Mieux vaut tard que jamais : près de deux ans après avoir signé, à l'unanimité, l'accord national interprofessionnel (ANI) du 5 décembre 2003 sur l'accès des salariés à la formation tout au long de la vie professionnelle (1) - étendu en décembre 2004 (2) -, les partenaires sociaux sont tombés d'accord, le 20 juillet dernier, au terme d'une négociation prévue par l'ANI lui-même, sur deux avenants à ce texte. Le premier, relativement consensuel, détaille les conditions de mise en œuvre de l'entretien professionnel et du bilan de compétences. Il définit également, en tenant compte des initiatives européennes en la matière, les modalités d'application et de financement du « passeport-formation ». Plus discuté, le second porte sur la validation des acquis de l'expérience (VAE).
Ouverts à la signature jusqu'au 23 septembre 2005 (3), ces avenants sont conclus « conformément au régime juridique applicable au moment de la signature de l'ANI du 5 décembre 2003 et dans le respect de la valeur hiérarchique que les signataires ont entendu donner audit accord ». Autrement dit, ces textes ont la même valeur juridique que l'accord interprofessionnel, bien que la loi du 4 mai 2004 ait permis depuis à un accord de branche ou d'entreprise d'être moins favorable qu'un accord interprofessionnel (4). Les partenaires sociaux ont prévu de demander au ministre chargé de la formation professionnelle l'extension de ces avenants
Jusqu'à présent, seuls les diplômes et titres à finalité professionnelle, ainsi que les certifications inscrites au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP), c'est-à-dire reconnus par l'Etat, pouvaient faire l'objet d'une validation. Les signataires de l'ANI du 5 décembre 2003 s'étaient accordés pour définir, « dans le cadre d'un ANI à négocier au cours du premier semestre 2004 », les modalités de mise en place d'un dispositif d'accès aux certifications de qualification professionnelle de branche.
Il aura fallu attendre un an pour que l'élargissement prévu par l'accord de décembre 2003 soit finalement consacré. L'avenant n° 2 du 20 juillet 2005 dispose que tout salarié doit pouvoir demander le bénéfice de la validation des acquis de son expérience, à condition de justifier - en qualité de salarié, de non-salarié ou de bénévole - d'une durée minimale d'activité de trois ans, en rapport avec la qualification recherchée. Et ce, en vue de l'acquisition :
d'une part, d'un diplôme, d'un titre à finalité professionnelle ou d'un certificat de qualification professionnelle (CQP) enregistrés dans le RNCP ;
d'autre part, d'un CQP dès lors qu'il est établi par la commission paritaire nationale de l'emploi concernée.
L'avenant n° 2 du 20 juillet 2005 précise également les modalités du congé de VAE. En l'état actuel de ce texte, sa durée ne pourrait ainsi excéder, par action de validation, 24 heures de temps de travail, consécutives ou non.
Par ailleurs, le salarié souhaitant bénéficier d'un tel congé devrait en formuler la demande au moins deux mois à l'avance, de manière à laisser le temps à son employeur de l'étudier. L'entreprise aurait alors un mois pour faire connaître par écrit à l'intéressé son accord. Son rejet (par lettre motivée) ou son report (possible dans la limite de six mois pour des raisons de service) de la demande doit être communiqué au salarié dans le même délai.
En cas d'accord, l'intéressé bénéficierait d'une rémunération calculée en pourcentage de la rémunération qu'il aurait perçue s'il avait continué à travailler, dans la limite de 24 heures par salarié et par action de VAE.
Les signataires de l'ANI de 2003 ont prévu que tout salarié ayant au moins deux années d'activité dans une même entreprise bénéficie, au minimum tous les deux ans, d'un entretien professionnel. Celui-ci, précise l'avenant n° 1 du 20 juillet 2005, a pour objectif de permettre à l'intéressé d'élaborer un projet professionnel à partir, notamment, de ses souhaits d'évolution et de ses aptitudes.
Au cours de cet entretien, qui a lieu à l'initiative du salarié ou de l'employeur, pourraient notamment être abordés les points suivants (avenant n° 1 du 20 juillet 2005) :
les moyens d'accès à l'information sur les dispositifs relatifs à l'orientation et à la formation des salariés tout au long de leur vie professionnelle ;
l'identification des objectifs de professionnalisation qui pourraient être définis au bénéfice du salarié pour lui permettre de s'adapter à l'évolution de son poste de travail, de renforcer sa qualification ou de développer des compétences ;
l'identification du ou des dispositifs de formation auxquels il pourrait être fait appel en fonction des objectifs retenus.
Les propositions de formation faites au salarié à l'issue de cet entretien peuvent, à son initiative, être portées dans une annexe au « passeport-formation » (ANI du 5 décembre 2003). Propriété de l'intéressé, ce document, précisent les partenaires sociaux en 2005, pourrait notamment recenser : les diplômes et les titres obtenus en formation initiale ;les expériences acquises lors de stages ou de formations ; les certifications professionnelles délivrées. Autre précision de l'avenant :le salarié pourrait établir son passeport, sur la base d'un modèle élaboré avant le 31 décembre 2005 par le comité paritaire national pour la formation professionnelle, qui prendrait notamment en compte le modèle européen de curriculum vitæ.
(1) Ce texte rassemble l'ANI du 20 décembre 2003 sur la formation professionnelle (voir ASH n° 2326 du 26-09-03), dont l'essentiel des dispositions ont été reprises par la loi « Fillon » du 4 mai 2004 (voir ASH n° 2359 du 14-05-04 et n° 2361 du 28-05-04), et l'accord du 3 juillet 1991 modifié et ses avenants.
(2) Voir ASH n° 2388 du 1-01-05.
(3) La CFDT et la CGT ont émis un avis favorable sur les deux avenants. La CGT apprécie positivement le premier texte, mais est plus réservée sur celui relatif à la VAE. La CFTC a également émis un avis favorable sur le premier avenant. Elle souhaite examiner plus en détail le second texte avant de se prononcer définitivement. FO, enfin, n'a pas prévu de se prononcer favorablement sur les textes, à tout le moins en l'état actuel de leur rédaction.
(4) Voir ASH n° 2355 du 16-04-04.