Au vu des 326 000 familles avec enfants reçues en 2003 et après une analyse statistique des situations menée sur dix ans, le Secours catholique mesure bien, au travers d'un zoom grossissant, les évolutions de la pauvreté (1). Il confirme en particulier l'augmentation du nombre des familles monoparentales, devenues en dix ans le « modèle dominant » parmi ses usagers, avec 58 % des familles accueillies et un « indice de fragilité » quatre fois plus élevé que pour les couples avec enfants. « La monoparentalité n'entraîne pas systématiquement la précarité, elle rend plus vulnérable face aux difficultés », commente l'association, qui pointe deux périodes particulièrement critiques : celle de la naissance du premier enfant et celle où le jeune est encore à charge alors qu'il n'ouvre plus droit aux prestations.
Seules 20 % des mères isolées accueil-lies travaillent, la moitié d'entre elles sous un contrat précaire. Il est vrai, souligne le Secours catholique, que les avantages financiers liés à l'emploi « sont souvent minimes, voire inexistants » si l'on tient compte des frais de transport et de garde. La situation des couples reçus est à peine meilleure, avec plus de six familles sur dix comptant deux enfants et plus où aucun adulte ne travaille. Au total, 83 % des familles accueillies vivent en dessous du seuil de pauvreté, note l'association, qui relève aussi que le montant des impayés est désormais concentré sur moins de familles mais devient plus lourd.
« Pour le Secours catholique, défendre la famille, c'est défendre toutes les familles, mais d'abord les plus pauvres », affirme Gilbert Lagouanelle, directeur de l'action institutionnelle. Il en appelle à une lutte exigeante contre l'illettrisme, pour l'accès de tous à un logement décent, pour une politique de l'emploi qui facilite la conciliation entre travail et vie familiale, enfin pour une politique familiale « volontariste, juste, équilibrée et équitable ». A ses yeux, cela passe par une allocation dès le premier enfant et une fiscalisation des prestations familiales. Parce que « pour les uns, les allocations familiales sont vitales pour pouvoir élever leurs enfants, alors que pour d'autres, elles sont superflues ».
Un point de vue que ne partage pas l'Union nationale des associations fa-miliales (UNAF), car l'intégration des allocations familiales dans l'assiette de l'impôt sur le revenu « organiserait la solidarité entre les familles, alors qu'elle doit l'être entre tous les citoyens », juge son président, Hubert Brin . Rappelant la position traditionnelle de l'organisation, il précise que les allocations familiales « ne sont pas un revenu mais la compensation d'une charge, au contraire d'une prestation comme le complément de libre choix, qui pourrait être intégrée à la base imposable ». Au total, pour l'UNAF, les allocations familiales ne sont pas un outil de redistribution, au contraire de l'impôt sur le revenu, qui devrait être « revalorisé ». En clair :augmenté.
(1) 1994-2003, les familles face à la pauvreté et l'exclusion - Mai 2005 - Secours catholique : 106, rue du Bac - 75007 Paris - Tél. 01 45 49 73 00.