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« Citoyenneté en institution : pour un juste équilibre »

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La loi du 2 janvier 2002 n'a pas été conçue pour faire progresser la citoyenneté des usagers des établissements sociaux et médico-sociaux mais en priorité pour accentuer les contraintes budgétaires pesant sur les institutions, estime Sylviane Agostino-Sollier, responsable d'un foyer d'hébergement pour adultes déficients intellectuels à Paris (1). Elle réagit ainsi à l'interview publiée récemment dans nos colonnes (2) de Joël Defontaine, Marcel Jaeger et Hervé Ledoux sur les effets de ce texte .

« La loi 2002-2 peut être considérée comme révolutionnaire non pas parce qu'elle "introduit la logique de la prestation de service" (Joël Defontaine) ni parce qu'elle "met au cœur de l'action sociale et médico-sociale la question des droits des usagers et de leur accès à la citoyenneté" (Marcel Jaeger), mais parce qu'il a fallu une loi pour faire reconnaître ce qui relève du droit commun, ce qui en dit long sur le regard porté par la société sur les personnes handicapées. Comme le souligne également Hervé Ledoux, "derrière les habits respectables de la citoyenneté, c'est une loi en trompe l'œil. [...] Diriger, ce n'est pas seulement compter ses sous, c'est aussi s'interroger sur le sens de l'action. "

« Depuis les années 70, l'accompagnement des personnes handicapées a énormément changé, évoluant d'un désir exprimé par d'autres (souvent les parents) à une prise en compte de leur parole. Ainsi, on est passé d'une prise en charge identique à celle des enfants, occultant leur statut d'adulte, à une écoute attentive de leur désir. Mais ce statut d'adulte reste malgré tout ambivalent. La plupart de nos usagers sont reconnus "incapables majeurs ", ce qui entraîne une restriction de leurs droits, et notamment de leur droit de vote. Qu'en est il alors de leur statut de citoyen ?

« De plus, il ne faut pas perdre de vue que s'ils sont frappés d'incapacité, cela est dû à la nature même du handicap. La personne handicapée est une personne "à la fois ordinaire et singulière ",disait mon confrère Laurent Gavelle. Ordinaire dans le sens où ses besoins rejoignent ceux de n'importe quel être humain et singulière car son handicap engendre des besoins spécifiques qui demandent un accompagnement adapté.

« En tant que responsable d'un établissement accueillant des personnes adultes déficientes intellectuelles, je pense qu'il faut, en matière de citoyenneté, trouver un juste équilibre afin de ne pas leurrer les personnes accueillies au risque de se leurrer soi-même.

« Faire progresser la citoyenneté, en institution, c'est avant tout soutenir la personne accueillie dans l'expression de ses désirs, respecter son histoire, en délimitant le cadre institutionnel, tout en n'occultant pas la raison pour laquelle elle est là ni ses difficultés. C'est également reconnaître les droits de la personne, mais aussi lui faire prendre conscience de ses devoirs : respect des autres, respect des lieux, respect du règlement de fonctionnement...

« Les professionnels veillent depuis longtemps, sans avoir attendu la loi rénovant l'action sociale et médico-sociale, à ce que cet apprentissage reste bienveillant et amène la personne adulte en situation de handicap à un véritable statut de citoyen, assorti d'une vraie reconnaissance de la société. Alors que la loi 2002-2 ne fait qu'énoncer des concepts comme s'ils étaient des évidences.

« Ce texte n'a pas été conçu pour les personnes mais tout d'abord pour accentuer les contraintes budgétaires pesant sur les institutions. Faites de la qualité mais dépensez moins ! Encore un paradoxe qui n'est pas près d'être résolu. Les priorités budgétaires sont fixées par chaque département et les chances et les droits des "citoyens handicapés" ne sont pas égaux d'un département à l'autre. Les institutions ne peuvent pas œuvrer correctement dans le cadre de cette loi. Prétendre à l'égalité de traitement sur l'ensemble du territoire est un discours de plus, "une loi en trompe l'œil ", oui Monsieur Ledoux. »

Notes

(1)  Tél. 01 45 79 18 33 - E-mail : sylviane.agostino@wanadoo.fr.

(2)  Voir ASH n° 2411 du 10-06-05.

LE SOCIAL EN ACTION

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