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Plaidoyer pour la reconnaissance du savoir-faire des lieux d'accueil et de vie

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Les lieux d'accueil et de vie peinent à faire reconnaître leurs spécificités et leurs compétences, regrettait récemment dans nos colonnes Alain Souchay, responsable du lieu d'accueil de Brox, dans l'Aveyron (1). Cette situation trouve son origine dans l'histoire du travail social, explique Martine Fourré (2), docteur en psychologie, psychanalyste et permanente de lieux de vie depuis 1978, tout en appelant de ses vœux un changement.

« J'ai beaucoup aimé, dans un film que j'ai vu récemment, l'interjection d'un accueilli à son accueillant : "Pour ce que t'es payé pour me torcher le cul, tu crois quand même pas que t'es respectable! "... L'admi-nistration, en déniant aux praticiens sociaux comme aux enseignants un revenu correct, n'oublie-t-elle pas que, dans notre société, la hiérarchie des revenus entraîne, dans les représentations communes, celle des respectabilités et des compétences... ? Comment, dans ces conditions, peut-elle imaginer que ceux qu'elle nous confie nous reconnaîtront une autorité légitime ? Il faut que l'on soit "compétents ",c'est le mot d'ordre de la loi 2002-2 qui veut tout garantir... Mais nul ne veut reconnaître que le savoir-faire lié à la pathologie des enfants confiés a des incidences tarifaires. L'administration voudrait-elle le beurre, l'argent du beurre... et que la crémière ne hurle pas ?

« En fait, l'administration ne "veut" rien. C'est un grand corps, pris dans un discours dont nul n'est responsable en particulier et qui est à l'image de l'histoire de notre champ. Nos professions ont des origines charitables et ont été soumises, tout au long de leur histoire, au pouvoir des "psy ". Le docteur Itard dictait ainsi aux éducateurs et à la gouvernante les tâches qu'ils devaient remplir et les attitudes qu'ils devaient avoir envers le "sauvage" de l'Aveyron. Dans les textes historiques, les idéaux visés, ainsi que les méthodes prônées, sont toujours ceux des cadres supérieurs du métier, les acteurs étant eux sans savoir, ni connaissance, ni responsabilité...

« La teneur et l'application des textes actuels n'est au fond que le reflet de cette longue tradition. La preuve en est, par exemple, la construction des placements familiaux. Dans les congrès, ce sont les psychologues qui disent ce qu'il en est du travail des assistantes maternelles. Comme les psychologues ou les psychanalystes passent leur temps à dire aux éducateurs ce qu'ils ont à faire dans l'exercice de leurs fonctions. Pourquoi, depuis tant d'années, ces professions se sont-elles soumises - sans aucun regard sur elles-mêmes et le sens de leur acte - à un discours sans sujet ?

« Les lieux de vie et d'accueil ont du mal depuis 30 ans à faire entendre aux administrateurs et aux "psy" ce qu'ils produisent dans notre lien social, parce qu'ils constituent un acte épistémologique propre à interroger les certitudes. Ils réintroduisent dans l'espace institutionnel la dimension du sujet niée par la construction idéologique du discours scientiste et managérial.

« Que les hauts fonctionnaires issus des grandes écoles aient du mal à reconnaître les effets propres du système en place, nous ne pouvons le leur reprocher : c'est là toute la logique de l'institutionnalisation. Mais qu'ils restent sourds à nos justes et légitimes questions, portées par une expérience attestée par d'autres que par nous..., est-ce raisonnable pour l'avenir de nos enfants ? »

Notes

(1)  Voir ASH n° 2397 du 4-03-05, p 27.

(2)  Contact : 234, boulevard Voltaire - 75011 Paris - martine.fourre@wanadoo.fr.

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