groupe.
Depuis le 13 février, cet accord doit être agréé par l'autorité administrative, après avis de l'instance départementale compétente en matière d'emploi et de formation professionnelle ou du Conseil supérieur pour le reclassement professionnel et social des travailleurs handicapés. L'agrément, précise la loi, est donné pour la durée de validité de l'accord.
Auparavant, c'était l'avis de la commission départementale des travailleurs handicapés, des mutilés de guerre et assimilés ou de ce Conseil supérieur qui était requis. En raison de la suppression par la loi de ces commissions départementales (art 86,2° de la loi), le législateur a modifié la procédure d'agrément.
Les employeurs ne remplissant pas l'obligation d'emploi direct des travailleurs handicapés et ne recourant pas aux dispositifs de substitution sont tenus de verser au Trésor public une pénalité dont le montant sera revaloriséà compter du 1er janvier 2006.
A cette date, elle sera égale à 1 500 fois le SMIC horaire, majoré de 25 %, soit 15 056,25 € (au lieu de 500 fois le SMIC horaire + 25 %) (C. trav., art. L. 323-8-6 modifié).
Depuis le 13 février 2005, le respect par une entreprise de l'obligation d'emploi devient l'un des critères retenus par la commission d'appel d'offres pour classer les candidats à une délégation de service public (code général des collectivités territoriales, art. L. 1411-1 modifié).
Cette commission doit désormais dresser la liste des candidats admis à présenter une offre en tenant compte non seulement des garanties professionnelles et financières de l'entreprise et de sa capacité à assurer la continuité du service public et l'égalité des usagers devant le service public, mais également du respect ou non par l'entreprise candidate de l'obligation d'emploi. Pourront donc être écartées des délégations de service public les entreprises qui soit n'auront pas souscrit la déclaration annuelle d'emploi des travailleurs handicapés soit n'auront pas, si elles en sont redevables, versé leur contribution à l'Agefiph.
La loi du 11 février 2005 prévoit, enfin, depuis le 13 février 2005, l'exclusion du droit de concourir aux marchés publics des entreprises assujetties àl'obligation d'emploi qui, durant l'année précédant celle au cours de laquelle a eu lieu le lancement de la consultation, n'ont pas souscrit la déclaration annuelle d'emploi des travailleurs handicapés ou n'ont pas, si elles en sont redevables, acquitté leur contribution financièreà l'Agefiph (code des marchés publics, art. 44-1 nouveau).
A l'instar du secteur privé, les employeurs publics sont assujettis à l'obligation d'emploi prévue par le code du travail, dont ils peuvent s'acquitter soit par l'emploi direct de personnes handicapées, soit par l'achat de prestations au« secteur protégé ». Mais il n'existait pas pour eux, jusqu'à la loi du 11 février, de sanction financière du non-respect de l'obligation d'emploi, car ils n'étaient pas assujettis à la contribution« Agefiph » ni à un dispositif de même nature.
Or le taux d'emploi dans la fonction publique de l'Etat s'élevait, pour 2001, à 4,33 %, hors Education nationale. Il était respectivement de 5,12 % et de 5,68 % en 1999, dernière année connue, dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière.
« L'état des lieux peu flatteur de la situation de l'emploi des personnes handicapées dans la fonction publique de l'Etat, qui apparaissait comme la "lanterne rouge" de la fonction publique » (Rap. Sén. n° 210, tome 1, février 2004), a conduit le gouvernement àconclure, le 8 octobre 2001, avec cinq organisations syndicales, un protocole d'accord sur l'emploi des travailleurs handicapés (4). Ce dernier mettait en place un mécanisme de sanctions pour les ministères qui n'auraient pas atteint les objectifs fixés par des plans triennaux d'emploi des travailleurs handicapés, sanctions qui pouvaient prendre la forme de contributions financières à un fonds interministériel pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique et d'une interdiction de pourvoir les emplois sur lesquels des travailleurs handicapés auraient dû être recrutés.
Toutefois, ce mécanisme de sanction n'est pas entré en vigueur et s'est heurté à deux limites : les crédits du fonds interministériel restaient des crédits budgétaires susceptibles de faire l'objet d'une régulation budgétaire et le mécanisme proposéconcernait uniquement la fonction publique de l'Etat, aucune démarche similaire n'ayant été entamée dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière.
