Avec la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005, l'amélioration des prestations offertes aux demandeurs d'emploi s'est accompagnée d'une redéfinition de l'obligation de recherche active d'emploi et d'une rénovation des modalités de contrôle des chômeurs (1). Une réforme mise en œuvre par un décret du 5 août 2005 qui a introduit une gradation des sanctions encourues par les demandeurs d'emploi. Jusque-là, les seules sanctions possibles étaient la suspension des allocations et la radiation. Cette gradation joue, bien évidemment, au niveau de la nature de la sanction - suspension, réduction ou suppression des allocations, voire radiation de la liste des demandeurs d'emploi -, mais aussi sur sa durée et même, s'agissant de la réduction des allocations, sur son taux. Elle prend en compte également la « récidive » du chômeur.
Une circulaire de la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP), qui fait le point sur la réforme, donne une lecture assez stricte de l'échelle de sanctions, notamment dans les cas de réduction des allocations. Elle prévoit en effet que celles-ci peuvent être diminuées de 50 % à partir du deuxième manquement et supprimées définitivement dès le troisième. Un texte qui a provoqué de vives réaction des organisations syndicales et des associations de chômeurs.
Ces nouvelles modalités de contrôle et de sanction des chômeurs sont applicables depuis le 6 août 2005, date d'entrée en vigueur du décret.
La notion de recherche active d'emploi a été redéfinie afin de la rendre conforme aux dispositions issues de la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005.
Auparavant, la condition de recherche d'emploi, à laquelle est subordonnée la perception du revenu de remplacement, exigeait des chômeurs l'accomplissement de « toutes les démarches en leur pouvoir en vue de leur reclassement ou de leur insertion professionnelle ».
Dorénavant, les chômeurs sont tenus d'accomplir de manière permanente des « actes positifs et répétés en vue de retrouver un emploi, de créer ou reprendre une entreprise ». Et ce, aussi bien de leur propre initiative que sur proposition de l'Assedic, de l'Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes ou de l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE), en particulier dans le cadre du projet d'action personnalisé, rebaptisé « projet personnalisé d'accès à l'emploi » par le décret (voir encadré).
Ces démarches doivent présenter un caractère « réel et sérieux », apprécié à l'aune de la situation du demandeur d'emploi et de la situation locale de l'emploi.
Le contrôle de la condition de recherche d'emploi est effectué par les agents de l'Etat, de l'ANPE et des Assedic.
Auparavant, seul le préfet pouvait prendre une décision concernant le droit aux allocations de chômage. Changement notable introduit par le décret du 2 août 2005, l'Assedic peut désormais décider, à titre conservatoire, d'en suspendre ou d'en réduire le versement, si le chômeur refuse, sans motif légitime, de répondre à une convocation, à un entretien ou s'il a fait une déclaration inexacte ou mensongère en vue de percevoir indûment les allocations.
Cette mesure ne peut toutefois intervenir qu'après que l'intéressé a été mis à même de présenter ses observations. En tout état de cause, elle cesse de produire ses effets au-delà d'une durée de deux mois à l'issue de laquelle, en l'absence de décision explicite du préfet, le versement du revenu de remplacement est rétabli.
Au final, c'est au préfet de département - ou, par délégation, au directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle - qu'il appartient de se prononcer sur la suppression, temporaire ou définitive, ou la réduction du montant du revenu de remplacement, les sanctions étant désormais graduées en fonction du manquement commis.
L'échelle de sanctions prévue par le décret a une valeur contraignante pour le préfet. Toutefois, précise la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle, il « conserve un pouvoir d'appréciation du comportement du demandeur d'emploi et donc une certaine latitude dans la qualification de ce comportement. De la même manière, lorsque le manquement a été effectivement constaté, [le préfet] conserve, suivant la nature du manquement, une certaine latitude dans la détermination de la sanction : il peut notamment en moduler la durée. »
Le préfet réduit les allocations de 20 % pendant 2 à 6 mois lorsque le demandeur d'emploi :
ne peut justifier de l'accomplissement d'actes positifs et répétés de recherche d'emploi. La DGEFP précise que, « pour apprécier le caractère plus ou moins actif de la recherche d'emploi, les services devront prendre en compte toutes les démarches dont le demandeur d'emploi pourra justifier, que ces démarches aient été engagées à son initiative ou à celle des agents du service public de l'emploi, sous réserve de la production des pièces correspondantes (candidatures envoyées, relevés de démarches sur Internet, participation à des sessions d'aide à la recherche d'emploi, pièces justifiant d'une démarche active en vue de créer ou reprendre une entreprise...) ;
refuse, sans motif légitime, une proposition de contrat d'apprentissage ou de contrat de professionnalisation, une action de formation, une action d'insertion ou une offre de contrat aidé ;
refuse sans motif légitime un emploi compatible avec sa spécialité ou sa formation et avec ses possibilités de mobilité géographique compte tenu de sa situation personnelle et familiale et des aides à la mobilité géographique qui lui sont proposées par les organismes du service public de l'emploi (2), et rétribué à un taux de salaire normalement pratiqué dans la profession et la région. Ces conditions sont appréciées, le cas échéant, au regard de son projet personnalisé d'accès à l'emploi.
