Le trouble des conduites a-t-il un substrat biologique ou génétique ? Par exemple, certains comportements violents sont-ils liés à des taux anormalement bas de cholestérol ? Les troubles persistants chez les enfants sont-ils le résultat de l'hérédité ? de l'influence culturelle de la « personnalité antisociale » des parents ? Autant de questions abordées parmi beaucoup d'autres, et sans trop de précautions, dans une expertise collective rendue publique, le 22 septembre, par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) (1).
D'après cette étude pluridisciplinaire qui veut rassembler les données scientifiques du moment, de 5 à 9 % des garçons de 15 ans et de 2 à 5 % des filles du même âge souffrent d'un « trouble des conduites ». Cette notion, d'abord définie par les Américains avant d'être reprise par l'Organisation mondiale de la santé, se caractérise « avant tout par la répétition et la persistance de conduites au travers desquelles sont bafoués les droits fondamentaux d'autrui et les règles sociales » : agressions, brutalités, destructions de biens, vols, fraudes, viols... Elle se situe « à l'intersection de la psychiatrie, du domaine social et de la justice », ajoute le rapport.
Tout en concluant à la nécessité de poursuivre les recherches, notamment sur la prévalence du trouble en France, les liens entre facteurs de risque individuels et environnementaux, l'efficacité des actions de prévention et des traitements..., les experts formulent déjà un certain nombre de recommandations.
Pour développer l'information du public et des familles, le rapport suggère notamment de créer des centres d'accueil spécifiques, où parents et enfants pourraient se présenter sans rendez-vous et gratuitement. Il insiste aussi sur l'importance du dépistage précoce (dès la maternité, la crèche ou la maternelle...) et sur l'intérêt des programmes de prévention validés dans les pays anglo-saxons. Autant de thèmes qui devraient, aux yeux des experts, faire partie de la formation des professionnels des services de protection maternelle et infantile, des centres médico-psycho-pédagogiques et autres établissements pour enfants inadaptés, des services de l'aide éducative, des personnels enseignants et médicaux de l'éducation ou encore des juges des enfants et des juges aux affaires familiales.
Autre préconisation : le suivi des enfants à risque dès la période ante et péri-natale. En cas de troubles mentaux sévères au sein de la famille, les experts demandent une évaluation rigoureuse des capacités des parents et un suivi régulier des enfants placés à l'aide sociale à l'enfance.
Pour les adolescents, ils prônent une orientation vers des structures spécialisées dès les premiers signes de trouble des conduites ou d'autres troubles (dépressifs, anxieux, addictifs) souvent associés. Ils demandent un suivi psychologique de tous les jeunes ayant effectué une tentative de suicide. Ils recommandent enfin un suivi psychiatrique de tous les adolescents incarcérés.
Au plan thérapeutique, les experts rappellent l'importance de l'éloignement des « pairs déviants ». Ils estiment que le placement en « centre de rééducation » n'est pas une solution car il a « tendance à élargir chez le jeune le répertoire des comportements agressifs », le placement en famille d'accueil spécialement formée et soutenue présentant « une plus grande efficacité ».
(1) Trouble des conduites chez l'enfant et l'adolescent - Inserm - Synthèse disponible sur