Afin de remédier à cette situation, la loi transpose au champ public, à compter du 1er janvier 2006, le système « Agefiph » en assujettissant les employeurs publics ne respectant pas l'obligation d'emploi de 6 % de personnes handicapées àune contribution, dont le produit alimentera un nouveau« fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique », commun aux trois fonctions publiques.
« L'établissement d'une pénalisation financière du non-respect de l'obligation d'emploi par les employeurs publics implique que le mode de décompte des personnels pour la vérification de cette obligation soit précisé » (Rap. A.N. n° 1599, mai 2004, Chossy).
Pour la fonction publique, la loi du 11 février 2005 retient un mode de calcul du taux d'emploi légèrement différent de celui applicable au secteur privé en vertu du code du travail, « mais qui s'en rapproche, ce qui s'impose pour obtenir des données comparables sur la situation de l'emploi des personnes handicapées d'une part dans les entreprises, d'autre part dans la fonction publique », ce qui n'est pas le cas actuellement.
Le taux d'emploi est calculé en rapportant l'effectif des bénéficiaires de l'obligation d'emploi à l'effectif global des agents.
Ainsi, à partir du 1er janvier 2006, l'effectif global des agents qui permet de calculer le taux d'emploi de 6 % des personnes handicapées sera constituéde l'ensemble des agents rémunérés par chaque employeur public au 1er janvier de l'annéeécoulée (C. trav., art. L. 323-4-1 nouveau). Relevons qu'aucune disposition spécifique n'est prévue pour les salariés en contrat de travail temporaire ou misà disposition par une entreprise extérieure alors que, dans les entreprises, la règle générale du code du travail est que les intéressés ne sont pris en compte que partiellement, au prorata de leur présence dans l'entreprise au cours des 12 mois précédents. Dès lors, selon les rapports parlementaires, « le système proposé pour la fonction publique tend àmajorer l'effectif global décompté, donc l'obligation d'emploi, sauf dans le cas assez peu vraisemblable d'une gestion limitant les effectifs présents au 1er janvier (par la multiplication de contrats temporaires échus juste avant ou passés juste après le 1erjanvier...) » (Rap. A.N. n° 1599, mai 2004, Chossy).
Dans ce cadre, chaque agent compte pour une unité.
En ce qui concerne l'effectif des bénéficiaires de l'obligation d'emploi, il sera constitué de l'ensemble des bénéficiaires de l'obligation emploi mais également des titulaires d'emplois dit« réservés » (5), des agents reclassés pour inaptitude à leur poste et des bénéficiaires de l'allocation temporaire d'invalidité rémunérés par ces mêmes employeurs publics au 1er janvier de l'annéeécoulée. Il ne s'agit là que du maintien de la situation actuelle. « Mais le fait est que la prise en compte, pour le calcul du taux d'emploi de personnes handicapées, d'agents souffrant de handicaps acquis qui obligent à les reclasser, mais n'entraînent pas nécessairement des aménagements particuliers ou un rendement plus faible dans leur nouvel emploi, voire de titulaires d'emplois réservés qui ne sont pas nécessairement invalides, semble permettre aux administrations d'afficher des taux d'emploi relativement "flatteurs ", sans qu'il soit possible de déterminer à quel point la statistique est faussée, puisqu'on ignore, notamment parmi les agents reclassés, la part d'entre eux qui serait susceptible d'entrer dans les catégories de bénéficiaires de l'obligation d'emploi "générale" s'ils étaient salariés d'entreprise » (Rap. A.N. n° 1599, mai 2004, Chossy).
Là encore et comme dans le secteur privé, chaque agent compte pour une unité.
La loi du 11 février 2005 instaure, à compter du 1er janvier 2006, un fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (C. trav., art. L. 323-8-6-1 nouveau).
Un décret doit préciser les modalités d'application de ces dispositions.
Les missions de ce fonds sont définies en termes généraux. Charge lui est ainsi confiée« de favoriser l'insertion professionnelle des personnes handicapées au sein des trois fonctions publiques »ainsi que « la formation et l'information des agents en prise avec elles ».
La nature des interventions du fonds n'est pas définie dans le dispositif législatif, mais des précisionsétaient apportées par l'exposé des motifs du projet de loi, qui citait diverses actions pour la plupart de même nature que celles réalisées actuellement par l'Agefiph : sensibilisation des employeurs ;aménagement de postes de travail et de moyens de transport (pour rejoindre le lieu de travail) ; formation et information des personnes handicapées et des personnels ; financement d'outils de recensement des bénéficiaires de l'obligation d'emploi ; financement d'organismes contribuant àl'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique...