Sur ce dernier point, la circulaire de la DGEFP précise que, « pour statuer sur ce refus d'emploi, il faut donc tenir compte des caractéristiques de l'emploi proposé (niveau de salaire, localisation, sujétions éventuelles) par rapport à la situation spécifique du demandeur d'emploi, telle qu'elle est décrite dans le projet personnalisé d'accès à l'emploi. Pour les offres d'emploi qui s'éloigneraient de la cible définie initialement, il convient de tenir compte de l'ancienneté dans le chômage : ainsi, un demandeur d'emploi depuis plus de 6 mois, ou a fortiori depuis plus de 12 mois, doit envisager plus facilement une réorientation s'il apparaît que celle-ci est nécessaire compte tenu des caractéristiques du bassin d'emploi. »
En cas de récidive (quel que soit le nouveau manquement constaté), les allocations sont réduites de 50 % pour une durée de 2 à 6 mois ou bien supprimées de façon définitive. La délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle apporte ici une interprétation de cette règle très sévère pour les chômeurs. Elle explique en effet que le décret du 2 août 2005 « n'a pas précisé les conditions d'aggravation des sanctions en fonction du nombre d'occurrences du manquement. La mention "réduction de 50 % pour une durée de 2 à 6 mois ou bien suppression définitive" peut être interprétée de la manière suivante : "réduction de 50 % de 2 à 6 mois" pour un deuxième manquement et "suppression définitive" pour un troisième manquement, sauf circonstances particulières du dossier. »
A noter : le retrait du bénéfice des allocations entraîne pour l'intéressé la radiation de la liste des demandeurs d'emploi pour une durée qui ne peut excéder celle de l'exclusion du revenu de remplacement.
Le préfet supprime le revenu de remplacement pour une durée de 2 mois si le demandeur d'emploi refuse, sans motif légitime :
de répondre à toute convocation d'un des organismes du service public de l'emploi ;
de se soumettre à une visite médicale auprès des services médicaux de main-d'œuvre destinés à vérifier son aptitude au travail ou à certains types d'emploi.
En cas de nouveaux manquements à l'une de ces obligations, les allocations sont supprimées pour une durée de 2 à 6 mois ou bien de façon définitive. Là encore, selon la DGEFP, la suppression temporaire intervient au deuxième manquement et les allocations sont définitivement supprimées dès le troisième manquement.
A noter : le retrait du bénéfice des allocations entraîne pour l'intéressé la radiation de la liste des demandeurs d'emploi pour une durée qui ne peut excéder celle de l'exclusion du revenu de remplacement.
Le revenu de remplacement est supprimé de façon définitive en cas de fraude, c'est-à-dire en cas de déclaration inexacte ou mensongère du demandeur d'emploi faite en vue de percevoir indûment les allocations. Une exception toutefois : lorsque ce manquement est lié à une activité non déclarée d'une durée très brève, l'allocation est supprimée pour une durée de 2 à 6 mois.
Lorsque les agents chargés du contrôle de la recherche d'emploi - services de l'Etat, ANPE, Assedic - constatent un manquement, ils le signalent sans délai au préfet du département, sans préjudice, le cas échéant, de l'exercice du pouvoir de radiation appartenant au délégué départemental de l'ANPE ou du pouvoir des Assedic de prendre une mesure conservatoire. Ce signalement doit comporter tous les éléments de fait et de droit de nature à justifier le constat effectué et, le cas échéant, la mesure prise à titre conservatoire. Le préfet se prononce, en principe, dans un délai de 30 jours à compter de la réception du dossier complet.
Il doit faire connaître aux organismes de l'assurance chômage les suites des signalements qu'ils ont effectués. Et, lorsqu'il n'envisage pas de donner une suite à une mesure de suspension ou de réduction prise à titre conservatoire, le versement du revenu de remplacement est rétabli sans délai.
La circulaire de la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle détaille cette procédure.
Lorsqu'il envisage de prendre une décision de suppression ou de réduction des allocations, le préfet - par délégation le DDTEFP - doit en informer par écrit le demandeur d'emploi.
