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Lutte contre la toxicomanie : la chancellerie demande « une réponse judiciaire systématique »

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Le ministère de la Justice diffuse aux parquets, dans une volumineuse circulaire, des recommandations pour améliorer la lutte contre la toxicomanie et les dépendances. Ce document s'appuie sur le plan gouvernemental 2004-2008 de lutte contre les drogues illicites, le tabac et l'alcool présenté le 29 juillet 2004 (1).

Une harmonisation de la réponse judiciaire

Dans l'optique d'une harmonisation de la réponse judiciaire à l'usage de stupéfiants, le ministère de la Justice demande aux procureurs généraux de désigner, au sein de chaque parquet, un magistrat chargé du traitement du contentieux lié à l'usage de stupéfiants de façon à permettre la mise en œuvre de réponses pénales équilibrées au sein d'une même juridiction. En outre, ils doivent préconiser l'instauration d'une réponse pénale systématique à l'égard de tout acte d'usage de stupéfiants.

S'agissant des réponses pénales à dominante sanitaire (mesures alternatives aux poursuites), la circulaire recommande que le secteur associatif, pour plus d'efficacité, soit associé à la prise de décision dans le cadre des conventions départementales d'objectifs destinées à améliorer la prise en charge sanitaire et sociale des toxicomanes placés sous main de justice et à mieux prévenir la récidive. Afin d'optimiser ce dispositif et de le recentrer sur les besoins réels de l'autorité judiciaire, la circulaire suggère que ces conventions soient soumises à « un cahier des charges » (2). Lequel serait validé par les directions départementales des affaires sanitaires et sociales.

Une réponse judiciaire graduée à l'égard des majeurs

« Dans tous les cas, le choix de la réponse pénale sera guidé par les éléments de la personnalité et le profil de consommation des usagers », indique le ministère. Une enquête de personnalité de l'usager doit donc être effectuée. Celui-ci devra, pendant ce temps, être placé en garde à vue, même de courte durée, afin d'identifier les revendeurs de stupéfiants, indique l'administration. En outre, elle rappelle que la réponse pénale doit s'appuyer sur le principe de la gradation inscrit dans la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité. Dans le cadre de la prévention de la récidive ou de la réitération des faits, « les classements sans suite non accompagnés d'une mesure d'avertissement ou de rappel de la loi doivent être exclus par principe ». Et être limités aux cas mettant en cause le « simple usager, non détenteur de substances stupéfiantes, majeur et non réitérant » ou « des usagers majeurs et sans antécédents judiciaires d'infraction à la législation sur les stupéfiants, pouvant détenir de très faibles quantités de stupéfiants ».

Mais la priorité est donnée aux réponses pénales à dominante sanitaire. Il pourra alors s'agir d'un classement avec orientation vers une structure à vocation sanitaire ou sociale plutôt réservé aux usagers occasionnels ou réguliers de stupéfiants, dont la consommation n'apparaît pas relever d'un suivi médical au sens strict, d'un classement conditionnel avec orientation vers un centre de consultation, d'évaluation et d'accompagnement (3), ou encore d'un classement sous condition (trois mois renouvelables une fois) assorti, par exemple, d'une obligation de se soumettre à des tests médicaux réguliers (4), ou d'une prise de contact avec un établissement favorisant l'insertion professionnelle. Quant à l'injonction thérapeutique, elle ne doit être limitée « qu'aux cas d'addiction les plus lourds  :usagers de drogues dites « dures » ou polytoxicomanes », indique la circulaire. Le ministère insiste en outre sur le fait que la mesure de composition pénale est « encore très inégalement mise en œuvre sur le territoire national, alors que sa portée pédagogique est pourtant indéniable ». Et préconise donc sa généralisation à l'égard des usagers réitérants ou récidivistes ayant déja fait l'objet d'une orientation ou d'un suivi sanitaire, ou ne relevant pas d'une mesure de soins.

Le ministère souligne que les poursuites pénales devant le tribunal correctionnel doivent rester « exceptionnelles » et réservées « aux réitérants ou récidivistes ainsi qu'aux usagers refusant de se soumettre aux mesures alternatives ». A contrario, les peines à dominante sanitaire ou pédagogique - telles que l'ajournement et le sursis avec mise à l'épreuve et les peines de travail d'intérêt général - seront privilégiées.

Mineurs  : éviter la banalisation des faits

Lorsqu'un mineur est en cause, il convient de recourir automatiquement aux enquêtes de personnalité et de se rapprocher du service éducatif situé auprès du tribunal. Ces éléments permettront alors de déterminer si le mineur est en danger et d'envisager la solution la plus appropriée. Mais, «  quel que soit le contexte de [la] consommation [de stupéfiants] , l'acte d'usage doit donner lieu à une réponse judiciaire systématique, claire et lisible, tournée vers la prévention des récidives », soutient le ministère. Ainsi, les classements sans suite en opportunité ou assortis d'un rappel de la loi doivent rester une exception et se limiter « au cas où l'usage de stupéfiants paraît ne pas avoir dépassé le stade de l'expérimentation ». Le ministère considère en effet que ce type de réponse pénale comporte « une vocation pédagogique limitée et contribue à asseoir [un] sentiment de banalisation et d'impunité ». Si la consommation de drogues révèle « une problématique plus complexe chez le mineur ou une dangerosité particulière », le juge des enfants sera saisi et mettra en place une prise en charge globale (éducative et sanitaire). Dans les autres cas, il faudra envisager d'autres mesures telles que le classement sans suite sous condition avec orientation vers une structure à vocation sanitaire ou sociale, ou l'injonction thérapeutique, ordonnée uniquement dans les cas où « l'investissement parental semble être de bonne qualité », souligne la circulaire.

(Circulaire CRIM 05 1 G4-08042005, à paraître au Bulletin officiel du ministère de la Justice)
Notes

(1)  Voir ASH n° 2370 du 17-08-04.

(2)  Celui-ci pourrait notamment prévoir l'élaboration d'un diagnostic préalable à la mise en place de la convention d'objectifs, l'évaluation des mesures jugées prioritaires ou le développement de la prise en charge des mineurs et des jeunes majeurs.

(3)  Cette orientation se fondera sur des éléments tels que la régularité de la consommation, les difficultés d'ordre familial, social, professionnel ou scolaire.

(4)  Une convention devra alors être passée avec un établissement de soins de manière à assurer une prise en charge au moins partielle des frais médicaux et à éviter une discrimination fondée sur les revenus.

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