Le gouvernement belge a présenté au Parlement européen une « initiative » législative (1) afin d'interdire aux personnes reconnues coupables d'abus sexuels dans un des Etats membres de l'Union européenne de travailler avec des enfants dans toute l'Union européenne. Cette proposition trouve sa source dans l'affaire « Fourniret », ce délinquant français qui avait pu travailler dans une cantine scolaire belge, les autorités locales ignorant ses condamnations passées pour viol en France. « Il s'agit de combler un vide dans le domaine de l'entraide policière et judiciaire européenne », a précisé la ministre belge de la Justice, Laurette Onkelinx, en présentant son projet au Parlement européen. « L'idée est assez simple : des personnes condamnées pour atteintes sexuelles et interdites d'exercice dans les métiers proches des enfants ne devraient pas échapper à cette restriction en se rendant dans un autre Etat membre », a-t-elle expliqué. « Si les données des fichiers criminels étaient échangées plus facilement et de façon plus systématique entre les Etats membres, les suspects pourraient être plus facilement identifiés. »
Cette proposition couvrirait toutes les infractions visées par la décision-cadre de 2004 sur l'exploitation sexuelle et la pornographie des enfants (2). Tous les Etats auraient l'obligation de consigner les incapacités professionnelles dans le casier judiciaire des condamnés et de les communiquer en cas de demande d'extrait de casier par un autre Etat membre. Le pays de résidence de la personne aurait alors la responsabilité de reconnaître et de faire appliquer cette incapacité. L'intéressé aurait toutefois un droit de recours.
Ce texte doit être discuté lors du Conseil des ministres de la Justice et de l'Intérieur, les 1er et 2 décembre à Luxembourg. Précisons que cette initiative s'inscrit en complément de deux décisions-cadres en préparation. La première, qui a fait l'objet d'un accord informel en décembre 2004, concerne l'échange d'informations des condamnations pénales entre Etats membres. La seconde, proposée en mars 2005 et toujours en discussion, porte sur la reconnaissance des condamnations pénales antérieures en cas de nouvelle procédure à l'encontre du même individu. Par ailleurs, la Commission européenne doit publier d'ici à la fin 2005 une communication sur les décisions en matière d'incapacité professionnelle.
(1) Dans le domaine de la justice et des affaires intérieures, la Commission européenne n'a pas le monopole pour impulser une législation européenne, les Etats membres disposant aussi de cette possibilité.
(2) Voir ASH n° 2340 du 2-01-04.