La lettre d'intention, motivée, doit indiquer le motif de la sanction et la sanction envisagée et informer le demandeur d'emploi qu'il peut, dans un délai de 10 jours, répondre en produisant des observations écrites et/ou en demandant à être entendu. Dans le cas où la sanction envisagée est d'une durée supérieure à 2 mois, la lettre d'intention doit indiquer la possibilité, pour le demandeur d'emploi, de demander la saisine d'une commission tripartite composée d'un représentant de l'Etat, de l'ANPE et de l'Assedic. Ses observations seront alors portées à la connaissance de la commission tripartite et l'entretien aura lieu devant cette commission.
En absence de réponse de l'intéressé dans un délai de 10 jours, la procédure peut suivre son cours, le DDTEFP prononçant la sanction à partir des éléments du dossier.
Si la sanction envisagée est inférieure ou égale à 2 mois, le préfet prend sa décision dans un délai de 30 jours à compter de la date de réception du dossier complet (délai en cas de transmission du dossier par l'ANPE ou l'Assedic). Le cas échéant, le préfet examine les observations produites par l'intéressé ou, si ce dernier a demandé à être entendu, le convoque à un entretien dans un délai de 10 jours (en lui indiquant qu'il peut être accompagné d'une personne de son choix). Si la sanction envisagée est d'une durée supérieure à 2 mois et que le demandeur d'emploi a demandé à être entendu par la commission tripartite, la décision du préfet ne peut intervenir qu'après consultation pour avis de cette commission. Cette consultation s'effectue dans un délai de 30 jours à compter de la date de réception du dossier complet, le préfet se prononçant dans les 15 jours qui suivent. L'avis de la commission ne lie pas le préfet.
Dans tous les cas, la décision du préfet doit comporter les éléments de fait et de droit justifiant la sanction. Ainsi que la mention de la possibilité d'exercer un recours gracieux, préalable au recours contentieux.
Comment s'articule la décision du préfet et l'éventuelle mesure conservatoire prise par l'Assedic ?Cette dernière doit être suivie par une décision explicite du préfet qui la confirme ou l'infirme et, dans tous les cas, se substitue à elle. Cette décision doit être prise dans le délai de 30 jours (45 jours en cas de consultation de la commission tripartite). Dans le cas - à éviter en pratique -où il n'y a pas de décision explicite dans un délai de 60 jours suivant la mise en œuvre de la mesure conservatoire de l'Assedic, celle-ci cesse de produire ses effets et le versement du revenu de remplacement est repris. En tout état de cause, le règlement définitif de la situation créée par la mesure conservatoire intervient lors de la décision explicite du préfet et si, du fait de la carence de ce dernier, aucune décision explicite n'était prise, le droit au revenu de remplacement serait intégralement reporté en fin de période d'indemnisation.
Le demandeur d'emploi peut exercer un recours gracieux auprès du DDTEFP. Ce dernier n'est plus obligé de consulter la commission départementale de recours gracieux (CDRG). Il s'agit pour lui désormais d'une simple faculté. La consultation de la CDRG doit être réservée aux cas les plus délicats, notamment au regard des critères suivants :
le dossier : si l'appréciation n'a pas posé de difficulté en amont et que la personne n'a pas produit à l'appui de son recours d'éléments nouveaux significatifs, la consultation de la CDRG pourra ne pas être jugée opportune ;
la procédure : si le demandeur d'emploi a déjà été auditionné et/ou que son dossier a déjà bénéficié d'un traitement par une instance collégiale, l'intérêt d'une consultation de la commission pourra apparaître comme faible.
La composition et les règles de fonctionnement de la commission sont inchangées et, comme précédemment, l'avis de la CDRG ne lie pas le préfet.
Le recours gracieux reste un recours préalable au recours contentieux.
L'audition par la commission du demandeur d'emploi est, comme précédemment, recommandée. Aussi, l'intéressé doit être invité, lorsqu'il est informé du passage de son dossier en commission, à s'y présenter en personne.
La délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle rappelle que la décision prise sur recours gracieux préalable à l'action contentieuse doit, comme la décision initiale à laquelle elle se substitue, comporter les motifs de droit et de fait qui la justifient. Un recours hiérarchique est également possible mais cette faculté n'a pas à être indiquée dans la décision, précise l'administration.
Le décret du 2 août 2005 prévoit une déconcentration des recours auprès du préfet de région à compter du 1er janvier 2006. Les modalités de mise en œuvre seront précisées dans une instruction ultérieure.
Aucune modification n'a été apportée à la procédure contentieuse : seule la décision prise sur recours gracieux est susceptible d'être déférée au juge administratif.