Le fonds pourra apporter son concours à l'Etat, aux collectivités territoriales, aux établissements publics autres qu'industriels et commerciaux (ceux-ci étant déjà assujettis au dispositif« Agefiph »), à l'ensemble desétablissements hospitaliers et médico-sociaux dont les agents relèvent de la fonction publique hospitalière.
Ce fonds sera géré par un établissement public sous la tutelle de l'Etat. Selon les rapports parlementaires, deux options seraient ouvertes : créer unétablissement public ad hoc ou confier la gestion du fonds à un établissement existant, ce que semble préférer le gouvernement.
Dans un souci de cohérence, la loi prévoit que ce fonds devra conclure une convention de coopération avec l'Agefiph (C. trav., art. L. 323-10-1 nouveau) .
Pour gérer ce fonds, la loi instaure un« comité national » tripartite composé de représentants des employeurs, des personnels et des personnes handicapées. Il sera chargé de définir les « orientations » concernant l'utilisation des crédits du fonds par des comités locaux dont la composition n'est pas définie. Le comité national devra également produire un rapport annuel soumis aux conseils supérieurs des fonctions publiques et au Conseil national consultatif des personnes handicapées.
Le fonds sera, par ailleurs, réparti en trois sections correspondant aux trois fonctions publiques : de l'Etat, territoriale et hospitalière.
La loi institue un cloisonnement assez strict entre ces trois sections. En principe, les crédits de chaque section devront servir exclusivement aux actions initiées par ses contributeurs. Toutefois, il sera possible de financer des actions communes à plusieurs fonctions publiques par des crédits provenant de plusieurs sections du fonds. « Le choix est donc celui d'une mutualisation limitée, alors que dans le champ privé, l'Agefiph mutualise tous ses moyens et intervient même très largement dans les entreprises de moins de 20 salariés (pourtant exonérées d'obligation d'emploi et donc de contribution) » (Rap. A.N. n° 1599, mai 2004, Chossy). Pour Hervé Rihal, professeur de droit public, « le législateur a sans doute vouluéviter notamment qu'on accuse l'Etat de dépenser les sommes recueillies auprès des collectivités territoriales, ce qui aurait pu être analysé en un transfert indirect de charges » (6).
Côté ressources, le fonds disposera, au 1erjanvier prochain, d'une contribution des employeurs publics qui ne rempliront pas leur obligation d'emploi.
S'inspirant du dispositif Agefiph, la contribution annuelle sera due pour chaque travailleur handicapé« manquant » par rapport à l'obligation de 6 % (C. trav., art. L. 323-8-6-1, IV nouveau).
Cette contribution sera calculée en fonction du nombre d'unités manquantes constatées au 1er janvier de l'année écoulée. Ce nombre d'unités manquantes correspondra à la différence entre 6 % du nombre total de personnes rémunérées par l'employeur, arrondi à l'unité inférieure, et le nombre des bénéficiaires de l'obligation d'emploi effectivement rémunérés par l'employeur (C. trav., art. L.323-8-6-1, IV nouveau).
Toutefois, cette contribution sera ajustée pour tenir compte des dépenses :
réalisées au titre de contrats de fourniture de sous-traitance ou de prestations de services avec des entreprises adaptées, des centres de distribution du travail à domicile ou des structures d'aide par le travail ;
affectées à des mesures adoptées en vue de faciliter l'insertion professionnelle des personnes handicapées dans la fonction publique.
Ainsi, le montant total de ces dépenses sera divisépar le traitement brut annuel minimal servi à un agent occupant à temps complet un emploi public appréciéau 31 décembre de l'année écoulée. Le nombre d'unités manquantes sera ensuite réduit d'un nombre d'unités égal au quotient ainsi obtenu.
De même, le nombre d'unités manquantes seraégalement réduit dans les mêmes conditions afin de tenir compte de l'effort consenti par l'employeur pour accueillir ou maintenir dans l'emploi des personnes lourdement handicapées.
La contribution sera ensuite égale au nombre d'unités manquantes, multiplié par un montant unitaire. Ce montant ainsi que ses modalités de modulation sont identiques, sous réserve des spécificités de la fonction publique, à ceux prévus pour la contribution Agefiph .
Pour les services de l'Etat, le calcul de la contribution est opéré au niveau de l'ensemble des personnels rémunérés par chaque ministère.
