Prévue par la loi du 9 décembre 2004 relative à la simplification du droit (1), une ordonnance du 4 juillet 2005 réforme le droit de la filiation. Son entrée en vigueur est fixée au 1er juillet 2006.
L'ordonnance supprime la distinction faite entre la notion de filiation légitime et celle de filiation naturelle suite à la consécration par le législateur, dans la loi du 4 mars 2002 modifiée relative au nom de famille, du principe de l'égalité entre tous les enfants.
Par ailleurs, en complément du dispositif de dévolution du nom de famille (2), le principe de l'unité du nom de la fratrie, quelles que soient les conditions d'établissement de la filiation, est affirmé. En outre, le changement judiciaire du nom de l'enfant ouvert aux parents non mariés est supprimé.
Les modes d'établissement non contentieux de la filiation puis les actions en justice relatives à la filiation sont successivement développées dans l'ordonnance.
Trois modes d'établissement non contentieux du lien de filiation sont distingués. Par l'effet de la loi, l'établissement du lien de filiation maternelle, concernant un enfant né de parents non mariés, sera déduit de l'indication du nom de la mère, qui restera facultative, dans l'acte de naissance. La mère non mariée n'aura donc plus à reconnaître l'enfant dont elle a accouché.
Les modes d'établissement de la paternité conserveront leur différence selon que les parents sont mariés ou non. Hors mariage, l'établissement de la filiation continuera ainsi d'impliquer un acte de volonté spécifique du père (la reconnaissance volontaire). La mère pourra toujours reconnaître l'enfant, éventuellement avant la naissance.
Troisième mode d'établissement de la filiation, la possession d'état vise les cas où la reconnaissance ne peut pas être faite. Elle s'établit par une réunion suffisante de faits qui révèlent le lien de filiation et de parenté entre une personne et la famille à laquelle elle est dite appartenir. Les principaux indices étant notamment que cette personne a été traitée par celui ou ceux dont on la dit issue comme leur enfant et qu'elle-même les a traités comme son ou ses parents et que ceux-ci ont, en cette qualité, pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation. L'ordonnance précise les conditions et les modalités de délivrance de l'acte de notoriété faisant foi de la possession d'état jusqu'à preuve contraire. Un tel acte pourra être délivré en cas de décès prématuré d'un parent, dès lors que suffisamment d'éléments de fait sont réunis.
Parmi les dispositions générales concernant les actions relatives à la filiation, le principe chronologique est généralisé et interdit ainsi l'établissement d'une filiation qui contredirait un premier lien légalement établi. L'enfant est mis à l'abri des conflits de filiation. Toujours pour garantir une plus grande stabilité de l'enfant, le délai de prescription des actions judiciaires relatives à la filiation sera ramené de trente à dix ans. Sauf lorsqu'elles sont enfermées par la loi dans un autre délai, les actions relatives à la filiation se prescriront par dix ans à compter du jour où la personne a été privée de l'état qu'elle réclame, ou a commencé à jouir de l'état qui lui est contesté. A l'égard de l'enfant, ce délai sera suspendu pendant sa minorité.
Hormis la fin de non-recevoir à l'action en recherche de maternité lorsque la mère a demandé le secret de son admission lors de l'accouchement, les actions aux fins d'établissement d'un lien de filiation obéissent au même régime procédural. Elles pourront être exercées durant la minorité de l'enfant, puis par ce dernier dans les dix ans suivant sa majorité.
Contrairement à l'acte de notoriété qui ne peut être demandé que par les parents ou l'enfant, l'action en constatation de la possession d'état, consacrée par la jurisprudence, pourra être ouverte par tout intéressé dans le délai de droit commun de dix ans.
L'ordonnance réduit amplement les dispositions tendant à la contestation d'un lien de filiation qui, en pratique, concerne principalement la paternité, plus incertaine par nature. La maternité pourra être contestée en rapportant la preuve que la mère n'a pas accouché de l'enfant. La paternité, quant à elle, pourra être contestée en rapportant la preuve que le mari ou l'auteur de la reconnaissance n'est pas le père. Le régime sera différent selon que le titre est ou non conforté par la possession d'état. Ainsi, l'existence d'une possession d'état de cinq ans à compter de l'établissement de la filiation rendra celle-ci inattaquable. En présence d'une possession d'état de moins de cinq ans, l'action sera réservée uniquement à l'enfant, au parent dont la filiation est en cause, à l'autre parent ou à celui qui se prétend tel. Le demandeur devra agir dans les cinq ans suivant la fin de cette possession. En revanche, en l'absence de possession d'état, une filiation légalement établie pourra être contestée par tout intéressé durant dix ans à compter de la naissance ou de la reconnaissance, lorsque celle-ci est postérieure à la naissance. A sa majorité, seul l'enfant pourra encore contester le lien de filiation durant dix ans.
(1) Voir ASH n° 2387 du 24-12-04.
(2) Voir ASH n° 2380 du 5-11-04.