Pour mémoire, la saisine du tribunal administratif doit intervenir dans les 2 mois suivant le rejet du recours gracieux, que ce dernier soit explicite - c'est-à-dire si le service administratif a répondu - ou implicite - dans le cas où l'administration a gardé le silence au-delà du délai qu'elle a mentionné dans l'accusé de réception du recours.
Le délégué départemental de l'ANPE peut radier de la liste des demandeurs d'emploi les personnes qui :
ne peuvent justifier de l'accomplissement d'actes positifs et répétés de recherche d'emploi ;
refusent, sans motif légitime, un emploi compatible avec leur spécialité ou leur formation et rétribué à un taux normal dans la profession et la région. Autre variable dont il est désormais tenu compte : les possibilités de mobilité géographique des chômeurs, appréciées à la lumière de leur situation personnelle et familiale ainsi que des aides à la mobilité qui leur sont proposées ;
refusent, sans motif légitime, une proposition de contrat d'apprentissage ou de contrat de professionnalisation ;
refusent, sans motif légitime, une action de formation ou d'insertion ou encore une offre de contrat aidé ;
refusent, sans motif légitime, de répondre à toute convocation des services et organismes du service public de l'emploi ;
refusent, sans motif légitime, de se soumettre à une visite médicale destinée à vérifier leur aptitude au travail ou à certains types d'emploi ;
ont fait de fausses déclarations pour être ou demeurer inscrits sur la liste des demandeurs d'emploi.
Les décisions de radiation sont transmises sans délai au préfet du département.
En tout état de cause, cette décision entraîne, pour l'intéressé, l'impossibilité d'obtenir une nouvelle inscription, pendant une durée qui varie selon le motif retenu :
15 jours en cas de manquements liés aux actes de recherche d'emploi, de refus d'une proposition d'emploi ou d'un contrat en alternance ou encore d'une formation. Une durée portée de 1 à 6 mois consécutifs en cas de manquements répétés ;
2 mois lorsque l'intéressé a refusé de répondre à une convocation ou de se soumettre à une visite médicale et, en cas de manquements répétés, de 2 à 6 mois consécutifs ;
de 6 à 12 mois pour ceux ayant effectué une fausse déclaration. La radiation « entraîne l'interruption des droits au revenu de remplacement, qui sont reportés d'autant en fin de période d'indemnisation s'agissant de l'aide au retour à l'emploi », précise la DGEFP.
Comme pour le préfet en matière de suspension ou de suppression des allocations, le délégué départemental de l'ANPE « conserve un pouvoir d'appréciation du comportement du demandeur d'emploi et donc une certaine latitude dans la qualification de ce comportement. De la même manière, lorsque le manquement a été effectivement constaté, [il] conserve, suivant la nature du manquement, une certaine latitude dans le détermination de la sanction : il peut notamment en moduler la durée », indique la DGEFP.
Sans changement, la décision de radiation intervient toujours après que le demandeur d'emploi a été mis à même de présenter préalablement ses observations écrites. Elle doit, comme auparavant, être motivée et notifiée à l'intéressé, et indiquer la durée de la radiation.
Les personnes qui entendent contester une décision de radiation doivent toujours former un recours préalable devant le délégué départementale de l'ANPE. Mais ce recours, qui n'est pas suspensif, n'est plus systématiquement soumis à la commission départementale de recours gracieux : il ne l'est qu'à l'initiative du délégué départemental. Et, en conséquence, l'avis de cette commission ne lie plus le délégué.
Le décret du 2 août 2005 a rebaptisé le projet d'action personnalisé (PAP) « projet personnalisé d'accès à l'emploi » (PPAE). Ce dernier, qui « doit constituer un instrument facilitant l'accompagnement et l'efficacité de la recherche d'emploi », est établi pour toute personne inscrite sur la liste des demandeurs d'emploi, et adapté au cours du temps, par l'ANPE ou, en liaison avec elle, par tout organisme participant au service public de l'emploi. Ce, « en fonction de la situation du marché de l'emploi et de celle du demandeur d'emploi », précise la DGEFP. Le PPAE tient compte de la situation du demandeur d'emploi, notamment de sa formation, de sa qualification, de sa situation personnelle et familiale. Et définit les caractéristiques des emplois recherchés en tenant compte de la situation locale du marché du travail et des possibilités de mobilité, géographique et professionnelle, de l'intéressé. Il peut comprendre des actions d'évaluation, de conseil et d'orientation, des actions d'accompagnement vers l'emploi et des actions de formation ou de validation des acquis de l'expérience.
(1) Voir ASH n° 2395 du 18-02-05.
(2) Sur les nouvelles aides à la mobilité des chômeurs envisagées par le gouvernement, voir ASH n° 2421 du 16-09-05.