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Deux décrets donnent corps à la réforme de l'aide médicale de l'Etat prévue de longue date

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Le gouvernement Raffarin II avait annoncé en octobre 2003 une réforme d'ensemble de l'aide médicale de l'Etat (AME) reprenant une partie de celle déjà prévue dans la loi de finances rectificative pour 2002 (1). Deux décrets d'application restreignant l'accès à l'aide étaient même passés tout près d'une publication au début de l'année 2004, mais avaient finalement été mis entre parenthèses sous la pression des associations, le ministre des Affaires sociales du moment, François Fillon, laissant alors le soin à un groupe de travail parlementaire présidé par Marie-Anne Montchamp - à l'époque députée - de plancher sur des pistes « alternatives » de réforme (2). La démarche avait pris du plomb dans l'aile avec la nomination de l'élue au poste de secrétaire d'Etat aux personnes handicapées au sein du gouvernement Raffarin III. Le dossier était depuis au point mort. Il est redevenu d'actualité cet été, avec la publication de deux décrets -très contestés par les associations (voir ce numéro) - qui donnent corps à la réforme annoncée en 2003 (3). L'un d'eux précise notamment la nature des ressources prises en compte pour déterminer le droit à l'aide ou encore les conditions d'agrément des associations auprès de qui le demandeur peut s'adresser. Les deux décrets organisent par ailleurs une révision des modalités d'admission à l'aide médicale de l'Etat.

Pour mémoire, l'AME a vocation à offrir une couverture sociale aux étrangers dont les ressources n'excèdent pas le plafond requis pour bénéficier de la couverture maladie universelle (CMU) complémentaire et qui résident en France de manière ininterrompue depuis plus de trois mois sans remplir la condition de régularité du séjour, nécessaire pour bénéficier de la CMU.

Les ressources prises en compte pour l'admission à l'AME

Les ressources prises en compte pour l'admission à l'AME sont constituées par celles du demandeur ainsi que celles des personnes à sa charge, indique le premier décret. Elles comprennent l'ensemble des ressources « de toute nature, nettes de prélèvements sociaux obligatoires, de contribution sociale généralisée et de contribution pour le remboursement de la dette sociale, perçues au cours de la période des 12 mois civils précédant le dépôt de la demande ». Les prestations mentionnées à l'article R. 861-10 du code de la sécurité sociale (allocation d'éducation de l'enfant handicapé, allocation de rentrée scolaire, etc.) ne sont en revanche pas prises en compte et les charges consécutives aux versements des pensions et obligations alimentaires en sont déduites. Au-delà, sont dorénavant également pris en compte les avantages en nature procurés au demandeur de l'aide médicale de l'Etat ou aux personnes à sa charge par un logement occupé à titre gratuit. Ils sont évalués dans les mêmes conditions que celles prévues pour la CMU complémentaire, c'est-à-dire mensuellement et de manière forfaitaire selon la composition du foyer.

Les agréments des associations

La demande d'aide médicale de l'Etat peut être déposée notamment auprès d'associations ou d'organismes à but non lucratif agréés à cet effet pour une durée de 3 ans renouvelable par le représentant de l'Etat dans le département. Il ne peut s'agir, précise le premier décret, que d' « associations et autres organismes à but non lucratif qui mènent des actions contre l'exclusion ou pour l'accès aux soins et qui offrent par le nombre, l'expérience, la qualité de leurs responsables et de leur personnel salarié ou bénévole des garanties suffisantes ». L'agrément fixe le ressort territorial dans lequel l'organisme est habilité à recevoir les demandes d'aide médicale de l'Etat des personnes qui y résident et précise les modalités, notamment :

 du recueil des demandes d'aide médicale de l'Etat et de leur transmission à la caisse d'assurance maladie qui en assure l'instruction ;

 de l'enregistrement des demandes par l'organisme agréé ;

 de l'établissement du dossier de demande d'AME et de l'assistance à apporter aux intéressés dans la constitution de ce dossier.

Dans le cas particulier où le demandeur est sans domicile fixe, l'intéressé doit faire le choix d'une « domiciliation » soit auprès d'un centre communal ou intercommunal d'action sociale, soit auprès d'un organisme agréé. Le décret précise que, dans ce dernier cas, peuvent être agréés soit les associations et autres organismes à but non lucratif qui remplissent les conditions pour recevoir les demandes d'AME, soit les «  établissements ou services comportant ou non un hébergement, assurant l'accueil, notamment dans les situations d'urgence, le soutien ou l'accompagnement social, l'adaptation à la vie active ou l'insertion sociale et professionnelle des personnes ou des familles en difficulté ou en situation de détresse » (4). L'agrément donné dans ce cadre- pour une durée de 3 ans renouvelable - doit préciser les modalités d'enregistrement des déclarations d'élection de domicile ainsi que les modalités du contrôle auquel l'organisme agréé est soumis. Lorsque ce dernier reçoit la déclaration d'élection de domicile, il délivre au déclarant une attestation.