La loi prévoit toutefois une entrée en vigueur progressive de ce dispositif. En effet, le montant de la contribution sera réduit de 80 % pour l'année 2006, de 60% en 2007, de 40 % en 2008 et de 20 % pour l'année 2009 (art. 96 de la loi).
Pour donner force à ce dispositif, la loi prévoit que les employeurs publics devront, à compter de l'année 2006 et au plus tard le 30 avril de chaque année, déposer auprès du comptable du Trésor public une déclaration annuelle d'emploi d'agents handicapés accompagnée du paiement de leur contribution (C. trav., art. L. 323-8-6-1, IV nouveau). Le contrôle de la déclaration annuelle sera effectué par le gestionnaire du fonds.
A défaut de déclaration et de régularisation dans le délai de un mois après une mise en demeure adressée par le gestionnaire du fonds, l'employeur sera considéré comme ne satisfaisant pas à l'obligation d'emploi. Le montant de la contribution sera alors calculé en retenant la proportion de 6 % de l'effectif total rémunéré. Dans cette situation ou en cas de défaut de paiement ou de paiement insuffisant, le gestionnaire du fonds émettra un titre exécutoire qui sera recouvré par le comptable du Trésor public selon les règles applicables au recouvrement des créancesétrangères à l'impôt et au domaine.
En outre, alors que chaque collectivité publique était tenue de rédiger un rapport annuel sur le respect de l'obligation d'emploi, qui devait uniquement être remis aux comités techniques paritaires ou aux instances en tenant lieu ainsi qu'aux conseils supérieurs des trois fonctions publiques, la loi du 11 février prévoit que ce document devra ensuite être présenté à l'assemblée délibérante (art. 35 bis de la loi 84-53 du 26 janvier 1984, art. 27 bis de la loi 86-33 du 9 janvier 1986). Ce, en vue de renforcer les contrôles et d'assurer une meilleure transparence.
La loi du 11 février 2005 réaffirme de manière plus claire le principe de non-discrimination à l'égard des personnes handicapées dans le cadre professionnel (C. trav., L. 122-45 modifié). Depuis le 13 février 2005, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ouà une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de promotion professionnelle en raison de son état de santé et de son handicap. Auparavant, le code du travail permettait d'écarter ce principe en cas d'« inaptitude [du salarié] constatée par le médecin du travail » en raison de son état de santé ou de son handicap. Cette restriction est supprimée par la loi.
Cette dernière précise néanmoins que les différences de traitement fondées sur une inaptitude constatée par le médecin du travail liée àl'état de santé ou à un handicap sont possibles et ne constituent pas une discrimination « lorsqu'elles sont objectives, nécessaires et appropriées » (C. trav., art. L. 122-45-4 nouveau).
En outre, les employeurs sont désormais tenus de prendre des mesures appropriées au bénéfice des personnes handicapées « visant à favoriser l'égalité de traitement » (voir ci-dessous). Celles-ci ne constituent pas une discrimination. En revanche, le refus des employeurs de prendre de telles mesures peut être constitutif d'une discrimination (C. trav., art. L. 323-9-1 nouveau).
Pour donner force à ce principe, la loi reconnaît aux associations œuvrant dans le domaine du handicap régulièrement constituées depuis 5 ans au moins la possibilité d'agir en justice contre les discriminations fondées sur le handicap ou l'état de santé à l'égard d'un candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou d'un salarié de l'entreprise. Dans ces cas, elles doivent justifier d'un accord écrit de l'intéressé. Celui-ci pourra toujours intervenirà l'instance engagée par l'association et y mettre un terme à tout moment (C. trav., art. L. 122-45-5 nouveau). Dans ce cadre, il appartient à l'association de présenter des éléments de faits laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ceséléments, la partie attaquée doit prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme alors sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles (C. trav., art. L. 122-45 modifié).
Même si le principe de non-discrimination figurait déjà dans la législation française, cette dernière ne répondait pas totalement aux exigences de la directive du Conseil européen du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail. Ce texte énonce en effet que les Etats membres doivent prévoir des « aménagements raisonnables » à l'égard des personnes handicapées et faire en sorte que les employeurs prennent des« mesures appropriées, en fonction des besoins dans une situation concrète, pour permettre à une personne handicapée d'accéder à un emploi, de l'exercer et d'y progresser, ou pour qu'une formation lui soit dispensée, sauf si ces mesures imposent à l'employeur une charge disproportionnée ».
