En matière de justice des mineurs, la loi Perben II du 9 mars 2004 a, depuis le 1er janvier 2005, transféré les attributions du juge de l'application des peines au juge des enfants et rendu compétents les services de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) - à la place des services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP) - pour la préparation, la mise en œuvre et le suivi des peines et de leurs aménagements (1).
Dans une très volumineuse circulaire (2), la direction de la protection judiciaire de la jeunesse, après avoir fait le point sur les principes généraux de l'application des peines en ce qui concerne le juge des enfants et les services de la PJJ - principes de compétence et procédures applicables -, précise le rôle des services de la PJJ dans ce cadre. De son côté, la direction de l'administration pénitentiaire insiste sur la coordination entre juge des enfants, services de la PJJ et SPIP.
Avec cette nouvelle compétence attribuée aux services de la PJJ, « l'ambition du législateur est clairement [...] d'organiser l'action éducative dans l'exercice même de la sanction, en lui permettant de prendre appui de manière constructive et imaginative sur cette dernière », énonce la chancellerie. En cela, poursuit-elle, ces dispositions « posent de nouveau la question essentielle de l'articulation entre éducation et contrainte judiciaire et, plus spécifiquement, celle de la place de l'éducatif dans le cadre de l'application des peines ». Or, parce que le mineur est « le plus souvent opposé ou passif à l'égard de la mise en place d'une intervention décidée par l'autorité judiciaire [...], l'éducateur n'aura de cesse, par une action appropriée, de transformer ce refus en adhésion authentique ». Dès lors, selon le ministère de la Justice, le champ de l'application des peines, loin de s'opposer à la démarche de l'éducateur peut, « au contraire, constituer le point de départ de celle-ci ». Dans cette optique, les contraintes inhérentes aux obligations judiciaires peuvent servir de base à un travail avec le mineur sur les conséquences de ces actes, l'évolution de son comportement et sa responsabilisation, souligne la circulaire. Et l'éducateur devra aider le mineur à percevoir les différentes finalités des obligations posées par le juge, telles que la protection de la victime, la réparation des dommages causés ou l'insertion sociale du condamné.
Ce principe posé, l'administration juge que « la mise en place et le suivi de ces mesures à l'égard des mineurs induisent des modalités différentes de celles qui seraient adaptées à un majeur » et invite la PJJ à « mettre en place une démarche éducative spécifique ». Dans le cadre des aménagements de peine, celle-ci se réalise à trois niveaux : au moment de la préparation du projet d'aménagement de peine, de sa mise en place et du suivi de son exécution. Par exemple, au stade de la préparation du projet, l'éducateur doit être vigilant par rapport à l'éventuelle existence d'autres affaires judiciaires en cours dans lesquelles le mineur pourrait être impliqué, et notamment de jugements à venir ou de peines susceptibles d'être mises à exécution. « En effet, une condamnation ou un risque de condamnation à une peine d'emprisonnement ferme dans la période précédant le débat contradictoire risquerait de compromettre l'octroi de l'aménagement de peine ou d'entraîner une réincarcération en cours d'aménagement. Cette dernière hypothèse serait particulièrement mal vécue par le mineur qui, par ailleurs, aura pu s'investir dans son projet et en respecter les obligations. »
La mise en œuvre de ces nouvelles missions du juge des enfants et de la protection judiciaire de la jeunesse implique en outre une coordination avec les personnels de l'administration pénitentiaire, et particulièrement avec les services pénitentiaires d'insertion et de probation. Sujet au cœur d'une seconde circulaire, émanant, elle, de la direction de l'administration pénitentiaire.
Celle-ci recommande notamment à ses services de bien prendre en compte le juge des enfants. Ce qui implique que son avis préalable soit effectivement requis en certaines circonstances (transferts de condamnés...), en adéquation avec les attributions du juge de l'application des peines, ou encore qu'il soit tenu informé de certains incidents (sanction disciplinaire, tentative d'évasion...).
Par ailleurs, même si les services pénitentiaires d'insertion et de probation ne sont plus compétents pour intervenir auprès des mineurs condamnés détenus, sauf exceptions (dessaisissement du juge des enfants...), « dans les maisons d'arrêt comprenant un quartier habilité à l'accueil des mineurs dans lesquels le SPIP est pilote en matière d'organisation des activités en détention, une coordination est à mettre en place entre ce service et les éducateurs de la PJJ intervenant en détention », souligne l'administration. Cette coordination doit avoir lieu tant pour la mise en œuvre de la politique d'aménagement de peines, afin « de renforcer et d'étendre le réseau partenarial permettant d'accueillir dans des conditions adaptées les mineurs et jeunes majeurs placés sous main de justice », que pour le repérage des condamnés devenus éligibles à un aménagement, ce qui nécessite une information des services de la PJJ.
La circulaire rappelle également les conséquences des nouvelles missions des services de la PJJ. Ces derniers doivent ainsi « accéder aisément aux mineurs où qu'ils soient dans l'établissement » ou pouvoir les rencontrer à tout moment de l'exécution de leur peine, y compris s'ils font l'objet d'une sanction disciplinaire. Avec la nouvelle réglementation, ils sont également chargés de la réalisation de l'entretien du mineur à son arrivée en détention dès lors qu'ils assurent une présence continue en détention (3). Toutefois, cette « disposition de portée générale sera effective dès que tous les quartiers mineurs seront investis par les services du secteur public de la PJJ. De manière transitoire, ce sont les travailleurs sociaux des SPIP qui continuent d'exercer cet entretien lorsque la PJJ n'est pas présente quotidiennement en détention, de la même manière qu'ils poursuivent la prise en charge du mineur détenu. »
Enfin, c'est aux éducateurs de la PJJ assurant une présence éducative continue qu'il revient le soin d'informer régulièrement la famille du mineur du déroulement de l'incarcération et non plus au chef d'établissement. Cette nouvelle répartition des compétences sera rappelée au moment de l'arrivée effective des services de la PJJ, indique l'administration. Laquelle aborde, pour finir, la situation particulière des jeunes majeurs.
(1) Voir ASH n° 2387 du 24-12-04 et n° 2351 du 19-03-04.
(2) Cette circulaire sera ultérieurement publiée sous la forme d'un guide méthodologique à l'attention des services déconcentrés.
(3) Sur les modalités d'intervention des services de la PJJ en détention, voir ASH n° 2394 du 11-02-05. Selon le rapport d'activité du ministère de la Justice pour 2004,17 nouveaux quartiers mineurs (soit au total 27 sur 58 établissements pénitentiaires habilités à l'accueil des mineurs) étaient concernés par cette intervention continue (rapport disponible sur