L'agrément autorisant le recueil des demandes d'AME comme celui habilitant au recueil des déclarations d'élection de domicile peuvent être retirés en cas de manquement grave de l'organisme agréé à ses obligations.

A noter : les associations et organismes agréés exercent leur mission à titre gratuit, précise le décret. « Aucun paiement ni aucun remboursement ne peut être exigé du demandeur, à quelque titre que ce soit, par l'organisme à l'occasion de l'exercice de ses missions. »

Les pièces justificatives à apporter

L'étranger désireux de bénéficier de l'AME doit fournir à l'appui de sa demande un dossier comportant les pièces nécessaires à la vérification de son identité et des conditions légales de résidence en France et de ressources. Le second décret paru cet été en dresse la liste. Ainsi, pour la justification de son identité et de celle des personnes à sa charge, l'intéressé doit produire l'un des documents suivants :

 le passeport ;

 la carte nationale d'identité ;

 une traduction d'un extrait d'acte de naissance effectuée par un traducteur assermenté auprès des tribunaux français ou par le consul, en France, du pays rédacteur de l'acte ou du pays dont l'intéressé a la nationalité ;

 une traduction du livret de famille effectuée par un traducteur assermenté auprès des tribunaux français ou par le consul, en France, du pays rédacteur de l'acte ou du pays dont l'intéressé a la nationalité ;

 une copie d'un titre de séjour antérieurement détenu ;

 tout autre document de nature à attester l'identité du demandeur et celle des personnes à sa charge. Pour la justification de sa présence ininterrompue depuis trois mois sur le territoire français, le demandeur doit fournir le visa ou le tampon comportant la date d'entrée en France figurant sur son passeport ou, à défaut :

 une copie d'un contrat de location ou d'une quittance de loyer datant de plus de trois mois ou d'une facture d'électricité, de gaz, d'eau ou de téléphone datant de plus de trois mois ;

 un avis d'imposition ou de non-imposition à l'impôt sur le revenu des personnes physiques, à la taxe foncière ou à la taxe d'habitation ;

 une facture d'hôtellerie datant de plus de trois mois ;

 une quittance de loyer ou une facture d'électricité, de gaz, d'eau ou de téléphone établie au nom de l'hébergeant, datant de plus de trois mois, lorsque le demandeur est hébergé à titre gratuit par une personne physique ;

 une attestation d'hébergement établie par un centre d'hébergement et de réinsertion sociale datant de plus de trois mois ;

 si la personne est sans domicile fixe, une attestation de domiciliation établie par un organisme agréé et datant de plus de trois mois ;

 tout autre document de nature à prouver que cette condition est remplie.

Par ailleurs, pour la justification de ses ressources -et, le cas échéant, de celles des personnes à charge -, y compris les ressources provenant d'un pays étranger, l'intéressé doit joindre au dossier un document retraçant ses moyens d'existence et leur estimation chiffrée. Enfin, pour la constitution du titre d'admission à l'aide médicale de l'Etat, il lui est demandé de fournir une photographie d'identité de lui mais aussi, le cas échéant, des personnes à sa charge pour lesquelles est demandée l'admission à l'aide médicale de l'Etat.

Signalons encore que le demandeur est aussi tenu de faire connaître toutes informations relatives à ses droits au regard d'un régime de base ou complémentaire d'assurance maladie. La décision d'admission à l'AME est prise par le directeur de la caisse d'assurance maladie dans le ressort de laquelle réside le demandeur ou, si ce dernier se trouve sans domicile fixe au moment de la demande, par la caisse d'assurance maladie dans le ressort de laquelle il s'est fait domicilier. Le bénéficiaire de l'aide doit informer le directeur de la caisse de tout changement relatif à la composition de son foyer, à ses ressources ainsi qu'à l'obtention d'un titre de séjour.

Point important : la décision d'admission à l'aide médicale de l'Etat prend effet à la date du dépôt de la demande. Si la date de délivrance des soins est antérieure à celle du dépôt de la demande, ces soins peuvent tout de même être pris en charge dès lors que, à la date à laquelle ils ont été délivrés, le demandeur résidait en France de manière ininterrompue depuis plus de trois mois et que sa demande d'admission a été déposée avant l'expiration d'un délai de 30 jours à compter de la délivrance des soins.

(Décrets n° 2005-859 et n° 2005-860 du 28-07-05, J.O. du 29-07-05)
Notes

(1)  Voir ASH n° 2327 du 3-10-03.

(2)  Voir ASH n° 2348 du 27-02-04.

(3)  Ce faisant, le gouvernement Villepin répond aux vœux exprimés par la mission d'évaluation et de contrôle de l'Assemblée nationale sur l'évolution des coûts budgétaires des demandes d'asile dans un rapport rendu public le 6 juillet - Voir ASH n° 2416 du 15-07-05.

(4)  Signalons encore que les organismes qui ont été agréés en application du décret n° 88-1114 du 12 décembre 1988 relatif aux conditions d'élection de domicile des personnes sans résidence stable demandant le bénéfice de l'allocation de revenu minimum d'insertion - abrogé depuis - peuvent être agréés aux mêmes fins s'ils en font la demande.

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