C'est pour répondre à ces règles et« garantir le respect du principe d'égalité de traitement » que la loi introduit dans le code du travail une disposition, fortement inspirée de cette directive communautaire et applicable depuis le 13 février 2005.
Empruntant les expressions du texte européen, la loi prévoit que les employeurs prennent « en fonction des besoins dans une situation concrète » les mesures appropriées pour « permettre aux [principaux bénéficiaires de l'obligation d'emploi] (C. trav., art. L. 323-9-1 nouveau) :
d'accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l'exercer ou d'y progresser ;
ou pour qu'une formation adaptéeà leurs besoins leur soit dispensée ».
L'application de ce principe ne doit néanmoins pas entraîner de charges« disproportionnées », compte tenu des aides qui peuvent compenser en tout ou partie les dépenses supportées par l'employeur à ce titre.
Ces aides peuvent concerner notamment l'adaptation de machines ou d'outillages, l'aménagement de postes de travail, y compris l'accompagnement et l'équipement individuels nécessaires aux travailleurs handicapés pour occuper ces postes et les accès aux lieux de travail, poursuit la loi.
Cette disposition prolonge ainsi la loi du 4 mai 2004 sur la formation professionnelle tout au long de la vie qui posait le principe de l'accès des personnes handicapées aux dispositifs de formation professionnelle « dans le respect du principe d'égalité de traitement, en prenant les mesures appropriées » (C. trav., art. L.900-5-1).
Ce principe vaut dans le secteur privé comme dans le secteur public. En effet, parallèlement, la loi du 11 février 2005 retranscrit dans le statut général de la fonction publique les nouvelles dispositions du code du travail relatives aux « mesures appropriées » (art. 6 sexies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983). Ce principe est ensuite décliné dans les textes statutaires propres à chaque fonction publique (art. 27, III de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 35 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et 27, I de la loi n° 86-33 de la loi du 9 janvier 1986).
Sont plus précisément visés (C. trav., art. L.323-9-1 nouveau) :
les travailleurs handicapés reconnus comme tels par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (appelée à se substituer aux Cotorep) ;
les victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles ayant entraîné une incapacité permanente au moins égale à 10 % et titulaires d'une rente attribuée au titre du régime général de la sécurité sociale ou de tout autre régime de protection sociale obligatoire ;
les titulaires d'une pension d'invalidité à condition que leur invaliditéréduise au moins des 2/3 leur capacité de travail ou de gain ;
les anciens militaires titulaires d'une pension militaire d'invalidité ;
les titulaires d'une rente d'invalidité des sapeurs-pompiers ;
à compter du 1er janvier 2006, les titulaires d'une carte d'invalidité ;
à partir du 1er janvier 2006, les titulaires de l'allocation aux adultes handicapés.
En tout état de cause, le refus de prendre des mesures appropriées pourra être constitutif d'une discriminationà moins que les différences de traitement ne soient objectives, nécessaires et appropriées (C. trav., art. L. 323-9-1 nouveau) .
Une traduction concrète de ce principe est inscrite dans la loi (C. trav., art. L. 212-4-1-1 nouveau). Est ainsi ouverte au profit de ces mêmes travailleurs handicapés, et à leur demande, la possibilité d'aménagements d'horaires individualisés « propres à faciliter leur accès à l'emploi, leur exercice professionnel ou le maintien dans leur emploi ».
Les aidants familiaux et les proches de la personne handicapée bénéficient dans les mêmes conditions d'aménagements d'horaires individualisés propres à faciliter l'accompagnement de cette personne (C. trav., art. L. 212-4-1-1 nouveau).
De même, dans la fonction publique, les fonctionnaires handicapés relevant de ces mêmes catégories de bénéficiaires de l'obligation d'emploi se voient accorder, à leur demande, des aménagements d'horaires permettant de faciliter leur exercice professionnel ou leur maintien dans l'emploi, « dans toute la mesure compatible avec les nécessités du fonctionnement du service » (art. 40 ter de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 60 quinquies de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et art. 47-2 de la loi n° 86-33 de la loi du 9 janvier 1986).
Même solution pour les fonctionnaires qui désirent accompagner une personne handicapée, qui est leur conjoint, concubin, la personne avec laquelle ils ont conclu un pacte civil de solidarité, un enfant à charge, un ascendant ou une personne accueillie à leur domicile et qui nécessite la présence d'une tierce personne. Cette disposition est donc le pendant, pour la fonction publique, de la disposition sur les aidants familiaux pour les salariés du privé.
