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L'accès aux soins des plus démunis devient plus difficile, selon le Conseil économique et social

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Si, « au début des années 90, la mise en place dans les hôpitaux de cellules d'accueil des plus démunis s'est progressivement généralisée et a constitué une avancée importante dans l'amélioration de l'accès aux soins et aux droits sociaux des personnes en situation de précarité », les évolutions que connaît aujourd'hui l'hôpital public tendent à inverser ce mouvement. C'est le constat que dresse le Conseil économique et social (CES) dans une étude consacrée à l'hôpital public (1), présentée le 29 juin au nom de la section des affaires sociales par Eric Molinié, administrateur de l'Association des paralysés de France.

Première cause évoquée : l'hyperspécialisation de la prise en charge hospitalière, qui n'est pas adaptée aux populations les plus démunies, ces dernières nécessitant « plus que toutes autres, une approche globale de l'individu ». Aux problèmes de santé proprement dits, s'ajoutent en effet « des difficultés d'ordre financier, d'éducation sanitaire, voire de vie sociale ».

De plus, pour ces publics, «  l'amont et l'aval du service hospitalier posent problème ». En amont, tout d'abord, les personnes en situation de précarité « retardent au maximum leur entrée dans l'hôpital, pour de multiples raisons », les premières étant, bien sûr, financières. Même si la couverture maladie universelle (CMU) « a constitué un réel progrès », les régimes d'assurance maladie obligatoires « ne prennent pas en charge la totalité des dépenses de santé engagées ». Et la CMU complémentaire n'est accessible qu'à la condition de ne pas excéder un plafond de ressources « jugé insuffisant[...] au regard notamment de divers minima sociaux, comme les allocations de base du minimum vieillesse/invalidité et l'allocation aux adultes handicapés » (sur la CMU complémentaire, voir aussi ce numéro). Cette critique, qui n'est pas nouvelle, est aussi valable pour le nouveau dispositif d'aide légale à l'acquisition d'une couverture complémentaire santé en vigueur depuis le 1er janvier dernier (2), estime le CES. Des raisons d'ordre psycho-social (la peur de l'autre, de ne pas comprendre ou de ne pas être compris) peuvent également expliquer l'entrée tardive à l'hôpital. Tout comme la crainte de l'expulsion pour les étrangers en situation irrégulière définitivement déboutés du droit d'asile, « même s'ils peuvent prétendre, dans des conditions qui ont été récemment restreintes, à l'aide médicale de l'Etat » (3). Mais le CES dénonce également l'attitude de certains services hospitaliers qui refusent encore de prendre en charge ces populations dans le cadre des soins programmés, et les réorientent vers la médecine de ville où les professionnels de santé, en raison parfois d'une surcharge de travail liée à leur mauvaise répartition sur le territoire, peuvent avoir « la tentation de ne plus recevoir des personnes en situation de précarité dont la prise en charge nécessite souvent un temps plus long ». En aval de l'hôpital ensuite, « un suivi sanitaire s'impose afin de s'assurer notamment de la prise du traitement prescrit », ce qui nécessite de mettre en place des partenariats appropriés (avec la médecine de ville, le secteur médico-social...). Plus généralement, estime le conseil, « l'hôpital doit non seulement soigner mais participer à la réinsertion des exclus dans un réseau de soins de type médico-social, adapté aux caractéristiques de cette population ».

Les populations les plus fragiles rencontrent aussi de réelles difficultés dans l'accès aux soins psychiatriques, relève en outre le conseil. « Il s'agit d'une population souvent nomade dont le suivi médical ou psychiatrique peut difficilement être rattaché à un secteur géographique précis », ce qui ne cadre pas avec l'organisation en secteurs de la psychiatrie publique. De leur côté, les structures de soins en santé mentale déclarent ne pas pouvoir prendre en charge des personnes opposant un refus radical de soin et « considèrent, à tort ou à raison, qu'elles n'ont pas à médicaliser les conséquences de la détresse sociale ». En pratique, donc, «  ce sont les travailleurs sociaux et les bénévoles des associations d'aide aux démunis qui se retrouvent souvent en première ligne face à des personnes qui présentent des troubles graves de comportement », déplore le CES.

Notes

(1)  L'hôpital public en France : bilan et perspectives - Conseil économique et social - 2005 - Disponible sur www.ces.fr.

(2)  Voir ASH n° 2399 du 18-03-05.

(3)  Voir ASH n° 2400 du 25-03-05.

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