Afin de sensibiliser les partenaires sociaux à la thématique de l'insertion professionnelle des travailleurs handicapés, la loi du 11 février 2005 prend appui sur certains dispositifs existant en matière de négociation collective.
Relevons que la commission nationale de la négociation collective est, depuis le 13 février 2005, chargée de suivre annuellement l'application dans les conventions collectives des « mesures prises en faveur du droit au travail des personnes handicapées », comme elle le fait déjà pour la mise en œuvre de certains principes (à travail égal salaire égal, égalitéprofessionnelle entre les hommes et les femmes, égalitéde traitement entre les salariés...) (C. trav., art. L.136-2 nouveau).
La loi du 11 février 2005 impose, depuis le 13 février 2005, aux organisations liées par une convention de branche ou, à défaut, par des accords professionnels de négocier - tous les 3 ans - sur les mesures tendantà l'insertion professionnelle et au maintien dans l'emploi des travailleurs handicapés (C. trav., art. L. 132-12 modifié). Jusqu'à présent, une telle obligation portait sur les salaires et la situation de l'emploi, les classifications, l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes...
Ce nouveau thème de négociation portera notamment sur les conditions d'accès à l'emploi, à la formation età la promotion professionnelles ainsi que sur les conditions de travail, de maintien dans l'emploi et d'emploi.
Cette négociation se déroulera sur la base d'un rapport établi par la partie patronale présentant, pour chaque secteur d'activité, la situation par rapport àl'obligation d'emploi des travailleurs handicapés.
Ce dispositif complète l'article L. 934-2 du code du travail modifié par la loi du 4 mai 2004 sur la formation professionnelle tout au long de la vie. Selon celle-ci, une obligation périodique de négociation sur la formation professionnelle, tous les 3 ans, porte notamment sur les conditions de mise en œuvre, de suivi et d'évaluation des actions de formation en vue de permettre l'égalité professionnelle, le maintien dans l'emploi et le développement des compétences des travailleurs handicapés.
Une convention de branche conclue au niveau national contient obligatoirement, pour pouvoir être étendue, certaines clauses. La loi du 11 février 2005 apporte deux modificationsà la liste de ces clauses obligatoires.
La convention doit notamment comporter des éléments essentiels servant à la détermination des classifications professionnelles et des niveaux de qualification. Ceux-ci sont notamment définis, à condition qu'ils aient étécréés depuis plus de un an, par référence non seulement aux diplômes professionnels mais aussi désormais en fonction des titres professionnels, les deuxétant délivrés au nom de l'Etat (C. trav., art. L. 133-5,3° modifié). La loi du 11 février 2005 ouvre donc aux entreprises la possibilité de déterminer les classifications professionnelles en fonction des diplômes délivrés par l'Education nationale mais aussi en tenant compte des titres professionnels délivrés en particulier par le ministère de l'Emploi à condition que ceux-ci aient été créés depuis plus de un an. L'objectif est « de ne pas pénaliser les personnes handicapées souvent exclues du système scolaire classique et ne disposant souvent pas - de ce fait - de diplômes mais de certificats délivrés par le ministère du Travail » (Rap. Sén. n° 20, octobre 2004, Blanc ). Relevons que si cette mesure aété inspirée de la situation spécifique des personnes handicapées, la disposition a vocation às'appliquer à l'ensemble des salariés, puisque la loi ne mentionne pas explicitement comme bénéficiaires de cette mesure les seules personnes handicapées (C. trav., art. L. 133-5,3° modifié).
De même, une convention de branche doit, pour êtreétendue, comporter une clause sur les conditions propresà concrétiser le droit au travail des personnes handicapées en état d'exercer une profession. Ces conditions peuvent se réaliser par l'application de l'obligation d'emploi mais également, ajoute la loi, « par des mesures d'aménagement de postes ou d'horaires, d'organisation du travail et des actions de formation visant à remédier aux inégalités de fait affectant » les personnes handicapées (C. trav., art. L. 133-5,11° modifié).
Une obligation similaire de négociation périodique est posée, depuis le 13 février 2005, pour les entreprises pourvues d'une ou de plusieurs sections syndicales d'organisations représentatives (C. trav., art. L. 132-27 modifié).
A l'instar notamment de la négociation sur les salaires, la durée et l'organisation du temps de travail ou encore l'égalité professionnelle entre les sexes, l'employeur est tenu d'engager chaque année une négociation sur les mesures relatives à l'insertion professionnelle et au maintien dans l'emploi des travailleurs handicapés. La négociation porte notamment sur les conditions d'accèsà l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, les conditions de travail et d'emploi ainsi que les actions de sensibilisation au handicap de l'ensemble du personnel de l'entreprise.
Lorsqu'un accord collectif comportant de telles mesures sera signé dans l'entreprise, la périodicité de la négociation sera portée à 3 ans.
Cette négociation, là encore, se déroule sur la base d'un rapport établi par l'employeur présentant la situation par rapport à l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés.
A la différence de la branche, un dispositif est prévu pour faire face à la carence de l'employeur. Ainsi, àdéfaut d'une initiative de l'employeur depuis plus de 12 mois suivant la précédente négociation, celle-ci s'engagera obligatoirement à la demande d'une organisation syndicale représentative dans les 15 jours suivant cette demande. Concrètement, la demande de négociation formulée par l'organisation syndicale devra être transmise dans les 8 jours par l'employeur aux autres organisations représentatives. Relevons que cette disposition apparaît quelque peu redondante avec l'article L. 132-28 du code du travail qui traite déjà de la procédure en cas de carence de l'employeur pour l'ouverture de la négociation annuelle« générale ».
Afin d'améliorer l'articulation des mesures spécifiques en faveur des personnes handicapées avec la politique générale de l'emploi mise en œuvre par l'Etat, la loi légalise le principe de la conclusion d'une convention entre l'Etat et le Fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) qui accorde différentes aides financières à l'insertion en milieu ordinaire de travail. Elle précise également le rôle des organismes de placement spécialisés.
Sans remettre en cause l'autonomie de l'Agefiph, la loi du 11 février 2005 vise à renforcer la portée et la cohérence des engagements que celle-ci prend avec l'Etat.
Au cours des débats, la proposition du rapporteur au Sénat, Paul Blanc, de transformer l'Agefiph en unétablissement public administratif avait provoqué un tollé. Le gouvernement avait notamment fait valoir que cetteévolution irait à l'encontre de la mobilisation des partenaires sociaux et créerait des rigidités. Le législateur n'a finalement pas retenu cette solution.
La loi prévoit d'abord la signature d'une convention d'objectifs, conclue tous les 3 ans, fixant les engagements réciproques de l'Etat et de l'Agefiph (C. trav., art. L.323-8-3 modifié). En fait, une telle convention existait déjà, en pratique, pour la période 1999-2003, soit pour 5 ans, la loi ne faisant que lui donner une base légale. Le législateur cherche par là à répondre au reproche de désengagement de la politique de l'emploi des personnes handicapées que la Cour des comptes avait formulé en 2002 à l'égard de l'Etat (7).
Cette convention doit déterminer notamment les engagements réciproques contribuant à la cohérence entre les mesures de droit commun de l'emploi et de la formation professionnelle et les mesures spécifiques arrêtées par l'Agefiph ainsi que les moyens financiers nécessairesà l'atteinte de ces objectifs. Elle fixe également les priorités et les grands principes d'intervention du service public de l'emploi et des organismes de placement spécialisés. Selon les rapports parlementaires, cette disposition « renvoie clairement à la nécessité de clarifier - ou du moins de coordonner - les rôles respectifs du réseau "Cap emploi" et de l'ANPE s'agissant du placement des travailleurs handicapés » (Rap. A.N. n° 1599, mai 2004, Chossy).
Depuis l'adoption de la loi du 11 février 2005, l'Etat et l'Agefiph ont donné corps à cette disposition en signant le 24 mai la première convention triennale d'objectifs pour 2005-2007 (8).
L'Agefiph se voit par ailleurs confier une nouvelle mission qui vise, sans remettre en cause son mode de gestion, àaméliorer « la transparence de sa gestion » et à répondre « aux observations faites notamment pas la Cour des comptes » (Rap. A.N. n° 1599, mai 2004, Chossy). La loi pose ainsi le principe de l'évaluation annuelle par l'Agefiph des actions qu'elle conduit pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées en milieu ordinaire (C. trav., art. L. 323-8-3 modifié). Elle prévoit également la publication d'un rapport d'activité annuel, que produit déjàactuellement l'Agefiph. Elle inscrit enfin la règle d'un« contrôle administratif et financier de l'Etat », ce qui donne une « base légaleà l'embryon de contrôle existant, notamment la procédure d'approbation des budgets d'intervention prévue par le code du travail dans ses dispositions réglementaires » (Rap. A.N. n° 1599, mai 2004, Chossy).
Un contrôle annuel de l'Agefiph par la Cour des comptes avait un temps été envisagé. Comme elle est déjà soumise au contrôle de la Cour des comptes en vertu du code des juridictions financières, la nouveautéaurait été l'annualité. Or « imposer un contrôle annuel de l'Agefiph peut être perçu comme une stigmatisation, car aucun contrôle de la Cour des comptes n'est annuel (hormis ceux sur l'exécution des lois de finances et de financement de la sécurité sociale, du fait de l'annualité de ces lois) ; dans les faits, les grands organismes ou entreprises publics sont contrôlés en moyenne tous les 5 à 10 ans » (Rap. A.N. 1599, mai 2004, Chossy).
Par ailleurs, dans un souci de cohérence, l'Agefiph devraégalement conclure une convention de coopération avec le fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées dans la fonction publique, lorsqu'il sera mis en place (C. trav., art. L. 323-10-1 nouveau) .
Cette convention déterminera notamment les obligations respectives des parties à l'égard des organismes de placement spécialisés, « ceux-ciétant des opérateurs chargés d'une mission générale de préparation à l'emploi, sans distinction de secteur d'emploi et dont le financement doit, dès lors, être partagé entre les deux fonds (Rap. Sén. n° 20, octobre 2004, Blanc).
La loi du 11 février 2005 introduit, dans la partie législative du code du travail, les centres de préorientation « qui contribuent àl'orientation professionnelle des personnes handicapées » (C. trav., art. L. 323-11 nouveau). Leur existence était jusque-là prévue seulement par voie réglementaire. Rappelons que ces derniers accueillent pour une période de 8 à 12 semaines les travailleurs handicapés dont l'orientation présente des difficultés particulières qui n'ont pu être résolues par la Cotorep (appelée à devenir la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées) (C. trav., art. R. 323-33-1 à R.323-33-5).
Dans la logique de guichet unique voulue avec la création des maisons départementales des personnes handicapées (9), ces centres de préorientation devront passer une convention avec cette structure, lorsqu'elle sera créée, afin de coordonner leurs interventions auprès des personnes handicapées.
Par ailleurs, la loi vise à clarifier la place des organismes de placement spécialisés regroupés sous le label « Cap emploi », dans la politique d'insertion professionnelle des personnes handicapées (C. trav., art. L. 323-11 nouveau). Rappelons que ce réseau comprend plus de 130 organismes qui, en complément de l'ANPE, mènent une action pour l'emploi des personnes handicapées.
Ces organismes sont ainsi chargés de la préparation, de l'accompagnement et du suivi durable dans l'emploi des personnes handicapées et participent au dispositif d'insertion professionnelle et d'accompagnement particulier pendant la période d'adaptation au poste de travail des travailleurs handicapés mis en œuvre par l'Etat, le service public de l'emploi, l'Agefiph et le fonds d'insertion professionnelle des personnes handicapées de la fonction publique.
Ils doivent être conventionnés à cet effet et peuvent, à cette condition, recevoir l'aide de l'Agefiph -ce qui correspond à la pratique actuelle - et du fonds d'insertion professionnelle de la fonction publique, à compter du 1er janvier 2006.
Ces conventions devront être conformes aux orientations fixées par la convention d'objectifs conclue entre l'Agefiph et l'Etat. Il s'agit « d'éviter que l'association, comme elle a eu tendance à le faire par le passé, n'interprète restrictivement sa compétence en matière de financement de l'accompagnement vers et dans l'emploi des personnes handicapées » (Rap. Sén. n° 20, octobre 2004, Blanc).
A l'instar des centres de préorientation, les organismes de placement spécialisés devront passer une convention avec les maisons départementales des personnes handicapées (lorsqu'elles seront installées, au plus tard au 1er janvier 2006) afin de coordonner leurs interventions auprès de ces dernières.
Relevons que, malgré des amendements en ce sens, le législateur s'est refusé à reconnaître les services d'insertion professionnelle, services spécialisés mis en place par des associations et intervenant en amont et en aval dans l'insertion professionnelle des personnes handicapées ayant certains troubles. Pour la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées de l'époque, « il convient de ne pas donner un statut législatif à ce type d'organismes, qui répondent partiellement et pour des durées parfois variables aux demandes de pub